mercredi 5 septembre 2018

Jeux d'ombres et de lumières


Le "raciologue" du Troisième Reich, Bruno Beger prend des mesures au Tibet
Le néoplatonisme se développe à Rome au IIIème siècle par Ammonios Saccas, maître de Plotin, et les élèves de ce dernier, Porphyre et Jamblique.
« Le néoplatonisme ou platonisme de l'Antiquité tardive tente de concilier la philosophie de Platon avec certains courants de la spiritualité orientale comme les Oracles chaldaïques, ainsi qu'avec d'autres écoles de la philosophie grecque, notamment celles de Pythagore et d'Aristote. » (Wikipédia)
L’intégration des spiritualités orientales, notamment les Oracles chaldaïques, (ré)introduit des éléments de Révélations dans ce qui avait plutôt commencé comme une philosophie (Blog).

Les Révélations sont comme le message du Ciel destiné à la Terre et introduisent des hiérarchies, dans le Ciel, entre le Ciel et la Terre, et sur la Terre. La verticalité est une caractéristique essentielle des hiérarchies et des Révélations. Le cours des astres - des dieux - influencerait le cours des choses la Terre et serait déterminant sur la vie des uns et des autres et sur leur caractère.

Pour connaître plus de détails, Penser au Moyen-Âge d’Alain de Libera, notamment les chapitres sur l’astrologie et sur Dante sont très intéressants et révélateurs. J’ai écrit sur les points de convergences de la théurgie et des tantras (La théurgie, un tantrisme occidental ?) et de la véritable période de melting pot (Les mystères du meltingpot hellénistique, au berceau des tantras), ainsi que sue les échanges entre Occident et Orient de manière générale (basé sur la recherche de Thomas McEvilley, auteur de Shape of Ancient Thought). En Occident comme en Orient, l’astrologie, l’alchimie et la magie (« héritage de l’hermétisme populaire dont les écrits les plus anciens remontent au IIIème siècle avant notre ère ») furent intégrées dans la philosophie et la religion, si elles n’en faisaient pas déjà partie.

Ce qui est particulièrement intéressant est l’idée que le Ciel, les astres, influence le caractère (vertu) d’un homme, et font qu’un homme soit plus ou moins noble, ou plus ou moins un « grand individu » (mahāpuruṣa). Ce caractère noble ou grand se retrouve même dans les caractéristiques d’un homme noble, forgées par le sperme des astres.
« Comment décrire la production, l’engendrement, d’un être humain ? Dante répond :
‘Je dis que quand l’humaine semence tombe dans son réceptacle, c’est-à-dire dans la matrice, elle y porte avec soi la vertu de l’âme générative, et la vertu du ciel et la vertu des éléments liés, c’est-à-dire la complexion ; et elle mûrit, disposant la matière aux influences de la vertu formative qu’apporta l’âme de l’engendrant ; et la vertu formative apprête les organes à la vertu célestiale qui, à partit de la puissance séminale, produit l’âme à la vie. Ladite âme aussitôt produite reçoit de la vertu du moteur du ciel l’intellect possible ; lequel en lui-même apporte en puissance toutes les formes universelles selon qu’elles sont dans son producteur et d’autant moins qu'il est plus éloigné de la première intelligence.’ » Penser au Moyen-Âge, p. 279.
Tournons-nous maintenant vers l’Orient et le bouddhisme aniconique et plutôt philosophique au départ. L’apport « théologique » du bouddhisme se loge plus particulièrement dans les théories sur ce qui est appelé le « corps symbolique » (sambhogakāya) du Bouddha. « Le Tathāgata ne peut être vu par son corps formel (rūpakāya) », « Celui qui me voit, voit le dhamma ; celui qui voit le dhamma me voit. » Le corps symbolique du Bouddha sera représenté et iconique. Ce corps sera celui d’un « grand individu » (mahāpuruṣa), voire d’un dieu, et doté de vertus particulières au nombre de 32.

Ces vertus ne sont pas une exclusivité du bouddhisme, aniconique et philosophique au départ. Sont-elles peut-être des emprunts ? La même série des 32 vertus est exposée avec richesse de détails dans le Brihat Samhita de Varāhamihira. Ce Varāhamihira vécut au VIème siècle et fut influencé par le Romaka Siddhanta ("Doctrine des Romains") et le Paulisa Siddhanta, le Siddhanta de Paul qui ne serait pas le Paul d’Alexandrie (c. 378 CE), mais un autre. Il n’est pas exclu que les vedas auraient influencé les Grecs et les Romains, qui auraient influencé en retour Varāhamihira et d’autres[1].

