Naissance dans un lotus à Sukhāvatī, détail Himalayan Art 458 |
Dans un lointain passé, la récitation à haute voix était la technologie informatique dernier cri, à la fois apprentissage, mémorisation, transmission et renforcement d'équipe. Les “erreurs” de mémorisation deviennent aussitôt apparentes. Si des changements dans le contenu apparaissent, ils sont aussitôt mis à jour collectivement. Tout le monde est sur la même longueur d’onde. En revanche, quand des groupes de moines partaient dans différentes directions, les différences pouvaient émerger.
Avec l’arrivée du support écrit, toutes les caractéristiques et bienfaits de la récitation n’étaient plus absolument nécessaires, mais les récitations ont continué, l’aspect traditionnel s’ajoutant à ses caractéristiques. On pourrait lire en silence, pour apprendre et mémoriser, ou faire lire en silence pour transmettre, mais la lecture silencieuse est une activité individuelle et solitaire. Elle peut prendre plus ou moins longtemps, tandis que la récitation a la même durée pour tous. On comprend plus ou moins ce que l’on lit silencieusement, mais comprend-on bien ce que l’on récite avec les autres, en compagnie des autres, avec toutes les sources de distraction que cela implique ? On ne peut pas arrêter la récitation, pour mieux comprendre, pour réfléchir, pour expliquer aux autres. La récitation a une certaine durée, pendant que la soupe cuit dans le chaudron. La vie en communauté impose un planning assez strict.
Dans un contexte plus moderne, quand les “pratiquants” ne sont plus des moines vivant en communauté, et que la pratique devient davantage individuelle, la récitation à haute voix peut servir à s’entraîner, à se préparer pour des occasions, où l’on récite à haute voix ensemble. On récite toujours, car c’est une tradition bouddhiste, et que cela renforce l’esprit d’équipe, le sens d’une communauté. Réciter à haute voix seul chez soi permet de se rappeler que l’on fait partie d’un groupe de pratiquants qui ont un commun de réciter, ou lire rituellement, les mêmes textes chez soi. Peut-être qu'on se sent moins seul. Mais, sans pression sociale, il faut une bonne discipline pour continuer la récitation à haute voix, d’une certaine durée, pas forcément aux mêmes heures, car une soupe se réchauffe facilement au micro-ondes. Le relâchement s’installe si facilement…
Depuis ma découverte récente du renouveau tantrique chinois (1930-1950), de la “fièvre Qigong” (années 1980), des syncrétismes qui s’ensuivent et au fond d’un New Age chinois, je fais un peu mon François Jullien en faisant un détour par la Chine, pour voir ce que nous pouvons apprendre des Chinois sur notre propre New Age.
Je vais écrire un blog séparé sur les bienfaits et sur la façon de motiver des disciples, ici j’aborderai cet aspect chez Fahai Lama (法海喇嘛). Ce lama chinois, ou peut-être sino-tibétain, avait trouvé une solution pour motiver ses troupes de disciples pratiquant individuellement chez eux. Sans doute ne l’avait-il pas inventé, pas dans la forme qu’il enseignait, mais je n’ai pas vraiment de souvenir d’un ensemble de bienfaits si structuré. Dans son cas, il fait appel à des arguments pneumatologiques pour motiver ses disciples.
Par "pneumatologie", je comprends tout discours sur “le Lien” entre “le corps” et “l’esprit”, ou “l’Homme” et “le Ciel”. Le Lien concerne la part du Ciel, immortelle, en l’homme. Cette part est le “souffle vital”, “l’énergie cosmique”, le prāṇa, le Qi, ou le rlung, le pneuma que l’on peut chevaucher pour remonter au Ciel, et dont la structure réseautique, hydraulique, pneumatique de fluide spirituel constitue le “corps subtil”, le “corps énergétique”, le “corps astral”, qui nous assure de notre immortalité, si l’on a été initié en ses secrets. Monika Esposito parle d' "anatomie visionnaire" quand elle aborde les pratiques du Franchissement du Pic (tib. thod brgal).
