vendredi 23 février 2024

Il suffit de passer le pont...

"Dignitaires passant le pont vers la Terre pure" (détail Bridge of the Seven Treasures)
"Deux diables Courte-vie et Prompte-mort, précipitent dans les flots les âmes qui s’y engagent"

Sans syncrétisme pas de religion. Cependant, le mot syncrétisme prend souvent un sens péjoratif dans une religion qui se respecte.
Fusion de différents cultes ou de doctrines religieuses; en partic., tentative de conciliation des différentes croyances en une nouvelle qui en ferait la synthèse.”
Et pourtant, sans "syncrétisme" aucun culte, aucune religion ou spiritualité n’existerait. Le syncrétisme semble poser moins problème dans l’art, la musique, la gastronomie. Quand on touche aux croyances et aux identités culturelles, cela devient nettement plus sensible. Le terme syncrétisme semble alors vouloir dire “Chacun chez soi et les cochons seront bien gardés”, car la fusion termine si souvent en con-fusion.

Dans de nombreuses religions, sept est le nombre de perfection, et même la gamme diatonique de Pythagore consiste en 7 notes. Car il y avait initialement sept planètes connues dans notre cosmos. Toutes les religions, anciennes ou nouvelles, tiennent toujours au nombre ancien. Il ne faut pas toucher un système qui fonctionne : if it ain't broke, don't fix it. Donc la terre, les sept planètes, les dieux-planètes, et les Parfaits et Dieu au-delà, n’y touchons pas. Les sept jours de la semaine nommés d’après les sept planètes sont très bien comme ils sont. 

Les religions s’intéressent surtout à la vie de l’âme (tib. bla) après la mort et à l’au-delà. L’âme est une étincelle de lumière, ou autre semence, embourbée temporairement dans un corps, et qui aspire à retourner dans l’au-delà afin de rejoindre la Lumière divine ou l'Un.

Screen capture from Prof. dr. Wouter Hanegraaff

Les religions ainsi que les platoniciens et néoplatoniciens[1] s’intéressent notamment au voyage retour. Il faudrait que l’âme (re)traverse les sept planètes, disons sept jours pour traverser chaque sphère planétaire et les entités qui la fréquentent, soit sept fois sept, quarante-neuf jours, un long voyage, pour une âme solitaire sans boussole. Et de quoi vivra-t-elle ? Les religions offrent tous les services dont pourrait avoir besoin une âme transmigrante. Les taoïstes et les bouddhistes en Chine sont parmi les mieux outillés dans ce domaine[2]. Leur saṃsāra se limitait encore à cinq destinées, là où le bouddhisme tibétain en compte six. Les religieux ont pour tâche d’empêcher que les âmes de trépassés soient agressées lors de leur périple ou transmigrent dans de mauvaises destinées, et veillent à leur confort optimal pendant le voyage qui dure au maximum 49 jours, soit sept semaines.

Henri Doré fig. 60 la roue de la métempsychose avec 5 mondes

Grâce au système des révélations terma (gter ma), le bouddhisme tibétain, à force de multiples fusions successives à différentes époques (notamment aux XVI-XIXème siècles), a su rattraper son retard en complétant et en ajustant son outillage GPS post-mortem, et prendre même de l’avance sur toutes les autres religions. Quasiment toutes les options sont disponibles.

Henri Doré, cercueil, autel avec tablette de nom (Chine) 

