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lundi 2 juin 2025

Vers davantage d'investitures de tulkus ?


Deux nouveaux livres ont retenu mon attention sur une page FB de Dharma Ebooks, un site de livres électroniques religieux lancé en 2017 par le 17ème Karmapa Ogyen Trinley Dorje (OTD). Il s’agit de deux textes de rituels composés en 2024.

Rituel pour guider les défunts ("Porte du Sud") avec Cakrasaṃvara (བདེ་མཆྷོ་ྒོི་ོ་)
Rituel d'investiture (ྲི་མངའགསྱི་ོ་)

Inauguration de Dharma Ebooks 2017 (youtube)

La persistance, en plein XXIe siècle, de l’imaginaire et de l'idéal théocratique dans le bouddhisme tibétain m’interpelle. Ces deux textes ont été composés pour de différents besoins, afin de combler à un manque des rituels existants.

Karma Dondrub, le père du 17ème Karmapa, est décédé en 2024, et son incinération a eu lieu en août 2024 au Tibet. C’est à cette occasion, et suite à un rêve particulier (gzim lam), que le 17ème Karmapa a fait un Rituel de guidance vers Sukhāvatī (dag pa'i zhing du 'phen pa) avec Cakrasaṃvara, alors qu'il avait initialement envisagé de le faire avec Avalokiteśvara. Sukhāvatī est la Terre Pure d'Amitābha à l'ouest. Avalokiteśvara est un bodhisattva/divinité de kriyātantra, et Cakrasaṃvara, une divinité de classe supérieure (anuttarayoga tantra).

Dans le texte du rituel, les bodhisattvas à Sukhāvatī s’étonnent de voir arriver quelqu’un par des moyens de tantras supérieurs. Le défunt est accueilli par les bodhisattvas, dont un qui s’interroge sur le nouvel arrivé.
"Le bodhisattva enquête : d'où est-il né ? où est-il né ? par quelle cause est-il né ? Il découvre qu'il est né de Jambudvīpa vers la terre pure de Sukhāvatī par le pouvoir des rituels tantriques."

"Ema ho ! Ô guide Śākyamuni ! Comme tes actions d'éveil sont merveilleuses ! Car les êtres tombés dans les destinées infortunées sont rapidement libérés comme l'éclair !"

"Ema ! Comme les bénédictions des mantras des Bouddhas sont extraordinaires ! Car les êtres tombés dans les destinées malheureuses renaissent ainsi rapidement dans les sphères divines !
[1]"
C’est à cet effet, que le nouveau rituel de guidance vers Sukhāvatī contient une courte initiation du Cakrasaṃvara anuttarayoguique. Le Rituel cite le tantra racine de Cakrasaṃvara (chapitre 51) :
"Au moment du transfert (pho ba, saṃkrānti) des yogis,
Le Glorieux Buveur-de-Sang (khrag 'thung dpal, Heruka), Vajrayoginī (rdo rje rnal 'byor ma) et les autres,
Tenant dans leurs mains de fleurs colorés,
Et diverses bannières et étendards de victoire,
Accompagnés des sons de divers instruments de musique
Et d’offrandes de chants variés,
Cette conception appelée 'mort',
Est conduite au royaume de Khécara (mkha' spyod gnas)
[2]."
En plus des rituels de renaissance à Sukhāvatī davantage connus, celui-ci permet aux défunts de recevoir une initiation post-mortem et, fraîchement initiés, d’être guidés vers les Khecarī (mkhaspyod), en théorie. Ou sinon pour passer le pont. Ce qui est une nouveauté pour moi, est la possibilité d’initier l’âme du défunt. Si le défunt était un tāntrika, cela permettrait de purifier ses samaya et voeux endommagés, et cela purifierait du même coup l’officiant du rituel…
Il faut accomplir le maṇḍala des trois [aspects] - génération de soi comme la divinité, génération de la divinité en face et génération de la divinité dans le vase - de quelque divinité d'élection que ce soit, faire les offrandes, etc. En particulier, si l'on confère l'initiation au défunt, il est absolument nécessaire que [l'officiant] lui-même soit engagé dans [la pratique] et ait reçu l'initiation. Même si l'on ne confère pas l'initiation [au défunt], pour accomplir un rituel comme celui de la “Porte du sud”, l'officiant du rituel doit impérativement avoir des samayas et des vœux parfaitement purs. Car, en raison des circonstances actuelles de lieu et d'époque, les transgressions racines surviennent très facilement, et cette prise d'initiation pour restaurer les samayas et vœux dégradés est donc indispensable. Cependant, si soudainement un cas spécial particulier se présente, [on peut recourir à] la Visualisation des cinq divinités de Cakrasaṃvara (bde mchog lha lnga'i mngon rtogs[3]) composée par le 8ème Karmapa.”
La deuxième publication est un Rituel d'investiture pour un “grand tulku” (mchog sprul). La reconnaissance et l'intronisation de tulkus a explosé en exil ("tulku boom"), depuis l’invasion chinoise (1959). La lignée de pratique Karma Kamtsang, bien qu'étant historiquement une source du système des tulkus, ne semblait guère posséder de rituels d'intronisation formalisés, à l'exception possible de quelques notes manuscrites de Jamgön Lodrö Thayé.
Ce [rituel] appelé ‘L'aube du bonheur et de bien-être’ est la cérémonie d'investiture des nobles réincarnations (mchog sprul) sur son trône du Dharma est l'une des œuvres importantes composées par Sa Sainteté le 17e Gyalwang Karmapa[4].

