mardi 19 septembre 2023

La voie du yogi immortel selon Virūpa

Virūpa arrêtant le soleil (détail HA4005)

Ma lecture “bête et méchante”[1]

L’importance du corps dans le bouddhisme ésotérique et dans les tantras en général, ainsi que sa revalidation n’ont pas pour objet le corps ordinaire, c’est-à-dire le corps de rétribution (corps physique), le corps de relents (inconscient) et le corps mental (psyche), il ne faudra pas s’y tromper. Ce n’est pas une célébration de l’immanence, non, plutôt une invitation à une certaine transcendance (jīvanmukti), à devenir immortel comme les dieux. Pour cela le Virūpa de l’Amṛtasiddhi utilise tous les moyens dont il dispose de façon pragmatique (siddha). Il prend ce dont il a besoin dans le cadre mythologique des religions indiques pour son projet. L’immortalité d’un dieu, mais aussi le nirvāṇa, enfin un nirvāṇa.

Quand “Virūpa” internalise ainsi l’ésotérisme (bauddha-śaiva-nātha), c’est le corps en tant que microcosme, et potentiel d’ascension macrocosmique, ainsi que la sortie, qui devient le centre de l’attention ésotérique. Il n’y a plus de réelle frontière entre les deux. Ou comme le dit la Table d’émeraude : “Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas”. 

Le Virūpa de l’AS ne s’encombre pas de rituels, de puja, de travail intellectuel, ni même de méditation, ou de la génération de corps mentaux, juste de son “yoga” extrême. Il ne témoigne pas beaucoup de respect à ceux qui suivent ces voies, et les incite à le suivre dans son “yoga” à minima. Il y a uniquement du respect pour le maître qui enseigne cette voie.

Quand des matériaux et pratiques de “Virūpa” commencent à être incorporés dans les lignées bouddhistes tibétaines, le ton change. Les échanges entre maîtres et disciples (zhus lan) sur la nature de la pensée et les exercices associés laissent place à des échanges sur des points précis des pratiques haṭhayogiques, kāyasiddhiques, d’immortalité du corps et de l’esprit, d’ascension spirituelle, bref, le fonds commun des religions, mais néanmoins un peu façon punk ou cynique grec. Les adeptes de Virūpa semblent accepter le cadre et le diagnostic, mais pas les solutions proposées, et ne témoignent pas beaucoup de respect à ceux qui les proposent… Avec l’AS on n’a pas l’impression d’un texte du vajrayāna. Le yogi de Virūpa n’est pas un prêtre. A part enseigner sa méthode aux autres, il n’a pas l’air de trop se soucier du bien des êtres et de la planète, puisqu’il compte tout faire sauter. Fabienne Bagnis écrit dans son compte-rendu du livre :

L’introduction comporte une brève entrée en matière (p. 3-5) mentionnant l’affiliation revendiquée de l’AS avec le milieu Vajrayāna. Toutefois, le traité de yoga s’en écarte puisqu’il s’adresse au yogin célibataire. Cela implique l’absence totale de rituels sexuels pourtant courants dans le Vajrayāna orthodoxe et la présence de plusieurs techniques d’onanisme assumées dont la visée est la libération du cycle des transmigrations.” Compte rendu de lecture sur la monographie de James Mallinson et Péter-Dániel Szántó (2022)
Les "techniques d'onanisme" auxquelles fait référence Fabienne Bagnis sont sans doute les techniques traitées dans le chapitre 20 de l'Amṛtasiddhi.

Le manuscrit AS bilingue

Il s’agit d’un manuscrit bilingue, mais la version tibétaine (AS) ne semble pas (encore) avoir été publiée intégralement, ce qui est bien dommage. Le deuxième texte (Amṛtasiddhimūla, ASM) est en revanche un texte du vajrayāna. Il partage avec l’AS les chapitres 11-13, mais pas verbatim. Le manuscrit du premier (AS) serait gardé à la bibliothèque culturelle du palais des nations à Beijing et des scans (Schaeffer) en circuleraient...

Certes, les bouddhistes connaissaient déjà le potentiel du corps mental (manomaya-kāya), les correspondances entre leurs extases et l’ascension macrocosmique, ils savaient comment monter à Tuṣita, pour y recevoir des instructions de Maitreya, et ceux qui en étaient incapables pouvaient par leur dévotion et ferveur naître à Sukhāvatī après leur mort, c’est-à-dire après la séparation de “la pensée” et de leur corps de rétribution. Avec le développement du bouddhisme mahāyāna et ésotérique, l’appareil ritualistique s’était grandement enrichi, et était bien conscient du lien microcosmique, mais “Virūpa” allait “dématérialiser” tout cela davantage. Le yogi se tourne vers l’intérieur de son corps et devient littéralement omphalopsychien… 

Satyres omphalopsychiens en Atlantefixant leurs nombrils 

Désormais son corps est le cosmos, et le cosmos est son corps. Le bien des êtres devient principalement une affaire interne. L’avantage des passerelles intercosmiques est que l’on peut aller dans les deux sens, des aller-retours et ascensions-descentes psychopompes sont possibles à tout moment, ici grâce au lien entre pensée, souffle et semence (bindu). Mais il n'est pas question de cela dans ce texte (AS), qui veut aller droit au but.

Avec la mode de l’intériorisation, ce qu'enseignent les purāṇa sur l’univers macrocosmique vaut désormais aussi pour le microcosmique. La “pratique”, même sobre et intériorisée, véhicule toujours le cadre mythologique, le but étant néanmoins la percée/destruction du Mont Meru et l’ouverture vers le Brahmā. En adoptant les pratiques de Virūpa, le bouddhisme doit aussi adapter sa mythologie interne, tout en gardant sa méthode. C’est la poursuite d’un retour du mythologique, déjà entamé par les tantras. Un retour, car la littérature de prajñāpāramitā, le madhyamaka et l’étude de la logique avait laissé sa marque. Ce retour en force du religieux est accueilli comme un grand progrès par les bouddhistes tibétains ésotériques, qui retiendront surtout la promesse de devenir un Bouddha, voire plus[2], dans l’espace d’une existence. Contrairement à “Virūpa”, ils garderont tout du bouddhisme ésotérique, et ses yogis seront aussi des yogis, mais surtout des prêtres. Leur univers reste le même, mais est désormais doté d’un ascenseur design super rapide. L'univers résultant est un peu comme le metaverse, mais sans besoin de lunettes Meta quête.

Meta quête, photo BDM

Selon l'AS, la quête de l’immortalité de Virūpa consiste à joindre le soleil (rajas) et la lune (bindu) dans le ciel. Il faut purifier le corps en développant les qualités (guṇa : sattva, rajas, tamas) et éliminer les défauts (doṣa : pitta, kapha, vāta). Tout cela est bien schématiquement représenté dans le corps metaversel. Pour l’AS la karmamudrā avec le corps d’un autre n’est plus nécessaire[3] et même le devatāyoga (8.9-10), le metaverse deVirūpa fournit tout ce qu’il faut. La quête est centré sur, dans et autour de la colonne vertébrale, le mont Meru et ses 14 niveaux (l'ascenseur). Tout se trouve à la même place qu’à “l’extérieur”, dans le macrocosme. Il n’y a plus question d’une carte et d’un territoire, tant que les lunettes Meta quête sont bien fixées au front. Mais la libération (mokṣa) reste de mise, la quête sera une quête alchimique intérieure[4]. A la fois alchimique, pneumatique, mythologique, astrologique… C’est une pratique autosuffisante. La clé est la déesse (māhavidyā) au centre (madhya), une sorte de Sophia, à la fois à l’origine de la création, et destructrice de l’ignorance (2,4). De la lune en haut du corps s’écoule le nectar de l’immortalité, qui est brûlé par le soleil au nombril. Voilà la cause de la mortalité. Quand le soleil et la lune, en mouvement, se rencontrent et s’unissent, c’est la création à l’extérieur, et le “yoga” à l’intérieur (4,8-10).

“(4.11) When Fire, as Sun, as Rahu, journeys upwards in the body [and] the lunar nectar of immortality goes downwards then men die.

(4.12) For it is only [when] all these elements move upwards in the body that these two, the Sun and the Moon, are said to bestow liberation.
Les pneuma font fonctionner le corps psychosomatique. Les principaux sont le prāṇa (lunaire) situé au coeur, et l’apāna (solaire) situé à l’anus/périnée, responsables pour la création et la destruction. Leur union (yoga) favorise la libération. Le premier texte (AS) rend hommage à Virūpa, le deuxième (ASM) à la déesse Chinnamastā, la tête tranchée, tenant une épée. Quel est son symbolique ? Peut-être un lien avec ceci ?
(6.20) And after taking the sword that is Breath, cutting off Breath’s coming and going, and piercing the pathway of Brahma and the other [gods], enjoy blissful happiness!

(6.21) He who abandons the yoga of Breath and practises another yoga is a fool who throws himself off a mountain peak expecting to survive.”
La semence (bījam) mâle, lunaire, est l’essence du corps et de ses constituants, et contient les dieux en forme subtile (5,1-2). Elle est le principe vital, la cause des quatre joies, et contrôlé par le pneuma. L’union des semences mâle (bīja) et femelle (rajas) est cause de procréation, mais chez le yogi de “yoga”. La semence mâle se situe dans la tête (Kāmarūpa) et la semence femelle dans le périnée (yoni).
(7.13) This [union] is a fundamental element, the ultimate teaching. This is considered the best yoga. This is the path which bestows liberation. This is the ultimate secret.

