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samedi 12 novembre 2011

Les Suiveurs de la Conscience




[3.4 Les Suiveurs de la Conscience (T. sems phyogs). Chengdu 212; Roerich 167)]

Sur les Suiveurs de la conscience.

[3.4.1 Introduction générale et défense des Suiveurs de la Conscience (Chengdu 212; Roerich 167)]

En ce qui concerne la « Section de la Conscience » (T. sems sde) de la Grande complétude, elle avait été enseignée par le Seigneur Mañjuśrīghoṣa, qui était le maître d'ācārya Buddhajñānapāda, au(x) moine(s) marié(s) (T. ban de chung ma can)[1].

La source des cycles d'instructions de [Buddha]jñānapāda, comme p.e. les Traditions orales (T. zhal lung) (S. Dvikramatattvabhāvana-mukhāgama), est le pandit Śrī Siṃha (paN+Di ta sing+ha) qui les étudia auprès du même Mañjuśrīmitra. Par la suite, Vairocana les étudia auprès de celui-ci [Śrī Siṃha]. Quand Vairocana était venu au Khams, il les avait enseignées partout[2].

De manière générale, le cycle des Traditions orales (T. rim pa gnyis pa'i de kho na nyid sgom pa zhes bya ba'i zhal gyi lung S. Dvikramatattvabhāvana-mukhāgama D715 et D716) de Buddhajñānapāda, les Suiveurs de la Conscience (T. sems phyogs) et les Suiveurs des préceptes (T. man ngag gi sde) ont beaucoup de points communs, mais quand ‘Bri gung dpal ‘dzin (14ème s.) (T. dpal 'dzin) [213] les corrigea (T. dag brjod) [Il avait publié une lettre circulaire autour de 1400], il avait dit que dans les commentaires, les pratiques (S. sādhana) et les instructions des nouveaux tantras même le nom « Grande complétude » (S. mahāsanti) ne figurait pas.

Cela montre combien sa vision était limitée, car il est écrit dans la Tradition orale de la culture de la réalité de l’état quiétif (S. Dvikramatattvabhāvana-mukhāgama[3] T. 'jam dpal zhal lung en abrégé, titre complet :  rim pa gnyis pa'i de kho na nyid sgom pa zhes bya ba'i zhal gyi lung)
« La Grande complétude est l'incarnation de l'intuition universelle[4]».
Fin de citation.Vitapāda (T. sman zhabs) [auteur du commentaire du Zhal lung] explique en outre que cela correspond à "la réalité telle quelle" (T. ji lta ba'i don).[5]

Le nom « Grande complétude » figure aussi dans l'Explication de la pratique (S. sadhāna) de Samantabhadrī (T. yan lag bzhi pa'i sgrub thabs kun tu bzang mo zhes bya ba'i rnam par bshad pa S. Caturaṅgasādhanasamantabhadrī-nāma-ṭīkā TG 1872) composée par [Buddha]jñānapāda, et dans le Trésor des siddhi (T. dpal gsang ba 'dus pa'i sgrub pa'i thabs dngos grub 'byung ba'i gter S. Śrī-Guhyasamājasādhanasiddhisaṃbhavanidhi-nāma TG 1874) composé par Vitapāda.
Et aussi dans le Commentaire des Traditions orales (T. mdzes pa'i me tog ces bya ba rim pa gnyis pa'i de kho na nyid bsgom pa zhal gyi lung gi 'grel pa TG 1866), il est fait mention des cinq consécrations des Puissances (T. nus pa'i dbang lnga po) enseignées dans le Guhyagarbha Tantra (T. gsang ba'i snying po)[6]. Cela correspondrait également à ce qui est enseigné dans les Mahāyoga tantras.