Bien que le système des tulkus (réincarnations) soit répandu dans toutes les écoles du Tibet - Sakya, Gelug, Kagyu et Nyingma - les rituels d'intronisation autonomes sont extrêmement rares. En particulier, bien que la lignée de pratique Karma Kamtsang soit historiquement devenue la source du système des tulkus, les rituels d'intronisation des tulkus ne semblent guère apparaître, à l'exception peut-être de quelques notes manuscrites de Jamgön Lodrö Thayé.

Par conséquent, cette année, en raison du grand besoin pour l'intronisation de la réincarnation de Bokar Rinpoché, et suite aux requêtes de Bokar Khenpo Rinpoché et d'autres, Sa Sainteté le 17e Gyalwang a examiné tous les documents pertinents des archives tibétaines : les cérémonies d'intronisation royale, les rituels de longue vie, les rituels d'intronisation, ainsi que d'autres biographies qui clarifient les circonstances liées aux intronisations.

Il a ainsi composé ce [rituel] aux mots et au sens remarquables, dans des versions étendues et condensées appropriées, principalement basé sur les offrandes aux Arhats selon la tradition des soutras, et qui convient à la fois aux pratiques traditionnelles et aux besoins contemporains.

Ceci est une œuvre d’ordre historique, et parce qu'elle sera très nécessaire lors de la reconnaissance et de l'intronisation futures de nombreuses réincarnations de maîtres, lamas et tulkus, nous l'avons maintenant produite sous forme de livre électronique ('phrul deb) et diffusée
[5].”
Le trône est le centre du rituel d’investiture. L’acte d’intronisation est enraciné dans des précédents historiques, comme l'intronisation du Roi Trisong Deutsen par Padmasambhava ou l'intronisation de Karmapas antérieurs par des empereurs[6]. Un “grand tulku” (mchog sprul) au Tibet était un théocrate avec un pouvoir à la fois séculier et spirituel. Ses références théocratiques sont les monarques universels (cakravartin), les “rois de dharma” (dharmaraja, chos rgyal), les rois de Shambala (rigs ldan, Kalki), le roi/empereur Trisong Deutsen. Puis, les grands théocrates historiques des diverses lignées.

L’investiture est à l’image de la consécration imaginée de Maitreya, “le prince héritier consacré” (abhiṣikta)[7], intronisé comme régent (yuvarāja) par le Bouddha, avant que ce dernier ne descende de Tuṣita pour prendre naissance sur la terre et de conduire sa carrière de Bouddha, comme un “nirmāṇakāya suprême” (mchog sprul), déployant les douze actes caractéristiques d’un Bouddha. Dans le Rituel d’investiture, le “nirmāṇakāya suprême” est “la suprême réincarnation d’un mahāpuruṣa (skyes chen dam pa'i yang srid)”. Un mahāpuruṣa est ungrand homme.

Tout cela est-il purement symbolique et métaphorique ? Cependant les métaphores programment notre esprit (Lakoff). Quel peut être dans ce l’effet du symbolique impériale ? Ou est-ce "Faire les choses, sans les faire vraiment" ?

Le texte souligne que "ceci est une œuvre de nature historique, et parce qu'elle sera très nécessaire lors de la reconnaissance et de l'intronisation futures de nombreuses réincarnations de maîtres, lamas et tulkus"[8]. L'objectif serait donc, malgré les nombreux problèmes avec des tulkus, de reconnaître et investir de nombreuses réincarnations à l’avenir.

Quelqu’un qui a connu les débuts du bouddhisme tibétain en Europe, malgré tout une période avec une certaine ouverture déchange et d'adaptation  -- peut-être provisoire et stratégique en s’appuyant sur les quatre façons d’attirer le monde (bsdu ba'i dngos po bzhi)[9] -- n’échappe pas à l’impression d’un revirement. Les Tibétains ont de bonnes raisons de vouloir préserver leur culture, même si cela passe souvent par ce que l’on pourrait considérer comme des choix conservateurs et passéistes. La tendance planétaire actuelle semble d’ailleurs leur donner raison... L’Inde de Modi, où se trouvent grand nombre de réfugiés tibétains, et le mouvement Hindutva les poussent également dans ce sens. En faisant abstraction du fait que le bouddhisme tibétain est désormais davantage tourné vers l’Asie, d’un point de vue européen, ce bouddhisme suranné à l’ésotérisme impérial, avec le Kālacakra Tantra comme modèle, pourrait-il encore attirer les jeunes européens ?

