Il revient sur le viol dont il avait été victime, enfant, au sein même du monastère où il vivait. Les détails sont terribles.
Mais Kalu dit que dans les premières années de son adolescence, il a été abusé sexuellement par une bande de moines plus âgés qui se rendaient dans sa chambre chaque semaine. Quand j’aborde la notion d’ « attouchements », il éclate d’un rire tendu. C’était du sexe hard-core, dit-il, avec pénétration. « La plupart du temps ils venaient seuls », dit-il. « Ils frappaient violemment à la porte et je devais ouvrir. Je savais ce qui allait se passer, et après on finit par s’habituer ». C’est seulement après son retour au monastère après la retraite de trois ans, qu’il a réalisé à quel point cette pratique était incorrect. Il dit qu’à ce moment là le cycle avait recommencé sur une plus jeune génération de victimes.
Il s'agit d'un problème récurrent dans les monastères tibétains, dont les tulkous ne sont pas à l'abri. L'expérience de Kalou Rinpoché semble d'ailleurs être le moteur derrière son projet d’ouvrir sa propre école au Bhoutan et d’interdire à ses monastères d’accepter des enfants.
Il peste contre le coût humain du système monastique, qui consomme des milliers d’enfants, simples moines et tulkus vénérés, sans leur fournir d’éducation pratique ou de solution de repli, tout ça pour produire une poignée de maître spirituels commercialement brillants. « Le système des tulkus c’est comme des robots », dit-il. « Vous construisez 100 robots, et peut-être que 20 % réussiront alors que 80 % seront mis au rebut. »En avril 2011, il avait congédié l'ancienne équipe de Kagyu Ling, et mis en place une nouvelle équipe de lamas occidentaux. Certains membres de l'ancienne équipe étaient accusés de viol. Le hasard veut qu'en cherchant des sources, je tombe sur cet article du Journal de Saône et Loire d'aujourd'hui (1/9/2012) qui donne des détails effrayants. J'étais parti pour un billet plus léger...
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Yangsi Kalou Rinpoché à son arrivée à l'aéroport de Rio de Janeiro, extrait de journal télé brésilien.
MàJ210912 : après la publication de cet article, le jour de son anniversaire, YKR écrit sur Facebook, qu'après avoir repris sa responsabilité de Kalou Rinpoché, il fait le voeu de faire en sorte de bénéficier les autres "d'une manière plus ouverte et plus réaliste". Pour avoir un aperçu de ce que cela implique concrètement, voici son programme d'octobre en Corée du Sud : pratiques préliminaires, homa et diverses initiations... Pendant sa visite au Brésil en août 2012, YKR était habillé en habit de moine. Tiendra-t-il longtemps ce genre de grand écart ?
Shangri-la
Article de Jeff Wilson sur la sexualité et l'homosexualité au Tibet et le phénomène "drombo".
Article sur l'expédition allemande au Tibet (1938-1939), où l'on mentionne les pratiques homosexuelles dans les monastères tibétains entre moines et jeunes garçons.
Ce genre de scandales existe aussi dans le bouddhisme Théravada
MàJ130122012 : Enquête policière à Samyé Ling en Ecosse .
Gananath Obeyesekere, un professeur en anthropologie à Princeton avertit contre les dangers de moines enfants
Blog sur les dangers de la relation maître-disciple (en anglais) Down the Crooked Path
MàJ 06022013 Retour de l'Himalaya
MàJ 26022013 Les droits de l'enfant accordés aux moinillons dans les monastères du Bhoutan.
MàJ 29032013 Distribution gratuite de préservatifs aux moines bhoutanais pour lutter contre le virus HIV
MàJ 220413 Homosexualité & bouddhisme japonais
MàJ 25022014 Problèmes dans les monastères au Bhoutan
MàJ 19052014 Sri Lanka's hidden scourge of religious child abuse
MàJ 12082016 La 4ème réincarnation de Jamgoeun Kongtrul renonce à ses fonctions
MàJ 25082016 Réaction de Dzongsar Khyentsé "Time for radical change in how we raise our tulkus"
Le pouvoir rend fou. Mais si je reste parfois dubitatif sur certains "témoignages" qui semblent plus tenir de la revanche que du fait réel, le nombre de plaintes est pourtant là pour montrer qu'un sérieux problème touche certains centres.
RépondreSupprimerEn même temps, lorsque l'on voit la "foi" béate et puérile de certain(e)s adeptes, il me semble difficile qu'un lama fragile ou pervers ne joue avec cette dévotion souvent mal placée.
Par contre je ne suis pas entièrement d'accord avec Kalou Rinpoché : envoyer son enfant au monastère était et est encore dans de nombreux endroits, le meilleur moyen d'assurer une éducation à son enfant.
