Le bouddhisme, une voie de responsabilité ? |
Le mot responsabilité a plusieurs sens. Le premier étant :
1. Obligation faite à une personne de répondre de ses actes du fait du rôle, des charges qu'elle doit assumer et d'en supporter toutes les conséquences.Je ne crois pas qu’il existe un mot tibétain qui couvre toutes les charges de ce mot. On trouve par exemple “(thugs) khag” pour un rôle, un devoir, une tâche, une mission, un mandat, une charge ...
Ou “(las) ‘gan”, commandement, direction, conduite, administration, management qui est utilisé dans les expressions comme prendre et donner la direction (‘gan len pa, 'gan theg pa).
En revanche, dans le sens de porter, assumer la responsabilité en cas d’un incident, d’un échec, etc., je ne suis pas certain que cette association d’idées existe. Il n’y a qu’un supérieur qui pourrait demander à un haut dignitaire de se justifier, de rendre compte, etc. Dans une théocratie, celui qui porte la plus haute charge ne doit des comptes à presque personne.
Selon la moralité bouddhiste, toute personne est moralement responsable de ses actes, et en supportera toutes les conséquences. Mais ce n’est pas aux hommes de gérer le karma, ils en seraient d’ailleurs incapables, car la loi du karma en tant que rétribution spécifique d’actes spécifiques a un côté surnaturel, magique et divin. Je pense notamment aux fruits karmiques traditionnels de certains actes sexuels dits “négatifs”, tels qu’on peut les trouver dans l’Abhidharmakoṣa. Conformément à ce texte, j’estime que 99,9% de la population mondiale actuelle peut compter sur une naissance dans le monde des preta (esprits avides). La surpopulation de la terre n’est rien comparée à celle du monde des preta.
Comme la loi du karma se charge de la responsabilité des actes de chacun, y compris des plus puissants, il n’est pas nécessaire de demander des comptes aux plus puissants, surtout éclairés, quand ils prennent des décisions, ou commettent des actes, que le commun des mortels ne peut pas comprendre. On ne leur demande tout simplement pas de comptes. Si nécessaire, la loi du karma s’en chargera.
Malgré tout cela, le bouddhisme tibétain, notamment sous la personne du Dalaï-Lama, semble depuis peu se présenter comme “une voie de responsabilité” (Le bouddhisme, une voie de responsabilité Sagesses bouddhistes du 27/06/2021, émission proposée par l’Union Bouddhiste de France). Un livre à ce sujet vient d’être publié par Les Arènes : Nouvelle réalité, l’âge de la responsabilité universelle, par le Dalaï-Lama et Sofia Stril-Rever.
Selon la moralité bouddhiste, toute personne est moralement responsable de ses actes, et en supportera toutes les conséquences. Mais ce n’est pas aux hommes de gérer le karma, ils en seraient d’ailleurs incapables, car la loi du karma en tant que rétribution spécifique d’actes spécifiques a un côté surnaturel, magique et divin. Je pense notamment aux fruits karmiques traditionnels de certains actes sexuels dits “négatifs”, tels qu’on peut les trouver dans l’Abhidharmakoṣa. Conformément à ce texte, j’estime que 99,9% de la population mondiale actuelle peut compter sur une naissance dans le monde des preta (esprits avides). La surpopulation de la terre n’est rien comparée à celle du monde des preta.
Comme la loi du karma se charge de la responsabilité des actes de chacun, y compris des plus puissants, il n’est pas nécessaire de demander des comptes aux plus puissants, surtout éclairés, quand ils prennent des décisions, ou commettent des actes, que le commun des mortels ne peut pas comprendre. On ne leur demande tout simplement pas de comptes. Si nécessaire, la loi du karma s’en chargera.
Malgré tout cela, le bouddhisme tibétain, notamment sous la personne du Dalaï-Lama, semble depuis peu se présenter comme “une voie de responsabilité” (Le bouddhisme, une voie de responsabilité Sagesses bouddhistes du 27/06/2021, émission proposée par l’Union Bouddhiste de France). Un livre à ce sujet vient d’être publié par Les Arènes : Nouvelle réalité, l’âge de la responsabilité universelle, par le Dalaï-Lama et Sofia Stril-Rever.
Suite au Prix Nobel de la Paix en 1989, le Dalaï-Lama avait créé sa fondation The Foundation for Universal Responsability. En tibétain, gong sa skyabs mgon tA la’i bla ma mchog gi kun phan bde rtsa. Le mot responsabilité dans ce nom correspond au tibétain “phan bde”, bien-être/prospérité et paix. Il y a la notion d’un devoir universel de tous les humains, qui est de se soucier de la planète, mais pas la notion de responsabilité, dans le sens d’une obligation de rendre compte de ses actions. L’idée semble être que la responsabilité pour le monde n’incombe pas à Dieu, aux dieux, au Bouddha ou aux bodhisattvas, mais aux humains eux-mêmes.
“Le Dalaï Lama (12:16) nous livre ici un message sans détour, pour nous exhorter à nous engager pour la protection de la vie sur terre, une responsabilité que nous avons tous, liés par l'interdépendance pour éviter le pire aux générations futures”.Les activités de la Fondation pour la responsabilité universelle sont :
Education and Ethics
Interfaith Confluence
Women, Youth and Peacebuilding
Explorations into Life & Death
Il y aura beaucoup à dire sur ce programme, mais je me limite pour le moment aux actions pour promouvoir l’égalité et la justice des sexes en Asie du Sud-Est. Un programme spécifique WISCOMP (Women in Security, Conflict Management and Peace) a été créé à cet effet en 1999. Il a notamment pour mission (tib. khag, ‘gan) de lutter contre la violence envers les femmes.
“WISCOMP aims at the transformation of gender relations – within the home, at the workplace, the community and in political processes. It foregrounds women’s right to safety and an end to Gender based Violence (GBV). Active participation of men in these processes is facilitated and encouraged.”
Gurukul avec SS Karmapa |
La participation active des hommes à ces programmes est facilitée et encouragée. Les instruments principaux pour arriver à cette fin, sont l’éducation et l’éthique. L’éducation et l’éthique pourraient-elles être entre de meilleures mains que celles des grands Maîtres ? C’est donc aux grands Maîtres, ici SS Dalaï-Lama et SS Karmapa, d’éduquer les futurs citoyens cosmoresponsables et de leur enseigner l’éthique pendant des rencontres entre Gurus et disciples, “Gurukul” (ou Gurukula), comme c’est la tradition en Inde et au Tibet.
“Applauding Survivors and Crusaders for Justice” “Applaudir les survivants et les défenseurs de la justice” |
Le programme WISCOMP a créé (en 2015) le prix SAHAAS[1] “Heroes of Courage Award”, qui récompense les efforts des femmes, des hommes et des personnes transgenres courageuses qui agissent pour mettre fin à la Violence contre les genres (GBV).
Voilà pour le côté “mission”, “charge”, “action”, "incentives", “éducation” et “sensibilisation” éthiques, etc. du mot “responsabilité”.
Côté assumer la responsabilité pour les actes, ratages, abus de pouvoir et dérives sectaires commis sous le couvert du bouddhisme tibétain et du guruvāda dans un cadre “gurukula”, il n’y a plus personne. On n’applaudit pas les victimes et les survivants dans les centres bouddhistes tibétains en Occident, on ne récompense pas non plus ceux qui se battent pour obtenir justice ou qui combattent la Violence contre les genres (GBV). On accepte à la limite de recevoir une délégation de survivants sous la pression des médias et des pétitions. On leur fait une promesse qui ne sera probablement pas tenue, et on continue à parler de responsabilité universelle, d'amour universelle et de compassion universelle.
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[1] SAAHAS Awards: Applauding Survivors and Crusaders for Justice
WISCOMP seeks to generate wider acceptability for a nuanced understanding of gender identity, which allows women, men and transgender persons to become active partners in efforts to end all forms of violence. Towards this end WISCOMP acknowledges and honors the efforts of women, men and trans persons who step up to end GBV with the Heroes of Courage Award. Initiated in 2015, the award applauds low profile but extraordinary crusaders for justice. Source