Représentation d'étrangers en habits grecs, jouant des carnyx et des flûtes aulos. Porte septentrionale du Stupa I de Sanchi
|
La présence des grecs/ioniens en Inde, et leur influence, est bien documenté. Les liens entre les Maurya et les grecs sont connus. Le Kalinga était un royaume antique du centre-est de l'Inde qui correspond grosso modo à l'état d'Odisha, entre autres connu pour la guerre sanglante de Kalinga (261 av. J.-C.) menée par l’empereur maurya Ashoka. Ce serait suite aux massacres qu’Ashoka se convertit au bouddhisme. Les mauryas et notamment le grand-père d’Ashoka, Chandragupta, entretinrent des relations étroites avec les Grecs. L’empereur Khārabēḷa/Khāravēḷa[1] de Kalinga de la dynastie Mahameghavahana étend son empire, entre autres en battant Démétrios, le roi Indo-Grec de Bactria, gouvernant de Begram [Bagram] (ou Kapiçi). Il protège toutes les religions, mais, semble-t-il, en favorisant les jains.
Les Grecs/Ioniens (Yavana ou Yona) ne sont pas limités à une simple présence au Gandhara. [2] Il semble assuré que, même vers le début de l'ère chrétienne, le terme Yavana ait désigné trois catégories différentes d'étrangers, les Grecs, les IndoGrecs et les habitants de l'Orient romain. Alors que les deux premières catégories résidaient dans les régions nord-ouest et ouest du sous-continent, la troisième était fixée dans la péninsule et s'adonnait principalement à des activités marchandes. Ailleurs dans le Mahābhārata, les Yavana sont rabaissés au rang des śūdra de même que les Dravidiens, les habitants du Kalinga (Odisha) et les śaka. Dans le Deccan oriental et en Inde du Sud, les Yavana semblent avoir été partie prenante dans les transactions commerciales locales. C'est pour la même raison que des preuves matérielles de leur présence, monnaies, lampes et poteries, ont été retrouvées en grand nombre dans ces régions. Le Grec Héliodore signale sa dévotion à Vishnou dans l'inscription du pilier de Besnagar, et se définit lui-même comme membre de la secte Bhāgavata.[3] Aux alentours de Puhar ou de Kaveripūmpaṭṭinam (Tamil Nadu), l'attention des passants était souvent attirée par les habitations des Yavana dont la prospérité ne déclinait jamais[4]. Stein fait valoir que, d'un point de vue social, « quels qu'aient pu être les Yavana », ils avaient été absorbés par la société indienne, et qu'il est peu probable que des colonies grecques aient existé vers le début de l'ère chrétienne 53. O. Stein, « Yavanas in Early Indian Inscriptions ».
Pour revenir sur le pilier d'Héliodore, le site wikipedia anglais est plus complet et donne d'autres interprétations possibles des inscriptions. Ainsi, Héliodore ne serait pas forcément un dévot de Vichnou (Bhagavan), mais pourrait aussi être un adepte du bouddhisme (Allan Dahlaquist). D'ailleurs, la devise pour gagner le ciel fait très "bouddhiste".
Trini amutapadani‹[su] anuthitani
nayamti svaga damo chago apramado
« Trois pas (préceptes) immortels … si pratiqués mènent au ciel :
le contrôle de soi, la charité et la conscience. »
La traduction de Richard Solomon : "(These?) three steps to immortality, when correctly followed, lead to heaven: control, generosity, and attention."
le contrôle de soi (P. damo), la générosité/don/sacrifice (P. cāgo) et la diligence/vigilance/attention (P. appamādo). Dans le bouddhisme Pāli, "appamāda" recouvre la pratique de l'attention (sati), de la lucidité (paññā) et de l'énergie (kusala viriya). Notons tout de même la présence du garuḍa qui surmonte le pilier.
Se pourrait-il que les « roitelets indo-grecs » aient pu influencer les rites autour de la royauté en Inde, et se pourrait-il que ces rites remontent aux Sumériens ? Alternativement, ces rites viennent-ils d’un terreau commun plus ancien ? Ce qui est certain, c’est qu’il s’agit de rites très anciens autour de la royauté et de la fertilité. Les festivals de la ville de Purī autour de Jagganāth nous offrent une occasion d’explorer ces questions.
Pour un article plus complet sur la présence grecque en Inde : La présence des Yavana en Inde ancienne de Ray Himanshu Prabha et Nolot Edith.
***
MàJ 07022018 The Greeks of Afghanistan Revisited
[1] Alain Daniélou places Kharavela somewhere between 180 BCE and 130 BCE, mentioning him as a contemporary of Satakarni and Pushyamitra Shunga. Source
[2] Ray Himanshu Prabha, Nolot Edith. La présence des Yavana en Inde ancienne. In: Topoi, volume 3/2, 1993. pp. 455-477; doi : 10.3406/topoi.1993.1480
[3] Journal of the Royal Asiatic Society, 1909, p. 1053.
[4] Paṭṭinappālaî 214-7. Puhar est la ville de Manimékhalaï.
Guerrier Yavana, Grottes d'Udayagiri (Jaina), prés de Bhubaneswar en Odisha |
***
MàJ 07022018 The Greeks of Afghanistan Revisited
[1] Alain Daniélou places Kharavela somewhere between 180 BCE and 130 BCE, mentioning him as a contemporary of Satakarni and Pushyamitra Shunga. Source
[2] Ray Himanshu Prabha, Nolot Edith. La présence des Yavana en Inde ancienne. In: Topoi, volume 3/2, 1993. pp. 455-477; doi : 10.3406/topoi.1993.1480
[3] Journal of the Royal Asiatic Society, 1909, p. 1053.
[4] Paṭṭinappālaî 214-7. Puhar est la ville de Manimékhalaï.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire