La vie de Maitrīgupta traduite par Sylvain Lévi est celle qui fait partie du Siddha Amnāya que l'on trouve dans le "manuscrit de Sham Sher", decouvert au Népal en 1928 par Sylvain Lévi et Giuseppe Tucci. Mark Tatz considère ce document pratiquement comptemporain à Maitrīgupta et Sāgara (11ème s.) et pense que ce dernier aurait pu en être l'auteur. Il contient des renseignements intéressants sur les années de formation de Maitrīgupta. La version hagiographique tibétaine la plus proche de celle du manuscrit et la version de Pao tsuklak (dpa' bo gtsug lag 'phreng ba 1504-1566).
Il y a quelques différences importantes avec la version de Pema Karpo (16ème s.). La déesse qui l'envoie chercher Śavaripa est Tārā et c'est Śavaripa qui lui transmet la pratique de Vajrayoginī. Maitrīgupta semble être un pratiquant de Tārā, qui est un "tantra de l’action" (S. kriyā tantra T. bya rgyud), il pratique son maṇḍala plusieurs fois par jour, suit un certain régime, puis pratique le jeune. Après sa vision (S. sākṣāddarśana) de Śavaripa, il compose un Commentaire sur les quatre mudrā du Pañcakrama (Pañcakramacaturmudrādivyākhyānaṁ), reçoit l'Instruction (S. upadeśa) et joue même de la vinā… Comme il était incapable de produire les manifestations corporelles (S. kāya-vyūha) comme son compagnon Sāgara, il demanda conseil à Śavaripa. Celui-ci lui apprend que c'est parce qu'il y mêle des concepts de différenciation (S. vikalpasambhūtatvāt) et qu'il y arrivera à travers la vision directe (S. darśanāprakāśanāṁ). Celle-ci lui deviendra accessible grâce à l'Instruction de Vajrayoginī (S. Vajrayoginyupadeśa) qu'il "réussira dès cette vie-ci". "Ayant énoncé l'Instruction (S. upadeśa), le Saint (S. Bhaṭṭāraka) disparut."
Nous retrouvons ici un point essentiel de la théorie d'Advayavajra. Selon lui, en accédant au corps qualitatif (dharmakāya) ou corps absolu, les corps formels se produiront spontanément à partir de celui-ci. L'activité éveillée se déroule spontanément et ne peut être créée d'aucune façon.
Ci-après la traduction de Sylvain Lévi telle quelle était publiée. J'ai ajouté certains termes techniques en sanscrite entre parenthèses et j'ai créé des paragraphes pour plus de confort et de clarté.
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Or ici-bas, dans la Contrée du Milieu, il y a une grande ville appelée " Kapilavastu des Lotus " ; tout près, il y a une bourgade du nom de Jhāṭakaraṇī. En cet endroit réside un brahmane nommé Nānukā et sa femme de caste brahmanique nommée Sādhvī. Dans le cours du temps ils eurent un fils appelé Dāmodara. Quand le garçon eut environ onze ans, et qu'il connut la moitié du Sāmaveda, il quitta sa famille et devint ascète ekadaṇḍa sous le nom de Martabodha (?).
Ensuite il apprit la grammaire de Pānini ; au bout de sept ans il possédait tout sāstra. Pendant vingt ans il apprit chez le vénérable Nāro les traités de logique, de philosophie Mādhyamika (?), du Pāramitānaya etc. Ensuite il demeura cinq ans avec Rāga vajra qui connaissait les textes du Mantranaya. Après cela il s'attacha pendant un an au vénérable et saint maître Ratnākaraśānti pour apprendre l'état d'esprit du sans-Morphème (nirākāravyavasthāṁ particularité du nirākāra). Puis il se rendit à Vikramaśīla près du grand savant Jnānaśrīmitra pour étudier son traité pendant deux ans.
De là il partit à Vikramapura où il devint moine sous le nom de Maitrīgupta dans l'école Sammatīya . Il étudia les Trois Corbeilles du Sûtra, de l'Abhidharma, du Vinaya pendant quatre (ans) ; il pratiqua la récitation murmurée des Formules (mantrajapaṁ) selon la tradition de Pañcakrama-Tārā , et cela dix millions de fois, avec le sens des quatre sceaux (caturmudrārthasa hitena: mahā°, samaya°, dharma°, karma°).