Ceux qui étaient intéressés par le “renouveau tantrique”, “la fièvre Qigong” étaient souvent passés par le taoïsme, mais sans avoir trouvé chaussure à leur pied. L’appel exotique du mystérieux Tibet était la promesse d’un savoir ancestral perdu en Chine, mais peut-être préservé chez les tibétains. Cela présuppose tout de même la croyance en une Gnose, qui ne change jamais et qui est la même partout... Même le Parti Communiste Chinois (PCC) était intéressé par la redécouverte d’un savoir ancestral national, à condition d’en séparer les éléments religieux et superstitieux. C’est ainsi que je m’explique qu’un personnage comme Fahai Lama, ou Lama Faiha comme on dirait en français, avait l’opportunité et une certaine liberté pour expérimenter sa méthode in vivo. Il semble ne jamais avoir été réellement embêté par le PCC.
Pour motiver ses troupes, Lama Fahai utilisait l’attrait des pratiques pneumatologiques. Il n’est pas toujours évident de motiver ses disciples à faire des pratiques répétitives : récitation de sūtra, récitation de rituels et de mantras, prosternations (koutou), comment expliquer l’utilité de ce travail répétitif ? La réponse de Lama Fahai est : en les associant au travail pneumatologique.
Lama Fahai opère une fusion entre la pratique énergétique spirituelle et la récitation. Le champs de connaissance de la chose énergétique spirituelle venait d’être enrichi par le patrimoine pneumatologique tibétain. Nous savons maintenant[1] que les Chinois han, disciples de Gangkar Rinpoché, apprenaient de lui le système énergétique spirituel, “la réalité sous-jacente intérieure”, entre autres par l’étude de textes comme celui du Karmapa III (Zab mo nang don), traduit en anglais sous le titre “The Profound Inner Principles” par Elizabeth M. Callahan (avec le commentaire de Jamgon Kongtrul). C’est au fond une doctrine d’adéquation entre le corps subtil microcosmique (l’Homme) et l’univers macrocosmique (le Ciel, l’Homme cosmique, le lokapuruṣa). Le yogi est invité à opérer la jonction des deux “corps” en s’appuyant sur “le Lien”. Ce qui se trouve à “l’extérieur” se trouve “à l’intérieur”, leur séparation n’étant que le fruit de l’ignorance, que la Gnose compte éliminer. La Gnose révèle les secrets pneumatologiques.
[1] The Incarnation from White Glacier Mountain, The Biography of Gangkar Rinpoche by Minyag Gonpo, translated by S. Brinson Aldrigel.
Avec l’arrivée du support écrit, toutes les caractéristiques et bienfaits de la récitation n’étaient plus absolument nécessaires, mais les récitations ont continué, l’aspect traditionnel s’ajoutant à ses caractéristiques. On pourrait lire en silence, pour apprendre et mémoriser, ou faire lire en silence pour transmettre, mais la lecture silencieuse est une activité individuelle et solitaire. Elle peut prendre plus ou moins longtemps, tandis que la récitation a la même durée pour tous. On comprend plus ou moins ce que l’on lit silencieusement, mais comprend-on bien ce que l’on récite avec les autres, en compagnie des autres, avec toutes les sources de distraction que cela implique ? On ne peut pas arrêter la récitation, pour mieux comprendre, pour réfléchir, pour expliquer aux autres. La récitation a une certaine durée, pendant que la soupe cuit dans le chaudron. La vie en communauté impose un planning assez strict.
Jan Van Eijk, détail de l'Agneau mystique |
Réciter avec d’autres peut produire un certain enthousiasme, on se sent fort. On imagine que les autres comprennent ce qui est récité de la même façon que l’on le comprend soi-même. Tout le monde "est d’accord" sur le sens du contenu récité. C’est une lecture ritualisée, qui renforce le groupe. Réciter n'est pas lire, ni comprendre, c'est autre chose. Dans le bouddhisme des sūtra et de l'abhidharma, les nombreuses listes mémorisées et récitées, sont des aide-mémoires et des supports à la réflexion, et à la réflexion juste (skt. yonisomanasikāra). Certains dhāraṇī avaient cette fonction, mais à partir d'un certain moment les dhāraṇī sont devenus des incantations, et leur récitation avait une autre fonction.
Dans un contexte plus moderne, quand les “pratiquants” ne sont plus des moines vivant en communauté, et que la pratique devient davantage individuelle, la récitation à haute voix peut servir à s’entraîner, à se préparer pour des occasions, où l’on récite à haute voix ensemble. On récite toujours, car c’est une tradition bouddhiste, et que cela renforce l’esprit d’équipe, le sens d’une communauté. Réciter à haute voix seul chez soi permet de se rappeler que l’on fait partie d’un groupe de pratiquants qui ont un commun de réciter, ou lire rituellement, les mêmes textes chez soi. Peut-être qu'on se sent moins seul. Mais, sans pression sociale, il faut une bonne discipline pour continuer la récitation à haute voix, d’une certaine durée, pas forcément aux mêmes heures, car une soupe se réchauffe facilement au micro-ondes. Le relâchement s’installe si facilement…
Depuis ma découverte récente du renouveau tantrique chinois (1930-1950), de la “fièvre Qigong” (années 1980), des syncrétismes qui s’ensuivent et au fond d’un New Age chinois, je fais un peu mon François Jullien en faisant un détour par la Chine, pour voir ce que nous pouvons apprendre des Chinois sur notre propre New Age.
Je vais écrire un blog séparé sur les bienfaits et sur la façon de motiver des disciples, ici j’aborderai cet aspect chez Fahai Lama (法海喇嘛). Ce lama chinois, ou peut-être sino-tibétain, avait trouvé une solution pour motiver ses troupes de disciples pratiquant individuellement chez eux. Sans doute ne l’avait-il pas inventé, pas dans la forme qu’il enseignait, mais je n’ai pas vraiment de souvenir d’un ensemble de bienfaits si structuré. Dans son cas, il fait appel à des arguments pneumatologiques pour motiver ses disciples.
Par "pneumatologie", je comprends tout discours sur “le Lien” entre “le corps” et “l’esprit”, ou “l’Homme” et “le Ciel”. Le Lien concerne la part du Ciel, immortelle, en l’homme. Cette part est le “souffle vital”, “l’énergie cosmique”, le prāṇa, le Qi, ou le rlung, le pneuma que l’on peut chevaucher pour remonter au Ciel, et dont la structure réseautique, hydraulique, pneumatique de fluide spirituel constitue le “corps subtil”, le “corps énergétique”, le “corps astral”, qui nous assure de notre immortalité, si l’on a été initié en ses secrets. Monika Esposito parle d' "anatomie visionnaire" quand elle aborde les pratiques du Franchissement du Pic (tib. thod brgal).
Ceux qui étaient intéressés par le “renouveau tantrique”, “la fièvre Qigong” étaient souvent passés par le taoïsme, mais sans avoir trouvé chaussure à leur pied. L’appel exotique du mystérieux Tibet était la promesse d’un savoir ancestral perdu en Chine, mais peut-être préservé chez les tibétains. Cela présuppose tout de même la croyance en une Gnose, qui ne change jamais et qui est la même partout... Même le Parti Communiste Chinois (PCC) était intéressé par la redécouverte d’un savoir ancestral national, à condition d’en séparer les éléments religieux et superstitieux. C’est ainsi que je m’explique qu’un personnage comme Fahai Lama, ou Lama Faiha comme on dirait en français, avait l’opportunité et une certaine liberté pour expérimenter sa méthode in vivo. Il semble ne jamais avoir été réellement embêté par le PCC.
