lundi 23 juin 2025

Ce Sahaja que l'on ne peut traduire, dire, chanter...

Naissance de la "co-émergence" dans The Royal Song of Saraha 

Au départ, le mot sahaja, composé de “saha”, avec[1], et ”ja” naître[2], porte le sens de “inné, naturel, de naissance” ; de façon ordinaire, non-théologique. Sahaja décrit fondamentalement quelque chose d'« acquis à la naissance », « par la naissance » ou « par la nature ». Le terme s'étend pour signifier « congénital », « inné », « héréditaire », « originel » et « naturel ». Il véhicule également l'idée de « spontané » ou « facile », dans le sens de quelque chose qui vient naturellement.

L'utilisation la plus ancienne attestée de sahaja en tant que composé “saha-ja”, en particulier dans un contexte spirituel, est très probablement le fait des bouddhistes, nommé Sahajiyā (dérivé de sahaja) au 20ème siècle. Le mouvement dit "Sahajiyā" aurait émergé au Bengale (Inde orientale) entre le VIIIe et le Xe siècle de notre ère. Des yogis, nommés des siddhas “Sahajiyā”, ont exprimé leurs expériences dans des chants et des dohās (distiques), ainsi que des cāryas (chants courts, Caryāgīti[3] t. spyod pa’i glu[4]) rédigés en langues Apabhraṃśa et en vieux bengali (des “folk-songs” selon Kvaerne, p. 8). S’il fallait faire une distinction entre les chants de type “Dohā” et de type “Caryāgīti”, je dirais que les premiers n’ont pas d’orthodoxie définie, tandis que les “Caryāgīti”, comme le nom cārya (observance) l’indique, s’inscrivent clairement dans une orthodoxie davantage codée, en dépit de leur “transgressivité” bien encadrée.

Dans sa traduction des Caryāgīti (1996) justement, Kvaerne justifie son choix[5] pour la traduction “co-émergence”, déjà utilisée par Herbert v. Guenther (1969[6]). Il reprend cette explication dans son article On The Concept of Sahaja in Indian Buddhist Tantric Literature (Temenos XI (1975). Je le reprend intégralement, car cette traduction semble devenue universelle.
I shall repeat here his explanation: “The literal translation of the Tibetan term [han-cig skyes-pa (Sanskrit sahaja) would be “co-émergence” ... Essentially it refers to the spontaneity and totality of the experience in which the opposites such as transcendence and immanence, subject and object, the noumenal and phenomenal indivisibly blend”. - I still believe that Guenther has succeeded in giving a correct description of the implications of the term sahaja. However, his translation must, I think, be modified to “co-emergent”. i.e. to an adjective, as I doubt whether sahaja is ever used - as far as Buddhist tantric texts are concerned - as a noun, except as short-hand for sahajānanda, sahajajñāna etc., terms which will be discussed below. For the moment I shall limit myself to saying that I believe that “simultaneously-arisen” or the like is the most suitable translation, and (anticipating my conclusions) that the term sahaja is basically connected with the tantric ritual of consecration where it refers to the relation between the ultimate and the preliminary Joys.[7]
Sahaja signifie désormais “la spontanéité et la totalité de l'expérience dans laquelle les opposés tels que la transcendance et l'immanence, le sujet et l'objet, le nouménal et le phénoménal se fondent indivisiblement”. Si cette définition est en effet basé sur Le trésor royal du mahāmudrā (phyag chen gan mdzod, fols 29a etc.), elle doit correspondre à la définition tantrique du mahāmudrā (aux quatre mudrā) de Padma Karpo (1527–1592), qui à cet endroit fait directement suite à son résumé des attaques de Sakya Paṇḍita (1182-1251)[8], pour montrer que oui notre mahāmudrā est tantrique aussi.

