lundi 19 mai 2025

Une controverse qui ne dit pas son nom

Les trois Père-fils spirituels de la lignée Dashang Kagyu (dwags shangs bka' brgyud kyi rje yab sras rnam gsum), montage photo (FB Lama Sochoe)

Au 14e siècle, Shangtön Gyawo (Zhang ston rgya bo, 1292-1370), recevait les transmissions Shangpa de Dolpopa Sherab Gyaltsen (Dol po pa Shes rab rGyal mtshan, 1292-1361) de Jonang, grand expert du Kālacakra et propagateur de la doctrine Shentong (gzhan stong pa). Le lien avec la lignée Shangpa perdure avec Jetsün Kunga Drölchog (1507-1566) et Jetsün Tāranātha (1575-1635)[1], et le Jonang prend un nouvel essor avec Jamgön Kongtrul I (1813-1899), résidant à Palpung, et le mouvement Rimé (ris-med), qui avait par ailleurs aussi une portée politico-religieuse anti-gelugpa. Jamgön Kongtrul I composa la méthode d’initiation de Kālacakra selon la tradition Jonang[2] (dus 'khor jo nang lugs), et que l’on trouve dans sa collection rGya chen bka' mdzod.

L'un des objectifs principaux du mouvement Rimé (ris med) était de sauvegarder les enseignements et les pratiques des lignées mineures qui risquaient de disparaître. Des maîtres comme Jamgön Kongtrul, Jamyang Khyentsé Wangpo et Chogyur Lingpa ont collecté, compilé et préservé systématiquement les enseignements de nombreuses lignées plus petites, notamment la Shangpa Kagyu, la Jonang, et diverses transmissions de terma (trésors spirituels).

Détenteur de la lignée Shangpa, Kalu I Rinpoché (1905-1990) était aussi considéré comme le principal détenteur de la lignée Kālacakra pour les Kagyupa, qu’il avait transmise à Bokar II Rinpoché (1940-2004), en lui remettant également la "cape" du Kālacakra. Tout comme Jamgön Kongtrul I, Kalu I Rinpoché et son maître Lama Norbu Töndrub étaient rattachés au monastère de Palpung, et au 11ème Tai Situpa Pema Wangchok Gyalpo (1886-1952) au Tibet. Karmapa XVI (1924-1981) avait reçu l’initiation du Kālacakra de ce dernier, ainsi que plus tard du Dalai-Lama.

Dans les années 1970, alors que de nombreux Occidentaux manifestaient un intérêt croissant pour le bouddhisme tibétain, c’est Karmapa XVI qui confia explicitement à Kalou Rinpoché la mission de diffuser le Dharma en Occident. C’est ainsi que Kalou Rinpoché effectua ses premiers voyages hors d’Asie à partir de 1971, visitant d’abord Israël puis l’Europe et l’Amérique du Nord, et fondant de nombreux centres bouddhistes, dont “Dashang Kagyu Ling” à La Boulaye en France, premier centre européen de retraite de trois ans. Sur le site de “Dachang Kagyu Vadjradhara-Ling” on peut encore lire l’explication suivante :
Très proches à l’origine, ces lignées se sont rejointes dès le 19ème siècle, et au 20ème c’est le très vénérable Kalou Rinpoché qui fut le parfait détenteur de la transmission issue de ce rapprochement entre Dagpo Kagyu et Changpa Kagyu, ainsi nommée Dachang Kagyu. Appellation que l’on retrouve dans le nom de l’un des centres fondés par Kalou Rinpoché en France, Dachang Vajradhara Ling.”
Au tout début, le premier nom donné au centre de Bourgogne était "Kagyu Yiga Tcheu Dzin", et la première maison d'édition associée avait repris le même nom. Ce nom avait été changé dans les statuts depuis. L'actuel nom de "Palden Shangpa La Boulaye", anciennement Kagyu-Ling, ou le Temple des mille Bouddhas, en Bourgogne, est toujours “Dashang Kagyu Ling” dans les statuts de ce centre. Dashang, Dachang, Dagshang, Dag Shang, etc. sont divers rendus phonétiques pour transcrire དྭགས་ཤངས་བཀའ་བརྒྱུད. A cette série se joint depuis quelque temps également le siège de Kalu I Rinpoché à Sonada (དྭགས་ཤངས་བཀའ་བརྒྱུད་བསམ་གྲུབ་དར་རྒྱས་ཆོས་གླིང) dans les publications sur les réseaux sociaux. Les centres occidentaux fondés par Kalu I étaient rattachés à la fois à la lignée Shangpa et à la lignée Karma Kagyu. Les noms de refuge et de moine donnés par Kalu I en occident étaient précédés par Karma, pour indiquer cette appartenance. La mort du Karmapa XVI en 1981 et la controverse qui s'ensuivit était un premier facteur de complication ; le décès de Kalu I en mai 1989 allait en devenir un deuxième. Après sa mort, Bokar II Rinpoché (1940-2004) lui succède à la tête de la lignée Shangpa Kagyu. 

Mirik novembre 2001, dans le Jardin de Shambala (scan photo Claire Lumière)
Kalu II au centre

Yangsi Kalu II, né en septembre 1990, fut reconnu comme le tulku de Kalu I, et intronisé à Samdrup Tarjayling Sonada en février 1993 par Taï Sitou Rinpoché, Gyaltsab Rinpoché et Bokar II Rinpoché. Il reçoit le nom Karma Ngedön Tenpay Gyaltsen. Après le décès de son père, Lama Gyaltsen en 1999, neveu et ancien secrétaire de Kalu I, et gérant du siège Samdrup Tarjayling à Sonada en Inde, Yangsi Kalu II est allé au monastère Bokar Ngedhon Choekhor Ling à Mirik, pour étudier auprès de Bokar II Rinpoché, qui décéda en août 2004. À l’âge de 15 ans, Yangsi Kalu II fit la retraite traditionnelle de 2004 à 2008.

En 2010, il fit un voyage en occident pour reprendre en charge les divers centres fondés par Kalu I. Durant son deuxième voyage, en avril 2011, il change la direction du centre “Dashang Kagyu Ling”, notamment suite à des abus (voir aussi Violence dans le bouddhisme), et change le nom du centre en “Palden Shangpa La Boulaye”, avec l’accord de Situ Rinpoche. Dans la “Lettre dinformation de Paldenshangpa La Boulaye” :
Historiquement, Kyoungpo Neljor (978-1127) n’est pas le contemporain de Gampopa ; c’est Motchokpa, son principal disciple, qui le fut. Kyoungpo Neljor fut plutôt le contemporain de Marpa (1012-1097) le traducteur, le maître de Milarepa. Ils étudièrent tous deux en Inde auprès de maîtres communs tels que Maitripa. Néanmoins, les maîtres principaux de Kyounpo Neljor furent deux femmes, Dakinis de Sagesse, Nigouma et Soukka Siddhi. Il y eut aussi, parmi les plus importants, Dordge Denpa qu’il rencontra à Bodh Gaya et le Yogi Rahula. De retour dans la région de Shang au Tibet Kyounpo Neljor fut à l’origine d’une lignée bien distincte qui, bien que partageant des enseignements et pratiques avec les autres, avait aussi ses pratiques spécifiques.

Il est ainsi clair qu’il n’existe pas d’ « École Dashang » ! La juxtaposition de ces deux vocables fut choisie parce que le premier Kalou Rinpotché était un maître particulièrement éminent dans les deux traditions Karma et Shangpa Kagyu et qu’il transmettait principalement ces deux traditions
.”
Dans une confession publique, en novembre 2011, il déclare avoir été abusé sexuellement par des moines lorsqu'il était âgé de 12-13 ans (au monastère de Mirik), et il accuse son tuteur au monastère Samdrub Darjay Choling à Sonada, d'avoir essayé de le tuer.