Je vais me limiter dans ce qui suit aux Guides de géolocalisation mythocosmique (rigs drug gnas 'dren) et à la pratique de Korwa Dongtrouk[3] que l’on trouve dans la collection du Rinchen Terdzö de Jamgön Kongtrul (1813-1899). Comme dans les Recherches sur les superstitions en Chine (première partie) de Henri Doré, on y trouve une petite table-autel avec une tablette nominale (Tib. ming byang C. Ji Ling 祭灵), qui sert de “siège de l’âme” temporaire, le temps des rituels. “C’est une tablette en papier, une sorte de poche ou de grande enveloppe rouge rectangulaire, censée contenir l’âme [tib. bla] du défunt dont on a écrit le nom dessus” (H.Doré). 
Nous avons ici le principe de l'effigie nominale représentant le défunt, qui sert de support pour fixer son principe conscient, lequel pourra ensuite être aisément instruit. Ce substitut du corps est ici représenté par des morceaux de vêtement ayant appartenu à l'individu ou même par des fragments de ses os si les funérailles sont achevées, et par l'écriture du nom du défunt. La mention du la (tib. bla) errant, sorte d'âme vitale d'origine non-bouddhiste, est un indice de l'ancienneté probable d'un procédé qui fut par la suite adapté aux doctrines bouddhistes et approchantes du Youngdroung bön. On notera aussi la mention selon laquelle cette pratique doit être faite chaque semaine après le décès. Enfin, l'allusion aux déités paisibles et courroucées montre le lien étroit de ces rituels avec la période post mortem, lien confirmé par l'existence du Bardo Thödröl de la transmission orale (tib. sNyan rgyud bar do thos sgrol) chez les Bönpo dès le XI siècle[4].”
Dans les pratiques tibétaines, on peut trouver à la fois des éléments taoïstes, Bön, manichéens, zoroastriens, tantriques indiens (sādhana, abhiṣeka), etc. Philippe Cornu a assisté à des rituels “Nédren” (tib. gnas ‘dren), et en donne une description dans son livre.
Il m'a été donné plusieurs fois d'assister à un rituel de nédren, notamment en 1989 où celui-ci était présidé par le IVe Dodroupchen rinpoché ; en 1996 également avec l'actuel VII dzogchen rinpoché ; et en 1997, où le rituel était accompli par Tülkou Pégyal rinpoché, un maître rattaché à la tradition du monastère dzogchen et spécialisé dans les rituels des défunts. Dans tous les cas, le corps étant absent, on fabrique d'abord une carte-support portant le nom du défunt, le mingtchang ou tsentchang (tib. mtshan byang), monté sur un bâtonnet vertical : l'ensemble constitue le tchangbou (tib. byang bu). La carte-support est une feuille de papier rectangulaire sur laquelle figure le dessin du défunt assis sur un lotus, les mains en prière, surmonté d'un parasol, les syllabes Ā SU NṚ TRI PRE DU étant apposées respectivement au niveau du front, de la gorge, du cœur, de l'ombilic, du sexe et des plantes des pieds de la représentation. Ces syllabes sont celles des différentes destinées du samsara. L'idée est de purifier ces empreintes karmiques figurées sous forme de lettres, afin d'éviter que le défunt ne soit entraîné à renaître dans l'une de ces destinées. Une baguette de bois horizontale, collée en haut du dessin, permet de fixer celui-ci sur un axe vertical en bois ou en bambou planté dans un bol de riz, d'orge ou de sable. La baguette horizontale est alors recouverte d'une étoffe, si possible provenant d'un vêtement ayant appartenu au défunt. Puis un miroir, symbole de l'esprit, est soit attaché au sommet du mingtchang, soit disposé dans une coupelle placée à côté.[5]

 

Tablette nominale (ming byang) (photo : P.Cornu IV.13)
Colonne des syllabes sur la droite A Ni Tir Pre et Du 

D’abord, la conscience, ou le “continuum de conscience” pour tenter de rester dans un cadre axiomatique bouddhiste, est convoqué et fixé dans le support, la “tablette nominale” (ming byang). Impossible pour une conscience en dérive dans le bardo d’y résister. Philippe Cornu précise que les maîtres nyingmapa arrivent même, au-delà des 49 jours, à capturer des âmes (bla) ou des "continuum de conscience" dans leur nouvelle destinée misérable, et de les fixer avec le mantra NṚ YAṂ VAJRA AṄKUŚA[6] JA JA dans le “siège de l’âme” (p. 725), afin de les sauver par un Nédren de la deuxième chance. Une fois capturée, l’âme, par le biais de son “siège”, ainsi que son esprit-miroir sont purifiés par l’eau consacrée versée sur le miroir rituel. Les syllabes marqués aux différents endroits du siège-corps, Ā SU NṚ TRI PRE DU, représentent les six mondes : les dieux (Ā), les demi-dieux (SUra), les humains (NARa), les animaux (TIRyak), les mânes (PREta) et les états misérables (DUrgati). Ces syllabes-mantras correspondent à “l'énergie sonore de la Réalité”. La Réalité vibre en effet en Sanskrit.
Dans le Vajrayana, on conçoit donc deux registres de perception de la réalité relative : la réalité relative impure, conditionnée par les forces opérantes, biaisée par les obscurcissements de la connaissance et des passions, et perçue par les êtres ordinaires piégés dans le cycle des existences; et la réalité relative pure, c'est-à-dire la manifestation incomposée et inconditionnée des précédents phénomènes, sous la forme des déités vides et lumineuses. Cette dernière est l'expression formelle de la vacuité ou réalité absolue.