Il est d'ailleurs dit dans la Tradition orale (T. rim pa gnyis pa'i de kho na nyid sgom pa zhes bya ba'i zhal gyi lung S. Dvikramatattvabhāvana-mukhāgama D715[de [Buddha]jñānapāda] :
« Recommandé par toutes les lumières du triple monde
Le coeur de tous les phénomènes (S. dharma) qui est l'accomplissement (S. siddhi), le Réel (S. tathatā),
Qui détourne les eaux empoisonnées de l'existence et brille au-dessus de l'intérieur putride du triple [monde]
Sera expliqué pour y donner accès à travers la tradition de Mañjuguru. »
 Fin de citation. Et encore, dans « L'Or fondu qui se répand » (T. rdo la gser zhun), le premier des dix-huit traités sur la conscience (T. sems sde)[7] :
« Parfaitement et également recommandé par tous les guides qui sont les lumières du monde
Ce qui constitue le coeur des phénomènes dans les phénomènes est l'essence (tattva) du coeur de Mañjuśrīkumāra
Comme elle (tattva) est la mère de tous les Bienheureux (S. sugata), elle est l'unique chemin de tous les Vainqueurs
Ainsi que le Champs de tous les océans de l'ascèse des Perfections comme l'éthique etc. »
 L'usage des mots dans ces citations semble en effet très similaire. Dans le cas présent,
« Ainsi que la base (T. gzhir au lieu de zhing précédemment) de tous les océans de l'ascèse des Perfections comme l'éthique etc. »
cela refute les Suiveurs des Techniques (S. upāya-caryā) de la Grande complétude et ne les affirme clairement pas. Il est d'ailleurs dit dans la Tradition orale [de [Buddha]jñānapāda] :
« Les phénomènes, telle la matière (S. rūpa) etc.
Sont de la nature de l'Omniscient (S. sarvajñā)
Authentique comme le centre de l'espace
Tel est l'intuition de la non dualité de ce qui est sous-jacent et apparent. »
Fin de citation.
Si on en développe le sens,
« A l'abri de toute construction mentale
Elle ne peut être ni conçue ni exprimée
Elle s'étend partout comme le ciel découvert
Et est appellée [pour cette raison] « le principe sous-jacent libre d'imagination  (S. akalpita?) »
Dotée de la forme/substance de la Mahāmudrā
Elle apparaît comme un arc-en-ciel irréel (S. māyā)
Quand l'esprit de soi et autrui est purifié
Il s'appelle « manifestation authentique »
Voilà ce qui est écrit dans Guhyasamāja muktitilaka (D721)[8].

Par conséquent, les Suiveurs de la Conscience (T. sems phyogs pa rnams) [n'affirment] pas la non existence totale (S. atyant-oparama = atyanta-a-parama) du rayonnement [de la conscience][9], mais ils mettent plutôt (T. shas che bar snang) l'accent sur l'aspect de la réalité sous-jacente (T. zab mo'i phyogs).Les Suiveurs des préceptes (T. man ngag pa rnams) en revanche [affirment] bien l'aspect de la réalité sous-jacente, mais mettent plutôt l'accent sur le rayonnement [de la conscience]. Les Suiveurs de la Nature[10] (T. klong gi skor rnams S. āvarta, nisarga) expliquent l'importance égale de la réalité sous-jacente et le rayonnement [de la conscience].

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Il s’avère de ce passage des Annales bleues, qualifié par Samten G. Karmay de « première fois que l’on mette en question l’existence de Dzogchen dans les nouveaux tantras en réponse aux attaques de dpal ‘dzin (1400) », que la source première canonique de la Section de la Conscience du Dzogchen serait [Buddha]jñānapāda et plus précisément ses Traditions orales (T. rim pa gnyis pa'i de kho na nyid sgom pa zhes bya ba'i zhal gyi lung S. Dvikramatattvabhāvana-mukhāgama).

***

Illustration : Geu lotsawa

MàJ081012 Selon Sam van Schaik (The Early Days of the Great Perfection, p. 167, n.6), le terme sems sde apparaît pour la première fois au 11ème siècle.

