dimanche 27 août 2023

Un corps dans un corps ?

Buzz Lightyear (photo : Made To Stick Decals LLC)

Dans le Samaññaphala Sutta (Les fruits de la vie contemplative, Digha Nikaya 2[1]), le Bouddha des auditeurs explique les fruits de la vie contemplative, et les pratiques contemplatives qui y conduisent, dans l’ordre, l’éthique (sīla), la modération des sens (indriyasaṁvara), l’attention et la vigilance (satisampajañña), le contentement (santosa), l’abandon des obstacles (nīvaraṇappahāna), les quatre jhanas (paṭhamajhāna), la connaissance pénétrante (vipassanāñāṇa), puis des fruits plus extraordinaires tels un corps créé par l'esprit (manomayiddhiñāṇa) et les pouvoirs supranormaux (iddhividhañāṇa), qui font l’objet d’un sutta particulier (SN 51.20 Iddhipada-vibhanga Sutta: Analysis of the Bases of Power).
"Son esprit ainsi concentré, purifié (citte parisuddhe), et clair (pariyodāte, cleansed, bright[2]), sans tache, libre de défauts, souple, malléable, solide, et entraîné à l'imperturbabilité, il le dirige et l'oriente vers la création d'un corps fait par l'esprit. A partir de ce corps il crée un autre corps, doté de forme, fait d'esprit, complet en toutes ses parties, pas inférieur en ses facultés. C'est comme si un homme devait tirer un roseau de sa gaine. L'idée lui viendrait: 'Ceci est la gaine, ça c'est le roseau. La gaine est une chose, le roseau une autre, mais le roseau a été tiré de la gaine.' Ou comme si un homme devait tirer une épée de son fourreau. L'idée lui viendrait: 'Ceci est l'épée, ça c'est le fourreau. L'épée est une chose, le fourreau une autre, mais l'épée a été tirée du fourreau.' Ou comme si un homme devait retirer un serpent de sa mue. L'idée lui viendrait: 'Ceci est le serpent, ça c'est la mue. Le serpent est une chose, la mue une autre, mais le serpent a été retiré de la mue.' de la même façon -- son esprit ainsi concentré, purifié, et clair, sans tache, libre de défauts, souple, malléable, solide, et entraîné à l'imperturbabilité, le moine le dirige et l'oriente vers la création d'un corps fait par l'esprit. A partir de ce corps il crée un autre corps, doté de forme, fait d'esprit, complet en toutes ses parties, pas inférieur en ses facultés.[3]
La présentation de la production d’un “corps mental” (manomaya-(kāya) ) dans ce passage ne permet pas de conclure que le “corps mental” est déjà “naturellement” présent dans le corps “karmique” (karma-vipāka), puisque ce “corps” est dit fabriqué (maya) mentalement (manas), en dépit des métaphores, utilisant des corps internes tout prêts dans un corps externe. Mais l'ambiguïté est bien là. Même s’il est dit ailleurs que le Bouddha ou d’autres pouvaient ainsi produire “mentalement” et simultanément de nombreux corps identiques. Ce “corps mental” n’est donc pas le “corps véritable”, enfoui dans une enveloppe mortelle. Mais certains bouddhistes - nombreux, la majorité - l’ont bien compris ainsi, et le comprennent toujours ainsi. Ce serait alors le “véritable” “corps mental”, capable de produire d’autres “corps mentaux”. Une sorte de pouvoir d’ubiquité, dont la réalité dépasserait celle de la simple perception réelle ou irréelle) individuelle (nirmāṇakāya).