En janvier 2014 Karmapa XVII Ogyen Trinley Dorje annonce la nouvelle de la réincarnation de Bokar II Rinpoche. Et en 2015, yangsi Bokar III est officiellement reconnu et intronisé par Karmapa XVII. Khenpo Lodrö Donyö (1943), l’abbé de Mirik, est son tuteur, et se charge de son éducation.


Le 27 juillet 2018, le monastère Samdrub Darjay Choling à Sonada publie une lettre en anglais et en français, accusant Yangsi Kalu II, d’avoir rendu ses voeux en 2009 sans concertation avec ses maîtres et d’avoir disgracié la réputation de Kalu I. La lettre liste les méfaits de Yangsi Kalu II, qui ont conduit au siège de Kalu I de créer son propre fonds pour recevoir les donations des disciples de Kalu I. Parmi les méfaits :
"Au cours des dernières années, l'incarnation actuelle a expulsé plusieurs lamas résidents de divers centres bouddhistes affiliés à notre monastère, des personnes qui avaient une foi inébranlable en son prédécesseur.

À l'avenir, ce n'est que lorsque l'incarnation actuelle aura regagné le respect de tous, tant sur le plan temporel que spirituel, qu'il sera digne de nos rêves et de nos espoirs dans cette vie et au-delà. Un jour, lorsqu'il sera pleinement capable d'assumer cette responsabilité, nous lui confierons les affaires externes et internes du monastère sans obstination. Cependant, si sa conduite actuelle, contraire à l'éthique et scandaleuse, devait se poursuivre, nous avons fermement résolu de ne pas lui remettre ce monastère et sa gestion, bien que nous n'ayons aucun pouvoir pour intervenir dans ses actions personnelles ou les restreindre. Si nous devions lui confier le monastère maintenant, en pensant qu'il a l'obligation et la responsabilité automatiques de le gérer, notre monastère et sa communauté monastique seraient certainement voués à la destruction.
[3]"

Situ Rinpoché publie une lettre un mois plus tard, dans laquelle il soutient Yangsi Kalu II et son projet de lignée Shangpa Kagyu[4]. Extrait :
L'actuel 2ème Kyabjé Kalu Rinpoché a été reconnu traditionnellement par moi et confirmé par Sa Sainteté le Dalaï-Lama. Depuis lors, Kalu Rinpoché détient la pleine autorité et responsabilité de maintenir l'ensemble de l'établissement de son prédécesseur, ainsi que de préserver et propager l'authentique lignée du Dharma du Bouddha, et de guider et nourrir le développement spirituel de chaque disciple selon les voies du Saint Dharma.

Pour cela, chaque Lama et disciple de Kalu Rinpoché sert sous sa direction et le soutient avec une dévotion et un dévouement complets, pour le bien de la lignée du Dharma du Bouddha et pour le bénéfice de tous les êtres sensibles.

L'actuel Kalu Rinpoché m'a également exprimé à plusieurs reprises qu'il souhaite maintenir la lignée Shangpa Kagyu comme sa responsabilité principale. Cette intention étant celle du Rinpoché, c'est très profond car le Rinpoché a la responsabilité de maintenir et de servir la lignée du Dharma du Bouddha, la Shangpa Kagyu étant l'une des lignées importantes du bouddhisme tibétain, et son prédécesseur pratiquait également la Shangpa Kagyu et la Dhagpo (Marpa) Kagyu
.”
Il est vrai que la lignée Shangpa est une des huit lignées avec des origines indiennes, appelées “sgrub brgyud shing rta brgyad” par Jamgön Kongtrul I. Il est vrai aussi que le précédent Kalu I avait utilisé la dénomination “Dwags shangs”. Le précédent Kalu I et son maître à lui, Norbu Tondrup, étaient rattachés à Palpung, le siège des Situpas au Tibet. L’actuel Situ Rinpoche soutient Kalu II dans son initiative d’école Shangpa indépendante. L’ancien siège de Kalu I, Samdrub Darjay Choling à Sonada, mentionne dans sa lettre “Un jour, lorsqu'il sera pleinement capable d'assumer cette responsabilité, nous lui confierons les affaires externes et internes du monastère sans obstination." Avec l’approbation de Situ Rinpoche, et la gestion actuelle de la lignée Shangpa par Kalu II, “les affaires externes et internes du monastère” pourraient sans doute lui être confiées, “sans obstination”...

Cela ne semble cependant pas être le cas. L’office du monastère Bokar Ngedhon Choekhor Ling est proche du Karmapa XVII Ogyen Tinlay et de Gyaltsab Rinpoché de la lignée Karma/Kamtsang Kagyu, et semble vouloir rester sous la tutelle de celle-ci. Kalu II est invisibilisé à Sonada, à Mirik, et dans les centres de Bokar II. Le monastère se présente comme appartenant à la lignée “Dagshang Kagyu” (དྭགས་ཤངས་བཀའ་བརྒྱུད) qui se rattache aux lignées Dagpo Kagyu et Shangpa Kagyu. Il y avait en effet un lien entre Gampopa (dwags po lha rje 1079-1153) et Mogchokpa Rinchèn Tseundru (1110-1170). C’est ce lien historique avec Gampopa et le Dagpo Kagyu, qui a sans doute conduit au choix du nom “Dagshang Kagyu”. C’est avec ce préfixe que Kalu I Rinpoché avait nommé ses centres fondés en Europe. Dans les centres de retraite affiliés à ces centres, on pratiquait à la fois les yidams et yogas Shangpa et Kagyupa, de Niguma/Sukhasiddhi et de Nāropa. Comme ce fut le cas à Palpung au Tibet.

Bokar II Rinpoche semble avoir eu une inclinaison particulière pour le Kālacakra Tantra. C’était son souhait de construire un stūpa de Kālacakra, un temple de Kālacakra, un jardin Shambala, et d’ajouter la pratique de Kālacakra et des six yogas associés dans ses centres de retraite à Mirik. Kalu I Rinpoche n'avait pas pu transmettre la tradition complète des six yogas du Kālacakra à Bokar II Rinpoche, en partie à cause de la difficulté à trouver les textes nécessaires en Inde. Pour y remédier, Bokar II Rinpoche avait invité le maître Jonang Khenpo Kunga Sherab Rinpoche du Tibet en 2004, pour recevoir la transmission complète des six yogas Jonang. Bokar II Rinpoche avait transmis la "cape" du Kālacakra ainsi que la responsabilité du monastère Bokar à Khenpo Lodrö Donyö Rinpoché, qui est l'actuel détenteur de cette lignée et le chef du monastère de Bokar Ngedhon Choekhor Ling (voir aussi mon blog Transmissions récentes du Kālacakra de 2013, et Kālacakra Tantra et Mahāmudra ésotérique de 2025).

L'enseignement et la pratique du Kālacakra Tantra occupent une place importante au monastère. Un grand rituel de Kālacakra, basé sur le mandala de sable, est conduit chaque année. Ce rituel suit une séquence précise et inclut la préparation, la création, et la dissolution ultérieure du mandala de sable. Elle inclut également une initiation de Kālacakra. Le centre de retraite du monastère propose un programme Jonang-Shangpa, incluant la pratique du Kālacakra Tantra, en plus d'autres pratiques comme les six yogas de Niguma. L'actuel chef du monastère, Khenpo Lodrö Donyö Rinpoche, est également actif dans la transmission, ayant donné des enseignements et a publié une histoire du Kālacakra Tantra en 2005[5].