Bonjour Philippe,
RépondreSupprimerMerci de votre réaction. Oui, les choses ne sont pas noir et blanc. On a cependant tendance à penser en termes de l’un ou de l’autre. Le pouvoir rend fou, c’est vrai. Surtout si l’une ou l’autre partie d’un rélation (ou les deux) de maître à disciple pensent qu’il doit être exercé. Les hagiographies ont tendance de chauffer les cerveaux des uns et des autres. De toute façon la plupart des pratiquants occidentaux et de leurs « maîtres » ne sont pas au niveau d’entrer dans une « relation de maître à disciple ». On aimerait le croire pourtant, car c’est valorisant pour les deux parties. Un ami spirituel, voire un instructeur, est d’ailleurs largement suffisant pour le travail à faire. Un ami spirituel donne l’exemple et se doit donc d’être exemplaire. Le vinaya ne définie non seulement les actes interdits, mais aussi les situations ambigues (p.e. un moine n’est jamais seul dans une pièce ou un véhicule avec une femme etc.). Même si on ne suit pas la voie monastique bouddhiste, cela est quand-même une indication très claire sur l’attitude du Bouddha vis à vis des situations ambigues, qui sont à éviter au maximum. Et c’est plutôt à celui qui donne l’exemple qu’incombe le devoir de clarifier les situations ambigues. Sauf mauvaise foi, c’est au « guru » d’éliminer l’ambiguité, après tout c’est lui qui est censé conduire de l’obscurité à la lumière. Qu’il fasse son boulot et rende honneur à son titre.
Quand un bon ami spirituel se voit confronté à une foi beate et puérile envers lui, il ne doit rien faire pour l’encourager. S’il maintient ou laisse en place l’ambiguité, il ne fait pas son boulot. Quand les lamas tibétains ou bhoutanais vivent dans leurs sociétés d’origine, leur rôle est clairement défini et personne ne se fait d’illusion à leur sujet. Ce n’était pas le cas en occident, où la part de projections sur un « maître » ou tout ce qui lui ressemblait vaguement était aussi grande que les déceptions qui n’ont pas manqué de suivre. Si vous êtes entourés d’adeptes qui vous prennent pour un bouddha ou un mahasiddha, il faut être assez fort pour ne pas succomber soi-même à cette croyance.
Je ne connais pas (plus) la situation des enfants aux monastères en Inde. Je ne sais pas si la scolarité y est obligatoire et si le gouvernement a alors l’obligation d’instruire les enfants. Si ce n’est pas le cas, vous avez sans doute raison. Si en revanche, l’enfant peut aller ou bien dans une école ou bien dans un monastère, je pense que l’école serait préférable. Ce n’est que pendant les dernières décennies que les différents scandales ont éclatés dans l’église catholique. Jusque là, ils étaient étouffés. Cela semble toujours être le cas pour les monastères tibétains. Par exemple, je ne sais pas comment avait réagi le monastère où avait résidé Yangsi Kalou Rinpotché (YKR) suite à ses confessions. Je n’ai pas vu ou entendu de déclaration officielle quant aux pratiques qu’il avait révélées. Jusqu’à nouvel ordre, tout a l’air d’aller bien dans les monastères tibétains... Je ne pense pas que ce manque de réaction officielle soit uniquement due à de la maladresse ou à un manque de savoir-faire en communication de la part des tibétains.
Un dernier point sur les témoignages éventuellement motivés par une envie de revanche. Une revanche de quoi d’ailleurs ? La chargée de communication du temple parle d’une omerta qui aurait duré plus de 20 ans (http://www.lejsl.com/saone-et-loire/2012/09/01/nous-avons-vecu-une-omerta-pendant-plus-de-20-ans). C’est un phénomène courant. Katy Butler en parle dans son article Encountering the Shadow in Buddhist America (dans Meeting the Shadow, http://byliner.com/katy-butler/stories/encountering-the-shadow-in-buddhist-america), où elle prend pour exemple les événéments dans l’organisation Vajradhatu de Trungpa Rinpoché et de son régent Tendzin ösel (Thomas Rich http://en.wikipedia.org/wiki/%C3%96sel_Tendzin).
Merci Janus pour votre réponse, avec laquelle je suis en grande partie d'accord.
RépondreSupprimerJe pense toutefois qu'il est parfois difficile d'éviter une "situation ambigue". L'ambiguité n'est-elle pas, souvent, dans l'esprit de l'autre, alors que l'on pense bien faire ?
Quant aux monastères, je parlais plutôt de ceux du Tibet ou des régions tibetophones (Zanskar, Ladakh). D'ailleurs, si un grand nombre de moines tibétains s'immole par le feu ces temps-ci, c'est parce que ce sont les mieux informés et éduqués, à mon humble avis, ce qui leur permet de comprendre la situation déplorable dans laquelle leurs pays et culture se trouvent, et le peu d'entrain de la communauté internationale.
Enfin, concernant la revanche, elle peut naître de par de multiples raisons : promotion d'une autre personne que soi à un rang convoité, jalousie amoureuse, remontrance mal prise de la part du maître. Je ne juge pas, mais j'ai déjà pu assister à ce genre d'attitude, ce qui laisse planer en moi un certain doute.