***

[1] Rituel pour guider les défunts
byang chub sems dpa' des kyang rang nyid gang nas skyes/ gang du skyes/ rgyu gang gis skyes brtags pas/ 'dzam bu'i gling nas bde ba can gyi zhing khams su sngags kyi cho ga'i stobs kyis skyes par mthong nas/

e ma ho/ shakya mgon po'i/ sangs rgyas mdzad pa ngo mtshar che/ gang phyir ngan song lhung ba yi/ sems can glog bzhin myur du grol/

e ma sangs rgyas rnams kyi ni/ sngags kyi byin rlabs ya mtshan che/ gang phyir ngan song lhung ba yi/ sems can lha gnas myur du skyes/
[2] Rituel pour guider les défunts
rnal 'byor pa rnams 'pho ba'i tshe//
khrag 'thung dpal sogs rnal 'byor ma//
lag na me tog sna tshogs thogs//
rgyal mtshan ba dan sna tshogs dang
sna tshogs glu yi mchod pa yis//
'chi ba zhes bye rnam rtog 'di//
mkho' spyid gnas su khrid par byed//

 rnal 'byor pa rnams 'pho ba'i tshe//
khrag 'thung dpal sogs rnal 'byor ma//
[...] mkha' spyod gnas su khrid par byed/
[3] Rituel pour guider les défunts bDe mchog lha lnga'i mngon rtogs bdr:MW3PD1288_9BC091

[4] Rituel d'investiture
skyes chen dam pa'i yang srid chos kyi khri la mnga' gsol ba'i cho ga phan bde nyin mor byed pa'i snang ba zhes pa 'di ni
[5] Rituel d'investiture
skyes chen dam pa'i yang srid chos kyi khri la mnga' gsol ba'i cho ga phan bde nyin mor byed pa'i snang ba zhes pa 'di ni rgyal dbang karma pa sku phreng bcu bdun pa chen pos mdzad pa'i gsung rtsom gal che ba zhig yin cing*/ de yang bod la sprul sku'i lam lugs sa dge bka' rnying thams cad la ma khyab pa med kyang / khri mnga' gsol gyi cho ga rang rkang tshugs pa ni shin tu dkon/ lhag par sgrub brgyud karma kam tshang ni lo rgyus thog sprul sku'i 'byung khungs su gyur kyang sprul sku khri 'don gyi cho ga ni 'jam mgon blo gros mtha' yas kyi gsung zin bris lta bu zhig las phal cher mi snang*/ der brten lo 'dir 'bo dkar rin po che'i yang srid khri la mnga' gsol ba'i don du dgos mkho che bar brten/ 'bo dkar mkhan rin po che sogs kyis bskul ma zhus pa ltar rgyal dbang bcu bdun pas bod kyi yig tshang rnams las rgyal po mnga' gsol dang /brtan bzhugs kyi cho ga /khri mnga' gsol gyi cho ga_gzhan yang khri mnga' gsol dang 'brel ba'i gnas tshul gsal ba'i rnam thar sogs 'brel yod kyi yig cha thams cad la gzigs rtog mdzad nas/ srol rgyun gyi phyag bzhes dang deng dus kyi dgos pa gnyis ka dang mthun pa/ gtso bo mdo lugs kyi gnas brtan phyag mchod la sbyar ba'i cho ga rgyas bsdus 'tshams la tshig don rmad du byung ba 'di nyid mdzad/ 'di ni lo rgyus rang bzhin gyi gsung rtsom yin cing / 'byung 'gyur bstan bdag bla sprul mang po'i yang srid ngos 'dzin dang mnga' gsol bgyi ba'i skabs dgos mkho che ba'i phyir da res nga tshos 'phrul deb tu bzos nas 'grems spel zhus yod/
[6] Le texte mentionne également que les Karmapas précédents, à partir du 2ème Karmapa, furent intronisés comme 'Roi du Dharma des trois royaumes' et reçurent des couronnes d'empereurs chinois et mongols, comme l'Empereur Ming.

[7] Mantras et mandarins, Michael Strickmann, p.85

[8] Rituel d'investiture
'di ni lo rgyus rang bzhin gyi gsung rtsom yin cing / 'byung 'gyur bstan bdag bla sprul mang po'i yang srid ngos 'dzin dang mnga' gsol bgyi ba'i skabs dgos mkho che ba'i phyir
[9] La générosité (sbyin pa), les paroles plaisantes (snyan smra), la conduite bénéfique (don spyod) et la conduite concordante (don mthun). Voir aussi The four factors of gathering disciples.

lundi 28 mars 2022

Terres pures 2.0

Sukhāvatī 1.0, Palace Museum Beijing (detail)

La théorie mahāyāna de la Matrice du Bouddha enseigne que l’activité d’un Bouddha (“activité éveillée[1]) est sans effort.
[Les activités éveillées ne s’interrompent jamais]
Parce qu’elles ont lieu sans pensées comme celles-ci
La libération définitive, son point d’appui,
Son fruit, les êtres pris en charge,
Les voiles et la condition de leur élimination
. (IV, 5)

Les dix terres sont la voie de la libération définitive
Dont les deux accumulations forment la cause.
Le fruit alors atteint est l’Éveil suprême
Qui prend en charge l’Éveil au cœur des êtres
. (IV, 6)” Ratnagotravibhāga, IV.5-6
Le Corps symbolique d’un Bouddha comprend son univers symbolique, sa “Terre pure” (buddhakṣetra). Le Corps symbolique est le fruit de l’accumulation de mérite et de Gnose, ainsi que du Voeu (praṇidhāna) du bodhisattva. Tel Fils [de Bouddha], telle Terre, pourrions-nous dire. Le bodhisattva fait son Voeu en concevant son univers symbolique en toute liberté : “s’il n’en est pas ainsi, que je n’obtienne pas l’illumination”... Quand, à cause de son accumulation de mérite et de Gnose et par la force de son Voeu, il devient Bouddha, son univers symbolique se réalise spontanément, simultanément, et l’activité éveillée associée ne s’interrompt jamais.

Quand le Voeu du bodhisattva est authentique, reflète sa vérité propre, et ce qu’il est, il devient la force motrice de son éveil, et de ceux qu’il attire dans son sillage.
Bien plutôt, c’est pour l’homme, une vérité de vie, d’intégrité personnelle, c’est la vérité dans l’ensemble de sa conduite, une vérité qui consiste à prendre ses responsabilités et à agir en conséquence. Cette Vérité, base métaphysique de l’ordre universel, est pour chaque être humain, et aussi chaque divinité, la sanction et le fondement éthique de ses actes, la substance de ses obligations, son devoir dans le cosmos.[2]
S’il est authentique, le Voeu du bodhisattva peut faire couler le Gange à l’envers (Milindapañha IV, I, 42), à l’instar de l’acte de vérité qui sort de la bouche d’une prostituée[3]. Il est alors comme un pouvoir qui “transcende [l]es lois physiques et trouve sa sanction dans les lois meta- ou hyperphysiques[4].

L’univers symbolique (saṃbhogakāya) peut aller envers et contre tout, y compris contre le cosmos “bouddhiste”, ses lois et ses valeurs. Amitābha et les autres tathāgata, Amitāyus, Bhaiṣajyaguru, Mañjuśrī, Samantabhadra passent par-dessus les souffrances des six mondes[5], le karma et la réincarnation. Leur univers symbolique et leur Voeu est plus fort que cela. Huisi (515-577), le maître bouddhiste qui sen inspire, tente de faire la même chose, mais il vit dans un monde turbulent, dans une Chine bureaucratique confucianiste, qui ne sait pas trop quoi faire avec le bouddhisme (religion étrangère) et le taoïsme (religion autochtone). Par prudence peut-être, il préfère respecter la bureaucratie, la misogynie bouddhiste, les hiérarchies, etc., de son époque, et cela se ressent dans son Voeu, et donc dans son univers symbolique. Il y a même des contradictions dans son Voeu: il n’y aura pas de place pour les enfers dans son univers symbolique, mais en même temps il y menace "les méchants" d'un aller simple en enfer.

Il n’y a de femmes dans aucune Terre pure bouddhiste classique. Celles qui sont femmes dans leur existence actuelle, pourront accéder à l’univers symbolique d’un des Bouddhas, mais pas dans un corps de femme. Le “corps”, symbolique, dans ces univers symboliques est un “corps” d’homme, d’un "grand homme" (mahāpuruṣa), doté de vertus particulières au nombre de 32, qui sont celles du Corps symbolique du Bouddha, y compris “l’Organe mâle caché” (n° 10).

Il ne peut y avoir de corps de femme dans les Terres pures, au même titre que les corps des trois destinées malheureuses, car il n’y a pas la moindre trace de souffrance dans les Terres pures. Le corps de femme serait un corps humain imparfait. Les tibétains parlent d’une “naissance inférieure” : “skye dman”, ce qui reflète probablement l’idée de la femme comme étant encore indéterminée, etdéterminable, toujours très répandue. D’ailleurs, au fond, il n’y a pas non plus de corps d’homme ordinaire dans les Terres pures, mais uniquement des Corps symboliques.

Il y a un lien évident entre la société dans laquelle vivent les bodhisattvas et la Terre pure qu’ils conçoivent. Car ils la conçoivent selon ce qu’ils sont, selon leur propre vérité. En même temps, ils se permettent de dévier de cette réalité pour concevoir une réalité symbolique supérieure, ou qu’ils considèrent comme telle. Dans leur pratique de bodhisattva, ils essaient de concrétiser, dans leur existence terrestre, autant que possible, les éléments de la Terre pure. En fonction de leur propre vérité, il est normal que l’univers symbolique conçu par des bodhisattvas du premier millénaire, reflète des aspects et des valeurs de la société dans laquelle ils vivaient, y compris ses hiérarchies et bureaucraties (voir lesfonctionnaires infernaux"), la position de la femme, etc.

Il me semble donc que conformément à l’idée du Voeu (praṇidhāna) du bouddhisme mahāyāna, les bodhisattvas du XXIème siècle ont la possibilité de concevoir, selon leur propre vérité, l’univers symbolique (“Terre pure”) qui leur correspond, tout en l’ “optimalisant”. Ils pourraient introduire la parité homme-femme, etc. des Corps symboliques, booster l’égalité des corps symboliques, etc. Il n’y aurait, tout comme dans les Terres pures 1.0, pas les souffrances habituelles de la cosmologie bouddhiste, donc pas de rétribution, de punition, et autres méthodes de purification et de domptage. Et la pratique des bodhisattvas du XXIème siècle anticiperait évidemment ces univers symboliques des Bouddhas à venir. 


***

[1] Chapitre IV du Mahāyānottaratantraśāstra.