Pour motiver ses troupes, Lama Fahai utilisait l’attrait des pratiques pneumatologiques. Il n’est pas toujours évident de motiver ses disciples à faire des pratiques répétitives : récitation de sūtra, récitation de rituels et de mantras, prosternations (koutou), comment expliquer l’utilité de ce travail répétitif ? La réponse de Lama Fahai est : en les associant au travail pneumatologique.
Lama Fahai opère une fusion entre la pratique énergétique spirituelle et la récitation. Le champs de connaissance de la chose énergétique spirituelle venait d’être enrichi par le patrimoine pneumatologique tibétain. Nous savons maintenant[1] que les Chinois han, disciples de Gangkar Rinpoché, apprenaient de lui le système énergétique spirituel, “la réalité sous-jacente intérieure”, entre autres par l’étude de textes comme celui du Karmapa III (Zab mo nang don), traduit en anglais sous le titre “The Profound Inner Principles” par Elizabeth M. Callahan (avec le commentaire de Jamgon Kongtrul). C’est au fond une doctrine d’adéquation entre le corps subtil microcosmique (l’Homme) et l’univers macrocosmique (le Ciel, l’Homme cosmique, le lokapuruṣa). Le yogi est invité à opérer la jonction des deux “corps” en s’appuyant sur “le Lien”. Ce qui se trouve à “l’extérieur” se trouve “à l’intérieur”, leur séparation n’étant que le fruit de l’ignorance, que la Gnose compte éliminer. La Gnose révèle les secrets pneumatologiques.
Selon Lama Fahai, lors de la récitation de textes bouddhiques, l’énergie de sagesse (光明的智慧气) sort de la bouche. Réciter adoucit les nāḍī, la voix deviendra de plus en plus forte et les nœuds des nāḍī (granthi, 脉结也) se défont. Ces nœuds sont le résultat de notre karma et de nos habitudes (skt. vāsanā) depuis de nombreuses existences. Une fois le nœud défait, les nāḍī des gens ordinaires se transforment en nāḍī de sagesse, et les troubles disparaîtront. Si en plus de cela, on récite des noms de Bouddhas ou de bodhisattvas aux bienfaits multiples, on dote sa pratique pneumatologique de pouvoirs incantatoires. Si en plus de cela on voit l’image d’un Bouddha ou bodhisattva devant soi, on reçoit ses bénédictions (libération par la vue), etc. etc.
Le culte du bodhisattva Kṣitigarbha permet de détruire son propre mauvais karma, et par le transfert du mérite, celui des autres, y compris celui des âmes des défunts. Le culte du bouddha Amitābha, et la récitation de son nom, permettent la renaissance dans la Terre pure de Sukhāvatī. Le culte du bouddha Amitāyus permet d’avoir une longue vie, etc.
La récitation a ainsi changé de fonction à plusieurs reprises dans le bouddhisme. D’abord un moyen mnémotechnique, puis après l’invention de l’écriture et la rédaction des “écritures” bouddhiques, en plus de rester un moyen mnémotechnique, aussi un moyen de reproduction de la tradition, de renforcement de l’identité du groupe, et de production de bienfaits de diverse nature, réels et/ou imaginaires.
Le bouddhisme Ch’an est souvent présenté comme un bouddhisme minimaliste. Il peut l’être, mais l’est-il vraiment ? Le bouddhisme est ce que croient et font les bouddhistes disent les anthropologues. “Une religion est un système de pratiques et de croyances en usage dans un groupe ou une communauté”. Les bouddhistes, que croient , que font-ils ?