Félicitations à l'occasion du 19ème anniversaire de Bokar III
signées Dashang Samdrup Tarjeyling (post FB)

Depuis quelque temps, la dénomination “Dashang” semble faire son retour sur les réseaux sociaux. Sonada, le siège de Kalu I signe ses publications en tibétain avec དྭགས་ཤངས་བཀའ་བརྒྱུད་བསམ་གྲུབ་དར་རྒྱས་ཆོས་གླིང (dwags shangs bka’ brgyud bsam grub dar rgyas chos gling). Une photo avec les trois détenteurs de la lignée Dashang (Les trois Père-fils spirituels de la lignée Dag shang Kagyu (dwags shangs bka' brgyud kyi rje yab sras rnam gsum) est publiée (voir en haut). 

The enthronement of the Third Bokar Rinpoche,
who illuminates the teachings of the Dagsang Kagyu.
VOA 23.11.2024 Gyaltsen Chodrak

Quand la radio Voice of Tibet (VOA) fait une émission dédiée à l’intronisation de Bokar III Rinpoché, on lit dans le titre : “Intronisation de la troisième réincarnation de Bokar, illuminateur de l'enseignement Dashang Kagyu”.  
 
Le Kagyu Monlam à Bodhgaya avait été instauré par Kalu I Rinpoché en 1983. Le Shangpa Monlam est tenu séparément par Kalu II Rinpoché, et le monastère de Sonada. Bokar III Rinpoché et Khenpo Lodrö Donyö organisent plutôt des Kagyu Monlam dans les centres de Bokar II rinpoché et au siège à Mirik.

Étant désormais loin des milieux bouddhistes tibétains, ce blog est fait à partir d'informations et des documents que l’on peut glaner sur Internet. Les photos des uns avec les autres publiées sur les réseaux sociaux sont autant d'indications sur les rapprochements et éloignements des uns et des autres, et donc sur l’état de lieu des relations entre lignées et offices. Les tulkus indépendants qui cherchent à se libérer de l’emprise des lignées et de leurs offices ont le plus grand mal de perdurer, comme dans l’Eglise d’ailleurs. Ça passe ou ça casse. L’indépendance se paie cher. Mais la dépendance aussi

Cette structure de lignées et d’offices (bla brang) régis autoritairement d’une main de fer, est-elle un modèle à suivre en Occident ? Avec un lien prêtre-bienfaiteur (mchod yon) ? Un bouddhisme relativement passif pour le grand public ? Des rituels complexes exécutés par des professionnels auxquels peuvent assister les fidèles ? La réponse peut évidemment être positive, cela dépend de chacun. Les centres et temples qui se vident en France fournissent peut-être un début de réponse. Disons que les bouddhistes tibétains de ma génération, inspirés par des yogis et des moines (souvent dans cet ordre), et des influenceurs moins avouables, voulaient souvent s’y engager davantage. Avec un ascenseur hiérarchique souvent en panne… Pour faire de beaux rituels complexes dans des temples -- si c’est cela qu’on veut proposer dans le cadre de la transmission en Occident -- il faudra des “professionnels” ou des volontaires enthousiastes, moines ou yogis. Je ne pense pas qu’il y a réellement de l’intérêt pour cela (hormis en tant que spectacle ou événement), mais je peux me tromper. Et pourtant c’est cela que le bouddhisme tibétain semble vouloir offrir, et à quoi il passe le plus gros de son temps et énergie. Puis, la légende et le message d'une société théocratique ou "éveillée", façon Shambala, est-elle réellement encore une option ? Quant à la véritable paix mondiale, qui n'est pas une Pax impériale, ne commence-t-elle pas autour de soi ?

***

[1] Oeuvres complètes 1 et 2 répertoriées par Edward Henning.

[2] dpal dus kyi 'khor lo sku gsung thugs yong rdzogs kyi dkyil 'khor du byis pa 'jug pa'i dbang bskur bklag chog tu bkod pa ye shes rgya mtsho'i bcud 'dren
bdr:MW23723_9161F6

[3] Traduction automatique d'extraits choisis de la lettre en anglais ci-dessous
Over the past few years, the present incarnation has expelled some residential lamas of several Buddhist centers affiliated to our monastery , people who have had unwavering faith in his predecessor.”

In the future, only when the present incarnation regains everyone’s respect in worldly and religious terms will he be worthy of our dreams and hope in this life and beyond. One day, when he is fully capable of shouldering the responsibility, we will hand over the external and internal affairs of the monastery to him without being obstinate. However, if his current unethical and scandalous conduct were to continue, we have therefore resolved firmly, not to hand over this monastery and its affairs to him, although we have no power to interfere and restrain his personal actions. If we were to hand over the monastery to him now. thinking that he has the automatic obligation and responsibility to manage it. then our monastery and it’s monastic community would certainly come to be destroyed.”

[4] Lettre de Situ Rinpoche 27/08/2018
In Tibetan Buddhist the reincarnation system and tradition was established around 900 years ago and since then the responsibility of each reincarnated master is to uphold without question, according to their predecessors, all responsibility of authority, presentation and propagation of that individual lineage.

The late 1st Kyabje Kalu Rinpoche Karma Rangjung Kunkyab who was retreat master in Palpung Monastic Seat Tibet of Both Naro Retreat Center and Shangpa Retreat Center and who contributed tremendous spiritual guidance in many people's lives all around the world and also established numerous Buddhist Monasteries and Centers in various countries.

The Current 2nd Kyabje Kalu Rinpoche was recognized traditionally by me and confirmed by His Holiness Dalai Lama. Since then Kalu Rnpoche has full authority and responsibility to uphold the entire establishment of his predecessor and to preserve and propagate the genuine lineage of Buddha Dharma and guide and nurture the spiritual development of every follower according to the ways of the Holy Dharma.

For this, every Lama and disciple of Kalu Rinpoche serves under his direction and supports with full devotion and dedication for the sake of the lineage of Buddha Dharma and tor the benefit of all sentient beings.

The current Kalu Rinpoche also expressed several times to me that he wishes to uphold the lineage of Shangpa Kagyu as his main responsibility. Since that is Rinpoche's intention, it is very profound being as Rinpoche has the responsibility of upholding and serving the lineage of Buddha Dharma with Shangpa Kagyu being one of the important lineages of Tibetan Buddhism and his predecessor also used to practice Shangpa Kagyu and Dhagpo(Marpa) Kagyu
.” 

