Les histoires de la vie du Bouddha s’appuient souvent sur les Actes du Bouddha (Buddhacaritam), composé par Aśvaghoṣa au début du IIème siècle après JC. Elles donnent une idée de la quantité des chercheurs spirituels et de la diversité de leurs méthodes, à l’époque du Bouddha.
Le Vinaya raconte la rencontre entre Uruvela-Kassapa, l’ainé des frères Kāśyapa, et le Bouddha. Uruvela-Kassapa pratiqua l’Atharveda, le dernier des quatre Vedas, qui fut inclus en dernier.
Le nom Atharveda vient d’une famille de brāhmanes védiques du nom d’Arthavan (ātabbaṇa en pāli). Ce sont leurs descendants, les Atharvāngirasas, qui auraient collectés ou écrits les 731 hymnes de l’Atharveda. Ceux-ci comportent des « anciennes incantations et chants d’inspiration populaire, entrecoupés de formules magiques et de prières ».[1] Ou encore des « cérémonies expiatoires, malédictions, incantations nuptiales ou mortuaires remontant aux plus anciens prêtres indiens, les Atharvans. »[2] Cette famille de prêtres a sa contrepartie en l’iranien ancien aθauruuan ou āθravan[3]. Les deux termes sont l’évolution de la forme indo-iranienne « atharuan », qui signifie « doté d’athar », le sens du mot athar étant contesté[4]. Dans le Yasna Hapta-hâti on trouve une allusion au retour des prêtres « qui s’en vont loin pour chercher la rectitude dans d’autres pays »[5], des prosélytes en quelque sorte, des missionnaires zoroastriens, des mages…[6]. Voir le blog de Jayarava pour ses pensées à ce sujet.
Quoi qu’il en soit, selon le Vinaya, les disciples des frères Kassapa, les Jaṭila, pratiquaient un culte du feu, dans une enceinte sacrée. Quand le Bouddha demanda à y passer la nuit, Uruvela-Kassapa refusa, craignant que le Bouddha ne soit tué par le serpent-dragon (nāga) gardien de l’enceinte. Le Bouddha y passa la nuit en combattant le "feu" du serpent avec son propre "feu". Le Bouddha montra ensuite par une série de miracles sa supériorité en la matière sur Uruvela-Kassapa, qui se soumit au Bouddha et devint son disciple, ensemble avec ses propres disciples et ceux de ses frères. Tout comme la chaleur du serpent fut soumis par la chaleur du Bouddha, la magie d’Uruvela-Kassapa fut soumis par les pouvoirs du Bouddha. L’enseignement qu’il leur destina était le Discours sur le feu.
Le Bouddha se saisit des croyances de son époque pour les utiliser comme des métaphores etc. au service de son propre enseignement. Prendre ces métaphores au premier degré serait une erreur.
Il demanda plu tard à Uruvela-Kassapa quelle connaissance lui avait fait renoncer à son ascèse et à son feu sacré, et Uruvela-Kassapa répondit que les sacrifices parlent de choses visibles et audibles, de saveurs, de plaisirs, de femmes et que tout ce qui appartient au devenir est comme un déchet, et qu’il n’arrivait plus à trouver plaisir en les sacrifices et les offrandes.[7] Le Bouddha lui demanda ensuite que, s’il ne trouva plus plaisir en les choses visibles et audibles, ni en les saveurs, qui appartiennent au monde des humains ou des dieux, de quoi sa pensée se délecta désormais. Uruvela-Kassapa répondit qu’il avait vu l’état de quiétude (nirvāṇa) dans lequel les fondements (upadhi) du devenir et les obstacles au perfectionnement (kiñkana) ont cessé, qui est libre d’attachement à l’existence sensorielle, et qui ne peut changer en un autre état, ni conduire à un autre état. C’est pour cette raison qu’il ne prenait plus plaisir en les sacrifices et les offrandes.[8]
L’essentiel n’est pas que les sacrifices, les offrandes etc. soient efficaces, et leur bénéfices réels, mais que la méthode du Bouddha n’a que faire d’elles pour arriver à sa fin. De même, pour le karma et la renaissance. Qu’ils soient réels, conformément à leurs définitions, ou non, importe peu au Bouddha. L’état de quiétude n’a pas de lien avec eux, et n'en est pas le résultat.
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[1] Louis Frédéric, Dictionnaire de la civilisation indienne.
[2] Dictionnaire de la sagesse orientale, Robert Laffont
[3] Source
[4] Hintze, Almut. (2015) Zarathustra’s Time and Homeland: Linguistic Perspectives.
[5] Source
[6] In due course, by their endeavors, Zoroastrianism, first established in eastern Iran, reached western Iran also, to be adopted there by the hereditary priests of the Medes and the Persians, known to the Greco-Roman world as the “magi.” Accordingly under the Achaemenids the standard word in western Iran for a Zoroastrian priest came to be magu. Under the Parthians, who represented an eastern tradition, an old Avestan term, aēθrapati, meaning apparently a learned priest or teacher, seems to have been widely used, in the form ērbed (ēhrbed), as an honorific for a leading priest, side by side with Middle Persian magbed (mogbed) “chief priest;” and these two words, in their later forms of hērbad/ērvad and mōbad, survive as the titles of Zoroastrian priests today.
[7] Vinaya Texts, T.W. Rhys Davids, Hermann Oldenberg Editor : Max Muller. What knowledge have you gained, O inhabitant of Uruvelâ, that has induced you, who were renowned for your penances1, to forsake your sacred fire? I ask you, Kassapa, this question: How is it that your fire sacrifice has become deserted?'
(Kassapa replied): ‘ It is visible things and sounds, and also tastes, pleasures and woman that the sacrifices speak of *; because I understood that whatever belongs to existence is filth, therefore I took no more delight in sacrifices and offerings.
[8] But if your mind, Kassapa (said the Blessed One), found there no more delight,—either in visible things, or sounds, or tastes,—what is it in the world of men or gods in which your mind, Kassapa, now finds delight? Tell me that.’
(Kassapa replied): ‘I have seen the State of peace (i. e. Nirvāṇa) in which the basis of existence (upadhi) and the obstacles to perfection (kiñkana) have ceased, which is free from attachaient to sensual existence, which cannot pass over into another State, which cannot be led to another State ; therefore I took no more delight in sacrifices and offerings.’
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