Le Hevajra Tantra[9] donnerait une définition plus simple du Sahaja :
« Tous les êtres sont depuis toujours vides
Vide de toute cause et condition : non conditionnés
Mais ce qui contrairement à ceux-là n'a ni naissance ni mort
Est appelé " le Naturel"
.[10] »
Si l’on lit cependant la Démonstration du Naturel (Sahajasiddhi) attribuée à Indrabhūti, et son commentaire le Guide du Naturel (Sahajasiddhipaddhati)[11], attribué à Lakṣmīṅkarā, la “co-émergence” -- le mahāmudrā aux quatre mudrās --, tel que définie par Padma Karpo, redéfini par H.v. Guenther, et adoptée par Per Kvaerne et d’autres, passerait au contraire pour du “non-Naturel”… Les textes sur le Naturel (sahaja) proposent un rejet explicite et détaillé des pratiques yoguiques, rituelles et ascétiques conventionnelles, les qualifiant d'"artificielles", "imaginées", "mensongères" ou "nuisibles". Ces pratiques, bien qu'elles puissent produire des visions ou des pouvoirs (siddhi), ne conduisent pas au véritable Naturel car elles sont basées sur l'effort et la conceptualisation.
38. La réintégration des bindu subtils
Est concrétisée par certains à travers une pratique
La méditation est ce qui existe en tant qu'objet de la méditation
Mais cela ne peut pas être appelé Naturel.

39. La goutte (scr. bindu) au centre du bhaga
Est concrétisée par certains à travers une pratique
Ce sont des états comportant des représentations
Mais cela ne peut pas être appelé Naturel.

40. La méditation au centre du Coeur
Est cultivée par ceux qui professent un mental
Ce sont des états sujets à l’imagination
Mais cela ne peut pas être appelé Naturel
.[12]
Il semblerait donc qu’au XIème siècle “le Naturel” tout comme la Nature naturante n’a ni naissance ni mort, et que Mère Nature (en tant que la Pensée/Intention du Père) est désormais icônisable en la Mère Vajrayoginī etc., éventuellement en union avec un Père Heruka ou Bouddha cosmique. La traduction “co-émergence” rend parfaitement compte de ce développement-là.

Au départ, le sahaja désigne ce qui est acquis par naissance, la naissance physique (jāti). Un frère “du même sang”, du même âge ou un jumeau peut également être appelé “sahaja”. Ronald M. Davidson (2002)[13] donne d’autres exemples, qui incluent également des dispositions ou des qualitées innées en fonction des astres, du karma, du mérite, etc.

Dans la Bhagavad-Gītā (18.48), sahaja karma (le devoir ou comportement inné/naturel, souvent lié à la caste) ne doit pas être abandonné malgré ses défauts. Dans le Raghuvamśa de Kālidāsa (8.43), la "nature courageuse" (sahajām... dhīratām) est décrite comme innée. Le Nītisāra de Kāmandaka (7e-8e siècle) distingue les ennemis "naturels" (sahajah), c'est-à-dire "nés dans sa propre famille", des ennemis opportunistes. Davidson conclut que la majorité des emplois de sahaja avant le bouddhisme ésotérique se réfèrent à ce qui est "congénital", souvent avec des qualités positives acquises par des efforts dans des vies antérieures (Davidson, 2002). Nous parlerions plutôt de facteurs physiques, individuels, familiaux, sociaux, etc. pour expliquer les différences.

Avec l’évolution yogācārine et ésotérique, la nature de la réalité de lanaissance (au milieu de liquides corporels) évolue, et devient une simple pensée, représentation, illusion, etc., jusqu’à devenir une émergence de la “vacuité lumineuse” ou de la gnose primordiale. Le terme “co-émergence” reflète bien cette nouvelle réalité théologique. Il ne s’agit pas d’une évolution linéaire, mais souvent de plusieurs filières en des stades d’évolution différents, s’influençant les unes les autres.