[5] 'Bo-dkar Mkhan-po Blo-gros-don-yod, Bde-bar-gshegs-pa'i Ring-lugs Spyi dang Bye-brag Rgyud Thams-cad-kyi Rgyal-po Dpal Dus-kyi-'khor-lo'i Chos-skor-gyi Byung-ba Brjod-pa Thub-bstan Mdzes-par Byed-pa'i Rgyan Indra-nî-la'i Phra-tshom, Bokar Ngedon Chokhor Ling (Darjeeling 2005), 727 pages, réf. BDRC W00EGS1016994.

samedi 17 mai 2025

Kālacakra Tantra et Mahāmudra ésotérique

Rituel d'Offrande de Kālacakra à Mirik (mai 2025 photos FB)

"Ce blog est subjectif, dans le sens qu’il ne traite pas avec objectivité le bouddhisme et le mahāyāna en général, et le bouddhisme tibétain en particulier. Il tente néanmoins de présenter ces formes de bouddhisme conformément, mais en y ajoutant un point de vue plus critique (« moderne et occidental »). C’est sans doute une vision de l’Orient par l’Occident, mais en évitant un Orient créé par l'Occident (« orientalisme »). Il ne s’agit pas de nier les réalités du bouddhisme oriental, qui seront ici présentées le plus fidèlement possible, mais du moment que le bouddhisme arrive en Occident et s'y installe, l’Occident a son mot à dire sur les formes de pratique « occidentale » du bouddhisme « oriental » et leur pertinence." (Rappel de la présentation de mon blog)

 

L’origine indienne du Kālacakra Tantra

Le Vimalaprabhā (“Lumière immaculée”) est le commentaire principal du Kālacakra Tantra, l’un des textes majeurs du bouddhisme tantrique tibétain, particulièrement central dans la tradition Jonang, mais également important chez les Gelugpa, Sakyapa et Kagyupa.

Selon la tradition, le Kālacakra Tantra aurait d’abord été composé sous la forme d’un mulatantra de 12 000 vers, puis réduit à un laghutantra (version abrégée) par le roi Mañjuśrīkīrti de Shambhala. Son fils, le roi Puṇḍarīka, aurait alors rédigé le commentaire Vimalaprabhā. Ces deux textes auraient été conservés à Shambhala avant d’être « retrouvés » et transmis en Inde au Xe siècle. Le manuscrit (Gauḍī, Bengali) le plus ancien[1] date de la fin du Xème siècle. Le commentaire était traduit en tibétain au XIe siècle par Somanātha et Dro Lotsawa ('Bro Shes rab grags, ‘bro lugs). C’est ce commentaire qui l’attribue au roi Puṇḍarīka. Le manuscrit Gauḍī ne mentionne pas d’auteur. Il fut révisé, adapté, commenté, etc. plus tard notamment par des maîtres de Jonang et d’autres lignées.

Sommet des tantras et des yogas

Le Kālacakra Tantra est considéré comme "supérieur" ou le "sommet" de tous les autres tantras selon le tantra lui-même, ainsi que par d'importants maîtres tels que le 8ème Karmapa, Mikyö Dorje (1507-1554) et Jetsun Tāranātha (1575-1635), etc. Le corpus du Kālacakra a évolué constamment, s’est étoffé et a été mis à jour au cours des siècles. Le Kālacakra et son sextuple yoga (sbyor ba drug, s. ṣaḍaṅgayoga) est considéré supérieur aux autre anuttara-yogatantras, et leur “yogas” (chos drug) respectifs.

En général, dans le tantra anouttarayoga, la base de la purification est notre propre processus interne de mort, de bardo et de renaissance. Dans le Kalachakra, la base de la purification n'est pas seulement interne, mais à la fois externe et interne. Ainsi, les structures du corps, de l'univers et du mandala du Kalachakra sont parallèles et extrêmement étendues, bien plus étendues que dans les autres tantras anouttarayoga. Plus la base de la purification est étendue, plus la purification est complète.” (Alexander Berzin[2])
Le chapitre externe aborde la cosmologie, l'astronomie et les planètes, le chapitre interne couvre l'anatomie, les canaux, les vents d'énergie et les gouttes, et le chapitre "Autre" traite principalement des initiations et des chemins (étapes de génération et d’achèvement). La réalité tripartite du Kālacakra est intérieure/personnelle (nang gi, s. adhyātma), divine/cosmique (lha’i, s. adhidaiva) et existentielle/matérielle ('jig rten gyi, s. adhiloka/adhibhūta), et procède de l’Ādibhuddha (ou Paramādhibuddha), la réalité ultime et primordiale[3]. l'Ādibuddha est décrit comme existant depuis toujours, sans début ni fin. Il n'est pas localisé mais imprègne tous les phénomènes (dharma), constituant leur essence véritable au-delà des apparences. Sa nature fondamentale est la Luminosité (prabhāsvara), une conscience pure et sans obstruction qui est simultanément vide et connaissant. L'Ādibuddha transcende la dualité entre vacuité (śūnyatā) et luminosité (prabhāsvara), représentant leur union indivisible.

L'Adibuddha se manifeste au niveau cosmique comme principe ordonnateur de l'univers, structurant les correspondances entre macrocosme et microcosme. Au niveau individuel comme essence-de-bouddha (tathāgatagarbha) présente en chaque être sensible. Comme divinité tantrique (Kālacakra), l'union de la méthode et de la sagesse. Comme état final de réalisation (fruit), il est le cinquième corps "jñānakāya" (corps de gnose) ou "mahāsukhakāya" (corps de grande félicité), qui transcende les quatre corps du Bouddha (nirmāṇakāya, sambhogakāya, dharmakāya et svābhāvikakāya). Ce cinquième corps est considéré comme l'expression ultime de l'Adibuddha et représente l'union indivisible de la grande félicité et de la vacuité. L'essence-de-bouddha pleinement épanouie ou réintégrée.

Le Kālacakra Tantra considère les tantras-père (comme Guhyasamāja et Yamāntaka) et tous les tantras-mère (comme Cakrasaṃvara et Hevajra) comme des tantras mondains ('jig rten pa). Les initiations obtenus par ces tantras, et plus particulièrement l'utilisation de la karmamudrā et jñānamudrā lors de la troisième initiation pour atteindre la quatrième, visent à obtenir des siddhis “mondains”. Les siddhis atteints par les tantras “mondains” sont ceux du Vajradhara surpassable (bla bcas pa), ou du "Vajrasattva inférieur" (rdor sems nyi tshe ba).

Les initiations supramondaines du Kālacakra (en particulier la quatrième initiation) conduisent à l’état de Vajrasattva universel (khyab pa'i rdor sems) et à la réalisation ultime du Mahāmudrā ésotérique. Dans ce système, la troisième initiation du Kālacakra, qui prépare à la quatrième (l'ultime sagesse du Grand Sceau), n'est pas mélangée aux siddhis mondains. La quatrième initiation du Kālacakra est ainsi considérée comme supérieure à la quatrième initiation provenant d'autres tantras comme Cakrasaṃvara et Guhyasamāja. Le Kālacakra est considéré comme plus profond, plus vaste et plus complet dans sa présentation de la voie ultime, clarifiant ce qui peut être caché ou moins explicite dans d'autres tantras.

Le syncrétisme assumé d’un ogre ésotérique

La présence de parallèles entre le Kālacakra Tantra et certains textes hindous comme la Bhagavad-Gītā s'inscrit dans une longue histoire d'influences mutuelles. Comme l'a suggéré Madeleine Biardeau (dans Le Mahābharata), la Bhagavad-Gītā elle-même pourrait avoir été développée en partie comme une réponse aux traditions de renoncement, notamment bouddhiques, proposant une voie de libération accessible aux laïques sans renoncement complet. Le bouddhisme Mahāyāna aurait alors émergé en réaction à ce succès, réintégrant certains éléments de dévotion et d'action dans le monde.

Le Kālacakra, apparaissant bien plus tard dans cette conversation millénaire, poursuit cette dynamique d'appropriation créative. La tripartition externe/interne/autre (adhiloka/adhyātma/adhidaiva) présente dans le Kālacakra et la Bhagavad-Gītā illustre comment des cadres conceptuels similaires ont été adaptés et réorientés vers des objectifs sotériologiques distincts. Si Kṛṣṇa déclare dans la Gītā être "le germe de tous les êtres" et que "rien ne peut exister sans lui", le Hevajra Tantra affirme similairement que "cet univers entier surgit de moi" - formulations qui révèlent une compétition implicite pour la vision cosmologique la plus englobante.

