mardi 29 mai 2012

Colonne de feu et axe du monde




Le bouddha avait le pouvoir sur le feu (S. tejas) et le tathāgata était quelquefois comparé à un feu qui brûle dans la nuit de ceux qui doutent (P. kankha).
Voyez ceci:
le discernement
des Tathâgatas,
tel un feu flambant dans la nuit,
donnant de la lumière, donnant des yeux,
à ceux qui viennent,
dissipant leurs doutes.
Kankharevata
(Thag 1.3) version anglaise de Thanissaro Bhikkhu
 Dans la littérature secondaire, cet exemple fut quelquefois pris au premier degré. Dans une des vies antérieures du Bouddha (jātaka), raconté dans le Sūtra des sages et des fous (T. mdo mdzangs blun), il s’appelait Sarvada. Pour aider des marins perdus sur la mer au milieu d’une région infestée de pirates, il s’enveloppa les bras de tissus imbibés d’huile et les alluma, servant ainsi, les bras étendus, de torche humaine sur le devant du navire.

Quel est exactement cet « élément igné » (P. tejo-dhātu) que maîtriseraient le Bouddha et ses arhats ?
« Tejas [tij] n. [«pointe de la flamme»] flamme, chaleur; effulgence, éclat, splendeur | ardeur; énergie vitale, vigueur; fougue; force; force virile, sperme | force spirituelle, puissance, influence morale; gloire, dignité, majesté | phil. le Feu, l'une des 9 substances [dravya_1] du vaiśeṣika, l'un des 5 éléments [bhūta] du sāṃkhya; son pañcabhūtasthala est Aruṇācaleśvara. » (Inria)
Le tejas est bien plus qu’un simple feu et l’on voit bien toutes les connotations avec des cultes du feu anciens et à venir. Le premier mot du premier Rigveda est Agni[1], le dieu du feu et du sacrifice, dont l’importance était capitale. Le mot igné vient d’ailleurs du latin igneus « de feu, enflammé; étincelant, ardent » et partage la même origine qu’Agni. "Mouillez le gn".


« À l'origine, raconte pour sa part le Linga Purana, lorsque l'univers était envahi par les eaux, Vishnou et Brahmâ se disputaient, affirmant chacun qu'il était le plus grand des dieux. Mais tout à coup, surgit une immense colonne de feu entre les eaux. Elle était si haute qu'elle semblait sans fin. Les deux dieux décidèrent de s'affronter en mesurant la hauteur de la colonne : Vishnou se transforma en sanglier et plongea au fond des eaux tandis que Brahmâ prit la forme d'une oie [sauvage] [haṃsa] pour voler aussi haut que possible. Mais ni l'un, ni l'autre ne purent atteindre l'extrémité de la colonne incandescente. Shiva, apparaissant alors, expliqua qu'il s'agissait du lingam, symbole de son pouvoir mais aussi Shiva lui-même. Les dieux reconnurent alors la suprématie de Shiva, qui leur adressa un discours censé instituer les principales règles de son culte (Nuit Sainte de Shiva, processions, instaurations de statures, etc.) »[2]
Brahmā qui sonde les limites du ciel, et Viṣṇu celles de la terre, sans qu’ils ne trouvent le début ni la fin de la colonne de feu, qui semble transpercer[3] à la fois et la terre et le ciel en les dépassant, comme un axe du monde. Cette colonne de feu est le signe distinctif (S. liṅga T. mtshan) de Śiva, un symbole, ce à travers lequel on peut reconnaître la nature de Śiva[4], qui est cependant « sans signe ».[5] Henri Le Saux, parla de « la forme sans forme ». Le « sans forme » (S. arūpa T. gzugs med) et le  « sans partie » (T. apakṣapāta T. phyogs med), l'indivis, qui se trouve au Cœur et au cœur du temple (S. garbha-griha). 
« Ainsi disons-nous que la lumière intérieure, la jyoti, paraît au fond de l’âme et y disparaît, alors que toujours elle y est, éternellement, resplendissante et radieuse. » [6]
« Le soleil ne brille plus ici,
Ni la lune, ni les étoiles
Ni les éclairs non plus,
Encore moins ces feux (de la terre)…
Mais Lui, quand il brille, tout brille après Lui,
Et de sa splendeur, tout resplendit
. » (Katha Upanishad, 5,15)

MàJ 28012015 Pillar of fire, jyotirlinga and Hindu temples in archaeology from ca. 3rd millennium BCE along the Meluhha tin road --Tracing the Hindu temple traditions in the context of Itihasa of Bharatam Janam


[1] agním īḷe puróhitaṃ / yajñásya devám ṛtvíjam / hótāraṃ ratnadhâtamam « Agni I laud, the high priest, god, minister of sacrifice, The invoker, lavishest of wealth. »
[3] Le Shivalingam perce les trois monde ou les trois cités.
[4] "Le signe distinctif par lequel on peut reconnaître la nature de quelque chose est par conséquent nommé Lingam." - Linga Purana
[5] "Shiva est sans signe, sans couleur, sans goût, sans odeur, hors d’atteinte par les mots ou par le toucher, sans qualité, immuable et immobile." (Linga Purana)
[6] Henri Le Saux, Intériorité et révélation, p. 61-63

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