S.B. Dasgupta[14] et d’autres avaient inventé des noms de nouveaux véhicules (Kālacakrayāna, Sahajayāna) en plus du Vajrayāna, qui n’ont pas de réalité historique, mais qui pourraient indiquer les tendances “lourdes” du Vajrayāna. Par exemple, le Vajrayāna serait associé plus spécifiquement au cultes de dieux dans leur ensemble, services aux laïcs y compris, donc notamment la phase de génération (utpannakrama), le Kālacakrayāna (monastique) à la phase d’achèvement (saṃpannakrama) avec caractéristiques (t. mtshan bcas rdzogs rim, ≈ kāyasādhana), et le Sahajayāna (yoguique) la phase d’achèvement sans caractéristiques (t. mtshan med rdzogs rim). On pourrait y ajouter encore un Sahajayāna radical (Dohākośagīti, Sahajasiddhi de Lakṣmīṅkarā). Radical, car le Guide du Naturel (Sahajasiddhi-paddhati) semble être en dialogue avec l’Advayasiddhi[15] également attribué à Lakṣmīṅkarā, que l’on pourrait qualifié de Sahajayāna yoguique, et de la Démonstration du Naturel, attribué à Ḍombi Heruka (dPal lhan cig skyes grub pa, D2223, qui s'appuie sur le Hevajra Tantra), dont il rejette jusqu’aux pratiques yoguiques.

Saraha, et notamment son Dohākośagīti semble alors en phase avec un Sahajayāna radical, tout comme d’ailleurs la Démonstration du Naturel (Sahajasiddhi) attribuée à Indrabhūti, et son commentaire, le Guide du Naturel (Sahajasiddhipaddhati), attribué à Lakṣmīṅkarā. Quelques caractéristiques communs du Sahajayāna radical pourraient être :
Le Naturel est sans méthode et toujours présent
Rejet des pratiques "artificielles"
“Non-méthode" et "non-méditation"
Le Naturel comme gnose naturelle : Le Naturel est "la gnose universelle qui se discerne elle-même"
Critique du ritualisme excessif et de la scolastique
Mais Saraha n’est pas seulement l’auteur du Dohākośagīti. D’autres Dohākoṣa (trilogie) et écrits davantage vajrayāniques lui sont attribués. Il est notamment l’auteur du commentaire créatif du "scandaleux" Buddhakapāla-yogini-tantra-raja[16]. Le point de divergence entre le “Saraha” de la tradition et le Sahajasiddhi d’Indrabhūti, semble être le refus des pratiques transgressives, non parce qu'elles sont transgressives, mais parce qu’elles sont justement des “pratiques”, des efforts, motivés par craintes et espoirs, et qu'elles ne sont pas naturelles, faciles...
Le Naturel n’a pas de méthode et est naturellement présent pour tous. Il ne se pratique pas à l’aide d’une méthode (scr. sādhana). Sinon ce serait comme si des enfants « deviendraient vieux en pratiquant la vieillesse», au lieu de vieillir naturellement.
« Les enfants [ont beau pratiquer] la vieillesse etc. pendant longtemps,
Ils n'y arriveront pas par l'effort.
 [30, 3-4]»
Les résultats auxquels on arrive en intervenant sur les causes ne dureront pas, parce qu’ils ont été obtenus par l’effort et non naturellement. Il en va de même pour les pratiques graduelles (scr. krama).
« Tout ce en quoi croit le sādhaka
Est réalisé avec beaucoup d'effort
Mais cela ne peut pas être appelé Naturel.
» (Guide du Naturel, p. 67)
Le Sahajasiddhi rejette donc aussi les pratiques de la phase d’achèvement avec caractéristiques (≈ kāyasādhana), qui interviennent sur le corps subtil et énergétique, ou si l’on veut le “Kālacakrayāna”. Ce qui est également le cas pour le Saraha du Dohākośagīti commenté par Advaya-Avadhūtipa[17]. En revanche, le Saraha commenté par Mokṣākaragupta (Dohākoṣapañjikā D 2258, P 3103) ne rejette pas les pratiques de la phase d’achèvement dite avec caractéristiques et peut être qualifié de“Kālacakrayāna”. Le commentaire par Advayavajra “le Newar” (Dohākoṣapañjikā Tōh. no. 2256) critique toutes les formes de bouddhisme traditionnel, y compris certaines formes de tantra institutionnalisées de son époque, suggérant que la réalisation directe du “Co-émergent” va au-delà du concept même du bouddhisme[18].

