vendredi 25 février 2011

Cakrasamvara tantra et Savaripa, des poissons en bonus



Tāranātha a écrit une hagiographie (slob dpon chen po spyod 'chang dbang po'i rnam thar ngo mtshar snyan pa'i sgra dbyangs) du mahāsiddha Kṛṣṇācārya/Kāṇha (T. nag po spyod pa) ainsi qu'un supplément à cette hagiographie[1]. Ces deux textes ont fait l'objet d'une traduction anglaise par David Templeman (Life of Kṛṣṇācārya/Kāṇha, Library of Tibetan Works and Archives, 1989). Comme tous les écrits de Tāranātha, ces deux œuvres foisonnent de détails merveilleux, anecdotiques et intéressants, mais qui sont souvent donnés de manière assez gratuite et sans mentionner les sources. On a donc à faire à des données brutes qui valent ce qu'elles valent, mais qui peuvent quelquefois nous pointer dans une direction.

Ainsi, dans le supplément, Tāranātha écrit que le tantra Śri Cakrasaṁvaramūlatantrarāja mentionne dans son 51ème chapitre prédit le Guhyasamāja et d'autres tantras. Il semble donc croire que le tantra-racine de Cakrasaṁvara est plus ancien que le Guhyasamāja. En fonction de la foi que l'on a en les prédictions, cela pourra être pris comme une preuve pour le contraire…

La lignée de transmission du Cakrasaṁvaramūlatantrarāja est donnée comme Vajradhara, Saraha et Nāgārjuna. Mais, écrit l'historien Tāranātha, ce n'est que suivre une énumération de noms ce qui ne donne rien de définitif. Plus tard, le siddha Śavaripa avait assimilé (T. thugs su chud ± S. pragrah) le Cakrasaṁvara-tantra et il était définitivement (T. mod) le premier à avoir donné les instructions (T. thog mar gdams pa) à Lūyipa (670:7). Et puisque Lūyipa devint plus tard le propriétaire (T. sdom pa'i rgyud kyi bdag po) et qu'il avait eut des visions de Cakrasaṁvara et de Vajravarāhī, toujours selon Tāranātha, il n'est pas besoin de chercher des prédécesseurs dans la transmission.[2] Le mahāsiddha Kṛṣṇācārya/Kāṇha s'inscrit dans la transmission qui descend de lui. Il s'agit d'une transmission nettement plus ésotérique et tantrique que celle d'Advayavajra qui "rencontra" Śavaripa peut-être un ou deux siècles plus tard.

Cela peut donner une idée de l'ancienneté et de l'importance que l'on accorde à Śavaripa, notamment dans la transmission des Cakrasaṁvara-tantra.

Pour l'anecdote, un des maîtres dans la lignée de Kṛṣṇācārya, Kṛṣṇavajra (T. nag po rdo rje) accomplit le miracle de la multiplication des poissons. Quand ce maître résida dans une auberge d'un village de pêcheurs (probablement T. hi tsi li S. Hicili ? mentionné précédemment), il y eut une réunion avec trois yogi chefs avec mille yogi qui les suivaient. Quand ils voulaient célébrer un gaṇacakra, sa chambre était trop petite et il ne restait plus qu'un morceau de viande, un morceau de poisson et un seul récipient d'alcool. Les trois yogis chefs voulaient renoncer, mais pas Kṛṣṇavajra. Tous les yogis pouvaient finalement rentrer dans la chambre. Ils avaient beau manger à leur faim et boire jusqu'à ne plus soif, ils n'arrivèrent pas à finir la viande, le poisson et l'alcool.

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[2] Templeman, p. 93

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