Pour faire plus court, avec le concept de l’Ādibuddha, le Kālacakra se présente comme une approche “éternaliste” (moniste)[4], où, ce que nous appellerions le surnaturel ou le supramondain est finalement la seule réalité, contenant les deux “réalités” du bouddhisme (phénomènes conventionnels ainsi que leur nature vide). Celles-ci sont éclipsées et disparaissent comme neige au soleil pour ceux qui possèdent la gnose lumineuse. La méthode externe, interne et “Autre” du Kālacakra, permet d’amener la Lumière primordiale (externaliser) dans toutes les réalités mondaines, comme des jñānasattva, à travers des correspondances et articulations multiples, par le biais de rituels, yogas, etc. Le syncrétisme devient alors une arme (Soft Power), qui lui permet d’injecter sa réalité lumineuse dans toutes les expressions cultuelles et religieuses conventionnelles, qu’elle peut intégrer, digérer, et faire siennes.

On retrouve les termes mêmes des approches externe, interne et Autre dans le huitième Chant de la Bhagavad-Gītā (Le salut en Brahman) :
"Arjuna dit:

1. Qu’est-ce que ce Brahman? et l’âme individuelle [adhyātmaṃ] ? Qu’est-ce que l’acte, ô suprême Seigneur? Qu’entends-tu par l’essence des êtres [adhibhūtaṃ] ? par l’essence du divin [adhidaivaṃ] ?
2. Qui — et comment? — ô vainqueur de Madhu, peut, ici-bas, dans un corps mortel, contenir l’essence du sacrifice? Comment, à l’heure suprême, peux-tu être connu des hommes qui ont su se discipliner?

Bhagavāt dit :

3 L’Impérissable est le Brahman suprême; on appelle âme individuelle la nature propre de chacun ; le devenir des êtres résulte de cette offrande créatrice qui s’appelle l’acte rituel.
4. Existence transitoire dans l’ordre des êtres, esprit (Puruṣa) dans l’ordre des dieux, j’incarne en ce corps, ô le meilleur des hommes, l’essence du sacrifice
[5].” (La Bhagavadgìta d'Émile Senart, Public Domain, 1922)
Le yoga à six branches

Le sextuple yoga (sbyor ba yan lag drug) associé au Kālacakra Tantra consiste en six éléments : pratyāhāra (retrait des sens, t. sor sdud), dhyāna (méditation, t. bsam gtan), prāṇāyāma (contrôle du souffle, t. srog rtsol), dhāraṇā (concentration, t. ‘dzin pa), anusmṛti (une forme de mémoire contemplative ou "remémoration", t. rjes su dran pa), samādhi (absorption, t. ting nge ‘dzin) - l'état final d'union parfaite. L'objectif n'est pas tant la transformation du corps physique grossier en un corps lumineux, mais plutôt le processus de manifester le corps lumineux (corps illusoire pour les tantras-père, corps d’arc-en-ciel pour les tantras-mère) à partir d'une essence lumineuse déjà présente (l'esprit de claire lumière le plus subtil et les vents subtils).
L'esprit de claire lumière (clear-light mind) le plus subtil est soutenu par le vent d’énergie le plus subtil. Avec l'atteinte de l'illumination, la continuité de l'esprit de claire lumière le plus subtil soutenue par les éléments des corps grossiers et subtils prend fin. Au contraire, les vents d’énergie les plus subtils qui soutiennent l'esprit de claire lumière donnent naissance aux formes subtiles d'un Sambhogakaya et aux formes plus grossières d'un Nirmanakaya.” (Alexander Berzin[6])
Il ne s’agit donc pas d’une transformation du corps grosseur en corps subtil, mais d’une “libération” du corps subtil du corps grossier. Les textes manichéens parlent explicitement d'une "nature lumineuse originelle" ou d'une "âme lumineuse" qui est emprisonnée dans le corps de chair. L'objectif n'est pas de créer cette nature lumineuse, mais de la libérer de l'emprise du corps de chair et de la Ténèbre. Extrait du L’Hymnaire manichéen chinois Xiabuzan :
“c.39 Ô, Grand Saint, tends-moi vite une main miséricordieuse
Et pose-la sur ma tête qu’ illumine ma nature bouddhique originelle !
À toute heure surveille-moi et protège-moi,
Sans permettre à la horde des démons d’ approcher pour me nuire.


c.40 Fais que m’habite à nouveau la joie éprouvée autrefois dans le monde originel!
Libère-moi des tourments des kalpa passés,
Aide-moi à parfaire totalement la merveille de mon âme de lumière, solennelle et glorieuse,
Comme il en était auparavant, avant que je ne sombre dans un monde de convoitise et de vanité!
[7]
La mention la plus ancienne d’un sextuple yoga (qui précède par ailleurs l’octuple yoga du système de Patanjali) se trouve dans le Maitrāyaṇīya Upaniṣad, et consiste en : prāṇāyāma (contrôle du souffle), pratyāhāra (retrait des sens), dhyāna (méditation), dhāraṇā (concentration), tarka (contemplation analytique) et samādhi (absorption). Dans le système du Kālacakra, le yoga à six branches reprend les mêmes noms des branches, pour actualiser le Corps vajra, éternel et lumineux.

Identité lumineuse : l’essence-de-bouddha dotée de qualités positives

Parmi ces qualités figurent la pureté, la permanence, la félicité et la véritable identité (gtsang rtag bde ba bdag). La vue par excellence associée au Kālacakra Tantra est celle dite “gzhan stong”, parfois traduit comme “vide extrinsèque”. Les phénomènes conventionnels (dharma), les afflictions mentales (kleśa) et toutes les impuretés adventices (mala āgantuka) sont considérés comme "vides de nature propre", c’est-à-dire qu’ils n'ont pas d'existence inhérente, et recouvrent en quelque sorte La lumière primordiale ('od gsal, s. prabhāsvara), qui n'est PAS vide d'elle-même. La diffusion universelle de cette réalité ultime est décrite comme l’essence-de-bouddha (tathāgatagarbha). Cette Luminosité, “vide” de tout ce qui n’est pas elle-même, est la “Lumière immaculée”, Vimalaprabhā, le titre même du Commentaire du Kālacakra Tantra.

Il ne s’agit pas de prétendre que la réalité tripartite du Bhagavad-Gītā serait celle du Kālacakra, que le sextuple yoga serait d’origine yayurvédique, que le Brahman et l’Adhibuddha[8] sont le même type de corps cosmique, que l’essence-du-bouddha serait un fragment de l’Adhibuddha, comme l'âme incarnée (jīva) est un fragment (aṃśa) de la divinité suprême (≈ Śrī Kṛṣṇa). Il y a des divergences et des nuances, mais ceux qui font de la botanique spirituelle ne manqueront cependant pas d’identifier des ressemblances de famille frappantes.
“10.39 Le germe (bījam) de tous les êtres, c’est moi ô Arjuna.
Il n’est pas d’être animé ou inanimé, qui puisse exister sans moi
.” La Bhagavad-Gītā, suivi du Commentaire de Śaṅkara (extraits), Émile Senart et Michel Hulin, Points Sagesses, 2010, p. 85)

15.7 Une parcelle de moi éternelle, devenue âme vivante dans le monde des vivants,
groupe les six sens — dont le sens interne — qui procèdent de la prakṛti
. (Sénart, 1922)[9]

"Cet univers entier surgit de moi. Les trois royaumes surgissent de moi. Je pénètre tout ce qui existe et ce monde visible ne consiste en rien d'autre[10]." (Hevajra Tantra)
Lumière primordiale

Le corps cosmique de l’Ādibuddha est la Lumière primordiale rayonnant partout, façon Logos... La conscience primordiale éternelle diraient d’autres.
“c.266 Universelle est la lumière rayonnante, porteuse de pureté,
De joie éternelle, où silence et néant se rejoignent dans la quiétude
Et où l’ on ressent une félicité dénuée de toute affliction :
Ce n’ est pas un lieu où la moindre parole de souffrance puisse être prononcée!
” h .xiii ( c.261-338, Hymnaire manichéen[11])
Elle est “pure”, c’est-à-dire qu’il n’y a aucune impureté en elle ; il n’y a au fond qu’Elle. Toute perception dualiste d’un macrocosme et d’un microcosme, est due à l’ignorance, à la non-gnose, la non-connaissance immédiate de sa véritable essence.

