dimanche 20 octobre 2019

Leçons apprises ?




Un exemple au hasard. J’apprends la venue de Sa Sainteté Gyalwang Drikungpa en France, du 24 au 30 octobre 2019. Avec au programme l’initiation du grand Drikung Powa[1] “donné seulement une fois tous les douze ans”. “La méditation de Powa est simple et puissante. Elle nous permet de transformer l’expérience de la mort, en un passage vers la réalisation de Déwatchèn (Terre Pure de Béatitude).”
Que l’on soit bouddhiste ou non, le simple fait de participer à l’enseignement et l’initiation du grand Drikung Powa (spécificité de la lignée Drikung Kagyu), permet d’obtenir une longue vie, l’absence de maladie, la diminution des passions et de tout attachement samsarique, bien-être et bonheur excellents, et permettra, dans la prochaine vie, de renaître en une existence supérieure : humaine ou divine, d’où il sera possible d’obtenir le grand éveil et d’acquérir le pouvoir d’aider les innombrables êtres.
Cette pratique a d’incommensurables qualités et est en harmonie avec toutes les traditions du monde
.” Source 
Dans les textes anciens, il est dit que “même le plus grand pécheur peut atteindre l’éveil grâce à la pratique de Powa.” Cette pratique est particulièrement appropriée à notre époque, où le temps consacré à la pratique est restreint.” Source
Le samedi 26 octobre 2019 SSGD donnera l’enseignement et Initiation complets du grand Drikung Powa et Bouddha Amitayus. Le dimanche 27 octobre 2019 les initiations et enseignements complets de Tara, Dorjé Sempa (Bouddha purificateur) et Amitabha (Bouddha de lumière infinie). Source
Rappelons les instructions traditionnelles sur la relation du maître à disciple :
“Avant de requérir des instructions du Dharma ou une initiation d’un maître, examinons ses qualités ; mais, une fois que nous avons reçu de lui (une instruction et une initiation), même s’il affiche les quatre actes immoraux, nous n’avons plus le droit de perdre foi en lui, de médire de lui, d’examiner ses qualités ou de le traiter de quelqu’autre manière qu’avec dévotion et respect.
Il est dit :
‘Une fois que l’on a écouté ne serait-ce que de brefs propos
Si l’on manque de respect pour son Lama,
On renaîtra en tant que chien cent fois
Et ensuite comme boucher.’ “
Le Flambeau de la Certitude, Jamgoeun Kongtrul.
Suite aux différents scandales dans le bouddhisme tibétain en Occident, il a souvent été reproché aux victimes de ne pas avoir bien examiné le guru (pendant au maximum une période de 12 ans), avant de recevoir des initiations et des instructions de lui. Il ne fallait pas prendre à la légère un tel engagement. Ici, cet aspect n’est absolument pas abordé. Tout le monde (“que l’on soit bouddhiste ou non”) est invité à venir recevoir l’initiation d’Amitayus et les instructions du grand Drikung Powa pour en recueillir plein de bienfaits. S’agit-il d’une simple initiation-bénédiction (rjes gnang) ou autre technicalité doctrinale non-mentionnée, permettant cette mesure exceptionnelle ? Peu importe, ce détail n’est pas mentionné. Les gens viendront, “que l’on soit bouddhiste ou non”, pour recevoir une pratique simple qui leur permettra d’avoir une longue vie, une renaissance au paradis etc.

Peut-être, certains aimeraient approfondir cette pratique en se rendant dans un centre drikung. Peut-être leur parlera-t-on de l’importance de la relation du maître à disciple, et leur dira-t-on que le fait d’avoir une initiation de Sa Sainteté Gyalwang Drikungpa, les liera à lui et à sa lignée. Peut-être les choses ont changé, je n’en sais rien...

Dans l’entourage de SSGD, on trouve des invités d’honneur comme Dagpo Rinpoché, Lama Ngawang, mais aussi Rigdzin Namkha Gyatso Rinpoché du centre Nyingmapa de Lausanne.

Rigdzin Namkha Gyatso Rinpoché
Ce dernier a été accusé d’abus sexuel par plusieurs femmes. Le journal néerlandais De Volkskrant avait publié en février 2018 un article De Tibetaanse meester met zijn 'geheime praktijk' (traduction française ici, English translation here), dans lequel le cas de Namkha Rinpoché est mentionné (une procédure juridique lancée contre lui en Suisse contre lui poursuit son cours). Il existe un autre témoignage par une femme nommée "Tar" (traduction anglaise). Lors de la rencontre des victimes dabus sexuels dans le bouddhisme tibétain avec le Dalai-Lama à Rotterdam en 2018, une des victimes de Namkha Rinpoche faisait partie de la délégation. “Lors d'un enseignement le 13 août 2017, [Namkha Rinpoché] a[vait] fustigé les « disciples arrogants » de Sogyal, qui avaient brisé leur samaya.” (article de Tempelman), en publiant leur lettre ouverte sur les mauvais comportements de leur maître.