Ce n’est pas tant, qu’au bout de l’entraînement progressif d’un bhikṣu, celui-ci arrive à produire mentalement un “corps mental”, mais plutôt que ce “corps” est la conséquence d’avoir abandonné l’expérience ordinaire de son corps “karmique”, produit par les éléments, etc. Par la désidentification/désappropriation progressive des “briques” élémentaires (dhātu) de ce qui constitue un individu ordinaire, le bhikṣu n’est plus cet individu ordinaire, et ne s’identifie pas avec son corps karmique. C’est son entraînement dans le “dharma” qui le remplace et c’est le “dharma” qui est devenu son corps. Le terme “corps” (kāya) est d’ailleurs à prendre dans le sens de corpus, un ensemble, une collection, voire une structure. Un ensemble de qualités (dharma) développé au cours de la vie du bhikṣu. Ces qualités peuvent être représentées par des symboles, et ce corps de qualités est alors visible de façon “symbolique” (saṃbhogakāya). Un stūpa ou un caitya est une représentation symbolique d’un Bouddha (dont chaque partie symbolise un aspect de la doctrine), mais aussi le corps d’un “grand homme” (mahāpuruṣa), avec ses marques majeures et mineures. Dans le cas d’un “grand homme”, ce n’est pas son corps ordinaire qui fait le “grand homme”, mais l’ensemble de ses qualités, qu’il a fabriquées “mentalement”, p.e. à force de générosité, éthique, endurance, effort, concentration et sapience. Le résultat de l'entraînement est la pensée (citta) radieuse, c’est-à-dire purifiée, libérée des cinq obstacles (nīvaraṇa) ou des cinq passions. L’absence des cinq obstacles ou passions EST la “présence” des “cinq sagesses”... L’absence de scories rend l’or brillant, “la brillance” de l’or est parfois positivement traitée comme de la sagesse (jñāna)… si l’on aime les réifications. Idem pour la pensée (citta).

Le sommet de l'univers bouddhiste (détail, Himalayan Art 47441)

La connaissance du corps mental (manomayiddhiñāṇa, manomaya-kāya) et les pouvoirs supranormaux (iddhividhañāṇa) associés rendent leur détenteur pareil aux devas. Ce corps est un bon support pour bon nombre de qualités éternalistes. A cause du principe de la sympathie microcosmique et macrocosmique, transmigrer dans l'univers bouddhiste, ou voyager à l’intérieur même de son corps mental revient au même (yoga du rêve). C’est dans le corps mental, au coeur de son corps karmique,  que le bhikṣu/yogi, confortablement assis ou couché, voyage mentalement dans le triple univers et au-delà. Les réalisations bouddhistes (jhana, etc.) se situent au-dessus du monde de Brahma, pour donner une idée de l’altitude spatio-temporelle métaphysique où le bhikṣu/yogi évolue. To infinity and beyond… Le progrès dans la pratique d’un bhikṣu/yogi est une indication pour le degré cosmologique atteint, s’il devait mourir à l’instant. Et sa pratique étant ce qui constitue son monde mental, son corps mental peut se situer à un certain degré cosmologique, tandis que son corps karmique épuise encore son karma humain résiduel dans le monde des humains. Pour certains bouddhistes le corps mental (manomaya-kāya) était le véritable corps actuel/futur (l'actif), tandis que le corps karmique était celui du passé (le passif). Un corps dans un corps, présent dès la conception, et même antérieur à celle-ci. Au moment de la mort, il ne “reste” plus que le corps mental qui devient alors temporairement le corps actuel, un véhicule, une monture (sheng 乘)[4], le temps de concevoir un nouveau corps karmique, voire se de se libérer dans l'existence intermédiaire. La transmigration se passe-t-il alors de façon microcosmique, macrocosmique ou les deux à la fois ?

La situation transmigratoire du corps mental est parfois désignée “existence intermédiaire” (antarā-bhava, C. zhongyou 中有, t. bar do), et l’entité transmigatoire est appelé “gandhabba’” (s. gandharva, t. dri za).
L’être intermédiaire qui effectue ainsi le passage d'une existence à une autre est formé, comme tout être vivant, des cinq agrégats (skandha). Son existence est démontrée par le fait qu'il ne peut y avoir discontinuité dans le temps et dans l’espace entre le lieu et le moment de la mort et ceux de la renaissance, et qu’il faut donc bien que les deux existences appartenant à la même série soient reliées dans le temps et dans l’espace par une étape intermédiaire. L’être intermédiaire est le Gandharva dont la présence est nécessaire à la conception au même titre que la fécondité et l’union des parents. De plus, l’Antarāparinirvāyin[5] est un Anāgāmin qui obtient le parinirvāṇa lors de l’existence intermédiaire. Quant au grand criminel, coupable de l’un des cinq crimes sans intervalle (ānantarya), il passe tout de même par une existence intermédiaire au terme de laquelle il renaît nécessairement en Enfer.” André Bareau, Les sectes bouddhiques du petit véhicule, École française d'Extrême-Orient, 1955, p. 143
Selon Sumi Lee, l'école Sarvāstivāda accepta la notion d’être intermédiaire et comprit cette notion d’être intermédiaire en termes de manomaya-kāya[6].
Puisque le corps de tous les êtres intermédiaires naît en se conformant au mental et agit en chevauchant le mental, il est appelé [corps] fait par le mental.” Abhidharma Mahāvibhāṣa Śāstra[7]
Outre ce “corps mental” ordinaire qui sert de monture aux êtres transmigratoires, il reste le sens du “corps mental” originel, utilisé du vivant du bhikṣu/yogi, pour faire des aller-retour dans le triple univers, et qui reste réservé à des grands pratiquants (arhat, pratyeka-buddha, bodhisattva), notamment pour monter voir Maitreya. Selon le Śrīmālādevī Sūtra et le Ratnagotravibhāga Śāstra (rgud bla ma), ces êtres avancés ne sont cependant pas encore arrivés à la fin de leur parcours, et il leur manquerait la perfection des qualités (guṇa-pāramitā) du Corps réel (dharmakāya) d’un Tathāgata, et pour cela ils doivent surmonter quatre obstacles (catvāraḥ paripanthā)[8]. Ces quatre obstacles/méprises concernent précisément ce dont le Soi (ātman) est doté par définition. A savoir dans le Bhagavad Gītā (II, 20) :
Jamais il ne naît ni ne meurt. Il n’appartient ni au passé, ni au futur. Sans naissance, permanent, éternel, l’Ancien [le Soi] ne se laisse pas abattre avec le corps.”[9]
Les quatre perfections (pāramitā) qui manqueraient au dharmakāya d’un Tathāgatha sont la pureté, le soi, la félicité et la permanence. Dans le Śrīmālādevī Sūtra :
Ce dharmakāya du Tathāgata est en effet la pāramitā de la permanence, la pāramitā de la félicité, la pāramitā du soi et la pāramitā de la pureté[10].
C'est la fin de l'équilibrisme d'un bouddhisme, taxé de nihiliste (nāstika) par les cultes éternalistes (āstika). Ce qui lui manquait pour devenir āstika se trouve dans ces quatre perfections éternalistes, et au potentiel d'ouverture à des pratiques éternalistes qu'elles représente. Je pense notamment aux méthodes “āstika” intégrées dans le bouddhisme brahmanisant mahāyāna et ésotérique. Rappelons quand-même les quatre critères de l’orthodoxie bouddhiste.
Tous les composés sont impermanents (P. sabbe saṅkhara annicā)
Tous les composés sont souffrance (P. sabbe saṅkhara dukkhā)
Tous les phénomènes (dharma) sont sans soi (P. sabbe dhammā anatta)
La destruction (de tous les liens), c’est le nirvāṇa (S. śantaṁ nirvāṇaṁ).
Les trois premiers vers de ce quatuor se trouvent dans le Dhammapada (vers n° 5, 6 et 7 de chapitre XX). Certes, selon le mahāyāna c’est du bouddhisme pour les auditeurs (śrāvaka), les disciples directs du Bouddha, à qui il manquerait encore ces quatre perfections du Soi pour être des parfaits tathāgata.

Le Mahāparinirvāṇasūtra le dit encore plus clairement :
"L’ātman, c'est le Tathāgatagarbha. Tous les êtres possèdent la Nature de Buddha : voilà ce qu'est l'atman, Cet atman, dès le début, est toujours cou vert par d'innombrables passions (kleśa) : c'est pourquoi les êtres ne parviennent pas à le voir. C'est comme si, dans la cabane d'une pauvre femme, il y avait un trésor d'or pur sans que, dans sa famille, absolument personne ne le sache... Le Tathāgata, aujourd'hui, révèle aux êtres ce trésor précieux, à savoir la Nature de Buddha. Quand tous les êtres l'ont vu, ils éprouvent une grande joie et prennent refuge dans le Tathāgata. Celui qui excelle en moyens salvifiques (upāya), c'est le Tathāgata; la pauvre femme représente les innombrables êtres; le trésor d'or pur, c'est la Nature de Buddha.”
Etienne Lamotte ajoute :
“2. La Pensée naturellement lumineuse (cittam prakṛtiprabha- svaram), le Tathāgatagarbha, dont il est question dans ces Sūtra a inspiré diversement les grands docteurs de l'École Yogācāra. Les uns, comme Saramati, s'en réclament pour forger un monisme absolu, plus brâhmanique que bouddhiste; d'autres, comme Asanga, l'interprètent dans le cadre de leur système psychologique et l'identifient à la Bhutatathata ou à l'Alaya "révolutionné"." (VKN, p. 56)
La pensée naturellement radieuse, comme de l’or pur, libre de toutes les scories. Imaginée et réifiée “sans souillures”, elle devient le Soi, qui ne naît pas et ne meurt pas. Dans son état “souillée”, appelé tathāgatagharba, elle “transmigre”, “sent la souffrance, se dégoûte, aspire au Nirvāṇa…” (Śrīmālādevī Sūtra, trad. Lamotte dans le VKN, p. 55)

