vendredi 14 octobre 2022

Extrait sur Chögyam Trungpa de "Trouble in Shangri-la" par Stuart Lachs



Extrait de l’article Tibetan Buddhism Enters the 21st Century: Trouble in Shangri-la, Stuart Lachs, publié en anglais sur Open Buddhism.
Traduction automatique (DeepL) retravaillé.
Chögyam Trungpa

Chögyam Trungpa (né en 1939 et mort en 1987) était le onzième de la lignée des Trungpa tulkus, figures importantes de la lignée Kagyü, l'une des quatre principales écoles du bouddhisme tibétain. Parmi ses principaux professeurs figurait Dilgo Khyentsé Rinpoché, ainsi que d'autres professeurs tibétains respectés. Trungpa avait reçu une formation complète dans la tradition Kagyu et obtenu son diplôme de khenpo (Wyl. mkhan po), un haut degré d'érudition bouddhiste dans les monastères tibétains. Trungpa avait également été formé dans la tradition Nyingma, la plus ancienne des quatre écoles du bouddhisme tibétain. En 1958, Trungpa s'est enfui de son monastère, et vivait caché après l’occupation du Tibet par l'Armée populaire de libération chinoise. Trungpa entreprit un dangereux voyage pour fuir le Tibet en avril 1959, et arriva en Inde en janvier 1960. Trungpa était à la tête du groupe de monastères Sourmang au moment de son départ. En un mot, Trungpa était un tulku important et avait un grand respect pour les maîtres orthodoxes du bouddhisme tibétain ; selon les règles du bouddhisme tibétain, il était parfaitement authentique.

En 1963, il étudie la religion comparée à l'Université d'Oxford. En 1967, avec Akong Rinpoché, également tulku, ils reprennent un centre de méditation en Ecosse qui deviendra Samye Ling, le premier monastère bouddhiste tibétain en Europe[1]. Peu de temps après son installation en Écosse, Trungpa, ivre et en excès de vitesse, a un accident de voiture qui le laisse partiellement paralysé du côté gauche. Cet accident, ainsi que d'autres expériences, amènent Trungpa à renoncer à ses vœux monastiques, et à continuer à enseigner en tant que laïc. Il fumait, buvait beaucoup et couchait ouvertement avec ses disciples. Il était également connu pour faire attendre ses disciples pendant des heures avant un enseignement, arrivant souvent avec un verre à la main. En 1970, il épousa Diana J. Mukpo, une disciple anglaise de 16 ans, d’une famille très riche. Il rompit avec Akong Rinpoché sur un désaccord sur la façon d'enseigner le bouddhisme tibétain. Akong favorisa une approche plus ordonnée, par opposition à la manière plus sauvage de Trungpa, appelée "Sagesse folle". Trungpa quitta l'Ecosse et s'installa aux Etats-Unis en 1970.

Trungpa était extrêmement charismatique et avait une façon unique de présenter le bouddhisme tibétain, qui plaisait à ses disciples occidentaux. Il était brillant, spirituel, et ouvertement alcoolique, ce qui, initialement, plaisait surtout à la contre-culture, aux artistes, aux écrivains et aux gens du théâtre. Parmi ses disciples, il compta le poète Allen Ginsberg, le biologiste/philosophe chilien Francisco Varela et les poètes/activistes Diane di Prima et Anne Waldman. 2 Un autre auteur/journaliste qui suivait Trungpa était John Steinbeck IV, avec sa femme Nancy. Steinbeck était le fils de John Steinbeck, le lauréat du prix Nobel, auteur de Les raisins de la colère et Des souris et des hommes. Contrairement à beaucoup d'adeptes de Trungpa, John Steinbeck IV et Nancy ont su reconnaître et aborder certains des problèmes générés par Trungpa, et ses enseignements de la Folle sagesse. Je m’appuierai sur eux comme une source importante, pour présenter la vie et de l'enseignement de Trungpa aux Etats-Unis. Je me réfère à eux en tant que “Steinbeck”, et je cite leur livre, The Other Side of Eden, à différents endroits dans ce document. 3

Initialement, les centres de méditation de Trungpa étaient appelés des “Dharmadhatus”. Ils sont actuellement connus sous le nom de “centres de méditation Shambhala”, y compris les grands centres du Colorado, du Vermont, et de la Nouvelle-Écosse, qui organisent des retraites de méditation intensive. En 1974, Trungpa fonda l'Institut Naropa, qui est devenu plus tard l'Université Naropa, la première université bouddhiste accréditée en Amérique du Nord. Des personnages connus ont enseigné à l’institut Nāropa de Trungpa. Il fut l'un des premiers à présenter l'enseignement ésotérique du Vajrayana à des disciples laïcs occidentaux. Comme d'autres maîtres du Vajrayana, Trungpa mettait en garde contre les terribles conséquences de l'abandon de cette voie, ou de la divulgation des secrets de ses pratiques. 4 Nous en verrons d'autres exemples plus loin dans ce document.

La romance initiale de Trungpa avec le monde de la poésie américaine et son acceptation par ce milieu ont été brisées par deux événements. Au début des années 1970, une lecture de poésie eut lieu à l'université du Colorado, au profit du centre de méditation de Trungpa, à laquelle participèrent Allen Ginsberg, Gary Snyder et Robert Bly, Trungpa agissant comme maître de cérémonie. Trungpa avait bu trop de saké et n'arrêtait pas d'interrompre les poètes avec des bruits forts, en imitant le son des pets, faisant des yodels, puis frappant fort sur un gong à la fin. Trungpa s'est excusé auprès du public à la fin de la soirée, non pas pour son propre comportement, mais pour les poètes : "Je suis certain qu'ils ne pensaient pas ce qu'ils ont dit". Depuis cet événement, Snyder et Bly avaient pris leurs distances avec Shambhala. 5

Le deuxième événement qui a profondément envenimé l’attitude de la communauté des poètes et beaucoup d'autres personnes envers Trungpa et Shambhala est connu sous le nom de "Grande Guerre de la Poésie de Naropa" ou "Affaire Merwin". Le célèbre poète W.S. Merwin et son amie, la poétesse hawaïenne Dana Naone, n'étaient pas des disciples avancés de Trungpa. Cependant, ils furent autorisés par Trungpa à assister [à la fin du] séminaire de trois mois de 1975, limité aux disciples avancés. Trungpa avait organisé une fête d'Halloween qui, comme d'habitude à Shambhala à l'époque, était sous le signe de l'ivresse. Merwin et Naone ne voulaient pas y participer, mais sur ordre de Trungpa, ils furent forcés de sortir de leur chambre par la force physique, au milieu de beaucoup de violence, et conduits devant Trungpa, qui ordonna à ses gardes Vajra de les déshabiller, ce qu'ils firent. 6

Sous le règne de Trungpa, Shambhala était connu pour ses fêtes sauvages, sa consommation excessive d'alcool et ses relations sexuelles sans lendemain. Il avait également popularisé l'idée de la "Folle sagesse", dont les paroles et les actions seraient souvent incompréhensibles pour des personnes non-éveillés. Être un représentant de la lignée de la "sagesse folle" signifiait que tout les comportements scandaleux étaient à prendre comme un enseignement. 7 Trungpa semblait avoir eu un goût pour les femmes mariées, et laissait entendre que les aventures extraconjugales étaient un chemin direct vers l'illumination. 8 Trungpa encourageait ses disciples à cultiver le détachement envers leurs enfants. 9 Nancy Steinbeck raconte que son instructeur de méditation "m'avait un jour accusée de me cacher derrière mes enfants, en refusant de les confier à des baby-sitters et de faire du bénévolat "10.