Bataille finale et restauration de l’Âge d’or

La non-gnose est à l’origine du mal et de la souffrance. Celui qui ne perçoit pas la Lumière, perçoit des ombres, qu’il réifie, et auxquels il s’identifie. Comme ce qui est “externe” et ce qui est “interne” sont comme synchronisés, la bataille est permanente, à la fois interne et externe. D’où la nécessité de s’identifier au corps lumineux interne. Changez le monde, commencez par vous-même, le vous-même profond…

Mais la bataille dite sacrée externe contre les forces barbares (prédit pour 2424) qui ne connaissent ni la gnose ni les révélations, ou qui les rejettent sciemment, a elle aussi des répercussions “internes”. En sortant vainqueurs de la bataille finale, les adversaires barbares vivront sous la Pax Luminosa et participeront à la gnose universelle[12]. En effet, les barbares sont au fond ceux qui ne connaissent pas une civilisation lumineuse spécifique, ou la rejettent. Les dompter et éduquer aura des effets (voir p.e. le roi Anala du Gaṇḍavyūha sūtra). D’un point de vue spiritualiste, les barbares sont surtout des naturalistes qui croient en la raison, en les phénomènes conventionnels, aux sciences, aux Lumières, considérés comme des sources de connaissance mondaines, de ce monde. La gnose du Kālacakra est considérée supramondaine, même si ces qualificatifs n’ont pas lieu d’être dans la Lumière fondamentale.

L’identité de l’ennemi, “les barbares”

Le Kālacakra Tantra, notamment le commentaire Vimalaprabhā, identifie clairement les barbares (mlecchas) aux Musulmans. Cette identification est liée au contexte historique des invasions musulmanes dans le nord de l'Inde à la fin du 10ème et au début du 11ème siècle par des figures comme l'Amīr de Ghaznī et son fils Sultan Mahmud. Le Kālacakra Tantra prédit l'introduction du "Dharma barbare[13]" (Islam) dans la région de La Mecque ("Mecca")[14]. Au fond, tous les cultes ou religions qui ne sont pas à sa hauteur, sont considérés comme (partiellement) barbares. Y compris le dharma védique, qui aussi pratiquait les sacrifices d’animaux.

Le Kālacakra est contre le système des castes, dans le sens qu’il vise à unir toutes les classes sociales (y compris les Śūdra et autres basses classes) en une seule famille Vajra par l'initiation. Il déconseille de suivre les Dharmas Vaiṣṇava et Śaiva pour les raisons de préjugés de caste.

Urban Hammar note qu'un passage du tantra mentionne une série de figures, incluant Mahomet ("Muhammed") et son enseignement (Islam), qui sont dits être au service de serpents démoniaques. “Ces figures sont "Adam, Noé, Abraham, Moïse, Jésus, 'Celui vêtu de blanc', Mohammed et Mathani." L’Islam est présenté comme un "enseignement barbare et par conséquent le principal ennemi du bouddhisme". Cette association à des figures négatives et à l'idée d'un "ennemi" renforce la désignation de "barbare"[15].

Les musulmans s'offusquaient de l'"idolâtrie" des “mūrti”, la vénération d’icônes ou de divinités par les hindous, bouddhistes, jains, etc., était un point de conflit du point de vue musulman. Dans le Kālacakra Tantra, le “mūrtipūjā” (≠ sgrub mchod) prend une place centrale.

D’autres “barbares” ou ennemis étaient les écoles matérialistes indiennes, comme le Lokāyata (ou Cārvāka), des renégats doctrinaux issus de la société aryenne. Les textes hindous ultérieurs, et aussi le Kālacakra Tantra, ont assimilé les idées matérialistes à une "mentalité mleccha" parce qu'elles contredisaient l'idéal spirituel aryen. Les mlecchas et les matérialistes (comme le Lokāyata) étaient accusés de privilégier le tangible sur le transcendant et de corrompre la jeunesse par des valeurs considérées comme "basses" (plaisir, richesse).

Une autre catégorie de “barbares” “matérialistes” est parfois identifiée par certains tulkus tibétains. Dzongsar Jamyang Khyentse Rinpoche défend un bouddhisme tibétain traditionnel conservateur. Il s'est exprimé ouvertement contre les tentatives de séculariser le bouddhisme et d'intégrer des valeurs occidentales telles que la démocratie, le rationalisme et la science. Selon lui, la "modernisation" ("so-called modern life") est essentiellement une "occidentalisation". Il estime que la civilisation occidentale, après avoir traversé le paganisme, le christianisme et les Lumières, est désormais coincée dans le rationalisme, la science, le naturalisme, bref le “mondain”[16]. C’est ce qui l’empêche d’avoir accès à la transcendance et au supramondain. Dzongsar semble en cela rejoindre les affirmations du Commentaire Vimalaprabhā.

Ritualistique et culte de représentations divines (mūrtipūjā)

Afin de rendre visible ce qui n’est pas (encore) directement aperçu, il faut “externaliser” (comme dirait Alice Bailey) la Pax Luminosa dans le cadre d’initiations (abhiṣeka), pratiques (sādhana), rituels d’offrandes (t. sgrub mchod), instructions ésotériques, etc., que l’on trouve expliqués dans le Chapitre appelé “Autre”. Injecter de la Lumière dans la réalité quotidienne ordinaire (voir photo ci-dessus). Le triple maṇḍala[17] du Kālacakra Tantra est une structure qui reflète et, dans la pratique, purifie et transforme le cosmos tel que nous le percevons.

Le mandala de Kālacakra contient 722 entités, qui sont qualifiées de divinités (maṇḍala du Corps, Parole, Esprit), et qui sont également en lien avec les canaux énergétiques (nāḍī) dans le corps de l'initié. Tous les éléments de notre expérience ordinaire sont représentés par des dieux/daimons. Les trente déités du mois lunaire Caitra sont corrélées avec trente canaux. Les formes purifiées des 360 souffles/heures/jours sont 336 déités d'entourage des déités des jours lunaires, plus douze parèdres des déités des jours lunaires et douze déesses du maṇḍala de l'esprit. Les formes pures des trente-deux canaux du lieu secret sont huit nāgas et huit mātṝkā féroces, multipliées par deux pour l'aspect sagesse et méthode, soit trente-deux. Il est fait mention de 1620 déités principales de sagesse et de méthode dans le mandala glorieux des constellations du Bouddha Suprême et Originel[18].