[1] Roerich traite ban de chung ma can comme un nom propre, et suggère Dārika (le siddha-roi vendu à une prostituée et qui la servait pendant 12 ans. Identifié quelquefois à Matsyendra ou à son « fils » Mīnanāth. Selon les sources tibétaines, quand le pécheur meurt, il renaît comme Dārika   ). On peut aussi le prendre comme un groupe nominal et traduire par « moine(s) marié(s) ». Quand Vitapāda (T. sman thabs) raconte la rencontre entre Buddhaśrījñāna et Mañjuśrīmitra, il précise que ce dernier avait une femme et qu’il porta une robe ouverte, un turban sur la tête…
[2] Voici ce qu’écrit ‘Gos. J’y attache personnellement peu d’importance. « On dit (T. grags) que Vairocana les a expliquées en deux temps et à trois reprises au Khams. Une première fois dans l'ermitage mGon po'i dgon pa à rGyal mo rong gi brag à la reine (T. rgyal mo) g.Yu sgra snying po). Il les aurait enseignées à gSang ston ye shes bla ma, dans l'ermitage stag rtse mkhar gyi dgon pa à tsha ba rong. Puis au mendiant sangs rgyas mgon po dans l'ermitage brag dmar gi dgon pa à stong khung rong. Dans le passé, il les aurait encore enseignées au roi et plus tard, il les enseignerait encore à la nonne La zi shes rab sgron ma. Cela fait cinq fois en tout. »
[3]  Karmay écrit : However, the work in question was probably translated only in the eleventh  century A.D. and it is not easy to guess what the original Sanskrit term  was in the line.
[4] rdzogs pa chen po ye shes spyi gzugs can/ La citation complète : rdzogs pa chen po ye shes spyi yi gzugs// yongs su dag sku rdo rje 'chang chen po// dpal ldan kun gyi ngo bo rim gnyis 'dis// sdug bsngal lam bcas bskal ba gsum du yang// rang gi rjes mthun byang chub bla dang bcas// thob nas de bde cung tzam rab tsogs pa// rnal 'byor de yis ci phyir de mi sgom// dad dang brtzon 'grus ting 'dzin shes rab dang// dran pa'i blo yis gong gi rim pa ltar// yid dga'i gnas brten kun du bzang po mchog /lam 'di bsgom par bya 'kho na'o/
[5] Karmay : ’Gos Lo-tsà-ba gZhon-nu-dpal without giving any  references states that Vitapàda (sMan-zhabs) explained the term rdzogs chen as “meditation  on the ‘proper object’” and this explanation according to G.N. Roerich (BA p. 168) is in  Caturangasādhanasamantabhadrìnàmatika of Vitapàda (Vol. 65, No. 2735), but in this work there  is no such explanation, see p. 201–1–1 where there is a discussion on the term rdzogs chen.  On the other hand, in his mDzes pa’i me tog ces bya ba’i rim pa gnyis pa’i de kho na nyid sgom  pa zhal gyi lung gi ’grel ba (Vol. 65, No. 2729, p. 68–4–3), Vitapàda explains that the term  rdzogs chen refers to rim pa gnyis pa (i.e. rdzogs rim): rdzogs pa chen po zhes bya ba ni rim pa gnyis  pa’o/.
[6] Je n’ai pas trouvé de terme « cinq consécrations des Puissances » dans l’outil de recherche d’ACIP. Selon Rigpawiki : five empowerments conferred as an entry point to the practice of Mahayoga in order to ripen students who have energy.
the empowerment of Ratnasambhava concerning listening
the empowerment of Akshobhya concerning meditation
the empowerment of Amitabha concerning teaching
the empowerment of Amoghasiddhi concerning enlightened activity
the empowerment of the five buddha families concerning the infinite teachings of the vajra king. Références : Jamgön Kongtrul, The Treasury of Knowledge, Book Six, Part Four: Systems of Buddhist Tantra, translated by Elio Guarisco and Ingrid McLeod (Ithaca: Snow Lion, 2005), page 315.
Longchenpa, Dispelling Darkness in the Ten Directions, pages 372-376.
[7] Geu cite ici un des dix-huit traités de la section de la conscience, « L'Or fondu qui se répand » (T. rdo la gser zhun), qui ne serait sans doute pas reconnu comme une source authentique par dpal 'dzin. Selon la hagiographie de Vairocana, il s'agirait du compte-rendu écrit par Mañjuśrīmitra des instructions que celui-ci avait reçu de 'dGa' rab rdo rje. Source : Samten G. Karmay, The Great Perfection, p. 19. Détail, Mañjuśrīmitra le disciple de Garab Dordjé est Mañjuśrīmitra l'ancien, tandis que le maître de [Buddha]jñānapāda est Mañjuśrīmitra le jeune.
[8] toh: 1870), attribué à Vitapāda
[9] Qui correspond à la phase de création selon le commentaire de Vitapāda « gsal ba zhes pa ni bskyed pa'i rim pa'o/ ches gsang ba zhes pa ni dngos po thams cad kyi de bzhin nyid do// de rnams ston par byed pa'i gong na med pa'i lung chen po ni 'dus pa'o ». « Kula est le mystère au-delà des états quiescents et émergents » Silburn
[10] Sur le terme « klong », souvent et apparemment par facilité traduit par « Espace ». En sanscrit : āvarta ou nisarga : [ni-sarga] m. évacuation; défécation | abandon; don, récompense | condition naturelle, nature innée. Entrée de Dan Martin : [= klongs]. receptive centre. Skt. āvarta, 'spiral inward' [M.Vy.], 'turning-place, whirlpool.' Nisarga [http://sanskrit.inria.fr/DICO/36.html#nisarga], 'array, nature.' Vipula, 'large, extensive, vast.' Stein. 75 2. See Germano, Poetic Thought 937, for the cowardly translation 'space.' This seems quite close to Sino-Tibetan words for 'middle' (related to Tib. gzhung); Coblin, Sinologist's 53. nags klong ni nags tshal chen po'i khrod. chu klung ni chu chen po. dba' klong ni rba rlabs. Utpal 11.2. Achard, L'Essence 88 n. 41.
[11] rtza ba'i rgyud kyi snying po 'dus pa nges par brjod pa'i rgyud bla ma rtza ba rtza ba'i 'grel pa (tg 1414) dans la cadre de la pratique avec dūtī, dbang gi cho ga'i rim pa zhes bya ba (tg 1535), dpal gsang ba 'dus pa'i dkyil 'khor gyi cho ga'i 'grel pa (tg 1871)(dans le cadre des pāramitā), mtsan yang dag par brjod pa'i 'grel pa tsul gsum gsal ba zhes bya ba (tg 2091), yang chub kyi sems bsgom pa don bcu gnyis bstan pa  (tg 2578) (theg pa chen po'i thabs kyi spyod pa)