La pensée radieuse a fait une sacré carrière. Nāgārjuna avait posé la voie du milieu entre l’être et le non-être, ou plus précisément entre quatre couples d’oppositions. La non-dualité ne choisit pas entre être et non-être, et ne choisissant pas, garde l’accès à la sphère totale, sans scission.
[I]l n'y a, chez Pyrrhon, aucune séparation telle que celle du “subjectif” et de l' “objectif“. Des lors, en effet, que les apparences ne recèlent aucun fond caché, il n'y a rien en elles qui leur permettrait de se poser en “êtres”, et il n'y a donc pas de “pôle” susceptible de correspondre, à titre d' “objet”, à cet autre pôle que serait le “sujet”. Les apparences ne sont ni des apparences-de, ni des apparences-pour, mais des apparences en elles-mêmes. On dit bien : “telle chose m'apparaît”, mais ce à quoi renvoie l'apparence se résolvant à son tour en apparences, l'apparence ne renvoie qu'à elle-même.” Pyrrhon ou l’apparence, Marcel Conche, PUF, 1994, p. 102.
La non-dualité requiert en effet le soi <-> non-soi, permanence <-> impermanence, souffrance <-> félicité, pureté <-> imperfection. Les coïncidences des opposés peuvent être en déséquilibre, momentanément et naturellement, ou pour d’autres raisons. Il me semble qu’il y a eu un basculement vers les pôles éternalistes, mettant à mal l’apparence. Cela conduit à des fausses certitudes, et à une radicalisation généralisée.

Peut-être que le bouddhisme qui avait séduit l’Occident au XIX-XXème siècle n’était pas le “vrai bouddhisme”, qui serait beaucoup plus religieux que l’Occident ne le pense, et qui l’aurait toujours été depuis le début. Le sera-t-il toujours, le doit-il rester ? Y aurait-il un terrain propice pour un "Bauddhatva" comme il y en a eu pour l’Hindutva ? On mesure la distance parcourue en regardant simplement l’évolution de la pensée radieuse momentanée en véritable “étincelle de lumière” de la Claire Lumière éternelle, et le développement cultuel des méthodes sotériologiques associées, s'adaptant aux nouvelles valeurs et lubies des époques. Le corps mental devenant un "corps de diamant" (vajrakāya), un corps d'arc-en-ciel"... 

Dans le petit espace de temps que j’ai connu le bouddhisme tibétain, surtout en Occident je précise, je l’ai vu devenir plus radical, plus ouvertement religieux, hiérarchique, anti-intellectuel, dévotionnel, superstitieux… Désormais, la foi en un maître semble suffire comme voie, toute la voie. Les plus dévotionnels ou religieux (croyant en l’efficacité religieuse - ou magique - des méthodes) sont restés (se sentant plus ou moins impliqués), d’autres ont abandonné le navire, ou se sont tournés vers des approches “bouddhistes” plus compatibles et contemporaines, comme la Pleine conscience. Une chose est certaine le bouddhisme ne s'est pas implanté dans l'Occident. L’enthousiasme des débuts a disparu et l’avenir du bouddhisme, “le vrai”, est incertain en Occident. 

Y a-t-il suffisamment d’intérêt pour un nouveau bouddhisme plus adapté, plus engagé ? Mais, le bouddhisme a toujours été très engagé, et au plus haut niveau de la société, sans doute pas dans le sens de l’engagement tel qu’on le conçoit maintenant, et encore…. Si le bouddhisme n’a plus la singularité d’être une vraie voie du milieu, étant devenu une “voie du milieu” penchant clairement vers l’éternalisme, y aurait-il une quelconque utilité pour un bouddhisme adapté à notre époque et ses valeurs, et engagé dans les causes actuelles ?