(7.15) Bindu is Buddha, Bindu is Śiva, Bindu is Viṣṇu, [Bindu is] Brāhma, Bindu is the god in all [beings], Bindu is the mirror of the three worlds (trailokyadarpaṇaḥ)
[5]
Après l’époque glorieuse de la prajñāpāramitā, la pensée (citta), c’est désormais autre chose. Elle n’est pas Buddha, Śiva, etc. C’est même elle qui produit l’Errance (saṃsāra). La philosophie arrivera peut-être à bout de la pensée, mais la philosophie fait chuter dans la vacuité (8.8)… <rires> Entendez-vous aussi ces yogis en shorts s’esclaffer ? Avec la perfection de la sapience, et la voie du milieu, le bouddhisme serait trop nihiliste (nāstika). Et les exercices mentaux comme se visualiser en corps mental, en une divinité ?
(8.9) He who tries to control Mind by means of self-empowering yoga (svādhiṣṭhanena yogena) deludedly chews a rock and, thirsty, drinks the sky[6].

(8.10) He who has not attained the level of a Siddha, does not have the grace of a guru, does not have the innate capability of abiding by the Dharma agotraḥ) [and] is full of demerit will lead [his] Mind to emptiness [alone]
[7].” <rires>
Non plus, la pensée ne peut pas sauver la pensée (8.11). Exit le triple entraînement (triśikṣa) bouddhiste. Désormais la pensée est asservie au pneuma pour saisir les semences (bindu), et bloquer la lune et le soleil dans le ciel (microcosmiquement bien entendu). Sans cela, pas d’état de Bouddha, et même un Bouddha ne serait qu’un saṃsārika[8]. Il n’y a que le “yogi”, celui qui a réussi le “yoga” décrit dans l’Amṛtasiddhi de Virūpa, qui est capable de relever tous les défis mythologiques des purāṇa, décrits de façon intériorisée dans le chapitre 13 de l’AS. Le grand sceau (mahāmudrā) sapientiel (samatā-vipaśyanā-mahāmudrā) ou tantrique laisse place au grand sceau alchimique, façon Virūpa afin de traverser enfin le saṃsāra.
(11.3) Carefully press the perineum with the left heel, extend the right foot and hold it firmly with the hands.
(11.4) Lift up the haunches onto a seat (āsane), put the chin on the chest, close the nine [bodily] openings and fill up the abdomen with air.
(11.5) Put the mind at the crossroads (catuḥpathe) and commence breath-control. Stop the movement of the Moon and Sun, and perform restraint of the breath (prāṇayantvaṇam).
(11.6) This is the assimilation (jāraṇā of impurity kṛṣṇa (kāṣayasya), the activation (cāraṇam) of Bindu and Nāda, the flushing of all the channels and the kindling of the fire.
[9]
Pas de traversée du saṃsāra sans ce lavement micro-macrocosmique ! Ensuite, il convient d’édifier le corps immortel, une création parfaite, de façon “pluridisciplinaire” yoguique/alchimique/astrologique/mythologique. Le yogi devient yoguiquement[10] et gestuellement le grand dieu (Śiva ?) et la déesse, pour accomplir la grande Percée (māhavedha), car :
“(13.1) Know the [hand-gesture] seal to be, like the Lock, of two kinds: the Yoni Seal (yonimudrā) for the goddesses and the Penis Seal (liṅgamudrā) for the [great] god.
(13.3) A woman of virtue and beauty is useless without a man; the Great Seal [mahāmudrā] and Great Lock [māhabandha] are useless without the [Great] Piercing [māhavedha][11].”
Tout comme une belle femme n’a aucune utilité sans un homme, le grand Sceau et la grande Ligature sont inutiles sans la grande Percée. Le yogi/couple primordial se met à la Percée (vedha) du bas jusqu’en haut de l’univers. Les dieux au milieu du Mont Meru tremblent. Brāhma et les autres vont mourir. Le noeud  (granthi, mdud) de Brāhma est percé et dénoué, ensuite le noeud de Viṣṇu, puis finalement celui de Rudra. La liane de l’ignorance (mohamayīṃ latām) est tranchée, et la porte du Brahmā (brahmadvāram) sur l'espace est ouverte. Le yoga a réussi (13.8-12). C’est la seule consécration (abhiṣeka) sur la voie des Siddhas, il n’y en a pas d’autre (13.15[12]). Tout est désormais connu grâce à la déesse du canal central (“Sophia”). Cela n’empêche pas la pratique régulière du haṭhayoga (14.4), qui passe par quatre phases progressives (19), et qui conduira à l’état de libéré vivant (jīvanmukti).
(32.3) Even a Buddha is unperfected [and] considered a man in saṃsāra as long as the lord that is seed (bījendraḥ), which has the form of Brahmā, leaks from the body[13].”
Un Bouddha incontinent avec des fuites de bīja toujours perdu dans le saṃsāra ... Frank T.J. Mackie, sors de ce corps ! En revanche, le yogi qui a acquis un corps de gnose (jñānakāyaḥ) et de pure connaissance (viśuddhajñānadehaḥ) serait libre des qualités (guṇa) de proliférations cognitives (prapañcaguṇavarjitaḥ), omniscient, omniprésent, éternel, aurait une bonne fortune et la vérité comme objectif (35.2). Autrement dit le nirvāṇa, le seul et unique.