Toute l'efficience de la pratique repose sur le fait qu'elle n'est que le rétablissement de la perception pure de la réalité relative : l'exercice répété de la visualisation, associé à la récitation des mantra, l'énergie sonore de la Réalité, purifie et transforme peu à peu la perception ordinaire qui finit par s'effondrer ou se déchirer comme un rideau usagé pour faire place à la vision pure. L'union indivisible de la vacuité et de la clarté se manifeste alors pleinement comme les formes pures du tathāgatagarbha enfin actuali
sé.” (p. 180-181)
Rencontres du troisième type. Communiquer grâce à l'énergie sonore de la Réalité
Ā SU NṚ TRI PRE DU

Comment l’âme, ou le “continuum de conscience”, est-elle empêchée de transmigrer dans une des six destinées ? Pardi, en brûlant leurs six syllabes-germe marqués sur le support ! Après avoir été lavée par l’eau consacrée ("ignée"), et en brûlant les germes des six mondes, il est tout simplement impossible que ceux-ci se matérialisent de nouveau pour l’âme sauvée. L’effigie vide sera incinérée, mais l’âme aura déjà passé le pont.

Les Guides de géolocalisation mythocosmique (rigs drug gnas 'dren) consistent en plusieurs parties en fonction des versions extensives ou condensées :
Les préparatifs et la création du support
La convocation de la conscience et sa fixation dans le support
La séparation des influences négatives
Les ablutions et purifications des obstacles et des actes négatifs
L’extirpation des poisons (tib. dug phyung, d’origine Bön)
Refuge et consécration
Hommages et offrandes
Incinération des nourritures et boissons (zas bsngo bsregs)
Montrer la voie (lam sbyong bstan pa)
Projection de la conscience dans un champ pur (rnam shes spar ba)
Crémation de l’effigie, rassembler les cendres de l’effigie et en faire des offrandes votives tsatsa en les mélangeant avec l'argile.
 
Korwa Dongtrouk (Samye Ling)

La pratique de Nédren est encadrée dans un rituel tantrique (sādhana), comme celui de “Avalokiteśvara rouge”, Rituel très condensé de la tablette nominale associé au rituel de l’aiguière du Grand compatissant qui secoue les tréfonds du saṃsāra[7]. Les ”tréfonds du saṃsāra” sont secoués par l’incinération des syllabes-germe des six mondes, et l’eau consacrée de l’aiguière lave l’esprit et “la conscience” (bla). Mais la conscience est d'abord attirée et fixée dans le support : 
"Par la vérité des Trois Joyaux
Par la vérité du dharmatā parfaitement authentique
Par la vérité de l'infaillibilité des liens de l'harmonie universelle (brten 'brel)
Par la vérité du Bienheureux Grand compatissant qui secoue les tréfonds du saṃsāra
Et par la puissance de la vérité universelle (bden pa chen po), où que se trouve la conscience de l'individu qui est passé de ce monde à son existence suivante, où que ce soit dans une des six destinées ou dans l'état intermédiaire, qu'elle se pointe ici sur le champ ! NṚ VAJRA-AṄKUŚA JA (trois fois)"
L’officiant qui se visualise comme “Avalokiteśvara rouge” imagine les sommets de ses mains jointes comme les Pères-Mères des Cinq Familles. Des interstices entre les dix doigts joints fusent des lumières de gnose qui brûlent les syllabes des six destinées, aux six emplacements du corps-support du trépassé, du même coup réduisant en cendres (bhasmi) ses actes négatifs (pāpaṃ) et obnubilations (avaraṇa) par la grâce de tous les tathāgata. Oṃ sarva tathāgata adhiṣṭhāna-adhiṣṭhite sarva pāpaṃ avaraṇa bhasmiṃ kuru svāhā, et le tour est joué. Le performatif est rendu possible grâce à l'énergie sonore de la Réalité réelle (mantra). Le mantra à six syllabes d’Avalokiteśvara purifie les six passions qui sont à l’origine de la transmigration dans les six mondes. Le rituel très condensé contient un transfert direct dans la Lumière infinie. Pas de transfert de la conscience dans un champ pur, ou dans le “point d’union d’Amitābha uni à son épouse, devenant ainsi un fils de Vainqueur"[8]”. Amitābha, la Lumière illimitée, le Noûs.