Les dohā et cāryagīti ont également été l’expression d’une liberté religieuse, celle de la vie réelle vécue comme religion, parmi ceux que SB Dasgupta (et d’autres) nomme les Vaiṣṇava Sahajiyā, les Bâuls (musiciens itinérants du Bengale), qui ne vivent pas le Sahaj comme “le co-émergant”.
"Nous suivons la voie sahaj (simple)[19] et ne laissons donc aucune trace derrière nous. Les bateaux qui naviguent sur la rivière en crue laissent-ils une marque ? Tous les cours d'eau qui se jettent dans le Gange deviennent le Gange. Ainsi devons-nous nous perdre dans le courant commun, sinon il cessera d'être vivant[20]" (Sen 1931 : 213-14)
Mais aussi dans les dohās et “pads” (pāda) de “Sants” tel Kabīr (1440-1518) et Raidas/Ravidas (1267-1337).
Que chanterai-je ? Il n'y a rien que je puisse chanter -
Je chante la beauté du sahaj.

refrain

Il n'y a pas de ciel, pas de montagne, pas de terre, pas de corps empli de souffle, pas de lune, pas de Rām, pas de Krishna, pas de qualités (guṇ), frère, quand la spontanéité parle.
Il n'y a pas de Védas, pas d'écritures, pas de Coran, dans le sahaj śūnya, frère.
Il n'y a pas de "Je" ou de "Tu", pas de "Tu" ou de "Je", à qui puis-je dire cela ?
Raidās dit, que chanterai-je ?
Chantant, chantant je suis vaincu.
Combien de temps vais-je considérer et proclamer : absorbe le soi dans le Soi ?
[21]
Et dans le Gitanjali d’un prix Nobel de littérature, Rabindranath Tagore (1861-1941), traduit en français par André Gide (LOffrande lyrique, 1912).
Quitte ton chapelet, laisse ton chant, tes psalmodies ! Qui crois-tu honorer dans ce sombre coin solitaire d’un temple dont toutes les portes sont fermées ? Ouvre les yeux et vois que ton Dieu n’est pas devant toi.

Il est là où le laboureur laboure le sol dur ; et au bord du sentier où peine le casseur de pierres. Il est avec eux dans le soleil et dans l’averse ; son vêtement est couvert de poussière. Dépouille ton manteau pieux ; pareil à Lui, descends aussi dans la poussière !

Délivrance ? Où prétends-tu trouver délivrance ? Notre Maître ne s’est-il pas joyeusement chargé lui-même des liens de la création ; il s’est attaché avec nous pour toujours.

Sors de tes méditations et laisse de côté tes fleurs et ton encens ! Tes vêtements se déchirent et se souillent, qu’importe ? Va le joindre et tiens-toi prés de lui dans le labeur et la sueur de ton front
[22]. “
On pourrait encore traduire (ou surtraduire) Sahaja par l’immanent, mais cela évoquerait aussitôt -- par co-émergence -- le transcendant. Un trop vieux couple, qui fait se détourner les yeux de la beauté du sahaj. 

Deux vers (pāda) de Kabīr, pour la route.
"Le paradis et l'enfer sont pour les ignorants, pas pour ceux qui connaissent Hari.
La chose effrayante que tout le monde craint, je ne la crains pas.
Je ne suis pas troublé par le péché et la pureté, le paradis et l'enfer.
Kabir dit, chercheurs, écoutez :
Où que vous soyez, c'est le point d'entrée
."*

"Fais de ton cœur La Mecque 
et de ton corps la Ka'aba.
Fais de la conscience
son gourou primordial.
"**

***

[1] En tant que préfixe inséparable, “saha” exprime des notions de « jonction », de « conjonction », de « possession », de « similarité » ou d'« égalité ». Lorsqu'il est combiné à des noms pour former des adjectifs et des adverbes, saha peut être traduit par « avec », « ensemble avec », « accompagné de », « ayant », « possédant » ou « ayant le même ». Monier-Williams Sanskrit-English Dictionary, 1899

[2] P.e. kulaja (« né dans une famille »), jalaja (« né dans l'eau », comme le lotus), et aṇḍaja (« né d'un œuf »)

[3] Traduit en anglais par Per Kvaerne, An Anthology of Buddhist Tantric Songs: A Study of the Caryāgīti, White Orchid Press, Bangkok, 1996.