[2] Brown Norman. Le devoir, force de Vérité dans l'Inde ancienne. In: Annales. Economies, sociétés, civilisations. 28ᵉ année, N.4, 1973. pp. 895-920;

[3] Voir l’histoire de la prostituée Bindumatī, racontée dans le Milindapañha (Blog La vérité (plus forte que les moyens habiles), note 2.

[4] Norman Brown, Le devoir, force de Vérité.

[5]Si, quand j’atteindrai la bouddhéité, un enfer, un royaume d’esprits avides et un royaume d’animaux sont présents en ma terre, puissé-je ne pas réaliser l’éveil suprême.” Premier voeu dAmitābha En une seule phrase, le moine Dharmākara (le futur Amitābha), rend caduque “la doctrine bouddhiste” dans son activité éveillée.

samedi 23 janvier 2016

Renaître dans la Terre pure


Amitābha et sa Terre pure

Le Bouddha ne se référait pas à sa personne, mais parla du tathāgata, « celui qui est ainsi ».[1] D’autres se sont référé à lui en l’appelant le grand ṛṣi (sct. mahāṛṣi), le prince des muni (sct. munindra), le dieu des dieux (P. devatideva).

Le Bouddha avait rappelé à plusieurs reprises que le véritable Bouddha, « celui qui est ainsi », n’était pas son corps et ses attributs (rūpakāya). « Celui qui me voit, voit le dhamma ; celui qui voit le dhamma me voit. » Dans le Milindapañho III.5.18 le moine Nāgasena dit : « De même on ne peut désigner le Bienheureux comme étant ici ou là. Mais il peut être désigné par le Corps de la Loi (dhammakāya) : car la Loi a été enseignée par lui. »

l’Éveillé, « ce qui sait et qui est éveillé » (bouddho[2]), ne se représente pas par un corps formel avec des attributs, par des paroles ou des pensées. Il ne se représente pas, il est ainsi, tel qu’il est. Dans un premier temps, le Bouddha n’était pas représenté par une forme physique, mais de façon aniconique. Ce qui représentait le Bouddha c’était l’ensemble (kāya) de ses qualités (dharma). L’ensemble de ses qualités (dharmakāya) constituait sa « doctrine », sa « Loi ».

Avant d’être représenté par sa forme anthropomorphe mondialement connue que l’on peut voir partout, il fut représenté par des symboles, notamment par des monuments symboliques (stūpa, caitya). De bas en haut, les diverses parties de ces monuments représentent les diverses qualités (dharma) de l’Éveillé. Ainsi, les quatre terrasses peuvent représenter les quatre fondements de l’attention (P. satipaṭṭhāna sct. smṛti-upasthāna), le kiosque l'octuple chemin des ārya, les treize roues les dix forces des bodhisattvas et les trois fondements de l'attention particuliers au Tathāgata etc.

Quand le Bouddha commença à être représenté de façon anthropomorphique, à partir du 1er siècle à Gandhara (au Pakistan) et dans la région de Mathura dans l'état de l'Uttar Pradesh dans le nord de l’Inde sous l’influence grecque, ce furent les différentes parties du corps anthropomorphique et les attributs qui prirent un sens symbolique.

Sans le sens symbolique, on ne voit qu’une simple représentation physique, et même s’il s’agit du corps du Bouddha historique, on ne voit pas « celui qui est ainsi » (tathāgata), « ce qui sait et qui est éveillé » (bouddho). Dans l’exercice de « remémoration de l’Éveillé » (sct. buddhānusmṛti tib. sangs rgyas rjes su dran pa), il ne s’agit pas de se souvenir du Bouddha historique (ou d’un maître bouddhiste), de son apparence physique et des diverses anecdotes de sa vie, aussi glorieuses soient-elles. Ce ne sont pas ces représentations qui donneront accès à « celui qui est ainsi » (tathāgata), « ce qui sait et qui est éveillé » (bouddho), bien que leur sens symbolique pointe vers lui.

Même si le Bouddha a été divinisé à partir d’une certaine époque, et appelé le grand ṛṣi (sct. mahāṛṣi), le prince des muni (sct. munindra), le dieu des dieux (P. devatideva), le sens symbolique était le lien (sct. samaya) qui empêchait de tomber dans un culte théiste ordinaire. Le bouddhisme a ainsi pu intégrer habilement (sct. upāyakauśalya) des méthodes de Yoga (yogācāra), tantras et autre cultes locaux.

Une méthode qui semble être une forme développée de la remémoration de l’Éveillé (sct. buddhānusmṛti) est l’ensemble de pratiques auxquelles on réfère sous le nom « bouddhisme de la terre pure ». Celui-ci se fonde canoniquement sur une série de Discours[3] centrés sur Amitābha, le Bouddha de la Terre pure (Sukhāvatīvyūha), que le Bouddha aurait donnée à Śrāvastī (Jetavana) à Śāriputra.

