dimanche 13 décembre 2015

Soliloque, la pensée s'adresse à elle-même (ELF ch. 4)


Vairotsana de Pagor (tib. Be-ro-tsa-na)

Extrait du Tantra de l'effusion de la lumière fulgurante de l'authentique pensée éveillée souveraine, le quatrième chapitre qui présente l'essence de la pensée.

Ensuite l'être fulgurant (sct. vajrasattva) demanda : "Eh Bienheureux, comment est l'essence de la pensée ?"

Grand être (sct. mahāsattva),
Voici comment est l'essence de la nature de la pensée
Elle n'est rien, mais se manifeste en tout
Elle ne peut être sondée, exprimée ou conçue
On ne peut donner d'exemple disant "elle est ainsi"
Voilà comment est l'essence de la pensée.

Elle apparaît comme les souffrances des êtres
Mais celles-ci n'apparaissent pas d'une autre source
La plénitude, la libération, les ravissements (sct. saṃbhoga) aussi
Ne sont pas accédés en dehors de la sphère (sct. dhātu) de la nature des choses (sct. dharmatā)
Et n'ont pas le moindre atome d'existence.

Le [triple] Corps ainsi que les roues (sct. cakra) qui sont ses ornements
Sont la pensée-en-soi (sct. sva-citta) et n'existent pas autrement
Le Buddha, le Dharma et la Sangha aussi
Sont elle, et n'existent pas autrement
C'est pourquoi, ils ne sont pas un objet de vénération
[La pensée] n'a pas besoin d'être protégée, réalisée ou cherchée
Elle n'a ni couleur, ni forme, ni lieu, ni caste
Elle n'a ni plénitude, ni souffrance, ni cause et effet
Elle n'est pas non-être, mais l'essence (sct. ātmakatā) de tout
Elle n'est pas l'être, elle est inexprimable
Elle est sans soi, sans autre, sans mort ni transmigration
Elle n'est pas rien, puisqu'elle est la source de tout
Elle n'est pas une source, elle est ce qui est (sct. tattva)
L'état continu de la connaissance (sct. jñāna), où tout est identique,
Est comme boire de l'eau à la saveur de l'espace
Identique par le principe, elle n'est pas clairement distinctible
Elle est la pensée éveillée qui se connaît elle-même (sct. saṁvedya)
On ne peut la montrer en disant "la voici"
N'étant rien, elle se manifeste en tout
Elle est le principe suprême du Coeur auto-engendré
Elle n'est pas manifeste dans la manifestation même
Elle se manifeste par le mode du non-manifeste
Dire qu'elle n'est pas serait une saisie
Mais il ne faut pas s'y investir (sct. apratiṣṭhāna)
S'y investir serait un égarement (tib. gol sa)
Qu'est-ce qui s'égarerait ?
Comment s'égarerait-il ?
Même l'apparence d'égarement est encore elle !
Elle n'a rien de concret (sct. bhāva)
Mais il ne faut pas s'investir (sct. apratiṣṭhāna) en cette [caractéristique]
Si on s'y investissait, ce serait une saisie."

Et l'être fulgurant (sct. vajrasattva) s'investit en lui-même.


Extrait du Tantra de l'effusion de la lumière fulgurante de l'authentique pensée éveillée souveraine, le quatrième chapitre qui présente l'essence de la pensée (ELF).

Attribué à Vairocana.

En ce qui concerne Vairocana de Pagor, une hagiographie (pdf) basée sur l'Histoire de l'école nyingma par Dudjom Rinpoché. Son hagiographie complète en tibétain. (merci Dan Martin)

***

Texte tibétain en Wylie

Byang chub sems rje btsun dam pa rdo rje ‘od ‘phro ba’i rgyud las/ sems kyi ngo bo bstan pa’i le’u ste bzhi pa’o//

de nas rdo rje sems dpas gsol pa/ kye bcom ldan ‘das sems kyi ngo bo gang lags/ bcom ldan ‘das kyis bka’ stal pa/

sems dpa’i chen po/
sems kyi rang bzhin ngo bo ni//
ci yang min las ci yang snang*//
dpag med brjod bral bsam mi khyab//
‘di zhes mtshon du me dpa ni//
sems kyi ngo bor de [576] gsungs so//
‘gro ba’i sdug bsngal snang ba yang*//
rang ying gzhan las de mi ‘byung*//
bde dang thar dang longs spyod kyang*//
chos nyid dbyings las ma rtogs pa//
rdul cha tsam yang med par gsungs//
sku dang rgyan gyi ‘khor lo yang*//
rang gi sems yin gzhan na med//
sangs rgyas chos dang dge ‘dun yang*//
rang yin de las gzhan na med//
de phyir bkur ba’i yul yang med//
bsrung med, sgrub med rtsol ba med//
kha dogs dbyibs dang gnas rigs med//
bde dang sdug bsngal rgyu ‘bras me//
me dpa ma yin kun pa bdag nyid//
yod pa ma yin brjod du med//
bdag med gzhan med ‘chi ‘pho med//
med pa ma yin thams cad ‘byung*//
‘byung ba ma yin de nyid yin//
kun gcig ye shes khyab pa’i ngang*//
nam mkha’i ro yi chu ‘thung bzhin//
dbye gsal med pa’i don du gcig/ 
‘di ni rang rig byang chub sems//
‘di zhes bstan du me dpa’o//
ci yang med las cir yang snang*//
rang byung snyin po mchog gi don//
snang ba nyid na snang med pas//
snang ba med pa’i tshul gyis snang*//
med ches bya ba ‘dzin pa tsam//
de nyid la yang gnas mi bya//
gal te gnas na gol sa yin//
gang zhig gol te ci zhig gol//
gang du gol te ji ltar gol//
gol bar snang ba [577] de nyid yin//
de nyid dngos po medpas na//
de phyir de la gnas mi bya//
gal te gnas na ‘dzin pa yin//

zhes gsungs pas/ rdo rje sems dpa’ nyid la gnas par gyur to//
Byang chub sems rje btsan dam pa rdo rje ‘od ‘phro ba’i rgyud las/ sems kyi ngo bo bstan pa’i le’u ste bzhi pa’o//




4 commentaires:

  1. STP, qui est-ce qui énonce ce tantra, quelle transmission est-ce ?

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  2. Donc là, "sattva" est traduit par "pensée" plutôt que par "être". Vu comme ça, que signifie "citta" ? Car du coup je pense à Bodhisattva et Bodhicitta. Tout cela pour bien comprendre, pas pour polémiquer. Merci.

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  3. Dans la tradition dzogchen (notamment sems sde), on attribue une série de textes à Vairocana de Pagor, qui ont pour titre les Cinq traductions anciennes (tib. snga ‘gyur lnga). Une de ces cinq traductions anciennes est le La Bannière royale indéclinable ou le Vaste ciel (Mi nub rgyal mtshan nam mkha’ che), dont il ne resterait qu’une partie. Trois tantras-racine, cinq trantras explicatifs, deux tantras du cycle Guhyagarbha et 55 vers qu’on trouve entre autres dans le chapitre 30 du Roi pancréateur (traduction ici : http://hridayartha.blogspot.fr/2012/06/le-silence-tonitruant-du-roi.html). Un des trois tantras-racine est le Tantra de l'effusion de la lumière fulgurante de l'authentique pensée éveillée souveraine (tib. byang chub sems rje btsun dam pa rdo rje ‘od ‘phro ba’i rgyud). J’ai publié deux chapitres de ce tantra, et je compte bien en publié d’autres.

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