Longchen Rabjam explique dans le Trésor du véhicule suprême :
Selon le degré de richesse des donateurs, qui peut être supérieur, moyen ou médiocre, les médiocres feront effectuer le rituel pour guider hors des six destinées [rigs drug gnas ‘dren], présenté plus haut, un jour durant, les moyens sept jours et les supérieurs sept semaines.[9]
Philippe Cornu ajoute :
Il faut rappeler que, dans le bouddhisme en général, il est d'usage pour les laïcs de prodiguer leur offrandes aux moines ou aux yogis afin d'accumuler des mérites en échange des services rituels qui leur sont offerts. Cette ‘économie’ propre au rapport social entre fidèles laïcs et communauté monastique joue évidemment un rôle lors de la mort d'un membre de la famille et il n'est pas rare que celle-ci fasse des dons considérables en échange du rituel funéraire effectué par les lamas et les moines. Le mérite accumulé est alors dédié au défunt.[10]
Il en allait de même dans la Chine de H. Doré avec le rituel taoïste/bouddhiste pour "passer le pont en argent et en or" (过“金银桥). Ces ponts sont d'ailleurs disponibles en ligne comme des artéfacts religieux. 
3° Cérémonie du Fong-ling.

Le troisième ou le cinquième jour après la mort, les riches invitent les bonzes, pour aider l’âme à passer le pont (sans doute le pont de la douleur, jeté sur le torrent rouge, et du haut duquel les deux diables Courte-vie et Prompte-mort, précipitent dans les flots les âmes qui s’y engagent)
[voir la première illustration].

Les bonzes viennent en procession, puis, quand la nuit est venue, ils vont se placer devant la demeure du défunt. En avant de la porte d’entrée, un simulacre de pont a été construit avec des tables, placées les quatre pieds en haut ; chaque pied de table soutient une lanterne allumée.

A la tête du pont a été dressé un siège élevé, où monte le principal bonze, la tête ceinte du chapeau à cinq cornes. Du haut de ce siège, il marmotte des incantations, puis jette des gâteaux que les curieux se disputent les uns aux autres ; les bonzes s’en vont, et la cérémonie est finie
[11].”
Syncrétisme ou non, les religions ont beaucoup de choses en commun. La cosmologie, leurs sciences surannées, les hiérarchies, les clercs, les sermons sur le mérite et le démérite, la tare innée d'un être humain (péché originel, avidyā, manque, dette ...), dévalorisation de ce qui est terrestre, survalorisation de ce qui est céleste, la rédemption, les indulgences, … la reproduction des moyens de production. Quel est le bénéfice réel de ces croyances et rituels, qui en sont un condensé ? Leur propre maintien. Et la continuation du réincarnationisme ou du "continuum de conscience" qui est le nerf de la guerre du bouddhisme.

Manuscrit Le pont des sept trésors avec 11 dignitaires qui le traversent (détail Bridge of the Seven Treasures)

De gauche à droite :
1.Nonne bouddhiste
2.Femme chaste
3.Filiale et respectueuse des ancêtres
4.Aime faire l'aumône et soulager les gens
5.Conseille les autres pour qu'ils fassent le bien
6.Propage le taoïsme
7.Comprend la bonté et récompense sa source
8.Il trouve de la joie dans la bonté et se réjouit de la partager
9.Construit des temples et des sanctuaires, des salles et des monastères
10.Il a éclairé son esprit et vu sa nature
11.Cultive le dao pendant son mandat

Devenir une simple âme vierge, sans ignorance, dualisme, passions, actes "négatifs", puisque tous ces éléments doivent être éliminés durant la vie ou sinon en urgence au moment de la mort (en brûlant la syllabe NṚ), ce serait le plus haut degré de perfection d'un être humain ?

Kalou R II pratiquant Korwa Dongtrouk à Hawai
 (capture d'écran 2022

***

[1] Au-delà des sept sphères planétaires, ils imaginent une huitième (ogdoade), une neuvième (ennéade) et même une dixième sphère, l’Un. Il faudrait s’appeler Buzz l'Éclair pour aller plus loin.