Malgré sa brillance et sa créativité, qui ont attiré de nombreux adeptes, [ ] son implication dans les produits pharmaceutiques s'est rapidement transformée en une véritable addiction, qui a obscurci son jugement. 11 Les Steinbeck ajoutent que, malheureusement, Trungpa se présentait comme une autorité dans des domaines, où il n'avait aucune compétence, comme l'éducation des enfants et la dynamique d’une famille. 12 Ses disciples ont suivi ses paroles, ce qui a conduit à de nombreux torts : "trop de cœurs brisés, beaucoup trop d'abus allaient ruisseler comme une pluie toxique sur la tête de ces enfants, que nous avions si allègrement laissés à la maison "13 Dans cet article, le lecteur verra malheureusement des exemples de ce que cela signifie.

Trungpa utilisait le titre de Vidyadhara Trungpa Rinpoché, qui indique qu'il était quelqu'un qui évoluait constamment dans l'état de pure conscience. Cela signifie également que ses disciples et le commun des mortels ne pouvaient pas le comprendre. Il prétendait qu’ayant la nature de Vajra [une psychophysiologie transformée et stabilisée par le yoga], il était immunisé contre les effets physiologiques normaux de l'alcool", avait déclaré un disciple. Ses disciples ont cru à cette histoire. Il n'est venu à l'esprit de personne, qu'il était un alcoolique, car l’alcoolisme était un maladie qui touchait le commun des mortels. 14 Il était bien connu qu'il était dépendant à l'alcool, ce que l’on savait beaucoup moins, même aujourd'hui, c'était sa dépendance à la cocaïne, qui lui coûtait 40 000 dollars par an [en dollars du milieu des années 1980] et, "ironie suprême, sa dépendance au somnifère Seconal". Des somnifères pour un gourou qui se présentait comme un éveilleur de consciences.'15

Steinbeck poursuit en décrivant les effets des années de consommation excessive d'alcool et de drogues de Trungpa. Au cours de sa dernière année, il était tellement délirant qu'il convoquait ses assistants et leur disait qu'il voulait rendre visite à la reine du Bhoutan. Ils le mettaient dans sa Mercedes et faisaient plusieurs fois le tour du quartier. En le ramenant à la maison, ils lui demandaient en riant comment s'était passée sa visite. "Merveilleuse", répondait-il. "Elle était délicieuse." Et ils appelaient ça de la magie. "Il est si puissant", chuchotaient-ils. "16 Les Steinbeck qualifiaient les proches disciples de Trungpa qui le servaient de "facilitateurs" [enablers]. Ils prétendaient que lui fournir des drogues et de l'alcool était l’expression de leur dévotion sans mesure, tout en se moquant de ceux d'entre nous qui s'y opposaient. 17 "Tout ce que le maître demande, je le lui donnerai", tel était leur vœu. Ils croyaient que briser ce samaya (vœu), refuser d'administrer au gourou le poison qui le tuait, les enverrait littéralement en enfer. 18 Il faut noter ici que les disciples de Trungpa, exprimant leur dévotion à son égard en lui fournissant de l'alcool et vraisemblablement de la cocaïne comme il le souhaitait, était en accord avec la vision du samaya, telle que représentée par trois Rimpoches bien connus : Kalu, Dilgo Khyentsé et Dzongsar Khyentsé, comme nous le verrons bientôt.

Les Steinbeck ajoutent une autre image troublante à la supposée nature Vajra de Trungpa et à sa prétendue capacité à transcender les effets d'une consommation excessive d'alcool et de drogues : "Après sa mort, un adolescent bouddhiste m'avait demandé : "Savais-tu que des gars faisaient du proxénétisme pour Rinpoché ? Ils lui trouvaient de nouvelles femmes pour coucher avec lui." (...) Alors que tout le monde se précipitait pour louer le courage de Rinpoché, pour avoir été si ouvert sur ses indulgences massives, ses sbires écumaient constamment les différents centres pour trouver du sang neuf. Les femmes étaient formées comme des "consorts". Cela signifiait qu'elles savaient quoi faire quand il vomissait, chiait dans le lit, sniffait de la coke jusqu'à l'aube, tournait son attention vers d'autres femmes, et avaient peut-être même envie d'un plan à trois. Notre petite bande de bouddhistes anonymes avait commencé à interroger des experts, s'ils pensaient que ce comportement manifeste pourrait constituer un abus religieux ou sexuel. La réponse standard que vous obtenez alors de la part du club des vieux garçons qui adhèrent au système (parce qu’ainsi leurs coffres seront également toujours pleins pour leurs propres addictions) est qu'ils n'ont jamais, dans toute leur carrière de proxénète, entendu une femme se plaindre d’avoir couché avec Rinpoché. (Enfin “coucher”, pendant des années, il était impuissant par alcoolisme et imaginait de petits jeux sexuels à l'aide d'un godemiché, connu sous le nom de "Mr Happy", ou insistait pour que les femmes se masturbent devant lui.) '19

Il allait finalement mourir "de l'alcoolisme et de la toxicomanie les plus aigus que j'aie jamais vus" et je le savais, écrit Nancy Steinbeck, "parce qu'à l'époque je travaillais dans un centre de désintoxication pour VIPs à La Jolla, en Californie " 20 " J'ai vu une photo de lui prise quelques jours avant sa mort. Il était maigre comme un os ; ses yeux avaient le regard hanté d'un fou.'21

Victoria Fitch, un membre du personnel de maison de Trungpa ayant des années d'expérience en tant qu'infirmière, donne une description plus détaillée du déclin final et de la mort de Trungpa. Il décrit également comment sa véritable condition a été tenue secrète pour presque tous les disciples de Trungpa et que, quelles que soient ses affirmations, Trungpa mourait comme d'innombrables autres alcooliques. Fitch écrit : "Lorsque Trungpa Rinpoché était mourant en 1986, à l'âge de 47 ans, seul un cercle restreint connaissait les symptômes de sa dernière maladie. Peu de gens pouvaient supporter de reconnaître que leur maître bien-aimé et brillant était en train de mourir d'un alcoolisme terminal, même lorsqu'il gisait incontinent dans sa chambre, le ventre distendu et la peau décolorée, souffrant d'hallucinations et de varices, de gastrite et de varices œsophagiennes, un gonflement des veines dans l'œsophage causé presque exclusivement par une cirrhose du foie".

Rinpoché n'était certainement pas un citoyen lambda, mais il est mort comme tous les alcooliques que j'ai vus boire sans interruption. Le déni était profond", poursuit-elle. J'ai vu sa démence alcoolique expliquée par le fait qu'il était dans le royaume des dakinis [khandroma (Wyl., mkha' 'gro ma) en tibétain], c'est-à-dire des gardiennes des enseignements, visualisées sous forme féminine. "22

Walter Fordham, le gestionnaire de la maison de Trungpa, donne un exemple du degré d'optimisme et de déni des effets d'années d'abus d'alcool et de drogues sur Trungpa parmi ses disciples, en affirmant que "l’on pouvait dire sans le moindre doute que son niveau de conscience n'était pas affecté par l’alcool "23.

Selon Steinbeck, "les commentaires d'autres lamas sur Rinpoché [Trungpa] ont commencé à affluer. Ils ont fini par admettre que pendant des années, ils avaient craint pour sa santé mentale et pensé qu'il avait agi de manière irresponsable, mais que personne n'en avait parlé. 24 En 1989, le Dalaï Lama déclara en privé à Steinbeck "qu'il ne ferait jamais confiance à un gourou qui prétendrait, comme l'avait fait Rinpoché, pouvoir transformer l'alcool en élixir".25 Il semble, du moins dans ce cas, que pour certains lamas et pour le Dalaï Lama, la protection du statu quo du bouddhisme tibétain était plus importante que le préjudice causé à des personnes réelles.

