1. Surmonter dés qu'elle se présente (T. phrad 'joms)1. Surmonter la représentation dés qu'elle se présente c'est la neutraliser (T. chod pa S. ācchedya) dans le non-né.
2. La retracer (T. phyi bsnyag)
3. Son absence serait un défaut (T. med sprul)
2. Si on ne la surmonte pas dès qu'elle se présente, il faut alors la retracer (T. snyog ). D'où est-elle apparue ? Comme elle apparaît de la conscience (S. citta) et qu'elle se fonde dans la conscience, elles n'est pas différente de la conscience. On appelle cela "retracer"
3. Pour expliquer que son absence serait un défaut, Géshé Chakriwa commence par expliquer que l'absence de mal-être (T. (mi bde ba cig) serait un défaut, parce que sans mal-être on ne sera pas motivé pour le renoncement (T. rab tu byung ba). Dans ce cas précis, il s'agit des représentations. Les représentations sont la conscience (S. citta). Et la conscience est le non-né (S. anutpāda T. skye med).
"Prenons l'exemple d'un feu dans une forêt. Un petit feu dans un bosquet serait éteint par le vent. Mais dans un grand forêt le même vent nourrirait le feu. [si l'on accumule beaucoup de bois propre et que l'on y met le feu, le feu flamboie. Si on y entasse encore davantage, autant on en ajoute, autant il flamboiera[2]. De même de nombreuses représentations nourriront la lucidité (S. prajñā).] Il s'allierait (T. grogs su 'gro) même avec de la terre et des pierres qui le nourriront. Ainsi, il est dit que toutes les représentations nourriront la lucidité (S. prajñā).On retrouve la méthode ou l'image de retraçage dans d'autres traditions. Ainsi le Bṛhadāraṇyaka Upaniṣad : “Parmi tout ceci, seul le Soi doit être connu et réalisé, car c'est à travers Lui que tout ceci peut être connu, [et nous pouvons Le connaître] de la même manière que l'on retrouve un animal perdu en suivant ses traces.”
C'est comme de la neige tombant sur un lac : dès que les flocons de neige tombent [sur la surface du lac], ils deviennent identiques (T. ro gcig tu 'gyur) [au lac]. De la même façon, dès que les représentations se produisent, elles sont identiques/identifiés (S. ekarasa) à la part connaturelle (S. Sahaja).
C'est comme rencontrer une personne familière (T. 'dris pa'i mi) : quand on la rencontre, pas besoin de se demander si c'est elle ou non[3]. De la même façon, pas besoin de se poser des questions au sujet des représentations, quand on les reconnaît comme [le] non-né."
On le trouve encore dans le bouddhisme Ch'an, chinois et coréen. Chez le maître chinois Lin-tsi (mort en 866 ou 867) d'abord :
"Si l'on est capable de 'retourner sa vision' (§11e : Essayez donc de retourner votre vision vers vous-mêmes) et de voir les choses de façon "définitive" (S. nītārtha), la nature de la concupiscence, de la colère et de la déraison n'est autre que la nature de Buddha; il n'y a point de nature de Buddha hors de la concupiscence, de la colère et de la déraison".[4]Chez le maître coréen Chinul (1158-1210), un représentant du bouddhisme Huayan (Mahāvaipulya Buddhāvataṃsaka Sūtra), qui enseigne une méthode appelée "retracer le rayonnement" ("tracing back radiance")[5].
Question: Qu'est-ce que cette conscience qui est vide, apaisée et experience numineuse ?Ramana Maharshi (1879-1950) , le sage de la colline sacrée Arunāchala, donne des instructions similaires à partir d'un état de "sommeil éveillé" :
Chinul: Ce qui vient de me poser cette question est justement votre conscience qui est vide, apaisée et conscience et expérience numineuse. Pourquoi ne pas retracer son rayonnement plutôt que de chercher à l'extérieur ?[6]
Chinul explique ensuite sa méthode. C'est une méthode "d'introduction à la nature de l'esprit (T. ngo sprod)". Une partie de sa méthode est ce Buswell appelle "entrer le noumène". Une des approches consiste à retourner à la source, le cœur-esprit, à l'aide de sons. Chinul l'appelle "La méthode d'Avalokiteśvara pour entrer le noumène"[7]
Ramana Maharshi : Si vous savez ce qu'est cette conscience de veille, vous connaîtrez la conscience qui se tient comme témoin dans les trois états. Cette conscience peut être trouvée en cherchant la conscience telle qu'elle était durant le sommeil profond.