La Sainte (Tara/Vajravarahi?) lui dit en songe : Va-t-en à Khasarpana. Il quitta son couvent, alla à Khasarpana, y resta un an. Et de nouveau la voix lui dit en songe : Va-t-en, fils de la Famille, dans le Dekkhan, où sont les deux montagnes Manobhaṅga et Cittaviśrāma, c'est là que demeure le prince des Śavara. Il te traitera avec faveur. Et là le nommé Sāgara te rencontrera sur ta route. Ce prince de sang royal habite maintenant le pays de Rāṭa (Rāḍha = Rarh) ; marche en compagnie avec lui.
Il partit, rencontra Sāgara, et tant qu'il fut dans le Pays du Nord, il ne put rien savoir du Manobhaṅga et du Cittaviśrāma. Il alla à Śrī Dhānya(kaṭaka), y resta un an ; ensuite dans la région Nord du Nord-Ouest il se mit à évoquer la Tārā du lieu (?). Au bout d'un mois il eut un songe : Va-t-en, fils de la Famille ; dans le pays au Nord-Ouest il y a les deux montagnes accolées ; on y arrive en quinze jours.
Sur l'indication de la Sainte il part vers le pays du Nord-Ouest avec des ... ; au bout de la route ils rencontrent un homme qui leur dit : Demain vous atteindrez le Manobhaṅga et le Cittaviśrāma ; vous y aurez un heureux séjour. À l'entendre, le docteur fut très content, et le lendemain il était arrivé. Sur la montagne il faisait tous les jours dix dizaines de Cercles ; il commença par se nourrir de bulbes, de racines, de fruits ; au bout de dix jours, il s'installa sur le plat d'un rocher et l'esprit unifié il se mit à observer le jeûne.
Le septième jour il a une vision en songe. Le dixième jour, il se mettait à se trancher le cou quand il eut soudain la vision directe (sākṣāddarśana) ; il lui rend hommage. Advayavajra . . . pendant douze jours fit le commentaire merveilleux des quatre Sceaux du Pañcakrama (Pañcakramacaturmudrādivyākhyānaṁ), et puis encore pendant cinq jours l'Instruction (upadeśa) . Il joua de la vīnā en prenant pour modèle tous les Dharmas.
Padmāvalī. . . Jnànāvalī. . . sur l'ordre du prince des Śavaras, montra l'illusion de l'attentat à la vie etc. À ce moment Sāgara fait voir l'Arrangement du corps (kāyavyūhaṁ). Le docteur lui dit : Très Saint, comment se fait-il que je ne puisse pas, moi, agencer magiquement (nirmapitum) l'Arrangement du corps ? Le prince des Śavaras lui dit : C'est à cause de l'Imagination différenciée (S. vikalpasambhūtatvāt). Le docteur lui dit : Alors que dois-je faire ? Que votre Révérence me donne ses ordres (jñāpayantu) ! Le souverain des Śavaras lui dit : Tu y réussiras dès cette vie-ci ; fais la clarté de la vision sur le nom (S. darśanāprakāśanāṁ). Advayavajra dit : Très Saint (Bhagavan), je suis incapable de le faire ; comment le ferai-je ? Il [Śavareśvara] lui dit : Tu le feras ici même grāce à l'Instruction de Vajrayoginī (S. Vajrayoginyupadeśāt), et le fruit en fructifiera.
Ayant énoncé l'Instruction (Supadeśa), le Saint (Bhaṭṭāraka) disparut.
Ce n'est pas un animal des bois ni un petit de sanglier ;Tel est, dans l'Amanasikāra, l'ordre de succession (kramaḥ) tel qu'il a été entendu.
C'est une belle des bois qui est là avec son visage de pleine lune
Grāce aux agencements magiques (nirmāṇanirmitata) agencés pour rendre service à celui qui en a besoin,
(Elle) se tient sur le rocher (en prenant la forme d'un) prince des Śavaras (Śavarādhirāja).
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Texte en sanskrit romanisé
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