Un bouddhisme Ch’an “minimaliste” devrait suffire pour s’éveiller. Suffit-il ? Si on (p.e. les Chinois avant le renouveau tantrique), pense qu’il lui manque quelque chose, on peut donner plus de moyens (upāya) à son bouddhisme minimaliste. Des moyens de libération par l’ouï (récitations, mantras, incantations), par la vue (icônes, représentations), par le toucher (amulettes, yantras, etc.), des moyens pneumatologiques, énergétiques, "neuroscientifiques" (?) etc. Si, en multipliant les moyens, cela ne suffit toujours pas, que faire ? On peut remplir tout notre champs sensoriel par des moyens “de libération” sensoriels ; on peut remplir toutes nos pensées par des bouddhas, des bodhisattvas, de ḍākinī, que sais-je ; on peut remplir tous les nāḍī de prāṇa, de Qi, dans notre corps subtil qui serait notre “vrai corps” (l’autre n’étant que notre enveloppe terrestre) ; on peut faire de toutes nos paroles des mantras et de chaque respiration une autre mesure de Qi, chassant les toxines, les mauvaises habitudes, le mauvais karma, le corporel ; on pourrait recevoir un certificat d’éveil et nous entendre dire “vous êtes éveillé ; on pourrait se réveiller dans un lotus au plein milieu de Sukhāvatī avec Amitābha ou Avalokita qui nous sourit, serait-on pour autant éveillé ?
Le culte du bodhisattva Kṣitigarbha permet de détruire son propre mauvais karma, et par le transfert du mérite, celui des autres, y compris celui des âmes des défunts. Le culte du bouddha Amitābha, et la récitation de son nom, permettent la renaissance dans la Terre pure de Sukhāvatī. Le culte du bouddha Amitāyus permet d’avoir une longue vie, etc.
La récitation a ainsi changé de fonction à plusieurs reprises dans le bouddhisme. D’abord un moyen mnémotechnique, puis après l’invention de l’écriture et la rédaction des “écritures” bouddhiques, en plus de rester un moyen mnémotechnique, aussi un moyen de reproduction de la tradition, de renforcement de l’identité du groupe, et de production de bienfaits de diverse nature, réels et/ou imaginaires.
Le bouddhisme Ch’an est souvent présenté comme un bouddhisme minimaliste. Il peut l’être, mais l’est-il vraiment ? Le bouddhisme est ce que croient et font les bouddhistes disent les anthropologues. “Une religion est un système de pratiques et de croyances en usage dans un groupe ou une communauté”. Les bouddhistes, que croient , que font-ils ?
Un bouddhisme Ch’an “minimaliste” devrait suffire pour s’éveiller. Suffit-il ? Si on (p.e. les Chinois avant le renouveau tantrique), pense qu’il lui manque quelque chose, on peut donner plus de moyens (upāya) à son bouddhisme minimaliste. Des moyens de libération par l’ouï (récitations, mantras, incantations), par la vue (icônes, représentations), par le toucher (amulettes, yantras, etc.), des moyens pneumatologiques, énergétiques, "neuroscientifiques" (?) etc. Si, en multipliant les moyens, cela ne suffit toujours pas, que faire ? On peut remplir tout notre champs sensoriel par des moyens “de libération” sensoriels ; on peut remplir toutes nos pensées par des bouddhas, des bodhisattvas, de ḍākinī, que sais-je ; on peut remplir tous les nāḍī de prāṇa, de Qi, dans notre corps subtil qui serait notre “vrai corps” (l’autre n’étant que notre enveloppe terrestre) ; on peut faire de toutes nos paroles des mantras et de chaque respiration une autre mesure de Qi, chassant les toxines, les mauvaises habitudes, le mauvais karma, le corporel ; on pourrait recevoir un certificat d’éveil et nous entendre dire “vous êtes éveillé ; on pourrait se réveiller dans un lotus au plein milieu de Sukhāvatī avec Amitābha ou Avalokita qui nous sourit, serait-on pour autant éveillé ?
[1] The Incarnation from White Glacier Mountain, The Biography of Gangkar Rinpoche by Minyag Gonpo, translated by S. Brinson Aldrigel.
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