Le Brihat Samhita est un livre d’astrologie qui explique l’influence des astres sur la terre, les animaux, les hommes, les grands hommes (mahāpurusa), les signes fastes et néfastes etc. Le chapitre qui nous intéresse plus particulièrement est le chapitre sur les signes du grand homme (p.e. les rois, pas de grandes femmes, désolé, Aristote et Saint Thomas d’Aquin expliquent pourquoi), soit le chapitre LXIX (Signes des hommes p. 542, Signes des grands hommes p.567 ). Il y a néanmoins des chapitres (LXX) sur les qualités des vierges etc. qui ont sans doute servi à déterminer les caractéristiques d’une amante compatible (Kamasutra) ou d’une karmamudrā.

Les signes des hommes nous apprennent à reconnaître ceux qui ont les qualités d’un roi (carkavartin) ou d’un homme ordinaire, p.e. en regardant leur sexe. Ainsi, le sloka n° 7 apprend qu’un homme avec un petit pénis deviendra riche, mais sans issu ( ?) et qu’un homme avec un gros (stout) pénis sera pauvre. Un homme portant à gauche n’aura ni enfants ni fortune, tandis que celui portant à droite aura des fils. Celui dont le pénis pend plutôt vers le bas sera indigent, et un pénis avec des veines apparentes ne produira que peu d’enfants. Un pénis avec un gros bout est gage de bonheur, etc. etc. Le sloka n°7 explique qu’un pénis retracté dans un fourreau (comme un cheval) est le signe d’un roi et accessoirement d’un Bouddha[2]. Munissez-vous d’un petit miroir et faites nous savoir dans un commentaire s’il convient de vous féliciter ou non.

Ce qui est intéressant dans la partie concernant les cinq types de grands hommes, ce sont leurs vertus reçues d’astres ou de constellations spécifiques. Les 32 signes majeurs d’un Bouddha (ou d’un cakravartin) sont de telles vertus psychométriques et anthropométriques.

Selon ce type de théorie, le Bouddha était comme prédestiné pour devenir un Bouddha, comme un criminel pouvait être considéré destiné par ses qualités psychométriques et anthropométriques de devenir un criminel. Dante suit un raisonnement comparable de « généalogie d’ennoblissement ».
« Pensée à la fois biologiquement, psychologiquement et cosmologiquement, la connexion parfaite du monde d’en haut avec le monde d’en bas donne donc lieu à un type d’homme nouveau : l’homme noble, l’« intellectuel » au sens de l’homme selon l’intellect. » Penser au Moyen-Âge.
Ou encore le « Bouddha » du sambhogakāya... Les théories des qualités positives du mahāpuruṣa, déterminées physiquement, peuvent conduire à l'autre bout du spectre à la détermination de qualités négatives par psychométrie, anthropométrie etc. Ce qui est étonnant est que dans ces différentes généalogies d'ennoblissement, les qualités sont comparées positivement ou négativement à celle attribuées à des animaux. On trouve cela dans les qualités des hommes, des femmes et des mahāpuruṣa chez Varāhamihira  dans les catégories d'hommes et des femmes du Kamasutra, et puis dans les théories criminologiques et raciales plus tard. Des hiérarchies, toujours des hiérarchies et sur des bases quelquefois plus que douteuses.

RACE : Josiah Nott and George Gliddon's 800-page illustrated volume, Types of Mankind
   
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[1] Sen, Samarendra Nath; Shukla, Kripa Shankar (2000). History of astronomy in India. Indian National Science Academy. pp. 85, 114, 345.

[2] Sloka 7.—A man with a small penis becomes wealthy, but without issue ; one with a stout one, poor ; with one bent towards the left, devoid of children and wealth ; with one turned towards (bent) the right, blessed with sons; with one bent on the lower side, indigent; with one full of veins, begets few children ; with one with a thick knot, becomes happy; and with a soft one, dies of gonorrhoea and the like.

Sloka 8.—Men with the genital organ hidden in sheath-like skin become kings ; with a long and split one, devoid of wealth ; and with a straight and round one as well as with one having slender veins, wealthy.

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