Selon certains[4], le long Sukhāvatīvyūha Sūtra (ou Sūtra de la vie infinie), qui semble être le plus ancien, aurait pu être compilé sous l’empire kouchan (Ier – IIIe siècles) dans la région du Gandhāra. La première traduction chinoise connue est attribuée à Zhi Qian, originaire de l’empire Kouchan, qui l’aurait traduit entre 223 et 253. Il existerait cependant des références plus anciennes dans le Pratyutpanna Samādhi Sūtra, traduit en chinois par Lokakṣema (né en 147) également originaire de l’empire Kouchan, où l’on trouve les premières mentions d’Amitābha et de sa Terre pure. Kumārajīva, encore un koutchéen, traduit le court Sukhāvatīvyūha Sūtra (ou Amitābha Sūtra) en chinois en 402. C’est le moine chinois Tanluan (476–542) que l’on considère comme le fondateur de l’école de la Terre pure (Jìngtǔzōng) ou de l’amidisme.
« Tanluan était à l’origine un érudit bouddhiste, mais, après être tombé malade, il étudia le taoïsme en vue d’obtenir l’élixir de longue vie. Cependant, après avoir rencontré Bodhiruci, un moine bouddhiste indien, Tanluan devint un fervent des enseignements de la Terre pure. » (Wikipedia)
Bodhiruci (V-VIème siècles) fut un moine bouddhiste originaire de l’Inde du nord (Ariane ?), qui arriva à Luoyang en 508 et qui disparut en 535. Il traduit notamment le Sukhāvatīvyūhopadeśa (Jingtu lun zhu) attribué à Vasubandhu, qu’il aurait transmis à Tanluan. Ce texte est aussi utilisé pour prouver l’intérêt de Vasubandhu pour la méthode de la Terre pure. Ce texte, le Traité de renaissance dans la Terre pure, comporte une partie texte-racine (gāthā) et un autocommentaire (upadeśa). Il n’en existe ni version sanskrite ni tibétaine.

Le Traité présente la méthode pour renaître dans la Terre pure comme une série de cinq pratiques (portes de la contemplation)[5] : 1. hommage corporel 2. louange d’Amitāyus, récitation du nom d’Amitāyus 3. résolution de renaître dans la Terre pure 4. visualisation de la Terre pure, d’Amitāyus et de sa suite de bodhisattvas et 5. Le transfert (dédicace) du mérite (sct. pariṇāmanā) ainsi accumulé.

C’est la quatrième pratique qui rappelle le plus la pratique bouddhiste de la remémoration de l’Éveillé (sct. buddhānusmṛti), qui prend ici la forme d’Amitāyus et de sa Terre pure, comme un prototype du maṇḍala. L’ensemble des cinq pratiques ressemble d’ailleurs à la structure d’un sādhana.

En plus de la visualisation, ce « maṇḍala » de la Terre pure, d’Amitāyus, et de sa suite de bodhisattvas comporte 29 « mérites » ou qualités, que l’on remémore. 17 se rapportent à la Terre pure, 8 à Amitāyus et 4 aux bodhisattvas.[6] Le seizième « mérite » de la Terre pure est que l’on n’y trouve ni femmes, ni personnes handicapées, ni auditeurs et bouddhas-par-soi (śravakayāna et pratyekabuddhayāna). C’est à ce niveau que les maṇḍala tantriques apporteront du nouveau, étant davantage inclusif.

L’autocommentaire est intéressant dans le sens qu’il montre que les cinq portes de la contemplation sont comme un précurseur du sādhana. Il explique que les quatre premières remémorations ou portes correspondent à la vertu de l’Entrée, qui correspond au bien de soi, et la cinquième porte à la vertu du Départ, qui correspond au bien d’autrui, et qui a pour fonction « d’enseigner et de convertir les êtres par compassion »[7]. Cela montre également que le « transfert de mérite » ou « dédicace » n’est pas un simple acte mental, où l’on place « du mérite » sur une sorte de compte d’épargne. Les quatre premières remémorations (hommage, louange, résolution et méditation) préparent à la cinquième, qui est le véritable but de l’exercice spirituel, l’activité du bodhisattva.