Pour ce qui est du côté obscur situé à la périphérie du maṇḍala, il y a le rākṣasa Ghaṇṭākarṇa, l'ogresse Hāriti, le tripède Bhṛiṅgī, des protecteurs de champs (kṣetrapāla) et des siddhas malveillants à subjuguer. La liste du côté obscur de la force inclut les rākṣasa, les planètes grahas, les piśācas, les śākinīs, les nāgas maléfiques qui se réjouissent du sang humain, les ḍākinīs, les rupikās, les vampire-ghouls (kumbhāṇḍa) se nourrissant dans les cimetières, les protecteurs de champs (kṣetrapala), les gaṇapatis, les pretas (démons affamés), les goblins, les seigneurs des ḍākinīs accompagnés d'épilepsie, et les siddhas malveillants... Ces êtres sont considérés comme puissants et capables de causer des maladies et autres maux. Des maṇḍalas spécifiques et des offrandes leur sont dédiés, souvent construits en dehors du village ou dans d'autres lieux spécifiques comme les cimetières ou les confluences de rivières.

Le rituel “externalise” la bataille externe et interne, équilibre les forces, et restaure l’ordre du maṇḍala.

L’importance du Kālacakra pour le huitième Karmapa

Maintenant, regardons ce que Karmapa VIII Mikyö Dorje (1507-1554) dit du Kālacakra Tantra, du vide extrinsèque (gzhan stong) et des six yogas associés. Je vais m’appuyer essentiellement sur un article de Jim Rheingans, The Eighth Karmapas Answer to Gling drung pa: A Case Study[19]. Les questions-réponses de Lingdroungpa (Gling drung la ’dor ba’i dris lan). Karmapa 8 y reprend à son compte les arguments du Kālacakra, et souligne dans ce texte la supériorité de la quatrième initiation issue du Kālacakra par rapport à celle des autres tantras. Il distingue le Kālacakra des autres tantras comme le Guhyasamāja ou le Hevajra, dont les initiations sont considérées comme “mondaines”. Il distingue cependant le Grand Sceau (Mahāmudrā) des initiations tantriques et de leurs pratiques, affirmant qu'il ne peut être mis en correspondance avec les initiations mondaines et supramondaines, car il est naturellement libre des "impuretés" (mala) des réalisations obtenues par ces pratiques. Il met fondamentalement au même niveau la réalisation du Grand Sceau et la gnose (ou connaissance directe et non-conceptuelle) de la Luminosité primordiale (≈ Vimalaprabhā), l'accès direct à la nature essentielle de l'esprit. Autrement dit un accès “supramondain”, transcendant, surnaturaliste, Lumineux, Divin.

Le Mahāmudrā ésotérique

L’union de śamatha et vipaśyanā est un chemin ou une méthode cruciale pour accéder à la réalité, en particulier la vacuité, de manière non conceptuelle. Cependant, la gnose de la Luminosité semble être “le niveau le plus subtil de l'esprit” et la réalisation ultime accessible par ce chemin, plutôt que le chemin lui-même. La Gnose (jñāna, t. ye shes) est décrite comme une connaissance "inséparable de la Sphère primordiale". La pratique du Mahāmudrā implique de "laisser l'esprit se reposer sans artifice" (ma bcos par) dans sa vraie nature. Mais quelle est “sa vraie nature” ou essence, si celle-ci dépasse l’union de śamatha-vipasana, ou l’union des deux vérités, et est considérée une gnose lumineuse primordiale ?
"Concernant le Grand Sceau (Mahāmudrā) soutenu par Dwags po Lha rje [Gampopa] de la tradition Bka' brgyud : Dans la grande absence primordiale (ye bral) des impuretés des expériences, réalisations, vues et systèmes philosophiques des quatre initiations mondaines et supramondaines et ainsi de suite, on s'établit dans l'oṅ sva re [l'état naturel laissé tel quel] non fabriqué tandis qu'il [le Grand Sceau] apparaît spontanément comme le bouddha primordial, l'essence même de l'être-là éternel (ye bzhugs nyid) ![20]
La doctrine du vide extrinsèque, qui sous-tend cette vision de la Luminosité ontologique, propose que la Luminosité/nature-de-bouddha transcende le cadre conventionnel des deux vérités. Elle est décrite comme une "troisième vérité" implicite qui est une réalité ontologique fondamentale et possède des qualités positives (pureté, permanence, félicité, identité véritable).

Dans le colophon d’un autre texte Instructions de la pratique de śamatha dans le cadre du Mahāmudrā (Phyag rgya chen po zhi gnas kyi khrid), Karmapa 8 s’exprime avec un ton d'auto-dérision ironique en signant.
"[Je] ne préserve même pas les préceptes du refuge et ne médite pas sur la mort et l'impermanence ne serait-ce qu'une seule session. [Mais, je] déclare : "[Je] médite sur le Grand Sceau immédiatement !" [Lama], je vous en prie, considérez avec compassion ma nature insensée ![21]"
Il semble, à différentes occasions, mélanger des arguments de la voie progressive (lam rim) qui s’inscrit dans un bouddhisme de la voie médiane, et d’une voie gnostique ésotérique où le guru joue un rôle crucial, et où la gnose, qui est , à l’état latente, depuis toujours, et qui peut jaillir à tout moment, mais indépendamment de toute pratique de bouddhisme naturaliste.

Est-ce que ce “Mahāmudrā” ésotérique était le “Mahāmudrā” de Gampopa (Dwags po Lha rje 1079-1153) et de Sahajavajra, disciple d’Advayavajra/ Maitrīpada (1007–1085) ? Et d’autres, qui suivaient la vue Apratiṣṭhāna-Madhyamaka (tib. dbu ma rab tu mi gnas pa). Il est clairement celui des Kālacakristes et des propagateurs de la vue du vide extrinsèque, et de tout ce qui s’ensuit. 

***

"En 1441, au concile de Florence, il est décrété que les païens, les juifs, les hérétiques et les schismatiques n'auront aucune part à la 'vie éternelle' et que tous, à moins de se tourner, avant de mourir, vers la véritable religion, iront droit en enfer.

C'est du temps que l'Eglise professait de pareilles énormités qu'elle était vraiment l'Eglise. Une institution n'est vivante et forte que si elle rejette tout ce qui n'est pas elle. Par malheur, il en est de même d'une nation ou d'un régime." Emil Cioran, De l'inconvénient d'être né, 1973
Pour des informations détaillées sur tout ce qui concerne le tantra de Kalachakra, voir le site d'Edward Henning (1949-2016)

[1] N° G-10766, Asiatic Society, Kolkata.

[2] Pourquoi étudier et pratiquer le tantra de Kalachakra ? Alexandre Berzin

[3] L'Ādibuddha représente la réalité ultime et primordiale, antérieure à toute manifestation conditionnée

[4] Le rang stong (vide intrinsèque) postule que tous les phénomènes, y compris la conscience et ses qualités, sont vides de nature propre (svabhāva-śūnyatā). Cette vision, défendue par des maîtres comme Nāgārjuna et le Madhyamaka, considère que rien n'existe de façon inhérente, pas même les qualités de l'éveil. En contraste, le gzhan stong (vide extrinsèque) affirme que si les phénomènes conditionnés sont effectivement vides de nature propre, la nature de bouddha (tathāgatagarbha) et la Luminosité primordiale (prabhāsvara) ne sont pas vides d'elles-mêmes. Elles sont seulement vides d'éléments étrangers à leur nature (les obscurcissements adventices ou āgantuka-mala).