On peut se demander si le Dalaï Lama, ou d'autres lamas, avaient publiquement fait part de leurs propres inquiétudes concernant la transformation de l'alcool en élixir, ou de bien d'autres inquiétudes qu'ils ont pu avoir au sujet de Trungpa et de Shambhala. On peut se demander si on aurait alors pu préserver beaucoup de gens, y compris Trungpa lui-même, de bien des souffrances ? On peut encore se demander si ces préoccupations concernant Trungpa et Shambhala avaient été partagées, si les abus qui ont été transmis par les dirigeants, de génération en génération, et qui semblent avoir infecté de nombreux centres Shambhala, auraient pu être évités. Mais soulever ces inquiétudes sur les actions et la santé mentale de Trungpa aurait soulevé d’autres questions sur l'autorité incontestable du système des tulkus et sur l'autorité des grands lamas qui cautionnent la génération suivante de chefs officiels.

La cérémonie de crémation de Trungpa avait eu lieu en mai 1987, en présence d'environ trois mille personnes. Dans ce qui semble être une version aseptisée du déclin et de la mort de Trungpa, mais qui servait également d'écran de fumée pour les choses à venir, le fils de Trungpa Rinpoché, Gesar Mukpo, demi-frère du nouveau chef de l'organisation Shambhala, c'est-à-dire Sakyong Mipham, avait déclaré : Mon père... était un fou de la boisson ! À quel point êtes-vous des fous vous-mêmes ? Jusqu'à quel point êtes-vous courageux pour vraiment faire ce qu’il faut ? Il était un guerrier. Un guerrier avec un stylo. Un guerrier avec le bon mot. Un guerrier de la boisson. Si vous n'aimez pas qu'il buvait, c'était un fou, et il est mort. Si en revanche son penchant pour la boisson ne vous dérange pas, et que vous pensez que sa sagesse d’éveil était incroyable, alors vous êtes un candidat éligible pour ses enseignements.'26 Nous voyons ici que l'abus d'alcool est présenté comme la voie de la pratique. Mukpo met les disciples de Trungpa au défi de devenir des fous à leur tour, ce qu'il assimile à la bravoure, à l’attitude du guerrier, et à une opportunité pour arriver à la sagesse de l’éveil. À l'époque, en mai 2000, on ne savait pas encore que le Sakyong lui-même avait des problèmes d'abus d'alcool et de femmes.”

Fin de l’extrait de l’article

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  1. Perry, Andrew (2011). Bringing Chogyam Trungpa’s “Crazy Wisdom” to the screen—A conversation with filmmaker Johanna Demetrakas. Lion’s Roar, November 23, 2011 (last accessed February 3, 2019).
  2. John Steinbeck IV & Nancy Steinbeck (2001).The Other Side of Eden. Amherst: Prometheus Books.
  3. Stephen Butterfield (1994) The Double Mirror: A Skeptical Journey into Buddhist Tantra (p. 11). Berkeley: North Atlantic Books. Also see, Matthew Kapstein (2014). Tibetan Buddhism: A Very Short Introduction (p. 86). Oxford: Oxford University Press: ‘Tantric practice must be grounded in unswerving devotion to a qualified teacher, without this, only its outer form survives.’
  4. Kashner, Sam (2004). When I Was Cool: My Life at the Jack Kerouac School (p. 49). New York: Harper Collins: ‘Consulting I Ching Smoking Pot Listening to the Fugs Sing Blake.’
  5. Much has been written about this. See, Clark, Tom (1979). The Great Naropa Poetry Wars (designed and printed by Graham Mackintosh), November 1979. Also see, Marin, Peter (1979). Spiritual Obedience: The transcendental game of follow the leaderHarper’s Magazine, February 1979 (last accessed July 8, 2019), for an overview of Trungpa and his followers. For a description of the “Merwin Affair,” see pp. 51-53. For another condensed version of the “Affair,” some reactions by Ginsberg, and the atmosphere around Trungpa, see Woods, Robert (pseudonym of Tom Clark), ‘“Buddha-gate”: Scandal and cover-up at Naropa revealed,’ Berkeley Barb. 28 (13), number 698, March 29 – April 11, 1979 (pp. 17-18, 21).
  6. Steinbeck, p. 29
  7. Steinbeck, p. 39
  8. One could argue that Trungpa practiced what he preached here leaving his son Ösel Mukpo, the future Sakyong Mipham with his mother in a Tibeten refugee camp in India while he went to England and then a little later leaving him again to go to America after Ösel Mukpo was in England.
  9. Steinbeck, p. 39
  10. Steinbeck, p. 40.
  11. Steinbeck, p. 40. Trungpa was not alone in this behavior, the author of this paper is familiar with a number of Zen teachers who also assumed the all-wise role.
  12. Steinbeck, p. 40.
  13. According to Dilgo Khyentse Rinpoche, the Sanskrit word vidyadhara (in Tibetan rigdzin, Wyl., rig ‘dzin) indicates someone who constantly abides in the state of pure awareness of rigpa-knowledge that comes from recognizing one’s nature. See also, Vidyadhara, Rigpa Wiki (last accessed July 8, 2019).
  14. See, Tibetan Buddhism in the West. Katy Butler’s (1990) article ‘Encountering the Shadow in Buddhist America’ appeared in Common Boundary Magazine, May-June 1990 (pp. 14-22). It dealt mostly with teacher abuse and its effects in the Shambhala community but also mentioned similar troubles with Zen groups and teachers.
  15. Steinbeck, p. 211. For a first person report of Trungpa’s cocaine use and child rape by one of his seven young wives trained to serve him see, Dharma Wheel (last accessed January 20, 2019). It also has come out recently that there was child sexual abuse at a number of Shambhala centers. See, Buddhist Project Sunshine (last accessed July 8, 2019).
  16. Steinbeck, p. 211.
  17. Steinbeck, p. 211.
  18. Steinbeck, p. 211.
  19. Steinbeck, p. 212-213.
  20. Steinbeck, p. 32.
  21. Steinbeck, p. 210.
  22. Katy Butler (1990), Encountering the Shadow in Buddhist America. Common Boundary Magazine, May-June 1990 (pp. 14-22).
  23. Remski, Matthew (2018). Pema Chödrön on Trungpa in 2011: “I Can’t Answer the Relative Questions”. Matthewremski.com July 20, 2018 (last accessed October 26, 2018.
  24. Steinbeck, p. 211.
  25. Steinbeck, p. 32.
  26. See, Way Back Machine (last accessed July 6, 2019). Thompson, Jesse (2000). The Dharma Brats: Growing up Buddhist in America. Nexus, May-June 2000.

mercredi 12 octobre 2022

Secrets de famille dévoilés par publications interposées

Georges Ivanovitch Gurdjieff (photo : Yahne le Toumelin)

L’article “ What It Means to be aScientific Monk’ ” de Marion Dapsance[1], montre comment Matthieu Ricard aime jouer sur deux tableaux : docteur en génétique et moine bouddhiste, et de rapprocher la religion de la science, et la science de la religion, ce qui aboutit à des disciplines de “science contemplative”. Notamment dans le cadre de l’institut Mind and Life, de la Pleine conscience et de la recherche neurologique sur les effets de la Pleine conscience. Il participe également au projet éducatif[2]Abiding Heartde Mingyur Rinpoché, en tant que docteur.


Matthieu Ricard présente la complémentarité de ses talents comme un héritage de ses parents. De son père Jean-François Revel (1924-2006), il a hérité de l’esprit scientifique, et de sa mère Yahne Le Toumelin (née en 1923) le côté artistique et spirituel.

