Tailopa (Himalayan Art) |
Quand Gorakṣa apprend, par Kānu-pa (Kṛṣṇācārya), que son maître Mīna-pa est tenu captif par les « mauvaises femmes » (Yoginī) à Kadalī (Kāmarūpa, Assam), il va voir Yama, en le menaçant de son Huṃkāra mantra. Yama lui montre toutes les fiches qu'il a sur les uns et les autres, et Gorakṣa y trouve en effet mentionné le nom son maître. Il efface son nom de la liste des futurs candidats de Yama et va sauver son maître, qui est tombé sous le charme des femmes et des plaisirs sensoriels (kāma), en suivant ses impulsions. Or, pour les nāths la satisfaction débridée des plaisirs sensoriels conduit à la maladie et la mort, et il convient de le sauver de cela. Pour attirer son attention, Gorakṣa se transforme en une « danseuse », et lui adresse un chant dans lequel il lui rappelle quelques vérités. La seule façon d’échapper à la mort et de trouver l’immortalité, passe par la pratique du (haṭha)yoga (kāya-sādhana). Une vérité que connaissait cependant Mīna-pa, puisqu’il fut le maître de Gorakṣa, mais qu’il avait oubliée à cause d’un mauvais sort que lui lança Durgā/Pārvati.
L’instruction de l’immortalité avait en fait été donnée par Śiva (l’Esprit) à Durgā/Pārvati (la Matière, la Nature primordiale), en réponse à la question « Comment se fait-il, Seigneur, que vous soyez immortel, et moi mortelle ? Dites-moi la vérité, pour que je devienne moi aussi immortelle ! » La réponse de Śiva à Durgā/Pārvati avait été entendue par Mīna-pa, avalé par un gros poisson, qui put assister en cachette à cette transmission, qui eut lieu au fond de l’océan.[1]
Macchanda/Matsyendranātha/Mīna-pa/Luī-pa/Koṅkaṇeśvara, le pêcheur, est considéré être à l’origine du culte Yoginī-kaula, dont, comme le note David Gordon White, les seuls manuscrits qui existent encore se trouvent au Népal[2]. En fait, ce culte avait été transplanté au Népal, qui entretenait des liens importants avec l’Inde oriental et du Sud-ouest. A partir du XIIème siècle, des shivaïstes du sud de l’Inde s’installèrent au Népal. A partir du XIVème siècle, suite à la restauration des Malla, des prêtres du Bengale et du Deccan officiaient dans les temples de Bhaktapur et ailleurs dans la vallée de Kathmandu.[3]
C’est du Népal (Tipupa, Réchungpa) qu’aurait été ramenée la transmission aurale de la ḍākinī incorporelle, qui remonterait à Tailopa, que l’on représente désormais (après avoir fabriqué de l'huile de sésame, d'où son nom) comme un pêcheur, un poisson à la main.
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[1] Obscure religious cults, SD Gupta, 1969, pp. 221-224
[2] The Alchemical Body, p. 89
[3] The Alchemical Body, p. 89
Les seuls textes du Kula, au Népal ? Pas du tout du tout ! White se trompe. Pour commencer, les txetes du Trika, Krama, Shrividya etc sont du Kula et on en trouve dans toute l'Inde. Ensuite, il n'existe pas de catalogue complet des manuscrits en Inde.
RépondreSupprimerPour la citation textuelle de White http://tinyurl.com/pbo28uq
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