vendredi 11 novembre 2011

Les traductions du Guhya-samaja




Les anuttarayogatantra (T. rnal ‘byor bla na med pa’i rgyud) consistent systématiquement en un « tantra-racine » (S. mūla-tantra T. rtsa ba’i rgyud) et en un « tantra ultérieur » explicatif (S. uttaratantra T. rgyud phyi ma).  Dans le cas du Guhya-samāja, le tantra-racine (D442 ) compte 17 chapitres et le tantra explicatif (D443 ) est le 18ème chapitre, ajouté ultérieurement.

Il est généralement accepté que le Guhya-samāja date du 8ème siècle et que la première traduction tibétaine aurait été faite à cette époque. Mais cette idée est contestée. Il y a deux transmissions, une qui remonte à Nāgārjuna (Nāgārjuna, Āryadeva, Candrakīrti), dite système « Ārya » et une autre qui remonte à Buddhaśrījñāna (Vitapāda…) et qui est appelée système « Jñānapāda ». L’ancienneté du système « Ārya » se base sur l’identification de leurs auteurs avec les grands maîtres du madhyamaka, Nāgārjuna, Āryadeva, Candrakīrti. Mais, il n’est pas exclu qu’il y eut d’autres maîtres du même nom qui auraient vécu au 9ème siècle[1].

La première traduction chinoise du Guhya-samāja date du 10ème siècle. Son traducteur, She hu (Dānapāla) s’était rendu en China en 980. Cela correspond bien à l’époque à laquelle étaient faites les traductions tibétaines par Rinchen Zangpo à Tholing en collaboration avec les pandits indiens Śraddhākaravarman et Kamalaguhya ou par le moine royal Yéshé Gyaltsen à Samyé.

Les traductions tibétaines des deux systèmes, « Ārya » et « Jñānapāda » datent du 10-11ème siècle. En ce qui concerne, Buddhaśrījñāna, le disciple de Haribhadra (8ème siècle) est connu. Mais ce que nous savons du Buddhaśrījñāna dans le cadre du Guhya-samāja nous est parvenu principalement par le biais de Vitapāda (T. sman thabs). Les Annales bleues reprennent les données hagiographiques que Vitapāda donne dans son commentaire (D728 ) sur la Tradition orale de Buddhaśrījñāna.  