Q. [Mrs Piggot] : Dans ce cas, je m'endors.
RM : Aucun inconvénient !
Q. : C'est un vide.
RM : Pour qui est le vide ? Cherchez Vous ne pouvez vous nier vous-même à aucun moment. Le Soi est toujours présent et subsiste dans les trois états [veille, sommeil, rêve].
Q. : Devrais-je alors rester comme en état de sommeil profond et en même temps être vigiliante ?
RM : Oui. Le fait d'être vigilant est l'état de veille. Ce ne sera donc pas un état de sommeil, mais celui d'un sommeil éveillé. Si vous suivez vos pensées, vous serez entraînée par elles et vous vous trouverez dans un labyrinthe sans fin.
Q. : Alors je dois remonter à la source de mes pensées.
RM : Tout à fait ; c'est ainsi que les pensées disparaîtront et que seul le Soi demeurera. En fait, pour le Soi il n'y a ni intérieur ni extérieur. De plus, ce sont des projections de l'égo. Le Soi est pur et absolu.[8]
***
Images : 1. Peinture rupestre à Renegade Canyon 2. Milarepa et le chasseur (flickr)
[1] rnam rtog don dam ngo sprod p. 211
[2] litt. bdag dga' (sa propre joie) ba yin zer.
[3] Abhinavagupta semble utiliser un exemple similaire sur la reconnaissance d'un visage familier et la joie qu'accompagne cette reconnaissance. Abhinavagupta, David Dubois p.85
[4] Entretiens de Lin-Tsi, Paul Demiéville, p122
[5] Tracing Back the Radiance, Chinul's Korean Way of Zen, Robert E. Buswell jr.
[6] Pojo Chinul's Secrets on Cultivating the Mind p 353, Jin Y. Park, Buddhist Philosophy Essential Readings
[7] La méthode pour retourner à la conscience nouménale
[8] L'enseignement de Ramana Maharshi, Albin Michel, p43
Tibétain Wylie :
/dge bshes lcags ri ba'i bla ma rnam gnyis kyi gdams ngag yin te/ sgom chen de bsgom pa'i dus su/ rnam par rtog pa 'byung ste/ phrad 'joms pa/ phyi bsnyags/ med sprul pa rnam pa gsum mo/ /dang po rnam rtog byung ma thag skye med du chod pa ni/ phrad 'joms pa bya ba yin/ phrad ma thag ma choms na/ phyi bsnyag gsung / rnam rtog de gang nas byung / de sems las byung / sems su thim/ sems dang gnyis tha mi dad de/ phyi bsnyag bya ba yin gsung / med sprul pa ni/ gang shes pa la lci ba/ nyams la mi bde ba cig med sprul pa yin te/ 'o skol rab tu byung ba la rtsa bzhi shes dgos pa lci ste/ de nyid med sprul te/ de rnam par rtog pa yin/ rnam rtog de sems yin/ sems skye med yin gsung / dper na/ nags la me shor na/ me chung ngu rlung gis 'chi ba yin/ nags tshal chen po tshig tsam na/ rlung yang grogs su 'gro /shing mang po yang dag pa tshogs nas me la dmag 'dren pa la/ me na re/ da rung khyed rang mang du spungs dang / khyod ji ltar mang ba bzhin/ bdag dga' ba yin zer la/ de bzhin du rnam rtog mang ba bzhin/ shes rab kyi grogs su 'gro gsung ngo // sa rdo tshun chad grogs su 'gro/ de bzhin du/ rnam rtog ji ltar mang ba bzhin shes rab kyi grogs su 'gro gsung / mtsho la kha ba bab pa dang 'dra ste/ babs ma thag tu ro gcig tu 'gyur ro/ /de bzhin du rnam rtog byung ma thag tu lhan cig skyes par ro gcig /sngar 'dris pa'i mi phrad phrad pa dang 'dra ste/ sngar 'dris kyi mi dang phrad tsa na/ yin min rtog dpyod bya mi dgos/ de bzhin du/ rnam rtog la rtog dpyod bya mi dgos par skye med du ngo shes gsung / de ni dge bshes lcags ri ba'i yin/
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