Yahne le Toumelin, Gurdjieff et d'autres disciples (photo : Yahne le Toumelin) 

Sa mère s’intéressait à la spiritualité dès son adolescence, et avait fréquenté les cercles parisiens de Georges Gurdjieff (1866/1872-1949). Le premier roman de son père “Histoire de Flore” (1953) serait inspirée de l’histoire de sa mère. Dans ce livre, Revel raconte “ l'évolution spirituelle d'une jeune catholique exaltée, qui sera une adolescente toumentée et fragile, puis devient, à vingt ans, l'élève obéissante de Gurdjieff - si obéissante qu'elle obéit à son maître lorsque celui-ci lui demande d'avoir des relations sexuelles avec lui, en lui disant que c'est "un test"[3]”. L'oncle maternel de Matthieu, Jacques-Yves Le Toumelin, l’avait introduit aux écrits de René Guénon. Sa mère avait pris les voeux de nonne auprès de Rangjung Rigpe Dorje, le 16e karmapa, à Rumtek en 1967, et serait devenu en 1968, disciple de Kangyour Rinpoché, avant que Matthieu Ricard ne la suive dans cette voie quelques années plus tard.
Sans recourir à une théorie psychanalytique de bas étage, il est assez facile de voir comment Matthieu Ricard a essayé de donner un sens à son héritage familial conflictuel. Comme son père, il affirme que la science et l'empirisme doivent être à la base de la compréhension de la vie. Comme sa mère, il pense que la vie doit aussi avoir un sens - un sens personnel, individuel, existentiel - et que, pour trouver ce sens, il faut essayer de devenir une meilleure personne sous la direction de "grands maîtres", considérés comme des modèles de perfection "spirituelle" (plutôt que simplement intellectuelle).[4]” (trad. auto, What It Means to be a ‘Scientific Monk)
MR et JF Revel (photo : Luc Fournol/Photo12)

Seulement, Matthieu Ricard explique lui-même en 2016 dans Ultreia n° 07 que son père n’aurait pas toujours été si scientifique et empirique qu’il ne le voulait le laisser entendre. Sur le site de Yahne le Toumelin, celle-ci écrit avoir fréquenté Gurdjieff à partir de 1942. Dans l’interview précité de Matthieu Ricard, on apprend[5] que Revel, fréquentait lui-même les cercles de Gurdjieff entre 1945-1950. Revel et Le Toumelin s’étaient mariés en 1945. Matthieu Ricard est né en 1946. Selon Daniel Goleman (Destructive Emotions, 2014), Gurdjieff était même son parrain. Gurdjieff est mort en octobre 1949. S’il n’était pas mort, les parents de MR l’auraient-ils suivi plus longtemps ? En 1952, Revel et Le Toumelin se séparent. En 1953, Revel publie son roman.
Si j’en crois ma mère, Yahne Le Toumelin, ses Mémoires n’étaient pas d’une totale objectivité. Il a indéniablement été pendant un temps sympathisant de Gurdjieff, un personnage sur lequel je ne me suis pas beaucoup penché et dont je n’ai pas lu les écrits. Mon père parle de ses “années noires" en y incluant sa vie avec ma mère. C'est pour le moins exagéré car au début, ils s'aimaient bien quand meme…

“Ultreia : Il affirme que l'influence qu'a pu avoir sur lui votre mère, fascinée par l’Orient a été “éphémère”...
- Il a certes écrit que cette orientation avait été une erreur mais ma mère m’a confirmé qu’il participait bien aux danses de Gurdjieff. J’ai même une photo où on le voit, assis en méditation, avec moi dans son giron
.” 
"Mouvements", danses de Temple (photo : John G. Bennett)

Matthieu, petit, dans un salon de Gurdjieff ? Revel aurait donc, à son insu, fait des danses vajra ?

Dans son dernier livre (07/10/2022), Carnets d’un moine errant, dans le chapitre 9 - Qu’est-ce qu’un maître authentique ? MR rappelle une fois de plus l’importance de bien examiner et choisir son maître spirituel.
Au disciple, il est donc fortement recommandé de ne pas se fier au premier venu et d’examiner tout d’abord minutieusement les qualités du maître potentiel, en commençant par s’informer auprès de tierces personnes, puis en s’assurant que l’opinion qu’il s’est faite est conforme à la réalité. Il est conseillé de laisser s’écouler plusieurs années avant d’accorder à un maître son entière confiance, car s’en remettre à un individu non qualifié revient à absorber du poison.

Le Dalaï-lama conseille avec insistance à tous, Orientaux comme Occidentaux, de mûrement réfléchir avant d’étudier auprès d’un maître pour s’épargner de possibles et amères déconvenues. Il ne s’agit pas pour autant de s’adonner à un papillonnage spirituel auprès de toutes les traditions de la planète et de tous ceux qui enseignent à tout vent. Comme le disait ma mère, Yahne:
« Lorsque vous trouvez un puits avec de l’eau vraiment pure, si vous avez soif, buvez[6]. Ne vous lancez pas dans le tourisme des puits ! »
Jean-François Revel est l’auteur du roman Histoire de Flore (1953), qui raconte la vie de "Flore", en trois parties : la famille, l’amitié et l’amour et l’ésotérisme. C’est dans le milieu ésotérique que JF Revel dit avoir fréquenté personnellement, qu’il avait rencontré la jeune femme en question, “Flore”. “On peut dire que, dans mon livre, il y a une part de document.” (Interview au début du livre). Le milieu ésotérique dans son roman, est celui des cercles parisiens des années d'après-guerre, et notamment ceux de “M. F…” (Gurdjieff), “un septuagénaire chauve et ventripotent, en pantoufles, avec une veste d’intérieur sale, le visage rond, un peu mongol, le regard fort” (p. 179). “Flore” a de la chance, car le maître lui dit de passer directement au groupe de jeudi.
Le grand avantage était évidemment de pouvoir approcher deux ou trois jeunes filles assez jolies, quoique pauvres, comme Flore, mais aussi une ou deux femmes du plus grand monde, admirablement habillées, dont Flore se souvenait d'avoir vu parfois le nom dans « Paris Match » ou dans « France-Dimanche » [ ] Aussi M. F... avait-il laissé entrevoir à Flore que le groupe n'était pas seulement la base du travail intérieur, mais aussi le moyen de s'organiser une vie extérieure donnant toute la liberté qui était nécessaire à l'édification du vrai moi.” (pp. 184-185)
Comme “Flore” s’intéresse à l’art, le maître (Gurdjieff) lui parle d’art lors de leurs entretiens privés. Et Revel décrit parfaitement le modus operandi qui aurait pu être celui de Sogyal Lakar, et la réaction de Flore, en pleine dissonance cognitive, grâce au “travail” préparatoire (“grooming”). Réduire la victime à zéro, lui faire sentir qu’elle doit se détacher d’elle-même et qu’elle doit passer par une grande “épreuve”, faire quelque chose qui lui coûtait vraiment.
A toutes ces questions, M. F... se borna à répondre, un soir, que l'art et la littérature actuels n'étaient que du fumier, des manifestations nuisibles de psychopathes vaniteux. D'ailleurs, tous les arts étaient en décadence depuis et y compris les Grecs, comme la philosophie, la littérature, la science et la religion.”
[ ]
- Et... les cathédrales du Moyen Age? demanda Flore - Cathédrales: merde, répondit M. F... Art vrai : Tibet, ajouta-t-il.
- Et la musique? Mozart?
- Mossart : merde.
Seul Max Linder trouva grâce aux yeux du maître. “L'art doit être objectif, il doit venir de vrais hommes, qui possèdent le vrai être. Vous voulez voir un exemple d'art objectif?” Et le maître lui montre une photographie pornographique, en observant de près la réaction de Flore, puis lui faisant comprendre que jusque-là elle n’avait pas encore réellement travaillé sur elle.
Ce qui la frappa, d'abord, ce fut la laideur monstrueuse des participants et la bizarrerie de leur position. Elle leva la tête et surprit le regard de M. F... qui observait les réactions de son visage. Elle se redressa, fut prise d'un tremblement terrible et se sentit pâlir. Elle sentit, en même temps, tout le ridicule du calme prétentieux qu'elle se figurait avoir atteint depuis quelques mois, sa précarité, son existence. Elle se laissa retomber sur son tabouret, l'épaule contre le mur, regardant devant elle. Elle apercevait à l'horizon le visage de M. F... qui la contemplait avec placidité, et, sur la table, entre eux, la photo.

Votre travail jusqu'à présent n'est rien, dit M. F..., vous: nullité. Vous voyez : une seule chose, et vous êtes perdue. Vous êtes complètement identifiée à votre sexe, hystérique, psychopathe. Savez-vous ce qu'il vous faut pour vous aider à lutter contre vous-même ? Et aussi pour vous redonner une sexualité normale? Coucher avec moi. [188]”
Il est évident que Revel sait ce dont il parle, il reproduit parfaitement le discours du maître : sur “le travail”, le travail sur l’ego dirait-on maintenant. Flore avait sursauté à la question du maître, mais dans les cercles on parlait d’une grande “épreuve”. Quand elle répond que le maître pouvait être son grand-père, celui-ci répond :
“- Moi, pour vous, répliqua M. F... en colère, grand-père, père, mari, frère, amant, tout[7]. Si vous voulez que je vous aide, il faut avoir avec moi une relation intégrale, complète. Si vous ne voulez pas coucher avec moi, c'est que vous accordez justement encore trop d'importance à cela. Il faut arriver à en faire une chose extérieure à vous, dont vous ne soyez pas esclave. - Un jour ou l'autre, il faudra que cela arrive, ajouta-t-il. Nécessaire, à un certain moment du travail. Sans ça, pas travail : titillation, philosophie. Réfléchissez et venez me voir demain. Puis il se calma, et, d'une voix rassurante, se mit à exposer son point de vue, comme sur une affaire tout à fait impersonnelle, avec mesure et réalisme. Flore se leva, enfila péniblement son manteau, sans faire attention au col qui resta à [189] moitié replié à l'intérieur, et se trouva dans la rue, étourdie, accablée.”
Gurdjieff était un modèle pour Chögyam Trungpa, qui admirait letrickster” (filou), la maîtrise de la manipulation à dû lui inspirer. La fréquentation des cercles, l’invitation au groupe privilégié, avec d’autres jolies filles, des femmes de notables, dont certaines étaient déjà passées par “l’épreuve”, les entretiens privés avec le maître, travaillant son ego, faisaient sentir à Flore qu’elle était nulle ; tout cela la travaillait.
Le sens de l'épreuve, certes, était clair. Mais triompher de cette épreuve, qu'était-ce? Avait-il fait cela simplement pour l'observer au moment où elle avait totalement perdu le contrôle de son visage, de sa voix, de ses gestes? Que convenait-il de faire maintenant? Abandonner, “ tomber “ ? Y retourner, sans accepter? Mais quelle vie d'enfer! Accepter, mais peut-être était-ce là justement ce qu'il ne fallait pas faire. Ne serait-ce pas se trahir, tomber dans le piège, révéler qu'elle croyait à l'illusion que le progrès spirituel peut s'acheter par des dons matériels, d'argent ou de son propre corps. Mais quelle est la chose la plus difficile? songea-t-elle. La plus coûteuse? Celle qui me force le plus à me détacher de moi-même ? C'est l'acceptation, sans aucun doute. Elle restait immobile, debout dans la rue, prise par cette évidence de plus en plus claire qui triomphait en elle avec une rapidité effrayante, et elle, Flore, se voyait de plus en plus en arrière, de moins en moins sensible à elle-même, engluée dans une sorte de grand ralentissement de tout l'être, d'affaissement et d'oubli.”
Et Flore retourne chez le maître à quatre heures du matin, pour ressortir de chez lui à six heures du matin.

Dans son livre cinq de ses Mémoires, Le voleur dans la maison vide, où JF Revel parle des “influences néfastes”, il décrit les cercles de Georges Ivanovitch Gurdjieff, cette fois-ci nommément, tels qu’il les avait connus pendant cinq ans. Le jargon parlé dans ces cercles pouvait être celui dans les cercles BT… être ou entrer dans le Dharma, les trois corps, le travail sur l’ego…

Mme de Salzmann, rassurante confidente, explique à tous que ces exigences sont dénuées de tout égoïsme et dictées par le seul souci de nous faire " avancer dans le travail ". De même, c'est encore Mme de Salzmann qui est là pour traduire, quand Gurdjieff se lance dans une réponse trop subtile pour son piètre français et passe donc au russe. Avoir suscité une réponse " en russe " signifie, pour le disciple, un degré de sollicitude supérieur de la part du maître et donc d'avancement marqué chez lui-même.”

Revel décrit aussi ce qui ressemble au néo-bouddhisme à la française quelques décennies en avance :
La substance proprement dite de l'enseignement de Georges Ivanovitch Gurdjieff - Ghiorghivantch pour les familiers - rassemblait en un pot-pourri trivial des traits empruntés au vieux fonds universel des doctrines de conquête de la sagesse et de l'illumination spirituelle. Ses principales sources se situaient en Orient, parce que c'est l'Orient qui plaît en Occident, comme le montre par ailleurs, avant et juste après la guerre, le succès des Oeuvres de René Guénon, qui ne séduisirent pas seulement de vieilles rombières crédules, puisque le persifleur Jean Paulhan et même un intransigeant rationaliste comme Etiemble m'en parlèrent, plus tard, avec un évident intérêt.”
Toute ressemblance avec les cercles de Trungpa et de Sogyal, etc. n’est pas fortuite. J’irai plus loin que Matthieu Ricard dans son conseil : ne fréquentez pas les cercles, n’examinez même pas leurs maîtres, n’y allez pas, ne demandez pas de l’aide pour “travailler sur vous”. Ne perdez pas votre temps et votre intégrité.

***

"A l’instar du fondateur du «Point», Claude Imbert, dont il fut un des intimes, le philosophe et essayiste fait partie des hommes accusés par Inès Chatin de lui avoir fait subir des violences sexuelles pendant son enfance."
Voir aussi : Controversial Reputation on the website http://gurdjiefffourthway.org

"By the early 1930s Gurdjieff’s reputation among many of his students was in tatters.
They were disillusioned by his seedy appearance, unprincipled behaviour, and his alleged use of hypnosis and unorthodox medical treatments as a source of income. By the summer of 1933 scandalous rumours about Gurdjieff had reached a crescendo: he was slovenly and debauched; he was afraid of the dark and of being alone; he was out of control and destroying everything; he was alienating even his closest students."


[1] What It Means to be a ‘Scientific Monk’, Matthieu Ricard and the Influence of Western Esotericism on the Mind and Life Institute
Talk delivered at the Conference on Buddhism and Neuroscience at Columbia University on Nov. 11, 2016, “Beyond the Hype. Buddhism and Science in a New Key”.

[2] Le nom du cours est « Le développement de l’enfant, de la naissance à la réincarnation » (‘Child Development from Birth to Rebirth’). Il durera 10 semaines et comprendra sept modules. Le « campus » Abiding Heart Education forme également les enseignants, les éducateurs, les moniteurs, les parents etc. au « développement holistique de l’enfant ». C’est une nouvelle approche éducative, combinant la vision bouddhiste du monde, la méditation, la méthodologie Steiner/ Waldorf, ainsi que la « science du développement », le meilleur de ce que l’Orient et l’Occident ont à offrir dans le domaine du développement de l’enfant. Voir mon blog Le réincarnationisme à lécole.

The curriculum fuses the live Buddhist experiential tradition which emphasizes applying the knowledge acquired to everyday experience, with Steiner/Waldorf methodology and developmental science, giving rise to a unique and transformative children’s pedagogy.” Site : Courses

[3]In this book, the reader can follow the spiritual evolution of a young exalted Catholic child, who grows up to be a tormented and fragile teenager, and then becomes, in her twenties, Gurdjieff’s obedient student – so obedient that she obeyed her master when the latter asked her to have sex with him, telling her it was ‘a test’.” Marion Dapsance

[4]Without resorting to cheap psychoanalytic theory, it is rather easy to see how Matthieu Ricard tried to make sense of his conflicted family heritage. Like his father, he claims that science and empiricism should be the basis for one’s own understanding of life. Like his mother, he thinks that one’s life should also have a meaning – a personal, individual, existential meaning – and, in order to find such meaning, that one should try to become a better person under the direction of ‘great masters’, considered to be models of ‘spiritual’ (rather than merely intellectual) perfection.” Marion Dapsance

[5]Il y avait sans doute dans votre famille un terreau propice à l’éclosion d'une vocation comme la vôtre, entre modernité et tradition. Dans ses Mémoires [Le voleur dans la maison vide, Plon, 1999], votre père - le philosophe et journaliste Jean-François Revel — reconnaît avoir été le disciple de Georges Ivanovitch Gurdjieff pendant cinq ans, de 1945-1950. Mais il se montre très critique à son égard en partant d’une ‘influence néfaste’’ qui l’a partiellement ‘deconstruit"...” Ultreia n° 07

[6] JF Revel, Mémoires : « Le monarque [Gurdjieff], environné de sa cour, portait les toasts à la santé de diverses catégories d'idiots - tous les humains qui ne suivaient pas son enseignement. Toasts nombreux, et Gurdjieff veillait à ce que nous finissions la soirée ivres. Avec un oeil infaillible de vieil alcoolique, il repérait les petits verres que certains emplissaient subrepticement d'eau, dont la couleur blanche, croyaient ces naïfs, se confondait avec celle de la vodka. La différence, c'est que l'eau offre à sa surface un ménisque, et pas la vodka. Décelant cette imperceptible convexité, un Gurdjieff courroucé exigeait que le coupable ingurgitât sans délai deux vodkas coup sur coup " à la santé de tous les idiots buveurs d'eau ". »

René Daumal, auteur de « La Grande beuverie » était également un disciple de Gurdjieff, avant l’époque des Ricards.
« — Buvons d’abord, prononça lentement l’homme de derrière les fagots. Ensuite je vous endormirai d’un discours plus ou moins consistant sur les emplois coupants, piquants, contondants, écrasants, désintégrants et quelques autres, du langage humain et peut-être de celui des oiseaux, mais buvons d’abord. »

[7] « Vajrayana texts state that for one who seeks enlightenment a guru is more important than all the buddhas of the three times put together. His job is not only to teach students but to lead them. He is our most important companion, our family, husband, wife and beloved child, because only he can bring us to enlightenment. » Dzongsar KR, Not for Happiness: A Guide to the So-Called Preliminary Practices.

jeudi 6 octobre 2022

Engagement total

Un suzerain, un vassal et un scribe

Suite aux scandales de l’été 2017 concernant Sogyal Lakar et son organisation Rigpa, et pendant la campagne de “nettoyage” menée par des hiérarques Nyingmapa tels que Dzongsar Khyentsé, Orgyan Tobgyal, Khenchen Namdrol, etc. le mot “samaya” (dam tshig), qui signifie "engagement sacré" tombait souvent. Quelque soit son sens dans le passé, ce terme fait désormais partie de la clause de responsabilité du Vajrayāna. Celle-ci, répétée comme un mantra, expliquerait que puisqu’il y a beaucoup de charlatans parmi les lamas (à qui la faute ?), il conviendrait de longuement examiner un “maître” avant de s’engager avec lui. Car une fois l’engagement (samaya) pris, on ne pourrait plus revenir en arrière. Le samaya n’est pas un engagement ordinaire, et a des parallèles (des origines ?) féodaux (voir ci-dessous). C’est une relation dans laquelle on peut entrer, mais dont on ne pourrait pas sortir, ou que "par le haut". Et même “réalisé” ou “accompli” on n'est pas à l'abri d'un incident. 
Même lorsqu'un disciple a atteint l'Accomplissement et qu'il rayonne de la plus parfaite gnose (samyag-jñāna), il salue respectueusement son guru accompli afin d'éviter l'enfer d'Avici.” Hevajra Tantra[1]
Pourquoi tous ces avertissements, et cette force de dissuasion, pourrait-on se demander ? Ce n'est donc pas par reconnaissance, respect ou amour que l'on salue son guru, mais pour éviter l'enfer d'Avici... Ce respect lui serait dû, quoi qu'il arrive, cela lui serait acquis.

C’est dans la collection des traités (bstan gyur), et dans la section des commentaires des tantras (rgyud 'grel, p.e. vol. 50 snar thang) que l’on trouve une petite série sur les offenses du vajrayāna qui régissent le lien (samaya) entre un maître et son disciples, de façon sommaire. Comme il s’agit de “traités” (śastra), ce ne sont pas des Paroles de Bouddha (buddhavacana), et leurs auteurs étaient donc officiellement humains. On y trouve des pseudépigraphes avec des grands noms (Nāgārjuna, Aśvaghoṣa), Ratnākaraśānti, son disciple Abhayākaragupta (mort en 1125), mais aussi des textes anonymes. Les offenses (apatti, ltung ba) énumérées dans ces textes sont assez différentes, et certaines se répètent. C’est à partir de lensemble des quatorze offenses principales du vajrayāna (Vajrayānamūlāpattisaṅgraha, rdo rje theg pa rtsa ba'i ltung ba bsdus pa) attribué à Aśvaghoṣa, que l’on trouve la version encore utilisée de nos jours. On peut y voir comme certaines offenses sont des évolutions d’offenses antérieures plus concises et plus énigmatiquement formulées. Notamment par rapport aux offenses principales[2] (Vajrayāna-sthūlāpatti, rDo rje theg pa'i spom po'i ltung ba) attribués à Nāgārjuna, qui ne mentionnent ni guru, ni co-initiés, ni la relation au guru. Les deux premières observances dans ce texte focalisent sur l’extraction de l’essence de la Prajñā et des substances secrètes (samayadravya). C’est surtout lorsque ces pratiques sont intégrées dans un cadre plus institutionnel, que les offenses évoluent et se soucient davantage du caractère secret de l’ensemble. D’où le mantrayāna secret.

Un maṇḍala est une la représentation de l’uni-vers, tourné vers le centre, où réside la divinité, le (Loka)Puruṣa et sa Puissance (śaktī). Une représentation “pure” (śudda), c’est-à-dire symbolique, uniquement accessible pour les initiés, qui ne sont plus des “enfants”. C’est en même temps un cercle fermé, dont celui qu’on appelle le guru gère l’accès. Dans le rituel (consécration) qui donne accès au cercle, le guru représente la divinité Père-Mère, dont il est indifférencié. Le rituel met concrètement en scène l’entrée dans le maṇḍala de l’initié, cette entrée est comme une nouvelle naissance, ou plutôt comme la naissance réelle car dans la lumière, sans nescience. La vie de l’initié ne sera plus jamais comme avant, s'il respecte son engagement total...

Le cercle est protégé par un code et un règlement, que respectent tous ceux qui y ont été admis. Ce règlement (samaya) est plus fort que tout autre règlement, y compris la discipline des premiers bouddhistes, les auditeurs (śrāvaka). Les versions les plus anciennes interdisent aux initiés (samayin, dam tshig can) de résider plus de sept jours dans les monastères suivant la règle des auditeurs. Est-ce pour éviter une rechute du moine samayin dans la voie inférieure, ou pour que celui-ci ne trahisse pas son appartenance au cercle secret ? Cette offense que l’on retrouve dans les Offenses principales du Vajrayāna attribués à Nāgārjuna, ou dans les Engagements supplémentaires anonymes (yan lag gi dam tshig ces bya ba, Aṅga-samaya-nāma), n’a pas été retenue dans la version d’Abhayākaragupta.

C’est un peu ironique que des vajrayānistes très à cheval sur l’observance de la Parole de Bouddha aient pu ainsi déconsidérer les Paroles du Bouddha des auditeurs. L’interdit de ne pas résider plus d’une semaine parmi des auditeurs a sans doute disparu, quand la voie des siddha et des vidyādhara avait été intégrée et systématisée, et que les adeptes du vajrayāna avaient leurs propres vihāra, et pouvaient imposer leurs propres conditions.

Non seulement Aśvaghoṣa l’ésotérique serait l’auteur de la version des 14 offenses principales encore suivies de nos jours, mais il serait aussi l’auteur d’un petit manuel qui expose l’étiquette dans la relation maître-disciple, très souvent cité pour définir l’obligation du disciple de servir son maître. Il s’agit des “Cinquante stances du service au Maître" (skt. Gurupañcaśika tib. bla ma lnga bcu pa). On pourrait donc considérer ces deux textes attribués à Aśvaghoṣa comme le Code du Vajrayāna, tel qu’il est encore considéré de nos jours comme LA référence. Dans ce texte, Aśvaghoṣa considère Vajradhara, un Bouddha primordial, comme la source des injonctions et des offenses du vajrayāna. Comme le nom l’indique, un “Bouddha primordial” est un “Archi-bouddha” qui fait de Śākyamuni un simple missionnaire.

La métaphore du maṇḍala est une métaphore impériale (sāmantamaṇḍala, cercle des feudataires). Au centre du maṇḍala trône la divinité principale, le rājādhirāja (suzerain), dont tout émane, y compris le maṇḍala.
La synthèse ésotérique mature qui surgit alors [à partir du VIIe siècle] était emblématique de la nouvelle formulation : elle insistait sur un lien immuable maître-disciple, recourait à des actes royaux de consécration et utilisait des maṇḍalas élaborés dans lesquels le méditant devait s'imaginer comme le Bouddha dans un champ de Bouddhas subordonnés. Les partisans du Système ont composé une nouvelle classe d'écritures qui enseignaient la transmission et la récitation de mantras secrets. S'appelant eux-mêmes "possesseurs de mantras ou de sceptres" (mantrin /vajrin), ils ont développé des rituels (en particulier le sacrifice du feu) dans le but de réaliser une série codifiée d'actes sotériologiques et non sotériologiques et ont finalement institutionnalisé ce matériel dans des monastères bouddhistes où les textes étaient copiés, l'art produit et les rituels exécutés. A cet égard, l'auto-description du bouddhisme ésotérique mature comme la voie des mantras secrets (guhyamantrayāna) est analogue à l'auto-description du Mahāyāna comme la voie du bodhisattva (bodhisattvayāna)[3].” [traduction automatique DeepL]
Un sāmanta est un vassal, qui tient son fief du rājādhirāja (suzerain), et qui est lié à lui par un lien féodal (samaya). Dans son livre Indian Esoteric Buddhism, a social history of the tantric movement, Ronald M. Davidson compare la terminologie d’une consécration (abhiṣeka) et du couronnement royal, et les ressemblances sont frappantes.

Ce bouddhisme ésotérique se pose comme une institution, une “Lignée” fermée aux non-initiés, dont le guru est le représentant, le détenteur, le gestionnaire et l’autorité la plus haute. Les 14 offenses principales servent de Code, auquel le guru est soumis également. Le rapport et le service au guru sont définis dans les Cinquante stances du service au Maître, également attribué à Aśvaghoṣa. Ici les 14 offenses selon Aśvaghoṣa. Je les retraduis pour mieux faire ressortir ce que je vais expliquer par la suite. Il s'agit pour la plupart d'interdits.
1. Dédaigner le maître, 2. Transgresser les injonctions (tib. bka’) des sugata[4], 3. Divulguer les fautes des co-initiés (samayin), 4. Ne pas être bienveillant envers les êtres, 5. Abandonner la pensée éveillée (bodhicitta), 6. Mépriser les religions, ses propres croyances (siddhanta) et celles des autres, 7. Divulguer des éléments ésotériques à ceux qui n’y sont pas préparés, 8. Mépriser les expériences psychosomatiques (skandha) qui sont en essence les cinq Jina [donc “pures” (śuddha)], 9. Avoir des doutes sur la nature pure (śuddha) des dharma [objets mentaux] 10. Toujours avoir des intentions bienveillantes envers les méchants (duṣṭa), 11. Analyser les dharma [objets mentaux] “ils ne sont pas rien (tib. chad pa) etc.”, 12. Décourager les croyants 13. Ne pas suivre les engagements (samaya), que l’on a reçus, 14. Mépriser les femmes, qui sont en essence la Prajñā[5].
On note que les offenses sont parfois positivement définies comme des offenses, ou négativement comme des injonctions. Ce sont les conditions d’accès au maṇḍala, la “vision pure” (tib. dag snang), ou monde symbolique (śuddha). La vision ordinaire (8, 9 et 11) est abandonnée. Le maître (1) est le Bouddha primordiale/la divinité, au centre de cette “vision pure”. Pour le maintien de cette “vision pure”, il faut suivre les injonctions du vajrayāna (2, 13), ne pas voir/dénoncer les fautes des co-initiés (3), car ce serait retomber dans une vision ordinaire. Ce n’est peut-être pas toujours évident, mais la “vision pure” est au service des êtres (4, 5, et 10). Comme la “vision pure” symbolique est religieuse, il ne faut pas dénigrer les pratiques symboliques des autres religions, qui sont de même nature (6), ne pas instiller des doutes en ceux qui ont foi en des méthodes religieuses (āstika) (12), et donc uniquement enseigner les méthodes du vajrayāna à ceux qui sont susceptibles de les accepter (7), notamment par rapport à l’extraction de l’essence de la Prajñā (1ère injonction du Vajrayāna-sthūlāpatti attribué à Nāgārjuna), qui est la substance secrète de la femme (14).

Pour une explication (et compréhension) contemporaine de ces quatorze offenses, voir larticle de la revue Tendrel surles voeux du vajrayāna, basé sur un enseignement de Beru Khyentsé Rinpoché. Ici, je vais regarder de plus près l’interprétation de l’offense n° 10 [Ne pas] Toujours avoir des intentions bienveillantes envers les méchants (duṣṭa). Voici l’explication de Beru Khyentsé Rinpoché.
Ne pas manifester d’amour envers les êtres nuisibles[6].

Ce samaya est brisé si l’on hésite à utiliser des moyens coercitifs dans le but de discipliner les êtres. De nombreuses personnes sont parfaitement capables de comprendre les enseignements, de les suivre, de discipliner leurs émotions conflictuelles à travers l’utilisation des moyens paisibles communs à la plupart des maîtres. Cependant, dans des cas exceptionnels, afin de pouvoir briser chez certains êtres des tendances récurrentes à des comportements particulièrement négatifs, il est nécessaire de brusquer ceux-ci quelque peu ! Ainsi, l’emploi de tels moyens est non seulement justifié, mais ne pas les utiliser alors que l’on est capable de le faire va à l’encontre du samaya. Comprenons bien ce que cela signifie : le comportement de ces êtres particuliérement rebelles, obtus, à l’esprit opaque, risque de les envoyer directement dans les états d’existence inférieurs, voire infernaux ; par compassion pour eux, il est donc parfois nécessaire de manifester une apparence qui présente toutes les caractéristiques de la colére, voire même un aspect qui les terrorise de maniére à les dominer et les ayant ainsi subjugués leur permettre de transformer leurs tendances profondes. C’est la raison pour laquelle il existe des aspects dits courroucés, comme Mahakala par exemple.”
Par l’amour pour les êtres (4), et dans le cadre du projet de les sauver (5), y compris et surtout d’eux-mêmes, il ne faut pas hésiter à utiliser des moyens coercitifs (10). Notamment envers ceux qui, ayant été initiés, semblent revenir sur leur décision, dans leurs actes, paroles et pensées… Par amour pour eux, et afin de les sauver des souffrances atroces qui les attendent dans les enfers (Avīci, enfer vajra - vajranaraka, etc.), il faut essayer de les faire revenir sur leur décision, les forcer, et en dernier recours les “libérer” (tib. sgrol ba), en expédiant leur principe conscient dans une Terre pure. C’est à cela que servent les “Protecteurs de Dharma” (dharmapāla), comme Māhakāla. Il vaut donc mieux garder ses engagements et si on les endommage, les purifier et revenir au plus vite dans le cercle de la vision pure.
Sinon, si vous ne tenez pas vos engagements,
Déchu, vous serez saisi par les démons,
Et vous subirez des tourments,
Chutant la tête en premier dans les enfers
.[7]

Subjuguez donc votre orgueil,
Et comprenez que vous êtes dans l’erreur.
Avec tout ce que vous possédez,
Faites des offrandes au guru en présence du Muni
.[8]
Ce n’est donc par pur amour (4), et afin de vous sauver de vous-mêmes et de votre erreur (5), que vos co-initiés, tentent de vous ramener à la raison, s’il faut par des moyens coercitifs, avant que Māhakāla ne doit être appelé à la rescousse.

Le samaya est un peu comme un contrat de mariage, tant que les choses vont bien, on sait à peine qu’il existe, et c’est surtout au moment du divorce qu’on le ressort. Si le vajrayāna se veut une transmission ininterrompue, force est de constater, même à partir d’une exploration rapide, que la nature et le contenu du “contrat”, ficelé à partir de bribes de vers au départ, a bien changé et a évolué dans un sens de plus en plus contraignant et menaçant. Pourquoi tant de violence si le guru et son maṇḍala son bienveillant et altruiste ? Parce qu’il s’agit de la défense sans merci d’une institution prête à briser des âmes, qu’elle imagine expédiées dans une Terre pure.
 
***

MàJ16102022 Pour comparer, un article sur les samaya dans la tradition Kaula (David Dubois)

[1]Even when a disciple has attained the Accomplishment and is resplendent with complete knowledge, he respectfully greets his perfected guru in order to avoid the Avici hell.”
siddhilabdho 'pi yah sisyah samyagjnanavabhasakah/ abhivandayati gururp siddho 'vicyatyajyahetuna//
(22), The Concealed Essence of the Hevajra Tantra, GW Farrow & I.Menon, p. 67-68

[2] 1. Extraire l’essence de la Prajñā et extraire l’essence du nectar des substances secrètes (samaya)
3. Ne pas divulguer aux [individus] non-qualifiés
4. [Ne pas] se disputer en publique / ne pas se disputer pendant les banquets (gaṇacakra)
5. [Ne pas] enseigner les doctrines d’autres aux adeptes
6. [Ne pas] rester [plus de] sept jours chez les Auditeurs
7. [Ne pas] Se vanter à tort d’être un yogi [accompli]
8. [Ne pas] Enseigner le Dharma à ceux qui sont sans foi

shes rab stobs kyis len pa dang*/ dam yi bdud rtsi stobs kyis len/ snod min la ni mi gsang dang*/ tshogs kyi nang du brtsod pa dang*/ dad ldan la gzhan chos ston dang*/ nyan thos nang du zhag bdun gnas/ brdzun gyis rnal ‘byor nga rgyal byed// dad pa med la chos ston pa// ‘di rnams sbom po’i ltung ba brgyad//

[3] « The mature esoteric synthesis that arose then [from the seventh century] was emblematic of the new formulation: it insisted on an immutable master-disciple bond, employed royal acts of consecration, and used elaborate maṇḍalas in which the meditator was to envision himself as the Buddha in a field of subordinate Buddhas. Proponents of the System composed a new class of scriptures that taught the transmission and recitation of secret mantras. Calling themselves “possessors of mantras or scepters” (mantrin /vajrin), they developed rituals (particularly fire sacrifice) for the purpose of a codified series of soteriological and nonsoteriological acts and ultimately institutionalized this material in Buddhist monasteries where texts were copied, art produced, and rituals performed. In this regard, the self-description of mature esoteric Buddhism as the way of secret mantras (guhyamantrayāna) is analogous to the Mahāyāna’s self-description as the way of the bodhisattva (bodhisattvayāna). » p. 117.

[4] Contrairement aux tathāgata, “ceux qui sont passé à l’ainsité”, les sugata sont “ceux qui sont passés à la félicité (su(kha))”, ce sont les "tathāgata" du vajrayāna pour ainsi dire, et leurs injonctions sont celles du vajrayāna.

[5] rtsa ba'i ltung ba bcu bzhi ni// rgyud las gsungs pa bshad par bya// gang phyir rdo rje 'dzin pa yis// dngos grub slob dpon rjes 'brang gsungs// de bas de la brnyas pa ni// rtsa ba'i ltung ba dang por bshad// bde gshegs bka' las 'das pa ni// ltung ba gnyis pa yin par gsungs// khros pas rdo rje spun gyi ni// nyes pa brjod pa gsum pa yin|_/sems can rnams la byams pa spong*// bzhi pa yin par rgyal bas gsungs// chos kyi rtsa ba byang chub sems// de spong ba ni lnga pa yin// rang ngam gzhan gyi grub pa'i mtha'// chos la smod pa drug pa yin// yongs su ma smin sems can la// gsang ba sgrogs pa bdun pa yin// phung po sangs rgyas lnga bdag nyid// smod par byed pa brgyad pa yin// rang bzhin dag pa'i chos rnams la// som nyi za ba dgu pa yin// gdug la rtag tu byams ldan pa// byed pa de ni bcu par 'dod// chad sogs ma yin chos rnams la// brtags pa las ni bcu gcig pa// sems can dad dang ldan pa yi// sems sun 'byin pa bcu gnyis pa// dam tshig ji bzhin rnyed pa dag_/mi bsten pa de bcu gsum pa// shes rab rang bzhin bud med la// smod par byed pa bcu bzhi pa/

[6] gdug la rtag tu byams ldan pa// byed pa de ni bcu par 'dod

[7]Otherwise, should you fail to keep your commitments
You will be caught by the demon of downfall,
And will thus experience suffering,
Brought down, you will descend to the hells
.” Aśvaghoṣa

gzhan du dam tshig las nyams na//
nyams pas bdud kyis gzung 'gyur te//
de nas sdug bsngal myong 'gyur zhing*//
thur du bltas te dmyal bar 'gro//

[8] Subjugate pride, therefore,
And know yourself to be unconfused.
With whatever you can afford,
Make offerings to the guru in the Sage's presence
. Aśvaghoṣa

de bas nga rgyal bcom nas ni//
rang gi 'khrul pa shes byas la//
ci 'byor pa yis bla ma la//
thub pa'i spyan sngar mchod byas nas//