vendredi 2 mars 2012

Conforme à la Nature



Dans le bouddhisme universaliste, la vérité étant l’absence de méprise, il n’y a pas à parader avec une vérité au détriment d’autres vérités. La vérité du bouddhisme est l’égalité de tous les phénomènes (sarvadharmasvabhāvasamatā). Logiquement, si cette vérité est percée ou « réalisée », il n’y aura pas de préférence ou de rejet pour l’un ou l’autre phénomène, du point de vue de la vérité, ce qui devrait conduire à l’impassibilité (ataraxia) à l’égard des phénomènes. La vérité n’est pas une question de foi, d’adhésion ou d’identification. "The proof is in the pudding" comme on dit Outre-Manche (≈ c’est le résultat qui compte).


Mais, il n’y a pas que le point de vue de la vérité qui est à prendre en compte. Ce serait de l’idolatrie selon Pascal (582). Des stoiciens comme Marc-Aurèle n’utilisent pas les mots grandiloquents vérité et charité mais suivent une discipline de l’assentiment et du désir (vérité), et de l’action (charité).
Pierre Hadot cite quelques exemples de cette double approche :
« Agir comme ta propre nature le commande ; pâtir comme la Nature commune te l’apporte » (XII, 32,3).« Suis-je en train d’accomplir une action ? Je l’accomplis, en la rapportant au bien des hommes. M’arrive-t-il quelque chose ? Je l’accueille en rapportant ce qui m’arrive aux dieux et à la source de toutes choses à partir de laquelle se forme la trame des événements » (VIII, 23).« Impassibilité (ataraxia) à l’égard des événéments qui viennent à ta rencontre produits par la cause extérieure. Justice (dikaiôsuné) dans les actions produites par la cause qui est en toi ; que ton impulsion à agir, que ton action, ait pour fin le service de la communauté humaine, parce que cela est pour toi conforme à ta nature » (IX, 31).« Il s’est abandonné tout entier à la justice pour les actions qu’il accomplit et à la Nature universelle pour tout ce qui lui arrive » (X,11,2).[1]
Très sobrement. La vérité et la charité, ou encore la bodhicitta chez les stoïciens.



[1] Citations de La citadelle intérieure, Introduction aux Pensées de Marc Aurèle de Pierre Hadot, pp. 200-201

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