D’un autre côté, si le point commun entre toutes les formes de bouddhisme du passé et du présent est que personne ne semble jamais avoir compris ni le Bouddha, ni son enseignement, comme on n'arrête pas de le répéter, la voie est libre pour de nouvelles approches qui ne comprennent ni le Bouddha, ni son enseignement. Ce serait parfaitement conforme à la tradition bouddhiste. 

***

[1] Pour une traduction “alignée” : la version pāli avec la traduction anglaise de Bhante Sujato

[2] On voit en anglais les traductions “cleansed”, “bright” pour “pariyodāte”, qui suit immédiatement au terme “parisuddhe” qui signifie purifié. La traduction “clair” en français, ou “bright” en anglais ne doit donc pas être traduite avec un sens de lumineux, produisant de la lumière. La pensée radieuse (cittaṃ (pr)abhāsvaram) est d’ailleurs comparé à de l’or sans scorie.

[3] Sujato :

4.3.3.2. Mind-Made Body

When their mind has become immersed in samādhi like this—purified, bright, flawless, rid of corruptions, pliable, workable, steady, and imperturbable—they extend it and project it toward the creation of a mind-made body. The “mind-made body” is the interior mental representation of the physical body. In ordinary consciousness it is proprioception, which here is enhanced by the power of meditation. The higher powers in Buddhism are regarded as extensions and evolutions of aspects of ordinary experience, not as metaphysical realities separate from the world of mundane experience.From this body they create another body, physical, mind-made, complete in all its various parts, not deficient in any faculty. This is similar to the experience of the “astral body” described by modern spiritualists. Note that it is still “physical” (rūpī) even though it is mind-made. This is the subtle (sukhuma) body, which is an energetic experience of physical properties by the mind.

Suppose a person was to draw a reed out from its sheath. They’d think: ‘This is the reed, this is the sheath. The reed and the sheath are different things. The reed has been drawn out from the sheath.’ Or suppose a person was to draw a sword out from its scabbard. They’d think: ‘This is the sword, this is the scabbard. The sword and the scabbard are different things. The sword has been drawn out from the scabbard.’ Or suppose a person was to draw a snake out from its slough. They’d think: ‘This is the snake, this is the slough. The snake and the slough are different things. The snake has been drawn out from the slough.’

In the same way, when their mind has become immersed in samādhi like this—purified, bright, flawless, rid of corruptions, pliable, workable, steady, and imperturbable—they extend it and project it toward the creation of a mind-made body. From this body they create another body, physical, mind-made, complete in all its various parts, not deficient in any faculty. This too, great king, is a fruit of the ascetic life that’s apparent in the present life which is better and finer than the former ones.


Pāli :

“So evaṁ samāhite citte parisuddhe pariyodāte anaṅgaṇe vigatūpakkilese mudubhūte kammaniye ṭhite āneñjappatte manomayaṁ kāyaṁ abhinimmānāya cittaṁ abhinīharati abhininnāmeti. So imamhā kāyā aññaṁ kāyaṁ abhinimmināti rūpiṁ manomayaṁ sabbaṅgapaccaṅgiṁ ahīnindriyaṁ.

Seyyathāpi, mahārāja, puriso muñjamhā īsikaṁ pavāheyya. Variant: īsikaṁ → isikaṁ (bj, sya-all); isīkaṁ (pts1ed) | Seyyathā → seyyathāpi (bj, pts1ed) | pavāheyya → pabbāheyya (sya-all, mr)Tassa evamassa: ‘ayaṁ muñjo, ayaṁ īsikā, añño muñjo, aññā īsikā, muñjamhā tveva īsikā pavāḷhā’ti. Variant: pavāḷhā’ti → pavālhāti (bj); pabbāḷhāti (cck, sya1ed, mr); pabāḷhāti (sya2ed)Seyyathā vā pana, mahārāja, puriso asiṁ kosiyā pavāheyya. Tassa evamassa: ‘ayaṁ asi, ayaṁ kosi, añño asi, aññā kosi, kosiyā tveva asi pavāḷho’ti. Seyyathā vā pana, mahārāja, puriso ahiṁ karaṇḍā uddhareyya. Tassa evamassa: ‘ayaṁ ahi, ayaṁ karaṇḍo. Añño ahi, añño karaṇḍo, karaṇḍā tveva ahi ubbhato’ti. Variant: ubbhato’ti → uddharito (sya-all, km)

