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[1] The Great Perfection, Samten G. Karmay, 1989, p. 214
« Cette opération de retranchement peut se concevoir, dans une perspective logique, comme une opération de négation. On peut se représenter l’attribution d’un prédicat à un sujet comme une addition et la négation de ce prédicat comme le retranchement de cette addition. C’est pourquoi la méthode d’abstraction a pu être considérée comme une méthode négative. »[1]Dans le bouddhisme mahāyāna, le retranchement est précisément la fonction de la prajñā, qui est souvent représentée par l’épée que tient dans sa main Mañjuśrī, le bodhisattva de la sagesse. La prajñā retranche tout les prédicats qui ont été ajoutés par non-reconnaissance (S. avidyā). C’est uniquement le plus qui a été ajouté aux éléments simples.
« Le complexe procède du simple par additions d’éléments qui, telles les dimensions spatiales, matérialisent la simplicité originelle. C’est pourquoi la remontée vers l’incorporel et l’intelligible s’effectue en retranchant ces additions matérialisantes. Cette remontée a donc un aspect négatif : la soustraction de ces additions, et un aspect positif : l’intuition des réalités simples. »[2]Candrakīrti :
« La vacuité est enseignée en vue d'éliminer toute complexité (S. prapañca). Aussi l'objectif de la vacuité est la cessation de toute complexité. [En réponse à ceux qui reprochent la vacuité d'être une vue nihiliste : ] Vous qui interprétez la vacuité comme néant (S. nāstitva) et qui en ce faisant continuez la toile de la complexité, ne connaissez pas l'objectif de la vacuité. Comment pourrait-il y avoir du néant dans la vacuité, qui est essentiellement la cessation de toute complexité ? Ce que signifie la production conditionnée (S. pratītya-samutpāda) la vacuité signifie aussi. Mais ce que signifie le non-être (S. abhāva), la vacuité ne le signifie pas. »[3]La vacuité n’est autre que les éléments simples sans complexité (S. aprapañca) qui sont là de toute évidence. La complexité étant un simple éclat. La prajñā élimine l'erreur, c'est-à-dire tout ce qui est additionné ou soustrait à tort, le plus et le moins, et auquel on attribue une réalité différenciée. La simplicité resplendit et n'a besoin de rien. Elle n'a pas besoin d'être élevé en un principe, ou en un Dieu ou autre entité dont on chante les louanges, ou qui aurait besoin d'être reconnu etc. Si ces chants de louange surgissent spontanément, parce que tel était notre conditionnement passé, que cela coule à flots. Sinon, pas la peine d'imiter une façon de faire. Le bodhisattva pour qui tous les êtres sont le Soi (Entrée dans la conduite de bodhisattva, chapitre 8), son Soi, cherche naturellement à faire ce qui est bien pour Lui, c'est-à-dire pour tous les êtres...
"C'est ce qu'on appelle "la présence" (S. smṛty) qui est l'omniscient (S. sarva-jña)
Désormais, dans la consécration du Sceau universel
La liberté universelle de connaître ce qui est (S. yathā)
Est elle-même la puissance (S. bala, śakti) de cela
Le maṇḍala ne se produit pas autrement."
dran pa zhes pa thams cad mkhyen pa'o//
da ni phyag rgya chen po'i dbang bskur la//
ji ltar shes pa'i bde chen po//
'di ni de yi mthu nyid de//
gzhan las dkyil 'khor 'byung ba med//
"Savoir que ces ensembles (skandha) sont vides depuis toujours et dépourvus d'essence
S'engager équanimement pour [le bien des] êtres qui n'ont pas [encore] accès au recueillement
Entretemps, ne pas négliger les instructions de l'Éveillé."
1) mahāmudrā > "sceau universel", mais pourquoi n'utiliser pas la traduction usuelle de mahā (chen po), c'està-dire "grand" ou "éminent"?
2) _mahāsukha_ -> pour mahā, même question que la précédente; pour sukha je ne comprend pas pourquoi vous préférez "liberté" au lieu de "plaisir", "joie", "félicité", qui sont plus conformes à la signification originelle du terme. [mahāsukhaikarūpā = "ayant la même nature (ekarūpā) de la grande joie"; la "grande joie", bien sûr, étant une parmi les définitions de la libération finale, mais ne signifiant pas littéralement "libération finale"].
3) (a)kuśalā -> évidemment le texte ici reproduit un stylème typiquement bouddhiste, à savoir la distinction morale entre kuśalā et akuśalā dharmā, en ajoutant (a)manasikārā comme déterminatif du terme dharmā. Je pense donc que la traduction de _(a)kuśalā_ doive respecter le sens moral et être, partant, "(pas) bons/(in)justes/(in)appropriés"; pourquoi vous traduisez plutôt avec "(in)efficaces"?
kun du rtogs pas ma brtags pa//ces bya ba gang yin pa de phyag rgya chen po yin par rig par bya'o// de'i phyir phyag rgya chen po bsam gyis mi khyab pa'i rang bzhin las/ dam tsig gi phyag rgya mchog gi 'bras bu skye bar 'gyur ro// phyag rgya chen po dri ma med pa'i 'bras bu nges par bstan pa ste gsum pa'o/ //
rab tu mi gnas pa yi yid//
dran pa med cing yid byed min//
dmigs pa med la phyag 'tsal 'dud//
avikalpitasaṅkalpa apratiṣṭhitamānasa |
asmṛtyamanasikāra nirālamba namo'stu te ||
2. Le yoga consiste à suspendre l’activité psychique et mentale[5]Il s’agit de deux méthodes différentes pour arriver au yoga. Mais celle qui veut intervenir directement sur le souffle vital (« l’âme »), le réifie et le rend concret. L’âme n’est alors plus traité comme un mystère, et comme un symbole, mais comme une substance ontologique. Quand on sort de la suspension de jugement confortable que permet le mystère, on a tendance à expliquer et à théoriser. C’est ce qui n’a pas manqué de se produire.
34. On parvient également au contrôle de la fluidité psycho-mentale par expiration et rétention du souffle vital[6].
35. Mais si on se concentre volontairement sur les objets perçus par les sens, on provoque aussi la stabilité intérieure[7] ;[8]