[4] Il existe un commentaire par Munidatta dont la traduction tibétaine (par Grags pa rgyal mtshan) porte le titre sPyod pa’i glu’i mjod kyi ‘grel ba, qui contient les vers-racine commentés. Selon Kvaerne, la plupart des chants datent du 11ème siècle (p.7).

[5] Per Kvaerne
Sahaja literally signifies “being bom (-ja) together with (saha-)". The Tibetan Ihan-cig skyes-pa, followed by the Mongolian qamtu toriigsen, faithfully renders this. Frequently this basic meaning is expanded to include “congenital, innate, hereditary, original’’, hence also “natural”. Translations of sahaja have tended to be based on these derived senses; thus, to quote but two examples, Shahidullah rendered it “I’lnne” followed by Snellgrove “the Innate”’. While this translation is etymologically sound, and doubtlessly expresses an important aspect of sahaja, it nevertheless has the disadvantage of suggesting that sahaja is purely subjective or in some sense individual, that it is something like a hidden “divine spark” in the depths of man. Such at least are the associations which would seem most readily to present themselves. M. Eliade has suggested another translation, “Ie non-conditionne”6; while certainly correct as far as it goes, this, too, is unsatisfactory as it seems to lay exclusive stress on the transcendent nature of sahaja."
[6] H. Guenther, The Royal Song of Saraha. A Study in the History of Buddhist Thought, Seattle 1969, p.9 n.14. (voir illustration plus haut)
The literal translation of the Tibetan term Ihan-cig skyes-pa (Sanskrit sahaja) would be “coemergence,” and as such it is explained by Padma dkar-po, Phyag-chen gan-mdzod. . fols. 29a ff. Essentially it refers to the spontaneity and totality of the experience in which the opposites such as transcendence and immanence, subject and object, the noumenal and the phenomenal indivisibly blend. The translation of this term by “ I’ Innt” (M. Shahidullah) and “ the Innate ” (D. L. Snellgrove) is wrong.
La source pour la décision de Guenther est donc le “Phyag-chen gan-mdzod” (phyag rgya chen po'i man ngag gi bshad sbyar rgyal ba'i gan mdzod) de Kunkhyen Pema Karpo (1527–1592), soit une définition datant du 16ème siècle.

[7] trad auto FR
« Je répéterai ici son explication : "La traduction littérale du terme tibétain [han-cig skyes-pa (sanskrit sahaja)] serait 'co-émergence'... Essentiellement, il se réfère à la spontanéité et à la totalité de l'expérience dans laquelle les opposés tels que transcendance et immanence, sujet et objet, nouménal et phénoménal se fondent indivisiblement". - Je crois encore que Guenther a réussi à donner une description correcte des implications du terme sahaja. Cependant, sa traduction doit, je pense, être modifiée en "co-émergent", c'est-à-dire en adjectif, car je doute que sahaja soit jamais utilisé - en ce qui concerne les textes tantriques bouddhistes - comme nom, sauf comme abréviation pour sahajānanda, sahajajñāna etc., termes qui seront discutés ci-dessous. Pour le moment, je me limiterai à dire que je crois que "simultanément-surgi" ou quelque chose de semblable est la traduction la plus appropriée, et (anticipant mes conclusions) que le terme sahaja est fondamentalement lié au rituel tantrique de consécration où il se réfère à la relation entre les Joies ultimes et préliminaires. »
[8]Certains méditent sur le Mahāmudrā, mais ils ne font que méditer sur une idée imaginaire. Ils ne comprennent pas que le Mahāmudrā est la gnose (jñāna) qui naît des deux phases. La méditation Mahāmudrā de ces sots est dite être principalement la cause de renaître en tant qu'animal. Sinon, ils renaîtront dans le domaine sans forme, ou tomberont dans la cessation des naissance des śrāvakas. Même s'ils méditent bien, cela ne transcenderait pas la méditation Madhyamaka. Bien que la méditation Madhyamaka soit excellente, elle est très difficile à accomplir. Tant que les deux phases ne sont pas perfectionnées, une telle méditation ne peut aboutir, et le perfectionnement des deux phases est dit nécessiter des éons innombrables.