[5] arjuna uvāca Bhg_08.001 [=MBh_06,030.001]
kiṃ tad brahma kim adhyātmaṃ kiṃ karma puruṣottama Bhg_08.001a [=MBh_06,030.001a]
adhibhūtaṃ ca kiṃ proktam adhidaivaṃ kim ucyate Bhg_08.001c [=MBh_06,030.001c]
adhiyajñaḥ kathaṃ ko 'tra dehe 'smin madhusūdana Bhg_08.002a [=MBh_06,030.002a]
prayāṇakāle ca kathaṃ jñeyo 'si niyatātmabhiḥ Bhg_08.002c [=MBh_06,030.002c]
śrībhagavān uvāca Bhg_08.003 [=MBh_06,030.003]
akṣaraṃ brahma paramaṃ svabhāvo 'dhyātmam ucyate Bhg_08.003a [=MBh_06,030.003a]
bhūtabhāvodbhavakaro visargaḥ karmasaṃjñitaḥ Bhg_08.003c [=MBh_06,030.003c]
adhibhūtaṃ kṣaro bhāvaḥ puruṣaś cādhidaivatam Bhg_08.004a [=MBh_06,030.004a]
adhiyajño 'ham evātra dehe dehabhṛtāṃ vara Bhg_08.004c [=MBh_06,030.004c] Revised GRETIL version

[6] Pourquoi étudier et pratiquer le tantra de Kalachakra ? Alexander Berzin

[7] Rault, Lucie : L’Hymnaire manichéen chinois Xiabuzan 下部讚 à l’usage des Auditeurs, 2018, Brill, p.90-91
c.39 大聖速申慈悲手
按我佛性光明頂
一切時中恒守護
勿令魔黨來相害

c.40 與我本界已前歡
除我曠劫諸煩惱
盡我明性妙莊嚴
如本未沉貪欲境
[8] L'Ādibhuddha représente la réalité ultime et primordiale, antérieure à toute manifestation conditionnée.

[9] Revised GRETIL version
yac cāpi sarvabhūtānāṃ bījaṃ tad aham arjuna Bhg_10.039a [=MBh_06,032.039a]
na tad asti vinā yat syān mayā bhūtaṃ carācaram Bhg_10.039c [=MBh_06,032.039c]
mamaivāṃśo jīvaloke jīvabhūtaḥ sanātanaḥ Bhg_15.007a [=MBh_06,037.007a]
manaḥṣaṣṭhānīndriyāṇi prakṛtisthāni karṣati Bhg_15.007c [=MBh_06,037.007c] 
[10] Hevajra Tantra, Farrow & Menon, p. 101
madbhavaṃ hi jagat sarvaṃ madbhavaṃ bhuvanatrayam |
madvyāpitam idaṃ sarvaṃ nānyamayaṃ dṛṣṭaṃ jagat || 39 || 
[11] Rault, Lucie : L’Hymnaire manichéen chinois Xiabuzan 下部讚 à l’usage des Auditeurs, 2018, Brill, p. 230-231
c.266 光明普遍皆清淨
常樂寂滅无動俎
彼受歡樂无煩惱
若言有苦无是處
[12] (Overview of Kalachakra, Alexander Berzin)
According to the Kalachakra presentation of historical cycles, barbaric hordes periodically invade the civilized world and try to eliminate all possibilities for spiritual practice. A future invasion is predicted for the year 2424 of this common era, when it is said there will be another brutal world war. At that time help will come from Shambhala to defeat the barbarians. A new golden age will dawn, with everything conducive for spiritual practice, particularly of Kalachakra. All those who have previously received the Kalachakra initiation will be reborn at that time on the victorious side. The highest motivation for receiving the empowerment is to be able to practice the Kalachakra methods now in order to achieve enlightenment in this very lifetime. Nevertheless, people have traditionally flocked to the initiation with the motivation of planting karmic seeds to connect themselves with this future golden age so as to complete its practice then.” 
[13] Le commentaire Vimalaprabhā note spécifiquement que les adeptes du Dharma barbare utilisent le mantra "Bismillah" pour frapper les animaux au cou avec une hachette et manger leur chair. Le texte affirme qu'il n'y a "aucune différence entre le Dharma barbare et le Dharma védique en ce qui concerne le meurtre". (voir Vesna Wallace, 2001)

[14] Vesna Wallace, The Inner Kalacakratantra: A Buddhist Tantric View of the Individual, Oxford University Press, 2001.

[15] Urban Hammar. Studies in the Kalacakra TantraA History of the Kalacakra in Tibet and a Study of the Concept of Ādibhuddhathe Fourth Body of the Buddha and the Supreme Un-changing.
“Urban Hammar notes that a passage from the tantra mentions a series of figures who are said to be in the service of demonic snakes. These figures are "Adam, Noah, Abraham, Moses, Jesus, "The white-clad one", Muhammed and Mathani." Hammar adds that "Muhammed and his teaching of Islam is presented as a barbaric teaching and consequently the main enemy of Buddhism."
[16] Voir mon blog Meanwhile on the Science-Belief spectrum (2022).

[17] La Roue Externe concerne l'univers, le monde extérieur, les cycles des planètes et le temps tel que nous le connaissons.
La Roue Interne concerne l'univers intérieur, c'est-à-dire le corps subtil de l'individu, ses canaux énergétiques, ses vents vitaux et ses cycles internes.
La Roue Alternative (ou "Autre") concerne les initiations, les chemins et les résultats de la pratique, et inclut le mandala Kālacakra lui-même.

[18] Khedrup Norsang Gyatso, Geshe Thupten Jinpa, Gavin Kilty, Ornament of Stainless Light: An Exposition of the Kalachakra Tantra (2001), Wisdom Publications, dans la série Library of Tibetan Classics.

[19] Gling drung la ’dor ba’i dris lan
Publié dans 2011, In Kapstein, Matthew T. and Roger R. Jackson (eds.), Mahāmudrā and the bKa´-brgyud Tradition. Proceedings of the 11th Seminar of the International Association for Tibetan Studies Bonn. IITBS GmbH: Halle, 345–386.

[20] English translation by Jim Rheingans, 2011.
“In that case, concerning the Great Seal upheld by the Bka’ brgyud Dwags po Lha rje: In the great timeless (ye ) freedom from the impurities of experiences, realisations, views, and philosophical systems of the four mundane and supramundane empowerments and so forth, one settles in the unfabricated oṅ sva re while it [the Great Seal] appears spontaneously as the primordial buddha, the timeless presence itself!” 
Mi bskyod rdo rje, Karma pa VIII, Gling drung pa la ’dor ba’i dris lan, fol. 2b: / ’o na bka’ brgyud dwags po lha rje ba’i bzhed pa’i phyag rgya chen po ni / ’jig rten dang ’jig rten las ’das pa’i dbang bzhi sogs kyi nyams rtogs lta grub kyi dri ma dang ye bral chen por gdod nas [fol. 3a] / ye bzhugs nyid ye sangs rgyas su lhun gyis grub par ’char ba la ma bcos oṅ sva re ’jog pa las /.

[21] English translation by Jim Rheingans, 2011.
“[I] do not keep even the refuge-vows and do not meditate on death and impermanence for a single session. [But, I] say: “[I] meditate on the Great Seal right away!” [Lama], please consider foolish me with compassion!"
“The concluding verses of Mi bskyod rdo rje, Karma pa VIII, Phyag rgya chen po zhi gnas kyi khrid , fol. 4a: skyabs ’gro tsam gyi bslab bya mi bsrung zhing / ’chi ba mi rtag thun gcig mi bsgom par/ da lta nyid du phyag chen bsgoms zhes pa / /blun po’i rang bzhin bdag la thugs rjes gzigs /."