De ce passage dans les Annales bleues[2], il s’avère que Mañjuśrīmitra commet Buddhaśrījñāna de rédiger un certain nombre (quatorze) de textes pour le bien des générations futures. Ce sont quatorze textes qui se rapportent au culte de Samantabhadra, dans le cadre du Guhya-samāja tantra (sādhana, rituel de feu (homa), rituel du tribut, ganacakra, explications, initiations…). Geu lotsāwa précise que Buddhaśrījñāna n’a pas composé le commentaire du tantra (T. rgyud kyi rnam bshad) et il pense que les autres textes sont connus sous le nom « les quatorze traites de la tradition » (T. lung gi chos bcu bzhi). Il ajoute que le texte du rituel du maṇḍala avait été amené au Cachemire et qu’on ne le trouve pas à Magadha.   

Les 14 traités sur Guhyasamāja (T. chos bcu bzhi) sont en fait 18 textes différents. Les trois textes de Samantabhadra sont comptés comme un, ainsi que les trois rituels de Jambala. Comme les titres abrégés donnés par Gue lotsāwa ne correspondent pas exactement aux titres utilisés dans le Tengyur, il ne m’est pas possible d’établir les correspondances sans examiner de plus près les textes en question. Je donnerai en premier la liste donnée par les Annales bleues avec les correspondances évidentes (B#) dans le tengyur et ensuite la liste du Tengyur.

1a. bskyed pa'i rim pa'i sgrub thabs kun tu bzang po (B3)
1b. kun tu bzang mo (B4)
1c. kun tu bzang po'i don bsdus pa (B5 ?)
2. sbyin bsreg gnyis kyi cho ga
3. gtor ma mi nub pa'i sgron ma
4. tshogs kyi 'khor lo'i cho ga
5. rin po che 'bar pa (Śrī-Guhyasamājatantrarājaṭīkā?candraprabhā-nāma)
6. dkyil 'khor gyi cho ga shlo ka bzhi brgya lnga bcu pa
7. rtsa ba'i ye shes chen po
8. tshigs su bcad pa'i mdzod (S. gathakosa), attribué à a. nyi ma sbas pa; t. jnanasanti; dpal gyi lhun po sde
9. grol ba'i thig le (Muktitilakanāma), (B7)
10. bdag sgrub pa la 'jug pa zhes bya ba (ātmasādhanāvatāra) (B8)
11. byang chub sems kyi thig le ?
12. dpal bkra shis kyi rnam par bshad pa chen po ?
13. bzhi pa la 'jug pa thabs dang bcas pa ?
14. chu sbyin dbang po’i sgrub pa'i thabs gsum (une série de trois rituels centrés sur Jambala)
14a. rje btsun 'phags pa gnod 'dzin chu dbang gi sgrub pa'i thabs (bhaṭṭārakāryajambhalajalendra-sādhana) (B9)
14b. gsang ba'i dzam bha la'i sgrub thabs (guhyajambhalasādhana) (B10)
14c. rgya che ba'i dzam bha la'i sgrub pa'i thabs (vistarajambhalasādhana) (B11)

Ensuite, en ce qui concerne l’identification et l’attribution de ces textes, il faut distinguer entre trois cas de figure. Un texte peut être composé (T. mdzad pa rdzogs) par Buddhaśrījñāna. Dans ce cas, on peut imaginer un texte transmis sous cette forme. Il peut avoir été reçu oralement (T. zhal snga nas) de Buddhaśrījñāna, en personne ou en vision ? sans précision du destinataire (Vitapāda ou un autre), qui a dû le mettre par écrit. Vitapāda ne semble exister que par la grâce de son guru illustre. Il n’est pas connu autrement dans le cadre du Guhya-samāja.
Dans le Tengyur (j’utiliserai celui de Dege dans ce qui suit), on trouve les textes suivants attribués à Buddhaśrījñāna (B) et à Vitapāda (V).


B1. rim pa gnyis pa'i de kho na nyid sgom pa zhes bya ba'i zhal gyi lung (dvikramatattvabhāvanā-nāma-mukhāgama D715). Transmission orale. Traduit par Kamalaguhya et le moine royal Yéshé Gyaltsen.
B2. zhal gyi lung (mukhāgama D716). Transmission orale. Traduit par Rinchen Zangpo (lo ts'a ba dge slong khyung wer rin chen bzang po, le terme « wer » est spécifique au Zhang Zhung et semble signifier roi).
B3. kun tu bzang po zhes bya ba'i sgrub pa'i thabs (samantabhadra-nāma-sādhana D717). Transmission orale. Traduit par le pandit Śraddhākaravarman et Rinchen Zangpo.  
B4. yan lag bzhi pa'i sgrub thabs lun tu bzang mo zhes bya ba (caturaṅgasādhanopāyikā-samantabhadrā-nāma D718). Composé par Buddhaśrījñāna. Traduit par Smṛtijñānakīrti (qui avait vécu au Tibet).  
B5. dpal he ru ka'i sgrub pa'i thabs (śrīherukasādhana D719) Composé par Buddhaśrījñāna. Pas de mention de traducteur.
B6. dpal he ru ka sgrab pa'i thabs kyi 'grel pa (śrīherukasādhanavṛtti D720). Aucune mention, ni de l’auteur, ni du traducteur.
B7. grol ba'i thig le (Muktitilakanāma D721). Transmission orale. Traduit par Kamalaguhya et le moine royale Yéshé Gyeltsen.
B8. bdag sgrub pa la 'jug pa zhes bya ba (ātmasādhanāvatāra D722). Composition orale de Buddhaśrījñāna. Traduit par Śāntibhadra et le lotsāwa 'gos lhas btsas (qui avait révisé des traductions de Rinchen Zangpo, voir Fremantle).   
B9. rje btsun 'phags pa gnod 'dzin chu dbang gi sgrub pa'i thabs (bhaṭṭārakāryajambhalajalendra-sādhana D723). Composé par Buddhaśrījñāna. Traduit par Śraddhākaravarman et gelong Chos kyi shes rab.
B10. gsang ba'i dzam bha la'i sgrub thabs (guhyajambhalasādhana D724). Composé par Buddhaśrījñāna. Traduit par Jayasena et bstun pa Dharma Yon tan.
B11. rgya che ba'i dzam bha la'i sgrub pa'i thabs (vistarajambhalasādhana D725). Pas de mention de l’auteur ni des traducteurs.
B12. stang stabs kyi bkod pa (gativyūha D726). Composé par Buddhaśrījñāna. Pas de mention des traducteurs.   
B13 so sor 'brang ma chen mo'i srung ba (mahāpratisarārakṣā D1944). Composé par Buddhaśrījñāna. Traduit par mahālotsāwa Dharmakīrti. Il s’agit de la dhāraṇī d’Ārya Mahāpratisārāyai, la śakti de Vairocana.

Pour l'intérêt :
* dpal gsang ba 'dus pa'i dkyil 'khor gyi cho ga zhes bya ba (śrīguhyasamājamaṇḍalavidhi-nāma D727). Composition orale d’Atīśa. Traduit par Rinchen Zangpo.

L’impression que donne cet ensemble de textes est que le Guhya-samāja est un phénomène relativement nouveau, une sorte de buzz, dans lequel sont impliqués aussi bien le centre de Tholing (Rinchen Zangpo) que celui de Samyé (Yéshé Gyeltsen). Rappelons aussi que la traduction chinoise du Guhya-samāja (en 18 chapitres) avait été fait par She  hu (Dānapāla), qui s’est rendu en Chine en 980. Certains textes sont nommément composés par Buddhaśrījñāna (4, 5, 8, 9, 10, 12), d’autres ont été reçus oralement (par qui ?) (1, 2, 3, 7), d’autres ne mentionnent pas d’auteur (6, 11).

Comment ces textes sont-ils parvenus au Tibet ? Très probablement, les pandits indiens invités par le roi Ye shes ‘od sont-ils  venus avec certains de ces textes dans leurs bagages. Il y a aussi le cas de textes « composés oralement » (T. zhal snga nas mdzad pa rdzogs so) sur place, comme p.e. le Rituel du maṇḍala de Guhya-samāja (T. dpal gsang ba 'dus pa'i dkyil 'khor gyi cho ga zhes bya ba S. śrīguhyasamājamaṇḍalavidhi-nāma D727), composé oralement par Atīśa et traduit par Rinchen Zangpo. Cela aurait très bien pu se passer entre 1042-1045, quand Atīśa avait rencontré Rinchen Zangpo à Guge.

Contrairement à Buddhaśrījñāna, toutes les œuvres attribuées à Vitapāda ont été composées par lui-même. On a l’impression d’une source beaucoup plus récente, voire même encore vivante…  C’est d’ailleurs à Vitapāda que nous devons toutes les informations hagiographiques sur Buddhaśrījñāna, hormis la lignée de transmission mentionnée au début de la Tradition orale (T. zhal lung) de Buddhaśrījñāna, qui est rappelons-le une transmission orale, traduite par Kamalaguhya et le moine royal Yéshé Gyaltsen (à Samyè ?).

Or, les œuvres dans le cadre du Guhya-samāja dans le Tengyur attribuées à Vitapāda, sont au nombre de neuf, parmi lesquels un commentaire sur la Tradition orale de Buddhaśrījñāna, un commentaire sur le sādhana de Samantabhadra...

V1. mdzes pa'i me tog ces bya ba rim pa gnyis pa'i de kho na nyid bsgom pa zhal gyi lung gi 'grel pa (sukusuma-nāma-dvikramatattvabhāvanāmukhāgama-vṛtti D728) [3]
V2. grol ba'i thig le zhes bya ba'i rnam par bshad pa (muktitilaka-nāma-vyākhyāna D732)
V3. yan lag bzhi pa'i sgrub thabs kun tu bzang mo zhes bya ba'i rnam par bshad pa (caturaṅgasādhanopāyikāsamantabhadrā-nāma-ṭīkā D734)
V4. dpal gsang ba 'dus pa'i dkyil 'khor gyi sgrub pa'i thabs rnam par bshad pa (śrīguhyasamājamaṇḍalopāyikāṭīkā D735)
V5. dpal gsang ba 'dus pa'i sgrub pa'i thabs dngos grub 'byung ba'i gter (śrīguhyasamājasādhana-siddhisaṃbhavanidhi-nāma D736)
V6. sbyor ba bdun pa zhes bya ba dbang bzhi'i rab tu byed pa (yogasapta-nāma-caturabhiṣekaprakaraṇa D737)
V7. gtor ma chen po'i cho ga (mahābalividhi D738) 
V8. mi shigs pa'i rin po che zhes bya ba'i sgrub thabs (ratnāmati-nāma-sādhana D739)
V9. bdag gi don grub par byed pa zhes bya ba rnal 'byor gyi bya ba'i rim pa (ātmārthasiddhikara-nāma-yogakriyākrama D740)
 
 
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[1] A. Wayman, Yoga of the Guhyasamājatantra, The Arcane Lore of Forty Verses,  1977, pp. 93, 96-97. La formation textuelle du Pañcakrama TOMABECHI T., Asiatische Studien A. 1994, vol. 48, n° 4, pp. 1383-1387 [bibl. : 4 ref.]
[2] |Source de [450]nas 'jam dpal dbyangs kyis slob dpon la ma 'ongs pa'i sems can la phan pa'i phyir bskyed pa'i rim pa'i sgrub thabs kun tu bzang po dang | kun tu bzang mo dang | kun tu bzang po'i don bsdus pa ste rnam pa gsum dang | sbyin bsreg gnyis kyi cho ga dang | gtor ma mi nub pa'i sgron ma dang | tshogs kyi 'khor lo'i cho ga dang | rin po che 'bar ba dang | rgyud kyi rnam bshad dang | dkyil 'khor gyi cho ga shlau ka bzhi brgya lnga bcu pa dang | rtsa ba'i ye shes chen po dang | tshigs su bcad pa'i mdzod dang | grol ba'i thig le dang | bdag sgrub pa dang | byang chub sems kyi thig le dang | dpal bkra shis kyi rnam par bshad pa chen po dang | bzhi pa la 'jug pa thabs dang bcas pa dang | chu sbyin dbang po'i sgrub pa'i thabs gsum ste| lung dang mthun pa'i chos bcu bzhi rtsoms shig par bkas gnang ngo | |de la kun tu bzang po gsum po gcig tu byas| chu dbang gi sgrub thabs gsum po'ang gcig tu byas| rgyud kyi rnam bshad ni slob dpon gyis ma mdzad pas na| lhag ma rnams la lung gi chos bcu bzhi zhes grags pa yin nam snyam mo| |dkyil 'khor gyi cho ga yang dpe kha cher khyer nas yul dbus na med do|
[3] Dans son commentaire sur les Instructions orales (zhal lung) de Buddhaśrījñāna. mdzes pa'i me tog ces bya ba rim pa gnyis pa'i de kho na nyid bsgom pa zhal gyi lung gi 'grel pa (sukusuma-nāma-dvikramatattvabhāvanāmukhāgama-vṛtti)