sDom gsum rab dbye :
“phyag rgya chen po bsgom na yang/ /rtog pa kha ‘tshom nyid bsgom gyi/ /rim gnyis las byung ye shes la/ /phyag rgya chen por mi shes so/ /blun po phyag rgya che bsgom pa/ /phal cher dud ‘gro’i rgyu ru gsungs/ /min na gzugs med khams su skye/ /yang na nyan thos ‘gog par ltung/ /gal te de ni bsgom legs kyang/ /dbu ma’i bsgom las lhag pa med/ /dbu ma’i bsgom de bzang mod kyi/ /’on kyang ‘grub pa shin tu dka’/ /ji srid tshogs gnyis ma rdzogs pa/ /de srid bsgom de mthar mi phyin/ /’di yi tshogs gnyis rdzogs pa la/ /bskal pa grangs med dgos par gsungs.”
[9] ‘bum phrag lnga pa’i kye’i rdo rje’i rgyud

[10] Cité dans le Sahajasiddhi-paddhati.
Lus can 'di dag thams cad ni//
'di nyid kyis ni dbugs 'byin zhing*//
dngos med gzhi las skyed par byed//
de 'dir lhan cig skyes pa yin//. 
[11] Traduits au au XIe siècle par le traducteur tibétain Dro Shérab Drak (alias Prajñākīrti) et le pandit cachemirien (brahmane) Somanātha.

[12] Joy Vriens, Sahajasiddhi-paddhati, le Guide du Naturel, Yogi-Ling, 2017
38. pha mo'i thig le'i rnal 'byor ni// kha cig sgrub pos sgrub par byed//bsam gtan bsam byar gang yod pa//de ni lhan cig skyes b.rod min//

39. b+ha ga'i nang gnas thig le ni// kha cig sgrub pos sgrub par byed// de ni rtog bcas go 'phang skye// de ni lhan cig skyes b.rod min//

40. sing ga'i dbus su bsam gtan ni// yid 'dod rnams kis som par byed// de ni rtog bcas go 'phang skye// de ni lhan cig skyes b.rod min//
[13] Ronald M. Davidson, Reframing sahaja: Genre, representation, ritual and lineage, Journal of Indian Philosophy, 2002

[14] Dasgupta, Shashi Bhushan (1946). Obscure Religous Cults As Background of Bengali Literature. Calcutta: University of Calcutta Press. Rev. edn., 1962. digitallibraryindia; JaiGyan

[15] gNyis su med par grub pa’i sgrub thabs zhes bya ba (phyag chen rgya gzhung, D2220)

[16] Résumé de la description très vivante de Ron Davidson

Le Buddhakapāla se distingue par son scénario d'ouverture "scandaleux", qui narre sa propre prédication et sa source spirituelle d'une manière conçue pour choquer le lecteur. Le récit débute avec le Bhagavan (le Bouddha) qui entre dans le nirvāṇa dans le lotus (vagin) de sa consort. Cette scène étonne les bodhisattvas et les yoginīs. Vajrapani demande alors à la yoginī Citrasena comment les êtres de moindre mérite peuvent atteindre le pouvoir (śaktyārohaṇopāya).

Le texte décrit différentes méthodes pour atteindre rapidement la siddhi par la récitation de mantras, en fonction du mérite de l'individu. Il souligne que la récitation sans les émotions appropriées ne confère aucun pouvoir. Citrasena, "enragée et féroce" mais "pleine de compassion", détruit l'armée de Māra en regardant le Bouddha décédé. Suite à cela, la tête du Bouddha s'ouvre, libérant un mantra qui descend et réduit en poussière les Nāgas du septième niveau, puis remonte dans la bouche de Citrasena avant de ressortir de son vagin pour retourner au crâne du Bouddha. Terrifiés, les grands serpents magiques, dont Vasuki, se soumettent à Citrasena. Le crâne du Bouddha s'ouvre alors pour révéler un texte, et Citrasena est invitée à prendre le livre du Buddhakapāla, présenté comme un roi des tantras et supérieur aux autres yoginī-tantras, bénéfique pour tous les êtres. Citrasena confie ensuite le texte à Vajrapāṇi. (Esoteric Buddhism, 2002, p. 247 etc.