Quand, dans la Contemplation d’Amitāyus (Amitāyurdhyāna Sūtra), la reine Vaidehī, femme du roi Bimbisāra et mère d’Ayātaśatru souhaite « voir un endroit où l’on peut naître en accomplissant des actes purs et non souillés », le Bouddha explique à Ananda et Vaidehī le sens de la huitième contemplation d’Amitāyus :
« Chaque Éveillé-tathāgata est présent dans la pensée de tous les êtres comme le Corps du dharmadhātu. Aussi, quand vous percevez l’Éveillé dans la pensée, c’est la pensée qui possède les trente-deux marques majeures et les quatre-vingt signes mineurs. C’est la pensée qui devient l’Éveillé, c’est la pensée qui est l’Éveillé. Et la sagesse (jñāna) de l’Éveillé – authentique, universelle et comme un océan, surgit de la pensée. C’est pour cette raison, qu’il faut fixer sa pensée et percevoir clairement l’Éveillé, le Tathāgata, l’Arhat, le parfait Éveillé (samyak-sambuddha). »
La pratique « de la Terre pure » est ainsi un exercice de « remémoration de l’Éveillé » (sct. buddhānusmṛti), plus développée, mais qui a toujours le même objectif. En laissant « l’orientalisme » pour ce qu’il est, et avec tout le respect que je dois au bouddhisme populaire et religieux, la méthode dite de la Terre pure semble avoir eu assez tôt (Tanluan 476–542) le même objectif. Mais, également assez tôt, on semble avoir perdu de vue que les cinq remémorations (hommage, louange, résolution, méditation et transfert de mérite) étaient des exercices spirituels (sct. upāyakauśalya), comme il s’avère de l’échange entre Houei-Neng et un préfet, qui comptait véritablement renaître dans la Terre pure d’occident en récitant le nom d’Amitābha.
« Le préfet se prosterna puis posa une autre question :
- Je connais des moines, des adeptes et des pratiquants laïcs qui récitent A-mi-t’o-fo en espérant renaître dans la terre pure d’Occident. Auriez-vous la bonté, Révérend, de nous expliquer s’ils y renaîtront vraiment - ou non? Résolvez mes doutes à ce sujet, je vous prie. 
Seigneur préfet, fit le Maître, écoutez bien ce que je vais vous dire. Alors que le Vénéré des mondes se trouvait dans le royaume de Çrâvastî, il parla de la terre pure d’Occident pour attirer et convertir. Les soûtras sont clairs à ce sujet : “Elle ne se trouve pas loin d’ici”, disent-ils. Le concept de l’“éloignement” de la terre pure est strictement destiné aux êtres dont les facultés sont inférieures ; lorsque le Bouddha parla de sa “proximité”, il le fit à l’intention de ceux dont la sagesse était supérieure. Ces distinctions ne valent que pour l’homme : dans le réel, il n’est aucune différence. La méprise des uns n’est pas la juste compréhension des autres : et, s’il existe des opinions lentes, il s’en trouve aussi de très vives. Les égarés récitent le nom du Bouddha pour renaître là-bas ; l’homme à la compréhension juste trouve la pureté dans son esprit. C’est pourquoi le Bouddha dit que “la pureté de l’esprit précède immédiatement la pureté des terres de Bouddha”. 
Seigneur préfet, il suffit qu’en Orient l’on garde l'esprit pur pour rester sans faute, car on pèche même en Occident, dès que l’on n’a plus l’esprit pur. Ce sont les égarés qui aspirent à renaître dans les terres pures d’Orient ou d’Occident: pour les illuminés, tous les lieux se valent. Si seulement nous avions l’esprit libre de mute impureté, la terre pure d’Occident ne se trouverait pas si loin d’ici. Celui qui entretient des pensées impures aura du mal à y renaître rien qu’en récitant le nom du Bouddha. Qu’il en finisse avec les dix actes négatifs, et il aura parcouru dix mille lis ; en se défaisant des huit perversions, il franchira les huit mille lis restants. Mais il suffit d’honorer la droiture pour se retrouver là-bas en un claquement de doigts. 
Seigneur préfet, contentez-vous de faire le bien : à quoi bon vouloir, en plus, renaître où que ce soit? Si vous ne mettez pas un terme à vos états d’âme liés aux dix actes négatifs, quel Bouddha viendra vous accueillir sur le seuil de sa terre pure ? Si vous compreniez parfaitement la subite méthode du sans-naissance, il ne vous faudrait qu’un bref instant pour voir la terre pure d’Occident. Si vous ne comprenez pas la méthode subite, le Grand Véhicule, la route sera longue, où vous réciterez le nom du Bouddha en pensant à votre vie future : comment en atteindrez-vous jamais le terme ? 
Seigneur préfet, poursuivit le Sixième Patriarche, le temps d’un clin d’œil, je vais me transporter en Occident avec vous. Nous aurons la terre pure devant les yeux. Vous ne voudriez pas la voir ? 
Le préfet se prosterna.
- S’il est possible de la voir maintenant, dit-il, pourquoi attendre la prochaine vie ? Je vous prie, Révérend, de nous montrer, en votre grande compassion, la terre pure d’Occident : ce serait grand !
- De Chine, dit le Maître, cette terre pure est indubitablement visible.
[72] Puis il dispersa l’assemblée. 
Nul ne comprit de quoi il retournait, mais, au-dessus de la perplexité générale, la voix du Maître s’éleva de nouveau :
- Vous tous, disait-il, ô vous tous ici rassemblés, écoutez-moi avec attention ! Le corps matériel de l’être humain est une ville murée ; ses yeux, ses oreilles, son nez, sa langue et ses corpuscules tactiles sont les portes de la ville : cinq portes qui communiquent avec l’extérieur et, purement intérieure, la porte du mental. L’esprit est la terre ; l’essence est le roi : l’essence présente, le roi l’est aussi; absente, le roi est parti. Quand l’essence est présente, le corps et l’esprit perdurent; quand l’essence est partie, le corps et l’esprit se détériorent. Le Bouddha est le fait de notre essence : n’allons donc pas le chercher ailleurs qu’en nous-mêmes. Égaré quant à son essence, le Bouddha est un être ordinaire ; illuminé dans son essence, l’être ordinaire est un Bouddha. La grande compassion, c’est Avalokita; la joie du détachement n’est autre que Mahâsthâmaprâpta ; les maîtres de la pureté sont des Çâkyamounis ; la droiture égale est Maitreya ; le soi de l’homme s’érige en mont Mérou ; les vues fausses forment l’océan ; les passions ressemblent aux vagues ; les pensées venimeuses sont les mauvais dragons ; souillures et confusion sont appelées poissons et tortues de mer ; vanités et illusions sont dieux et démons ; les trois poisons constituent les enfers ; l’ignorance est le monde des bêtes ; les dix actes positifs forment le paradis. 
Quand il n’y a plus ni moi ni autrui, le mont Mérou s’écroule; l’océan épuise ses eaux avec la fin des pensées incorrectes ; les passions disparaissent : il n’y a plus de vagues; les poisons n’empoisonnent plus personne : fin des poissons, fin des dragons. Sur la terre de votre esprit, le Tathâgata de votre essence éveillée rayonne de la clarté de la grande sagesse, illumine les six portes et, dans l’éclat de la pureté, abolit les six cieux du désir [73] en répandant la lumière ici-bas : les trois poisons éliminés, tous les enfers s’évanouissent instantanément, le dedans et le dehors s’interpénétrent en toute clarté, et cela, ce n’est rien d’autre que la terre pure d’Occident.
» Sans cet exercice, comment s’y rendre autrement?
On se pressait au pied du trône, et, quand le maître se tut, maints cris d’admiration s’élevèrent dans le ciel : les égarés comprirent soudain et virent le préfet se prosterner en soupirant d’admiration.
Bravo, disait-il, bravo ! Souhaitons tous que, parmi les êtres animés qui peuplent les mondes du réel, ceux qui ont entendu cet enseignement s’illuminent et au même instant atteignent la libération
! »