Une autre opinion de Virūpa dans la tradition tibétaine contre son propre système : Les 84 vers de Śrī Virūpa, [DG n° 2283]

***

[1] De la traduction anglaise de la première partie (AS). James Mallinson and Szántó Péter-Dániel. The Amṛtasiddhi and Amṛtasiddhimūla, The Earliest Texts of the Hathayoga Tradition (Institut français de Pondichéry, 2022)

[2] Car un Bouddha peut être un simple saṃsārika sans la méthode de Virūpa.

[3]The Amṛtasiddhi contrasts its celibate yoga method with the sexual yoga of mainstream Vajrayāna, in which the male participant is usually said to experience orgasm and ejaculation. A minority of schools, the best known of which is the Kālacakra, teach sexual yoga in which semen is not released.” The Amṛtasiddhi and Amṛtasiddhimūla.

[4] Complète avec mahāmudrā (grand sceau), māhabandha (grande ligature), māhavedha (grande percée, jāraṇa (digérer), cāraṇa (activer) et māraṇa (tuer). La semence mâle-bīja ("mercure"), nectar de l’immortalité, et femelle-rajas ("souffre") peut être épaissie (mūrcchita), fixée (baddha), dissoute (līna), et éteinte (niścala). Il y a question de creusets (puṭa) et de double creusets (saṃpuṭa) liés et scellés. La lune se trouve en haut dans le ciel (canal central), le soleil en bas. Les quatre cercles le long du canal/ciel sont percés par le souffle expédié du nombril. Les quatre éléments sont détruits.

[5] Bindurbuddhaḥ śivo bindurbindurviṣṇuḥ prajāpatiḥ | binduḥ sarvagato devo bindustrailokyadarpaṇaḥ ||7.15|

Comme le tibétain de cette édition bilingue n’a pas été rendu public, sauf erreur, je ne peux pas faire de comparaison, à part les observations faites en commentaire dans la traduction anglaise de l'ASM. La version tibétaine sera-t-elle l’exacte traduction de la version newari de l'AS ?

[6] svādhiṣṭhānena yogena yastu cittaṃ prasādhyati | śilāṃ carvati mohena tṛṣitaḥ khaṃ pibatyapi || 8.9

[7] asiddhapadamārūḍho guruprasādavarjitaḥ | agotraḥ pāpasaṃpūrṇaścittaṃ śūnyaṃ pravartayet || 8.10

[8]Même un bouddha, tant qu'il n'est pas perfectionné [par la pratique enseignée dans l'Amṛtasiddhi ], est considéré comme un homme du monde (sāṃsārika)" - 32.3ab tāvad buddho 'py asiddho 'sau narah. sām.sāriko matah. |

[9] yoniṃ saṃpīḍya vāmena pādamūlena yatnataḥ | savyaṃ prasāritaṃ pādaṃ karābhyāṃ dhārayeddṛḍham || 11.3
āsane kaṭimāropya cibukaṃ hṛdayopari | nava dvārāṇi saṃyamya kukṣimāpūrya vāyunā || 11.4 || 
cittaṃ catuḥpathe kṛtvā ārabhetprāṇayantraṇam | candrārkayorgatiṃ bhaṅghā kuryādvāyunivāraṇam || 11.5
jāraṇeyaṃ kaṣāyasya cāraṇaṃ bindunādayoḥ | cālanaṃ sarvanāḍīnāmanalasya ca dīpanam || 11.6

[10] “(13.1) Know the [hand-gesture] seal to be, like the Lock, of two kinds: the Yoni Seal (yonimudrā) for the goddesses and the Penis Seal (Liṅga-mudrā) for the [great] god.”

[11] guṇarūpavatī nārī niṣphalā puruṣaṃ vinā | mahāmudrāmahābandhau vinā vedhena niṣphalau || 13.3

[12] sarvābhiṣekasaṃsiktaḥ sarvādhikārasaṃbhṛtaḥ | siddhamārgeṇa saṃyukto naro bhavati nānyathā || 13.15||

[13] tāvadbuddho ’pyasiddho ’sau naraḥ sāṃsāriko mataḥ | yāvadravati bījendro dehato brahmarūpakaḥ ||32.3

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