[17] Dohākoṣahṛdayārthagītāṭīkā (Do ha mdzod kyi snying po don gi glu'i 'grel pa D2268, P3120)

[18] Klaus-Dieter Mathes & Péter-Dániel Szántó, Saraha's Spontaneous Songs: With the Commentaries by Advayavajra and Moksakaragupta, Wisdom Publications, 2024.
In sum, Advayavajra is extremely critical of all forms of traditional Buddhism, and that includes certain forms of tantra, which had already been institutionalized by his time. It thus seems that for Advayavajra the direct realization of the coemergent, the recurring topic in Saraha’s collection of songs, is even beyond the very concept of Buddhism. Mokṣākaragupta, on the other hand, does not read into any of Saraha’s verses a refutation of Buddhist or any other systems of philosophy.
[19] Dictionnaire Biswas, Sailendra. 2004. Samsada Bangala Abhidhana, en ligne
“1) সহজ sahaja (p. 999)
সহজ sahaja a. inborn, innate, instinctive; natural, inherent; easy, not difficult or strenuous, simple; easily understood, plain; not crooked or tough, simple, plain (সহজ লোক). ~গম্য a. easily accessible; (fig.) easy to understand. ~পাচ্য a. easily digestible; easy to digest.

2) সাহজিক sāhajika (p. 1010)
সাহজিক sāhajika a. natural; instinctive.”
[20] "We follow the sahaj (simple) way and so leave no trace behind us. Do the boats that sail over flooded river leave any mark? All the streams that flow into the Ganges become the Ganges. So must we lose ourselves in the common stream, else it will cease to be living" Kshiti Mohan Sen (1880 - 1960). Medieval Mysticism in India, reprint, Oriental Book, New Delhi ... F.E.Keay, Kabir and his Followers, Association Press, Calcutta, 1931
Cité dans Indian Religions, A Historical reader of Spiritual Expression and Experience, edited by Peter Heehs, Hurst & Company, London, 2002, p.298-299

[21]  Indian Religions, 2002, p. 370
"What shall I sing? There is nothing I can sing -I sing of the beauty of sahaj.

refrain

There is no heaven, no mountain, no earth, no body filled with breath, no moon, no Rām, no Krishna, no guṇs, brother, when spontaneity speaks.
There are no Vedas, no scriptures, no Koran, within the sahaj śūnya, brother.
There is no "I" or "You", no "You" or "I", whom can I tell this to?
Raidās says, what shall I sing?
Singing, singing I am defeated.
How long shall I consider and proclaim: absorb the self into the Self?
[22] Gitanjali, Rabindranath Tagore, Macmillan and Co, London, 1913, p. 8-9
LEAVE this chanting and singing and telling of beads! Whom dost thou worship in this lonely dark corner of a temple with doors all shut? Open thine eyes and see thy God is not before thee!

He is there where the tiller is tilling the hard ground and where the path-maker is breaking stones. He is with them in sun and in shower, and his garment is covered with dust. Put off thy holy mantle and even like him come down on the dusty soil!

Deliverance? Where is this deliver-ance to be found? Our master himself has joyfully taken upon him the bonds of creation; he is bound with us all for ever.

Come out of thy meditations and leave aside thy flowers and incense! What harm is there if thy clothes become tattered and stained? Meet him and stand by him in toil and in sweat of thy brow
.” 

* Heaven and hell are for the ignorant, not for those who know Hari.
The fearful thing that everyone fears, I don't fear.
I'm not confused about sin and purity, heaven and hell.
Kabir says, seekers, listen:
Wherever you are is the entry point. (Indian Religions, p. 365)

** Make your heart Mecca 
and your body the Ka'aba.
Make consciousness
its primal guru. (Indian Religions, p. 362)

 

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