Le soûtra de l’Estrade du sixième patriarche Houei-Neng (638-713), traduit par Patrick Carré (pp. 70-73)


Avalokiteśvara et Mahāsthāmaprāpta


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Article : The Five Contemplative Gates of Vasubandhu’s Rebirth Treatise as a Ritualized Visualization Practice, Richard K. Payne 

[1] Richard Gombrich expliqua dans ses conférences Numata (en 2006) que lorsque « gata » (aller) est utilisé dans des mots composés de ce type, il perd son sens premier d’aller et signifie simplement « être ». Le tathāgata est alors « celui qui est ainsi ». Et tathātā « ce qui est ainsi ».

[2] Le vénérable ajahn Liem explique que « Bouddho » signifie : « Ce qui sait et qui est éveillé » http://www.dhammadelaforet.org/sommaire/liem/liem_questions_reponses.html

[3] Le court Sukhāvatīvyūha Sūtra (ou Amitābha Sūtra), traduit en chinois par Kumārajīva en 402, le long Sukhāvatīvyūha Sūtra (ou Sūtra de la vie infinie), et l’Amitāyurdhyāna Sūtra, la contemplation d’Amitāyus, que l’on considère comme un apocryphe chinois.

[4] Nakamura, Indian Buddhism, 1999, p. 205

[5] « 1. bodily worship; 2. praise of Amitāyus, interpreted as verbal recitation of Amitāyus’ name; 3. mental resolve to be born in the Pure Land; 4. visualization of the Pure Land, Amitāyus, and his retinue of bodhisattvas; and 5. transfer of merit. »

[6] « Seventeen Merits of the Pure Land: 1. That world surpasses the ways of the three worlds. 2. It is broad and limitless, like space. 3. Wholesome roots which transcend saṃsāra produce great compassion of the right path. 4. It is filled with pure light, like a mirror, or the sun or moon. 5. It has the qualities of precious jewels, and is complete with sublime glories. 6. Its undefiled lights are vigorous and bright, purifying the world.10 7. The grasses there have jewel-like qualities and when touched produce an ecstatic experience like touching soft cloth. 8. There are ten million kinds of jewel flowers, covering all things; from the towers there one has an unim-peded view of the trees which emit lights and the jewel-railings which surround the trees, the colors of all blending together; Indra’s net covers the entire sky with bells at every knot ringing out the sound of the true dharma. 9. Glorious flower-robes rain down, perfuming all things. 10. The Buddha’s wisdom shines forth like the sun, elimi-nating the world’s delusions, darkness, and ignorance. 11. The sacred words heard here are subtle, and no matter how faint are heard everywhere. 12. Amitāyus abides there as the dharmarāja. 13. Bodhisattvas are born there. 14. The bodhisattvas enjoy the “flavor of the buddha-dharma and nourish themselves on dhyāna and samādhi.“11 15. Their enjoyment is unbroken. 16. All born there are equal: no one is born there as a woman, having defective sense organs, or as a member of the lineages of the two lower vehicles (śravakayāna and pratyekabuddhayāna). 17. All that is wished for is fulfilled. Eight Merits of the Buddha: 18. The king is adorned with innumerable jewels and sits on a lotus throne. 19. His marks shine to the distance of an arm’s length. 20. His voice is heard everywhere in the Pure Land. 21. He makes no discriminations. 22. The bodhisattvas are born from the sea of his wisdom. 23. He stands exalted and unsurpassed. 24. The bodhisattvas “pay homage, surround, and adore”12 him. 25. He is available to all. 46Pacifc World Four Merits of the Bodhisattvas: 26. The wheel of the dharma is constantly turned by the bodhisattvas. 27. The beneficial light of the Pure Land penetrates everywhere. 28. The offerings and praises are made without discrimination. 29. The bodhisattvas seek rebirth in worlds lacking the buddha and dharma jewels. »

[7] Payne