On peut donc s’étonner que d’une part des initiations et des instructions soient données à des personnes nouvelles, y compris “non-bouddhistes”, et que d’autre part un lama comme Namkha Rinpoché, très à cheval sur le samaya, et qui fait l’objet d’allégations, fasse partie des “invités d’honneur”.

En ce qui concerne ces pratiques tantriques de la Terre pure. Ce genre de pratique eschatologique n’est pas une nouveauté dans le bouddhisme. C’était/c’est même une de ces méthodes prosélytiques les plus anciennes. A la fin du temps (kaliyuga, mappo, etc.), quand les démons rôdent partout sur la terre, et que les catastrophes se déclenchent les unes après les autres, il faut des pratiques faciles et efficaces. C’est au IIIème siècle (entre 220 et 250 à Nankin) qu’apparaît la traduction chinoise de la “Description de la terre pure” (Sukhāvatī-vyūha) d’Amitābha, qui explique que toute personne à l’article de la mort et récitant le nom de ce Bouddha pourrait y renaître aussitôt. Tout comme la 4ème concentration, cette Terre pure est à l’abri de la destruction eschatologique, mais elle est plus facile à atteindre.
Autour d’Amitābha et de son paradis allaient se nouer les espoirs d’une majorité de Chinois et de Japonais. Par la visualisation de ce paradis et la récitation du nom de ce bouddha, in articulo mortis, même un pécheur endurci renaîtrait dans un étang de lotus au milieu du royaume des saints. Tout cela est dit dans une « description de la Terre pure», le Sukhāvatī-vyūha, dont la première version chinoise complète fut réalisée à Nankin entre 220 et 250, et qui compte donc parmi les premiers textes du mahâyâna à avoir été traduits. À la fin de cet ouvrage, nous trouvons un passage qui ramène le lecteur du paradis aux dures réalités terrestres :

Je vous ai confié cette Écriture, dit le Bouddha aux membres de l’assemblée. Vous devez la garder fermement sans rien ajouter ou diminuer au texte de votre propre gré. Après mon parinirvāṅa, les Écritures et mon Tao ne resteront que mille ans. Passé le millénaire, les Écritures et mon Tao cesseront. C’est parce que je vous ai tous pris en compassion que je vous laisse cette Écriture et ses rites, qui demeureront cent ans de plus. Cependant, une fois ces cent ans passés, ils cesseront à leur tour. Ceux qui en formuleront l’intention dans leur cœur pourront donc obtenir le Tao.”

Les Écritures de la Terre pure entrent donc, elles aussi, dans le schéma eschatologique. Leur rôle est si spécial que le Bouddha leur a taillé une petite niche de cent ans au-delà du millénaire fatidique. Tout comme aux détenteurs de la traduction du Lotus réalisée quelque quarante ans plus tard, il sera rappelé aux aspirants à la Terre pure que le temps qui leur reste est strictement limité. À la pression morale et karmique personnelle vient s’ajouter une fatalité historique absolument sans appel.

On doit relever une différence de ton entre ces premiers sutra mahâyâna et les « Évangiles du bouddhisme » qui les ont précédés. Les récits et apologues antérieurs furent assez circonstanciés dans leurs prophéties, mais toujours détachés en quelque manière et éloignés. On pouvait, certes, y repérer les indications sur l’avenir et en tirer des conséquences morales, mais elles restaient de l’histoire relevant du passé lointain. Avec ces textes précoces du mahāyāna, on semble entendre résonner une nouvelle voix au timbre marqué par l’urgence et la crise. C’est la voix du livre lui-même. Il devient insistant : «Tiens-moi, récite-moi, copie-moi, prêche-moi ou diffuse- moi, car sinon... ! » Ces textes excellent dans la pratique. Ils disent au lecteur exactement ce qu’il doit faire. Les exégètes monastiques continuent et continueront toujours à spéculer autour de la fin de la Loi, selon les diverses traditions savantes. Ce sont cependant les textes de ce genre qui ont déterminé les contours du bouddhisme en Asie orientale, et c’est dans cette ambiance mouvementée que nous devons réinsérer les premières phases du tantrisme en Chine, en les comprenant à travers ce contexte eschatologique.” Mantras et mandarins, Michel Strickmann, pp. 110-111

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MàJ 02112019 Les invités d'honneur pendant la cérémonie
Khenpo Tashi, Lama Gyourmé, Mogchok R. et Namkha R.
Liens vers d'autres photos

L'origine du Grand Powa

[1] “Le grand Drikung Powa est une spécificité de la lignée Drikung Kagyu. La tradition ancestrale, veut que tous les douze ans, l’année cochon (2019-20), le Grand Drikung Powa est donné. Sa Sainteté Chetsang Rinpoché le donnera sur une journée complète à Paris à la maison de la chimie. Toute personne ayant reçu l’initiation, obtiendra la longue vie, l’absence de maladie, la diminution des passions et de tout attachement samsarique, bien-être et bonheur excellents, et permettra, dans la prochaine vie, de renaître en une existence supérieure : humaine ou divine, d’où il sera possible d’obtenir le grand éveil et d’acquérir le pouvoir d’aider les innombrables êtres.
Cette pratique a d’incommensurables qualités et est en harmonie avec toutes les traditions du monde“. Source

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