[2] Voir p.e. H. Doré : Recherches sur les superstitions en Chine, première partie

[3] Thugs rje chen po 'khor ba dong sprug gi bum chog dang 'brel ba'i byang chog shin tu bsdus pa

[4] Philippe Cornu, Le Livre des morts tibétain, Buchet-Castel, 2009, p. 717

[5] Philippe Cornu, Le Livre des morts tibétain, p. 722

[6] Le “crochet adamantin”.

[7] Thugs rje chen po 'khor ba dong sprug gi bum chog dang 'brel ba'i byang chog shin tu bsdus pa

[8] Philippe Cornu, Le Livre des morts tibétain, p. 759. “La conscience du défunt devient un HRĪḤ rouge, l’essence de l’esprit”.

“Ecoute fils défunt de bonne famille
Quel que soit le lieu où tu naîtras dans le cycle des existences
Il aura la triple souffrance pour nature
Sans s'attacher à, et réifier cette [existence]
Produis l'éminente pensée d'éveil
Et remémore la Réalité réelle [symbolique]
Les cinq chemins [du petit véhicule] n'ont pas d'essence propre
Perfectionne les dans un état semblable à une illusion
Et ton corps mental au Coeur lumineux
Ira dans le Champ Arrangment-de-lotus
Puisse tu t'y éveiller manifestement
De façon indifférencie de la Gnose de Lumière infinie
Ta conscience qui a pris l'aspect de la lettre A blanche
Est transférée ('pho) dans le Coeur blanc de Lumière infinie
Tes reliefs (snyigs ma) seront purifiés par les flammes de Gnose
En l'Elément primordial (ka dag) profond [au niveau de la racine hypostatique] et lumineux.”

Nyon cig tshe 'das rigs kyi bu
'khor ba'i gnas ris gar skyes kyang
sdug bsngal gsum gyi rang bzhin yin
de la ma chags ma zhen par
byang chub mchog tu sems bskyed nas
chos nyid bden pa dran par gyis
lam lnga rang bzhin med pa ste
sgyu ma lta bu'i ngang du rdzogs
'od gsal snying po yid kyi lus
padmo bkod pa'i zhing du song
snang ba mtha' yas ye shes dang
dbyer med mngon par byang chub shog
rnam shes aa yig rnam pa ni
'od dpag med kyi thugs kar 'pho
snyigs ma ye shes me lce yis
gting gsal ka dag dbyings su sbyang

[9] Philippe Cornu, Le Livre des morts tibétain, p. 719-720

[10] Philippe Cornu, Le Livre des morts tibétain, p. 720

[11] H. Doré : Recherches sur les superstitions en Chine, première partie, page I.60

[12] "In general, the head (of the body) is described as the essence of the Tathāgata (Vairocana), the right hand as that of Akṣobhya,[1] the left hand as that of Ratnasambhava, the left foot as that of Amitābha, and the right foot as that of Amoghasiddhi. Then, among the fingers which are the appendages (of those hands), the middle one represents the enlightened family of indestructible reality, the index finger represents the enlightened family of the tathāgata, the thumb represents the enlightened family of gemstones, the fourth finger represents the enlightened family of the lotus, and the little finger represents the enlightened family of activity.

In this context, the hand-gesture known as the "indestructible palms" (rdo-rje thal-mo) is the causal basis of the seals or hand-emblems. It is described as follows: On the tips of the five fingers of the right hand or Akṣobhya (mi-bskyod), on the five solar disks (nyi-ma'i dkyil), the size of round grains, are respectively the syllables (yi-ge) HŪṂ, OṂ, SVĀ, ĀṂ, and HĀ. These are the five (seed)-syllables of the male consorts of skillful means. And on the five fingers of the left hand or Ratnasambhava (rin-chen), on five lunar disks (zla-ba'i dkyil) the size of grains or amulets there are respectively arrayed the five syllables (yi-ge) MŪṂ, LĀṂ, MĀṂ, PĀṂ, and TĀṂ which belong to the female consorts of discriminative awareness. The union (sbyar-bas) in the gesture of "indestructible palms" which comes about through (las) the respective combination (zung-du sprad-pa) of those two sets of five (lnga-gnyis), namely, the five fingers of the right hand and those of the left hand, is the causal basis for the emergence of ('byung-ba'i rgyu) the seals or hand-emblems (phyag-rgya) belonging to the different deities
." Guhyagarbha Tantra (with Commentary), Gyurme Dorje, 1987

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire