mercredi 15 décembre 2021

Le grand retour

Schéma du projet manichéen (Michel Tardieu, Le Manichéisme, PUF)

Dans les croyances dualistes, où des étincelles lumineuses des hautes sphères ont été répandues dans les sphères inférieures, et où les entités des hautes sphères cherchent à récupérer/sauver les étincelles lumineuses, il y a différentes opinions quant aux êtres, plantes, minéraux, etc. dans lesquels ces étincelles sont capturées, et sur les méthodes de récupération. La règle générale semble être que les entités supérieures, leurs envoyés (“Elus”, etc.), sont capables de “raffiner” ou d’enlever la gangue des étincelles (tib. bcud len skt. rasāyana), pour ne retenir que la Lumière vive et laisser la matière morte pour ce qu’elle est.

Dans les cultes que leur font les êtres sublunaires, les substances offertes peuvent être incinérées et seules la “Lumière” capturée et libérée est accueillie par les entités supérieures, ou bien la simple présentation des offrandes, et leur acceptation par les entités supérieures purifie et bénie les substances (prasād), qui peuvent être ingérées par les adeptes par la suite. Pour ces mêmes croyances, la procréation, notamment humaine, est un autre aspect à surveiller de très près, car elle peut conduire à une reproduction sauvage (= incontrôlé) d’étincelles emprisonnées (“fornication”), qui ne font qu'augmenter la présence de l’obscurité.

Dans la Bible (Ancien et Nouveau Testament[1]), la “doctrine de Balaam” (qui se mue dans le Nouveau Testament en la doctrine des “nicolaïtes”) est associée au refus de la monolâtrie de Yahweh. Ceux qui adorent d’autres dieux (“Baals” et “Astartes”) que Yahweh sont des idolâtres. L’accusation était évidemment principalement dirigée contre les juifs adorant d’autres Baals que Yahweh, ou en plus de Yahweh.

Il s’agit ici notamment de manger “des choses sacrifiées aux idoles”, ainsi que de la “fornication”. Il est possible que “l’abomination” consiste en “l’impureté” du simple partage de nourriture avec ceux qui adorent d’autres dieux et de “mariages” avec des personnes adeptes d’autres cultes.

La façon de sacrifier est également mise en cause. Dans le judaïsme, les offrandes étaient entièrement incinérées, il n’y avait donc pas question de manger les offrandes comme une sorte de prasād (tib. lhag ma) les reliefs d'une offrande présentée aux dieux, avant d’être partagée et mangée sans distinction par tous ceux présents, sans distinction. Pendant la période hellénistique, le mélange et l’universalisme prennent de l’ampleur, mais en fait déjà avant le “miracle grec”, à Persépolis, toutes les religions étaient tolérées. Cette tolérance est insupportable pour les croyants dualistes, car tout contrôle sur la gestion des étincelles de lumière est perdu.
En Grèce ancienne, le partage de nourriture crée la communauté des hommes et des dieux par l’intermédiaire du sacrifice[2]. Comme l’a montré Marcel Detienne, le refus de partager la chair de l’animal sacrifié équivaut à rejeter les valeurs de la cité, à être socialement exclu[3].

Les pratiques alimentaires concourent à l’ordonnance des relations sociales[4]. Le partage est essentiel, comme le souligne Plutarque : « “[A]ujourd’hui j’ai mangé et non dîné”, sous-entendant que le dîner exigeait toujours pour assaisonnement convivialité et cordialité. »[5]. L’acte de s’alimenter illustre très bien ce que Marcel Mauss qualifiait de « fait social total », d’activité structurant le social[6]. Il convient donc de tracer les grandes lignes de l’évolution de la sociabilité de type alimentaire dans le cadre de la cité en relation avec la citoyenneté et l’exercice du pouvoir, à partir de témoignages allant de l’époque archaïque jusqu’à la période romaine.”[7] (Le banquet, intégration et sociabilité citoyenne dans la cité grecque, Robin Nadeau)
Les premiers chrétiens, qui ont subi l’influence hellénistique, organisent des “agapes”, où les pauvres sont invités à partager la nourriture des riches. Quand le christianisme devient religion d’état, les hérésiologues reprennent à leur compte l'abomination des nicolaïtes, pour désigner les non-chrétiens, qui “mangent des choses sacrifiées aux idoles”, et qui “se livrent à la fornication”, mais en l’appliquant aux non-chrétiens (“païens”) et aux non-juifs. Les reliefs des offrandes présentées au dieux romains de façon symbolique (placées devant leurs représentations) pouvaient être mangés. Les offrandes par incinération étaient sacrifiées à perte pour les adeptes

A Dieu jaloux, religion jalouse. Les chrétiens peuvent partager des repas avec des non-chrétiens, mais “se marier” (matrimonium[8]) avec des non-chrétiens sans leur conversion n’est pas acceptable. Le terme “fornication” est actuellement défini comme les “relations charnelles entre deux personnes qui ne sont ni mariées ni liées par aucun vœu” (atilf). La polygamie des clercs chrétiens n’était cependant interdite qu’à partir du VIIIème siècle, et ce n’est qu’à partir du XIIème siècle qu’on parlait du mariage comme un sacrément. La fornication dans les bouches des hérésiologues est donc autre chose, et fait référence à certaines pratiques attribuées à des gnostiques libertins, pendant des banquets où tous les sens étaient gratifiés.

Ainsi, Epiphane (Panarion, 26,17) nous informe sur l’existence de banquets obscènes perpétrés par les Stratiotiques[9], les Borborites, ou les Phibionites, appartenant tous au groupe des Barbélognostiques (des “śāktika” avant la lettre...). Il y avait peut-être un arrière-plan idéologique d’universalité, de mélange de type a-kula (skt.)[10] (non-hiérarchique, toujours avant la lettre), mais aussi gnostique. A-kula (skt.), sans famille, dans une grande Famille universelle. Ce qui faisait lien était la Lumière. Des Fils et Filles de Lumière.
Si l'on veut se référer à un arrière-plan idéologique, il s'agissait dans ces cérémonies « cultuelles » de rassembler et de faire remonter à Dieu toutes les particules de Lumière, même celles répandues dans le sperme masculin ou les menstruations féminines.”

Nous apprenons encore que le commerce sexuel ne devait servir qu'à reconduire les femmes séduites devant les Archontes, et c'est au terme de ce raffinage de la semence lumineuse qu'on devenait Christ, cf. Panarion, 26,9, 6-9 ; aussi ibid., 26,13,2-3 : l'âme parfaite n'engendre pas d'enfants aux Archontes.”

Ce qui est dit de ce culte spermatique en un autre endroit est plus digne de foi (Panarion, 26,9,4) : « La puissance renfermée dans les menstruations féminines et dans la semence masculine, disent-ils, c'est l'âme (psyché) que nous recueillons et mangeons. Et en tout ce que nous mangeons, que ce soit de la viande, des légumes, du pain ou autre chose, nous en faisons grâce à la création, vu que nous rassemblions l'Âme de partout et que nous l'emportons avec nous dans les sphères supracélestes ». Cette explication rappelle les repas manichéens des élus qui servent au rassemblement de l'Ame, cf. Augustin, Confessions, III, 10.Les repas sacrés des gnostiques, Jacques E. Ménard, Revue des Sciences Religieuses
Je reviendrai une autre fois sur le rôle des Archontes. Ce passage est “panthéiste”, mais avec un Projet précis, et dans le sens gnostique de sauvetage (de “rassemblement”) de la puissance divine répandue dans les sphères inférieures, qui est poussé très loin chez les manichéens. Saint Augustin parle de manière sarcastique des figues “sensibles” recueillies par d’autres et offerts à des Saints ou des Élus manichéens qui les mangent, en poussant dehors de la bouche “de petits Anges, ou plutôt de petites parties de Dieu même, du Dieu souverain et véritable, qui fussent toujours demeurées unies et comme liées à ce fruit, si elles n’en eussent été détachées par les dents de cet Élu et par la chaleur de son estomac[11].

Par comparaison, dans le bouddhisme ésotérique, une personne initié s’identifie à la divinité, dont le corps divin est composé de cakra, des cercles de dieux[12], à qui toute expérience humaine “ordinaire” est offerte, qui du coup est transmutée. En mangeant, on offre aux cercles de dieux, qui se “remplissent” et transforment l’expérience ordinaire en plénitude, une autre façon de transformer l’obscurité en lumière, ou de raffiner l’expérience ordinaire... Les gaṇacakra sont des “banquets” où les adeptes mangent de la viande, boivent de l’alcool, et “forniquent”, tout en “remplissant” les cercles de dieux, indissociables de la divinité d’initiation, indissociable de la divinité dans sa sphère respective, indissociable du Bouddha primordial dans la Grande Lumière. C’est du recyclage de semences lumineuses à l’échelle cosmique, micro, méso et macro… Ne dites plus “nous faisons la fête”, mais nous sauvons des âmes.

Il en va de même avec toutes les rencontres d’un “Saint ou Élu” du vajrayāna et son établissement de connexions avec les êtres. C’est une autre façon de “rassembler l’Âme” de partout. Il y a bien une intention de sauver des étincelles lumineuses en les expédiant dans les hautes sphères. Y compris par la fornication (tib. sbyor) et le meurtre rituel, appelé “libération” (tib. sgrol ba), la combinaison mahāyoga des deux est appelée “sbyor sgrol”. Mais tout simple contact sensoriel[13], crée un lien “libérateur” ou “Gnostique”. Ainsi, on peut être “libéré” par la vue (mthong grol), par l’ouï (thos grol), par l’ingestion (myong grol), par le toucher, par le port sur soi (amulette, brtags grol), etc.
Aspirez à créer des connexions avec les gens, même ceux qui ne perçoivent qu’une bribe de votre T-shirt aux couleurs voyantes dans une foule, ce qui aura pour conséquence qu’un grain de dharma soit semé dans leurs esprits.”[14] Blog Briller comme mission
Ou
N’ayez pas de pensée ordinaire à ce sujet, du type “Oh, il a couché avec moi, alors je suis son égal ; cela fait de moi quelqu’un de spécial, car il a couché avec moi”. Ce n’est pas la façon de penser qui convient à une sangyum [partenaire sexuel d’un maître tantrique]. Il est de la responsabilité d’une sangyum de considérer qu’il voyait en vous une connexion karmique à cultiver. Et n’oubliez pas que c’était à cause de sa bonté qu’il avait reconnu votre karma de cultiver cette connexion et de l’actualiser. Si votre attitude en est une d’humilité et de dévotion, et que vous suivez ses instructions, cela pourra être très bénéfique pour vous à cause de la nature particulière de votre connexion avec lui. Si vous cultivez cette situation, vous pourrez progresser, et être très utile aux autres. Mais si vous ne reconnaissez pas le niveau de cette connexion et la percevez comme quelque chose d’ordinaire, en vous gonflant d’orgueil et d’ego, vous aurez réellement manqué cette opportunité. Ce serait plutôt comme coucher avec un roi, mais [votre maître] n’était pas un roi, mais un bodhisattva. C’est une grande différence.”[15]
Les liens ainsi créés avec des Élus sont indestructibles, et sont au fond des liens avec les sphères supracélestes. En fait, les Elus ne descendent pas réellement des sphères supracélestes, ce ne sont que leurs reflets (tib. sprul pa, émanation skt. nirmāṇa, métamorphose), qui se dotent de l’armure de cinq éléments etc., afin de venir sauver ce qui peut l’être ici-bas. Notamment par les contacts directs (sensoriels, ingestion, coït, ...) avec les étincelles lumineuses à sauver, en les renvoyant à la Grande Lumière. Il s’agit clairement d’une idée Gnostique.

Ce n’est pas tant que le bouddhisme ésotérique ait subi l’influence de tel ou tel courant via les routes de la soie, c’est qu’au centre de ce réseau routier se trouvait le berceau (Babylon, la Perse, ...) de ces doctrines dualistes qui opposent des forces de la Lumière et de l’obscurité dans des champs de batailles macro-, méso et microcosmiques. Mar Ammo/Amu était l’apôtre oriental de Mani, mais il y avait des communautés bouddhistes en Perse. Ainsi, Mani en personne aurait converti le Shah de Touran, un petit royaume bouddhiste dans le Baloutchistan. Il aurait reconnu Mani comme un Bouddha, peut-être même l’émanation de Maitreya… L’écart entre ce bouddhisme-là et le manichéisme ne devait alors être pas si grand[16]. Le manichéisme était la religion «perverse» des Ouïgours selon l'empereur de Chine Xuanzong (712-756). L’empereur tibétain Khri song lde btsan (755–797) ne voulait pas non plus de la religion universaliste du “fornicateur” perse Mar Mani (tib. par sig g.yon chen mar ma ni)[17]. Il avait déjà son propre “Bouddha de Lumière”.

***

[1] "14. Mais j'ai quelque peu de chose contre toi : c'est que tu en as là qui retiennent la doctrine de Balaam, lequel enseignait Balac à mettre un scandale devant les enfants d'Israël, afin qu'ils mangeassent des choses sacrifiées aux idoles, et qu'ils se livrassent à la fornication.
15. Ainsi tu en as, toi aussi, qui retiennent la doctrine des nicolaïtes; ce que je hais." Apocalypse 2:14-15

[2] J.-P. Vernant, "À la table des hommes, dans La cuisine du sacrifice en pays grec"

[3] M. Detienne, "Pratiques culinaires et esprit de sacrifice",….

[4] M. Dietler et B. Hayden, "Digesting the Feast", dans Feasts,….

[5] Plutarque, Propos de table, VII, 1, 697c [J. Sirinelli trad.,…

[6] I. de Garine, "Les modes alimentaires", dans Histoire des….

[7] Le banquet, intégration et sociabilité citoyenne dans la cité grecque, Robin Nadeau, Dans Hypothèses 2009/1 (12), pages 251 à 261

[8] "Chez les Romains, il y avait trois manières de le contracter : par l'usage (usus), en cohabitant avec une femme pendant un an et un jour ; par un contrat (coemptio) dans lequel les deux parties se liaient l'une à l'autre par une vente simulée ; enfin par une cérémonie religieuse (confarreatio ; voyez ce mot pour les détails et le sens de la cérémonie)". Source
La confarreatio est l'une des trois formes juridiques par lesquelles, dans le mariage romain, la femme peut entrer dans la manus – c'est-à-dire sous l'autorité juridique – de son mari. Elle tire son nom du pain d'épeautre (farreus panis1, farreum2) qui intervient dans ce rituel3. Cette forme, au caractère archaïque et religieux très marqué, vraisemblablement réservée aux seuls patriciens, était tombée en désuétude sous l'Empire.” Wikipedia

[9] Secte de Valentiniens, des soldats, des guerriers.

[10]D’autre part, Kula est le nom de Shakti, Akula le nom de Shiva. Ceux qui suivent la voie de Kula sont ceux qui appartiennent encore au domaine de la manifestation, qui n’ont pas atteint Shiva, le Transcendant, l’inconditionné. Shiva réside dans le Lotus à mille pétales, siège de la Libération, siège de l’amanaska, tandis que ‘le chemin de Kula’ (Kula-patha), c’est la Sushumnâ depuis le mûlâdhâra jusqu’à l’âjña-cakra”.” Tara Michaël, Le Yoga de l’éveil, La voie vers l’inconcevable, Fayard, p. 191

[11] Folio poche, Confessions, p.19-110, traduction d’Arnauld d’Andilly.

Autre traduction :
10. 18. Moi, dans l'ignorance de ces principes, je riais de tes saints serviteurs et prophètes. Et que faisais-je en riant d'eux? Je n'arrivais qu'à te faire rire de moi, qui insensiblement m'étais laissé peu à peu amener à des niaiseries, à croire que la figue pleure quand on la cueille, pleure avec la branche, sa mère, des larmes de lait! Et si pourtant un « saint » la mangeait, cette figue qu'un autre assurément, et non pas lui, avait fait le crime de cueillir, alors il la mêlait à ses entrailles et en exhalait des anges, voire des particules de Dieu, dans les gémissements de sa prière et dans ses rots. Et ces particules du Dieu très haut et véritable seraient restées enchaînées dans ce fruit, si la dent et l'estomac du « saint élu » ne les avaient délivrées! Et j'ai cru, quelle misère! qu'il fallait être plus miséricordieux 51 envers les fruits de la terre qu'envers les hommes pour lesquels ils naissent. De fait, si quelque affamé en demandait sans être manichéen, on eût paru mériter en quelque sorte la peine capitale en lui en donnant une bouchée.” Traduction de E. Tréhorel et G. Bouissou

[12] “24.1a Ils mangent, ils boivent et éprouvent la joie de l'union
24.2a Les cercles [divins] se remplissent constamment
24.3a Par cette instruction ils concrétiseront l'autre monde
24.4a Les têtes de ces étourdis seront écrasées sous les pieds [du Seigneur du monde]


Dohākoṣahṛdayārthagītāṭīkā (Do ha mdzod kyi snying po don gi glu'i 'grel pa D2268, P3120), qui est le Commentaire du Chant de distiques de Saraha, attribué à Advaya-Avadhūtipa.

[13]Note 56 The “four liberations” are literally “liberation” through seeing, hearing, wearing, and tasting. The enumeration of “six liberations" adds liberation through touching and feeling, and sometimes recollecting and touching, although there are considerable variations. For more on these rubrics and practices see Holly Gayley, “Soteriology of the Senses in Tibetan Buddhism,” Numen 54 (2007b): 459-499; and Joanna Tokarsha-Bakir, “Naive Sensualism, Docta Ignorantia. Tibetan Liberation through the Senses," Numen 47, no. 1 (2000): 69-112.” Power Objects in Tibetan Buddhism, The Life, Writings, and Legacy of Sokdokpa Lodrö Gyeltsen …, James Duncan Gentry

[14] "Aspire to create connections with people, even those who catch no more than a glimpse of your brightly coloured T-shirt in a crowd, that result in the seed of dharma being sown in their minds." Source https://www.facebook.com/IAmSamLongSamIAm/posts/10221779572896678

[15] "So if you are doing the Shambhala training, and if you have faith in the place of Shambhala and in those great enlightened beings who have manifested in this place for our welfare, then the blessings that enter your mind will be very swift, and this will help increase your own understanding of your Buddha nature. … Shambhala is not to be mistaken with Shangri-la. Everyone thinks: ‘I want to go there.’ But that’s just made up, that’s a movie…. Now this is really not my business, but I want to mention anyway, to some of the women who are the sangyum, or the consorts, of Trungpa Rinpoche, you should be very careful about your attitude. Don’t have an ordinary mind about it, thinking in an ordinary sense: ‘Oh, he slept with me, so I’m equal to him; this makes me special, because he slept with me.’ This is not the way that a sangyum of someone like this should think. It’s the sagyum’s responsibility to consider that he saw in you a karmic connection that could be cultivated. And consider that it was because of his kindness in recognizing your karma that there was an ability to cultivate that and bring that out. If you have an attitude of him with humility and devotion, then if you follow whatever teachings he gave you, because of the special aspect of your connection with him this can be of tremendous benefit to you. If you cultivate your situation, you can then go ahead and be of tremendous benefit to others. But if you fail to see the level of the connection and think of it as being only ordinary, and elevate your pride and ego, you’ve really failed in that connection. That would be like sleeping with a king-but he was not a king, he was a great bodhisattva. There’s a difference."

Gyatrul Rinpoche, Oral Commentary on the Natural Great Perfection by Dudjom Lingpa, given in Boulder, 1992, trans. Sangye Khandro, ed. Ian Villarreal, later published by (Ashland, Oregon: Mirror of Wisdom Publications, 2000), 58-59

[16]One of the main hurdles in reconstructing the missionary history of early Manichaeism concerns the nature of the later Iranian source material from which our impressions are drawn, much of which presents a triumphalist portrait of Mani and his disciples’ activities in the provinces and regions within and beyond Sasanian territory, converting rulers, performing miracles and overcoming the teachings of the other ‘dogmas’ and false faiths. One particular incident, involving Mani’s conversion of the Shah of Turan, ‘a small Buddhist kingdom in what is today Baluchistan’,33 and narrated in fragments in Parthian (M48; trans. H.-J. Klimkeit 1993, 206-8), demonstrates the complexities involved in assessing the documentary value of the central-Asian Manichaean material.” Manichaeism: An Ancient Faith Rediscovered, Nicholas J. Baker-Brian

"Un fragment parthe (M 48) raconte comment Mani aurait réussi à convertir le roi bouddhiste de Turan. Après avoir procédé publiquement à un exercice de lévitation au cours duquel son interlocuteur fictif est amené à professer la sagesse véritable, Mani expose au roi son dessein missionnaire. « Dès que le Turanshah et les notables (azadan) eurent entendu cela, ils furent joyeux. Ils acceptèrent de croire et devinrent favorables à l’apôtre et à la religion. » Quelques membres de la famille et de la cour du roi se convertissent à leur tour. A la vue de Mani s’élevant à nouveau dans les airs pour prendre congé de lui, le roi tombe à genoux mais Mani l’appelle à lui. Le Turanshah va alors à sa rencontre dans les airs et donne à Mani un baiser en lui déclarant : « Tu es le Bouddha ! »
La courte durée de cette mission indienne, deux ans maximum, exclut toute possibilité de prosélytisme et d’implantation en milieu bouddhique. Si elle n’a donc point abouti aux conversions spectaculaires que lui attribue la légende manichéenne, elle connut cependant un certain succès en milieu chrétien puisque, selon un autre fragment parthe (M 4575r), Mani de retour à Rew-Ardaxshir envoya Patteg (son père, un de ses premiers convertis) et frère Jean (Hanni) s’occuper de la communauté qu’il venait d’y fonder." Le Manichéisme, Michel tardieu

[17] Source : bKa' yang dag pa'i tshad ma'i mdo btus pa. “Fornicateur” est un des sens du mot tibétain g.yon can, qui signifie aussi escroc, et démon, et qui correspondrait au terme dhūrtaka en sanskrit.

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