Evameva kho, mahārāja, bhikkhu evaṁ samāhite citte parisuddhe pariyodāte anaṅgaṇe vigatūpakkilese mudubhūte kammaniye ṭhite āneñjappatte manomayaṁ kāyaṁ abhinimmānāya cittaṁ abhinīharati abhininnāmeti. So imamhā kāyā aññaṁ kāyaṁ abhinimmināti rūpiṁ manomayaṁ sabbaṅgapaccaṅgiṁ ahīnindriyaṁ. Idampi kho, mahārāja, sandiṭṭhikaṁ sāmaññaphalaṁ purimehi sandiṭṭhikehi sāmaññaphalehi abhikkantatarañca paṇītatarañca.”

[4] The Meaning of ‘Mind-made Body’ (S. manomaya-kāya, C. yisheng shen 意生身) in Buddhist Cosmological and Soteriological systems, Sumi Lee, UCLA, Buddhist Studies review

[5] Maitrīgupta/Advayavajra aurait "réalisé la Mahāmudrā ["tantrique"] dans le Bardo", voir Maitripa et ses disciples vus par Taranatha

[6] The Meaning of ‘Mind-made Body’ (S. manomaya-kāya, C. yisheng shen 意生身) in Buddhist Cosmological and Soteriological systems, Sumi Lee, UCLA, Buddhist Studies review

“The *Mahāvibhāṣā, the encyclopedic treatise of the Sarvāstivāda school, in fact provides a list of four terms with the same referent as antarā-bhava, i.e., antarā-bhava (C. zhongyou 中有), gandharva (C. qiandafu 揵達縛), ‘birth-seeker’ (S. saṃbhavaiṣin, C. qiusheng 求生), and manomaya (C. yicheng 意成).”

[7]Since the body of all the intermediate beings is born complying with the mind and acts while riding on the mind, they are called mind-made [body].” The Meaning of ‘Mind-made Body’, p. 74. T 1545 363a17–27.

[8] [1] ‘Phenomenon of condition’ (S. pratyaya-lakṣaṇa, C. yuanxiang緣相) means ‘entrenched ignorance’. [The ‘entrenched ignorance’ is the condition for ‘karmic activities’ (S. saṃskāra, C. xing 行) 38 for the three types of beings,] just as ‘ignorance’ (S. avidyā, C. wuming 無明) is [the condition] for ‘karmic activities’ (S. saṃskāra, C. xing 行) [for ordinary people]. [2] ‘Phenomenon of cause’ (S. hetu-lakṣaṇa, C. yinxiang 因相) means the ‘uncontaminated activities’ (S. anāsrava-karma, C. wulou ye 無漏業) conditioned by the ‘entrenched ignorance’ [as the cause of the manomaya-kaya], [and it is to be] compared with the ‘karmic activities’ [conditioned by the ‘ignorance’ of the ordinary beings]. [3] ‘Phenomenon of origination’ (S. saṃbhava-lakṣaṇa, C. shengxiang 生相) means the origination of the three types of mind-made body (S. manomayātmabhāva), conditioned by the ‘entrenched ignorance’ and caused by the ‘uncontaminated activities’, just as the origination of the three realms (S. tribhava) is conditioned by four kinds of ‘grasping’ (S. upādāna, C. qu 取)39 and caused by the ‘contaminated activities’ (S. sāsrava-karma, C. youlou ye 有漏業).40 [4] ‘Phenomenon of destruction’ (S. vibhava-lakṣaṇa, C. huaixiang壞相) means ‘inconceivable transformative death’ (S. acintya-pāriṇāmikī-cyuti, C. bukesiyi bianyi si 不可思議變易死) conditioned by the origination of the three types of manomaya-kāya. It corresponds to ‘aging and death’ (S. jarā-maraṇa, C. laosi 老死) [of the existence of the three realms, which is] conditioned by the birth (S. jāti, C. sheng 生)

[9] Traduction de Michel Hulin, La Bhagavad-Gītā, Sagesse, p. 39

[10]This dharmakāya of the Tathāgata is indeed the pāramitā of permanence, the pāramitā of bliss, the pāramitā of a self, and the pāramitā of purity.[174]”
When the Clouds Part: The Uttaratantra and its Meditative Tradition as a Bridge between Sutra and Tantra. Boston: Snow Lion Publications, an imprint of Shambhala Publications, 2014. Karl Brunnhölzl

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